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- Voir avis du 11 décembre 2021 (a168026) : Les termes ‘L'examen médical préalable à la souscription d'un contrat d'assurance du secteur vie (assurance vie, solde restant dû ou revenu garanti) est une prestation demandée et rémunérée par la compagnie d'assurances. Il convient donc que le médecin traitant n'accepte pas cette mission.’ sont supprimés.
Accès aux données médicales d’une personne par le médecin chargé d’évaluer son état de santé
Le Conseil national de l'Ordre des médecins est interrogé concernant l'accès aux données médicales d'une personne par le médecin chargé d'évaluer son état de santé.
1- Les missions d'évaluation de l'état de santé, principalement confiées aux médecins disposant du titre professionnel de médecin spécialiste en médecine d'assurance et expertise médicale, sont diverses, plusieurs d'entre elles étant légalement définies(1).
La bonne application des règles en matière de secret professionnel et de respect de la vie privée impose d'être attentif à la nature de la mission dont le médecin est chargé et à la personne qui le mandate.
Les articles 43 et 44 du Code de déontologie médicale 2018 énoncent les principes déontologiques applicables.
2- Lorsque l'accès aux données de santé dans le cadre d'une expertise est expressément réglé par la loi, il y a lieu de s'y conformer.
3- Lorsque le médecin est mandaté par la personne dont l'état de santé est évalué, les pièces nécessaires au devoir d'expertise lui sont remises par celle-ci.
Le patient peut confier la collecte des pièces nécessaies au devoir d'expertise à une personne de confiance (article 9, § 3, de la loi du 22 août 2002 relative aux droits du patient), laquelle peut être son médecin conseil (médecin de recours). Cette délégation est faite par un écrit que le médecin désigné joint à sa demande de recevoir copie. Il précise dans celle-ci les éléments qui sont nécessaires à l'exécution de son mandat et la qualité en laquelle il intervient.
Plusieurs réseaux d'échange régionaux (CoZo / Collaboratief Zorgplatform, Abrumet / Réseau Santé Bruxellois, RSW / Réseau Santé Wallon) ont pour objet l'accès par les praticiens aux données de santé dans le cadre d'une relation thérapeutique. Le médecin chargé d'une mission dans le cadre de la médecine d'assurance, la médecine de contrôle et la médecine légale n'a pas une relation thérapeutique avec la personne dont il doit évaluer l'état de santé(2) ; il ne peut dès lors pas utiliser ce réseau pour accéder à ses données.
Si la personne concernée choisit son médecin traitant pour la représenter ou défendre ses intérêts, celui-ci n'use des données de santé dont il dispose en tant que médecin traitant afin de remplir la mission d'évaluation qui lui est confiée par le patient qu'avec l'accord exprès de celui-ci. Préalablement à leur utilisation, le médecin traitant informe son patient quant aux informations qu'il compte adresser aux autres parties et recueille expressément son accord quant à leur transmission.
L'examen médical préalable à la souscription d'un contrat d'assurance du secteur vie (assurance vie, solde restant dû ou revenu garanti) est une prestation demandée et rémunérée par la compagnie d'assurances. Il convient donc que le médecin traitant n'accepte pas cette mission.
4- Lorsque le médecin est mandaté par une autre partie (compagnie d'assurances privée, etc.) que la personne dont l'état de santé est évalué, les pièces nécessaires au devoir d'expertise lui sont remises par cette dernière (le cas échéant par l'intermédiaire de son médecin-conseil ou de son avocat).
À nouveau, le réseau d'accès électronique permettant l'accès aux données de santé d'une personne par les praticiens ayant une relation thérapeutique avec celle-ci ne peut pas être utilisé par le médecin chargé d'une mission d'expertise pour accéder directement aux données de santé.
À la demande de la personne dont l'état de santé est évalué, son médecin traitant transmet lui-même les données médicales au médecin chargé d'une mission d'évaluation. Préalablement, le médecin traitant a informé son patient quant aux informations sollicitées par le médecin chargé de cette mission et a recueilli expressément son accord quant à leur transmission.
La déontologie médicale s'oppose au cumul du rôle de prestataire de soins ayant une relation thérapeutique avec l'exécution d'une mission d'évaluation de l'état de santé du même patient lorsque celle-ci intervient à la demande d'un tiers.
Le fondement de la relation thérapeutique est la confiance. En utilisant les confidences de son patient et les renseignements appris au cours de la relation thérapeutique à des fins d'évaluation pour le compte d'un tiers, le médecin trahit cette confiance(3).
