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Déontologie

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Alcoolisme03/04/2004 Code de document: a104006
Médecine du travail - Dépistage de l'alcoolisme chez les travailleurs

Médecine du travail – Dépistage de l'alcoolisme chez des travailleurs

Un conseil provincial soumet au Conseil national la lettre d'un médecin du travail. Celui-ci souhaite savoir s'il est déontologiquement et légalement permis d'effectuer un dosage de CDT, dans le cadre exclusif d'un examen de reprise du travail, d'un travailleur alcoolodépendant occupant un poste de sécurité.

Avis du Conseil national :

En sa séance du 3 avril 2004, le Conseil national a poursuivi la discussion à propos de votre courrier concernant l'utilisation du dosage des taux sériques des formes peu sialylées de la transferrine (CDT), dans le cadre exclusif d'un examen de reprise du travail, d'un travailleur alcoolodépendant occupant un poste de sécurité.
Votre courrier soulève trois questions: l'utilisation du test, la possibilité de l'imposer et enfin en cas de refus, la possibilité d'une mise en inaptitude temporaire.

Les dispositions légales relatives à la surveillance de la santé des travailleurs laissent au conseiller en prévention-médecin du travail l'initiative de l'utilisation éventuelle de nouvelles prestations offrant quant à leurs résultats les mêmes garanties de validité et de fiabilité que les tests habituellement utilisés. Il en informe le Comité pour la prévention et la protection au travail, en précisant les critères de son choix: état de santé du travailleur, antécédents, nature et importance des risques.

Le Conseil national n'a pas compétence pour se prononcer quant à la valeur du test CDT par rapport aux tests utilisés antérieurement. Il relève cependant dans la documentation fournie que les résultats de ce test ont des limites. La sensibilité varie de 39 à 94 % et la spécificité de 82 à 100 % selon les références.
En ce qui concerne le second point, le Conseil national estime que la récente loi sur les droits des patients, en conformité avec les règles déontologiques, ne permet pas de réaliser un test diagnostique non prévu dans le cadre de la surveillance habituelle de l'état de santé du travailleur, sans que celui-ci n'ait marqué son accord. Celui-ci aura auparavant reçu toutes les informations nécessaires quant à la nature du test, la signification des résultats et leurs répercussions éventuelles sur sa situation professionnelle.

Les dispositions légales et les règles déontologiques accordent au sujet le droit de refuser un test diagnostique qui ne serait pas prévu par les arrêtés relatifs à la surveillance de la santé des travailleurs. Il ne peut dès lors être tiré argument de ce refus, ni pour prendre une décision d'inaptitude temporaire, ni pour écarter le sujet du poste de travail qu'il occupait antérieurement.

Par ailleurs, une augmentation du taux sérique de CDT suggère une consommation chronique d'alcool, mais ne permet pas d'établir que le travailleur est en état d'ébriété durant les heures de prestation et/ou présente une diminution de son aptitude à occuper son poste de travail. Comme le Conseil national l'a souligné dans ses avis antérieurs à ce sujet, c'est sur la base d'arguments tels ceux fournis par l'anamnèse, l'examen clinique, si nécessaire complétés par des tests fonctionnels adaptés à la fonction exercée que le conseiller en prévention-médecin du travail pourra après en avoir informé l'intéressé, éventuellement proposer à l'employeur d'affecter le travailleur à un autre poste de travail mieux adapté à son état de santé sans communiquer à l’employeur les justifications médicales.

Consentement éclairé27/09/2003 Code de document: a102003
Equipes oncologiques et droits du patient

Un conseil provincial soumet la question d'un anatomopathologiste à qui il est demandé, dans le cadre de la mise sur pied d'un centre d'oncologie dans son institution, de transmettre chaque semaine une liste des cas oncologiques à ses confrères oncologues. Cette liste doit leur permettre d'inviter à leurs concertations pluridisciplinaires hebdomadaires les médecins qui ont suivi et soigné le patient en première intention (médecin généraliste, interniste, chirurgien, …).
L'anatomopathologiste se demande s'il est conforme à la déontologie de communiquer une liste des patients d'un médecin à un autre médecin sans accord préalable des patients concernés et si lesdites concertations pluridisciplinaires entre médecins ne sont pas contraires au principe suivant lequel c'est le patient qui choisit son ou ses médecins.