5- Le médecin expert judiciaire désigné par le tribunal obtient les pièces que les parties déposent. Si la partie demanderesse a la charge de prouver son dommage, elle garde la libre appréciation des pièces qu'elle dépose à cette fin.
La personne dont l'état de santé fait l'objet de l'expertise peut donner son accord à l'expert pour que celui-ci recueille auprès de tiers nominativement désignés (médecins ou non) les données objectives médicales en relation directe avec le but précis de l'expertise.
L'accord écrit du patient et l'ordonnance du juge qui précise la mission de l'expert doivent être adressés au tiers sollicité pour transmettre des pièces(4).
Si le dossier médical est saisi, l'autorité requérante peut, si elle le juge utile, confier son analyse à un médecin expert judiciaire ou à un médecin chargé d'une mission spécifique d'expertise(5). L'accord de la personne concernée n'est pas requis dans ce cas.
6- L'actualité fait, à nouveau, état de consultations illégales de dossiers médicaux électroniques par des médecins.
Le Conseil national rappelle les articles 43 et 44 du Code de déontologie médicale 2018 et leur commentaire.
La consultation par un médecin des données à caractère personnel relatives à la santé contenues dans un dossier médical requiert l'autorisation du patient ou de la loi. À défaut, il y a violation de la vie privée du patient.
En outre, le Code pénal réprime l'accès à un système informatique par celui qui sait qu'il n'y est pas autorisé (article 550bis du Code pénal).
Le réseau électronique réservé aux praticiens ayant une relation thérapeutique ne peut pas être utilisé par le médecin qui n'a pas une telle relation avec un patient pour accéder à ses données de santé(6).
Toutes les mesures préventives et de contrôle doivent être prises par les responsables des institutions hospitalières et les gestionnaires des réseaux d'accès électroniques pour protéger les données à caractère personnel contre leur accès et tout autre traitement non autorisés.
La généralisation de la possibilité pour le patient de voir qui a consulté son dossier est une mesure positive notamment en ce qu'elle participe à cet objectif.
L'Ordre des médecins est à la disposition de ses membres pour répondre à leurs questions concernant les bonnes pratiques en la matière et au service de la collectivité pour réprimer les fautes disciplinaires qui seraient commises.
(1) - médecin-contrôleur : médecin qui exerce la médecine de contrôle entendue comme l'activité médicale exercée par un médecin pour le compte d'un employeur en vue de contrôler l'impossibilité pour un travailleur de fournir son travail par suite de maladie ou d'accident (art. 2 de la loi du 13 juin 1999 relative à la médecine de contrôle) ;
- médecin-arbitre : médecin qui intervient comme arbitre dans la procédure d'arbitrage prévue à l'article 31 de la loi du 3 juillet 1978 relative aux contrats de travail ;
- médecin-conseil d'organisme assureur : médecin dont les missions sont (art. 153 et 164 de la loi relative à l'assurance obligatoire soins de santé et indemnités, coordonnée le 14 juillet 1994) et (arrêté royal n° 35 du 20 juillet 1967 portant le statut et le barème des médecins-conseil chargés d'assurer auprès des organismes assureur le contrôle médical de l'incapacité primaire et des prestations de santé en vertu de la loi relative à l'assurance obligatoire soins de santé et indemnités, coordonnée le 14 juillet 1994) :
a. de conseiller, d'informer et de guider les assurés sociaux afin de garantir que les soins et les traitements les plus adéquats, leur sont dispensés au meilleur coût, en tenant compte des ressources globales de l'assurance soins de santé et indemnités ;
b. d'informer les dispensateurs de soins afin de les éclairer sur l'application correcte de la réglementation relative à l'assurance soins de santé, en veillant à l'utilisation optimale des ressources de cette assurance ;
c. de contrôler l'incapacité de travail ;
d. de contrôler les prestations de santé.
- médecin-conseil de Medex : médecin intervenant dans le cadre des missions de l'Administration de l'expertise médicale (arrêté royal du 24 janvier 1969 relatif à la réparation, en faveur de membres du personnel du secteur public, des dommages résultant des accidents du travail et des accidents survenus sur le chemin du travail et l'arrêté royal du 13 juillet 1970 relatif à la réparation, en faveur de certains membres du personnel des services ou établissements publics du secteur local, des dommages résultant des accidents du travail et des accidents survenus sur le chemin du travail) ;
- médecin-conseil d'une compagnie d'assurance privée ;
- médecin fonctionnaire : médecin chargé par la loi d'exécuter une mission d'intérêt public ;
- médecin expert judiciaire : médecin inscrit au registre national des experts judiciaires (art. 991ter du Code judiciaire) ou désigné par l'autorité judiciaire sur la base de l'article 555/15 du Code judiciaire ;
- médecin expert auprès du Fonds des accidents médicaux visé à l'article 17 de la loi du 31 mars 2010 relative à l'indemnisation des dommages résultant de soins de santé.
Cette liste n'est pas exhaustive des médecins qui peuvent être amenés à procéder à une évaluation de l'état de santé pour le compte d'un tiers.
(2) Cf. point 4.2. de la note relative aux preuves électroniques d'une relation thérapeutique et d'une relation de soins, approuvée par la section santé du Comité sectoriel de la sécurité sociale et de la santé par sa délibération nr. 11/088 du 18 octobre 2011, modifiée par la chambre Sécurité sociale et Santé du Comité de sécurité de l'information le 21 juin 2016, p. 6
(3) Commentaire de l'article 43 du Code de déontologie médicale
(4) Avis du 7 février 2015, Projet, dans le cadre d'une expertise judiciaire, d'obtenir toutes les informations relatives au sinistre, Bulletin du Conseil national n° 148
Avis du 24 mars 2012, Consultation du dossier médical par un médecin légiste, Bulletin du Conseil national n° 137
(5) Avis du 28 mai 2011, Consultation du dossier médical par un médecin légiste, n° 134
(6) Cf. point 4.2. de la note relative aux preuves électroniques d'une relation thérapeutique et d'une relation de soins, approuvée par la section santé du Comité sectoriel de la sécurité sociale et de la santé par sa délibération nr. 11/088 du 18 octobre 2011, modifiée par la chambre Sécurité sociale et Santé du Comité de sécurité de l'information le 21 juin 2016, p. 6
Voir également l'avis du 21 septembre 2019, Consultation de dossiers médicaux via les moyens télématiques par un médecin via un hôpital sans autorisation expresse du patient, Bulletin du Conseil national n° 166
Consultation du dossier médical d'un défunt par le médecin-conseil d'une compagnie d'assurances
Consultation du dossier médical d’un défunt par le médecin-conseil d’une compagnie d’assurances
Un conseil provincial transmet la correspondance qu'il a eue avec un médecin-conseil d'une union nationale de mutualités. Ce médecin souhaite savoir s'il peut communiquer des informations médicales qui lui sont demandées, notamment par des médecins de compagnies d'assurances se disant mandatés par les patients ou par des héritiers en ce qui concerne les assurances vie. La loi du 22 août 2002 relative aux droits du patient est-elle en l'occurrence applicable?
Il soumet le cas concret d'une compagnie d'assurances qui lui demande, dans le cadre de l'exécution d'un contrat d'assurance vie, de lui fournir des renseignements médicaux concernant un affilié décédé. Ces renseignements doivent être envoyés au médecin-conseil de la compagnie d'assurances. Pour appuyer la demande, ce dernier a joint une copie du contrat de mandat par lequel le père du défunt autorise ce médecin-conseil à consulter le dossier médical du défunt tenu par l'union nationale de mutualités.
Avis du Conseil national :
En sa séance du 25 novembre 2006, le Conseil national a examiné votre demande du 7 juin 2006 concernant l’application de la loi du 22 août 2002 relative aux droits du patient.
La problématique décrite dans votre courrier est la suivante.
Un médecin-conseil d’une compagnie d’assurances est mandaté par un parent d’un défunt, en application de l’article 9, § 4, de la loi du 22 août 2002 relative aux droits du patient (1), en vue de consulter le dossier médical de ce défunt aux fins de vérifier si les conditions d’exécution du contrat d’assurance vie souscrit sont valablement remplies.
Le Conseil national rappelle d’abord que cette loi s’applique également au médecin-conseil d’une compagnie d’assurances (article 3).
En ce qui concerne la question posée, le Conseil national estime qu’un médecin-conseil d’une compagnie d’assurances, dans le cadre de ses missions, ne peut être le praticien professionnel par l’intermédiaire duquel le parent du défunt pourrait avoir droit à la consultation du dossier médical, en application de l’article 9, § 4, précité.
Si le praticien professionnel pouvait être mandaté en même temps par la compagnie d’assurances d’une part et par les héritiers du défunt d’autre part, il y aurait conflit d’intérêts.