Avis du Conseil national:

En sa séance du 27 septembre 2003, le Conseil national a examiné le problème qui vous est posé par le docteur X et la réponse provisoire que vous lui avez fait parvenir. Son interrogation s’inscrit dans la restructuration des soins en oncologie dont les arrêtés royaux du 21.03.03 ont été publiés au Moniteur belge le 24 avril dernier.

Ainsi que vous l’avez souligné, les problèmes déontologiques posés par ces nouvelles dispositions légales concernent entre autres la transmission des données du patient cancéreux à des médecins qui n’ont pas été sollicités par lui pour établir soit le diagnostic soit le traitement de son affection, transmission suivie par la participation de ces praticiens aux décisions à prendre dans le décours de sa maladie.

Il semble avant tout utile de mettre en balance d’un côté, le bénéfice que peuvent offrir au malade des échanges d’informations dans une consultation multidisciplinaire entre spécialistes en matière d’oncologie et ses médecins traitants et, d’un autre, la protection de sa vie privée, son droit à l’information et au respect de ses options thérapeutiques.

Il paraît difficile de contester l’intérêt scientifique de la concertation structurée entre experts avertis. Il importe cependant de laisser au patient la place centrale qu’il occupe ; des considérations de type techniques, administratives voire financières ne peuvent avoir la priorité sur la volonté du patient.

Dans le respect de son autonomie et pour faciliter sa réflexion quant à son adhésion au processus de soins il sera toujours dûment informé, ainsi que l’exige par ailleurs la loi sur les droits du patient, sur les raisons de cette consultation pluridisciplinaire, son déroulement, les participants et leur spécialité, l’implication de son médecin généraliste à la discussion. Ensuite son consentement sera toujours sollicité et obtenu avant que n’interviennent les praticiens auxquels il ne s’est pas adressé.

Ces derniers s’efforceront d’agir avec le maximum de réserve, respecteront la confidentialité des données et se garderont d’interférer imprudemment dans la relation fondamentale entre médecins traitants et patient.

En ce qui concerne la demande précise de notre confrère s’il peut mettre à la disposition du centre d’oncologie à créer dans une hôpital, la liste des prélèvements avérés positifs afin de convoquer les médecins qui ont suivi et soigné le patient en premier lieu aux réunions pluridisciplinaires hebdomadaires projetées, il s’avère qu’il avait bien estimé le problème en proposant avant tout que le patient soit dûment informé des possibilités offertes et de recueillir son consentement avant toute transmission des données médicales au centre d’oncologie. Le Conseil national estime en outre que son ou ses médecins traitants, lesquels entretiennent une relation directe avec le malade, constituent la meilleure voie pour véhiculer cette information en entériner son consentement.

Vie privée26/07/2003 Code de document: a101006
report_problem Cet avis a été remplacé par l'avis BCN 105 p. 2, a105001, en ce qui concerne le secret professionnel après le décès du patient.
Avis : loi relative aux droits du patient

Avis : loi relative aux droits du patient

En ses séances des 10 mai, 21 juin et 26 juillet 2003, le Conseil national a examiné l'impact sur la déontologie médicale de la loi du 22 août 2002 relative aux droits du patient (Moniteur belge du 26 septembre 2002, entrée en vigueur le 6 octobre 2002) (voir Bulletin du Conseil national n° 99, mars 2003, p. 13). Dans ses avis des 17 février 2001 concernant la Note conceptuelle Droits du patient et du 16 février 2002 sur l'avant-projet de loi relatif aux droits du patient, le Conseil national s'est déclaré d'accord sur l'essentiel des textes examinés consacrant comme droits du patient bon nombre des principes déontologiques prônés par l'Ordre des médecins depuis des années. D'autre part, ces avis formulaient une série de remarques dont il a été tenu compte en partie dans l'élaboration de la loi. Par ailleurs, l'application de la loi soulève dans la pratique bien des questions d'ordre déontologique. Pour ces raisons, le Conseil national juge indiqué d'émettre un avis supplémentaire visant à compléter et préciser les avis précités.

Le présent avis traite successivement des points qui font difficulté concernant le dossier médical, la personne de confiance et le représentant du patient, l'expression de la volonté du patient et le nouvel article 95 de la loi du 25 juin 1992 sur le contrat d'assurance terrestre. En ce qui concerne la fonction de médiation, le Conseil national déterminera son point de vue après publication de l'arrêté royal qui doit être pris en exécution de l'article 11, §3, de la loi relative aux droits du patient.

LE DOSSIER MEDICAL

Dans son avis du 16 février 2002, le Conseil national indiquait que médecins et patients devaient parvenir à une attitude adéquate en matière de dossier médical. Ils doivent être conscients que le dossier médical est et doit rester l'outil essentiel pour le diagnostic, la qualité et la continuité des soins. Les médecins doivent en outre réaliser, lorsqu'ils constituent le dossier médical et y notent leurs constatations, que le patient a désormais le droit d'en prendre connaissance. Indubitablement, cela nécessitera une période d'adaptation pour les médecins, mais après un certain temps, la nouvelle attitude deviendra un automatisme.

Contenu

Dans son avis du 16 février 2002, le Conseil national énumère les données devant figurer dans le dossier médical. A cet égard se pose la question de la destination de données confiées au médecin par des tiers à l'insu du patient. Le Conseil national estime que le dossier doit contenir toutes les données importantes pour le diagnostic, la qualité et la continuité des soins. Toutes ces données, quelle que soit leur provenance, sont importantes non seulement pour la stratégie du traitement, mais aussi pour sa justification le cas échéant.

Ceci s'applique tant à des données échangées entre praticiens professionnels dans le cadre de la continuité et de la qualité de soins qu'à des données fournies par des tiers.

Ainsi est-il essentiel, quand un patient est référé, de transmettre toute l'information nécessaire. Lorsque l'information est communiquée à l'insu du patient, elle doit être mentionnée dans le dossier médical avec tact et précaution afin que la relation du référant avec le patient ne s'en trouve pas altérée lors d'une éventuelle prise de connaissance ultérieure du dossier. Ainsi, il pourrait suffire par exemple de mentionner sans plus que l'entourage du patient a le sentiment qu'il boit en cachette.

Les renseignements hétéro-anamnestiques sont généralement pris en présence du patient ou avec son accord. Lorsque ces renseignements sont fournis à l'insu du patient et qu'ils sont importants pour la stratégie du traitement, ils doivent être repris dans le dossier médical avec la circonspection requise et, sauf en cas de nécessité particulière, sans mention précise de la source.

L'exclusion de toutes ces données du droit de consultation, sur la base de l'article 9, §2, troisième alinéa, comme étant des "données concernant des tiers", aurait pour conséquence de rendre la stratégie du traitement moins transparente et dès lors difficile à comprendre.

Annotations personnelles

Suivant l'exposé des motifs, les annotations personnelles sont "les notes que le praticien professionnel a dissimulées à des tiers, voire aux autres membres de l'équipe de soins, qui ne sont jamais accessibles" et qui perdent leur caractère personnel à partir du moment où le praticien professionnel les soumet à un collègue. Il peut en être déduit que ces annotations personnelles du praticien professionnel sont dénuées d'intérêt pour la qualité et la continuité des soins et qu'elles ne font pas partie du dossier du patient. L'exposé des motifs indique qu'il s'agit de notes "réservées à l'usage personnel du prestataire de soins". Il s'ensuit que le prestataire de soins appréciera si ces notes lui sont nécessaires.

C'est en vain que le Conseil national s'est opposé, dans son avis du 16 février 2002, à la consultation des annotations personnelles par un praticien professionnel désigné. Dans les pays qui nous entourent, dont la loi prévoit aussi la consultation des annotations personnelles par voie indirecte, il a été constaté que les annotations personnelles disparaissaient rapidement, si bien qu'il peut être affirmé avec une quasi-certitude que tel sera également le cas en Belgique.

Droit de consultation

Il ressort de la loi que le patient doit adresser sa demande de consultation du dossier au praticien professionnel qui l'a constitué. Lors d'une demande de consultation au cours d'un traitement ou à sa clôture, le droit de consultation se situe dans le prolongement de l'obligation d'informer. Il est indiqué dans ces cas de parcourir le dossier avec le patient afin de lui fournir les explications nécessaires le cas échéant.

Les demandes de consultation parfois longtemps après la clôture du dossier peuvent conduire à des difficultés surtout dans les hôpitaux. Ces dossiers sont conservés sous un numéro unique par patient dans des archives médicales gérées sous la responsabilité du médecin-chef. Ce n'est toutefois pas par le médecin-chef que doit être accordée la consultation du dossier, car la demande doit être adressée au praticien professionnel qui a constitué le dossier ou à son successeur. Les personnes habituées aux dossiers parfois volumineux des patients et au nombre de leurs auteurs, savent à quelles difficultés peut conduire la demande d'une copie de tels dossiers.