Si l’intérêt du médecin-conseil, en tant que mandataire de la compagnie d’assurances, est de connaître la date des premiers symptômes de la maladie ayant entraîné le décès (voyez l’avis du Conseil national du 16 juillet 2005, BCN n° 110, p. 4), l’intérêt des proches parents est de voir appliqué l’article 95 (2) de la loi du 25 juin 1992 sur le contrat d’assurance terrestre qui précise clairement que le médecin de l’assuré doit uniquement délivrer un certificat établissant la cause du décès et non l’histoire de la maladie ayant entraîné ce décès. Les intérêts divergents des parties empêchent le cumul des mandats entre les mains du médecin-conseil de la compagnie d’assurances.
En outre, le libellé de l’article 95 nouveau de la loi sur le contrat d’assurance terrestre souligne la volonté du législateur de limiter les informations susceptibles d’être fournies à l’assureur pour la conclusion ou l’exécution du contrat d’assurance. La désignation du médecin-conseil comme praticien professionnel par l’intermédiaire duquel le parent pourrait prendre connaissance du dossier médical du défunt en application de l’article 9, § 4, de la loi du 22 août 2002, conduirait à rendre pratiquement inapplicables, dans le cadre de l’assurance vie, les dispositions, favorables à l’assuré, de l’article 95 de la loi du 25 juin 1992 sur le contrat d’assurance terrestre.
Le Conseil national estime qu’il est déontologiquement inacceptable qu’un médecin-conseil d’une compagnie d’assurances prête son concours au contournement de l’esprit de l’article 95 de la loi sur les assurances terrestres en cumulant les mandats.
(1) L’article 9 est rédigé comme suit :
« § 1er. Le patient a droit, de la part de son praticien professionnel, à un dossier de patient soigneusement tenu à jour et conservé en lieu sûr.
A la demande du patient, le praticien professionnel ajoute les documents fournis par le patient dans le dossier le concernant.
§ 2. Le patient a droit à la consultation du dossier le concernant.
II est donné suite dans les meilleurs délais et au plus tard dans les 15 jours de sa réception, à la demande du patient visant à consulter le dossier le concernant.
Les annotations personnelles d'un praticien professionnel et les données concernant des tiers n'entrent pas dans le cadre de ce droit de consultation.
A sa demande, le patient peut se faire assister par une personne de confiance désignée par lui ou exercer son droit de consultation par l'entremise de celle-ci. Si cette personne est un praticien professionnel, elle consulte également les annotations personnelles visées à l'alinéa 3.
Si le dossier du patient contient une motivation écrite telle que visée à l'article 7, § 4, alinéa 2, qui est encore pertinente, le patient exerce son droit de consultation du dossier par l'intermédiaire d'un praticien professionnel désigné par lui, lequel praticien consulte également les annotations personnelles visées à l'alinéa 3
§ 3. Le patient a le droit d'obtenir, au prix coûtant, une copie du dossier le concernant ou d'une partie de celui-ci, conformément aux règles fixées au § 2. Sur chaque copie, il est précisé que celle-ci est strictement personnelle et confidentielle.
Le praticien professionnel refuse de donner cette copie s'il dispose d'indications claires selon lesquelles le patient subit des pressions afin de communiquer une copie de son dossier à des tiers.
§ 4. Après le décès du patient, l'époux, le partenaire cohabitant légal, le partenaire et les parents jusqu'au deuxième degré inclus ont, par l'intermédiaire du praticien professionnel désigné par le demandeur, le droit de consultation, visé au § 2, pour autant que leur demande soit suffisamment motivée et spécifiée et que le patient ne s'y soit pas opposé expressément. Le praticien professionnel désigné consulte également les annotations personnelles visées au § 2, alinéa 3 ».
(2) Cet article est rédigé comme suit :
« Information médicale - Le médecin choisi par l'assuré peut remettre à l'assuré qui en fait la demande, les certificats médicaux necessaires à la conclusion ou à l'exécution du contrat. Ces certificats se limitent à une description de l'état de santé actuel.
Ces certificats ne peuvent être remis qu'au médecin-conseil de l'assureur. Ce dernier ne peut communiquer aucune information non pertinente eu égard au risque pour lequel les certificats ont été établis ou relative à d'autres personnes que l'assuré.
L'examen médical, nécessaire à la conclusion et à l'exécution du contrat, ne peut être fondé que sur les antécédents déterminant l'état de santé actuel du candidat-assuré et non sur des techniques d'analyse génétique propres à déterminer son état de santé futur.
Pour autant que l'assureur justifie de l'accord préalable de l'assuré, le médecin de celui-ci transmet au médecin-conseil de l'assureur un certificat établissant la cause du décès.
Lorsqu'il n'existe plus de risque pour l'assureur, le medecin-conseil restitue, à leur demande, les certificats médicaux à l'assuré ou, en cas de décès, à ses ayants droit ».