Le Conseil national estime indiqué que dans chaque hôpital, les médecins-chefs, les chefs de service, les membres du staff médical et tous les médecins dont des dossiers de patients sont conservés à l'hôpital, s'accordent sur une série de mesures pragmatiques facilitant au patient la consultation du dossier et l'obtention d'une copie éventuelle de l'ensemble ou d'une partie du dossier. Il est évident que ces conventions doivent être conformes aux dispositions légales en matière de dossier du patient et qu'elles ne peuvent restreindre les droits du patient et des praticiens professionnels. Il serait approprié que les médecins, la direction et les autres praticiens professionnels parviennent à un règlement uniforme pour la consultation et la copie de dossiers, et des modalités y afférentes comme entre autres le prix de la copie.

Lorsque des années après le dernier contact avec le médecin, la consultation du dossier médical est demandée par une personne de confiance, il peut être utile de vérifier si la désignation est encore valable et si le patient est encore capable d'exercer ses droits.

Droit d'obtenir copie

Dans son avis du 17 février 2001, le Conseil national considérait que, si l'on admettait le droit de consultation directe, il n'y avait pas d'argument du point de vue déontologique pour refuser au patient une copie de son dossier. Pour éviter que le patient ne puisse être l'objet de pressions de la part de tiers dans l'exercice de ce droit, le Conseil national a proposé dans son avis du 16 février 2002, que le droit de consultation directe soit associé à un droit indirect d'obtenir copie. Le législateur n'a pas retenu cette proposition, mais a quand même prévu qu'il soit mentionné sur chaque copie que celle-ci est strictement "personnelle et confidentielle". Il ne peut être déduit de ceci qu'un patient ne serait pas en droit de fournir une copie à des tiers afin de défendre ses intérêts. Il est possible d'exercer le droit d'obtenir copie sans consultation préalable du dossier médical bien qu'il soit recommandé de commencer par consulter le dossier afin de déterminer de quelles pièces une copie est souhaitée.

De la lecture conjointe des paragraphes 2 et 3 de l'article 9 de la loi, il ressort que le droit d'obtenir copie ne se limite pas au patient mais qu'il vaut aussi pour la personne de confiance par qui ce droit peut être exercé au nom du patient. Mais en ce qui concerne la demande d'une copie par le représentant, le Conseil national estime nécessaire que le patient marque son accord par écrit. Cet écrit doit faire apparaître qu'il n'est pas exercé de pression sur le patient pour qu'il communique la copie à des tiers. Plus du temps se sera écoulé entre la clôture du dossier et la demande de copie, plus cette dernière recommandation prendra de l'importance.

Consultation après le décès

L'article 9, §4, prévoit qu'un patient peut empêcher la consultation de son dossier après sa mort, en s'y opposant expressément. Le médecin doit parler de cette possibilité au patient s'il sait que la volonté du patient va en ce sens. Il est évident qu'un patient ne peut exprimer son opposition à la consultation que lorsqu'il est encore capable d'exercer ses droits.

Le droit de consultation du dossier doit émaner de l'époux, du partenaire cohabitant légal, du partenaire ou des parents jusqu'au deuxième degré inclus. La demande d'une seule des personnes énumérées suffit et le cas échéant, chaque demandeur a la faculté de désigner un praticien professionnel afin de consulter le dossier.

Si la demande de consultation du dossier après le décès est insuffisamment motivée et spécifiée, le médecin requis peut s'opposer à la consultation du dossier après le décès du patient. Le Conseil national estime qu'un médecin ne peut s'opposer à la consultation du dossier en raison d'une suspicion de faute médicale. En revanche, il estime que la contestation d'un testament ne peut justifier la consultation du dossier. L'autoriser porterait gravement atteinte à la confiance de la personne âgée dans la médecine. Les contestations relatives à la validité d'un testament doivent être jugées sans violer la confidentialité de données médicales.

Consultation par le praticien professionnel

Outre la consultation du dossier médical par le patient ou par sa personne de confiance, la loi octroie dans certains cas une compétence exclusive de consultation du dossier à un praticien professionnel. Il s'agit de la consultation des annotations personnelles (article 9, §2, quatrième alinéa), de la consultation lorsque certaines informations ne sont pas divulguées au patient (article 9, §2, cinquième alinéa, et article 7, §4, deuxième alinéa), de la consultation du dossier après le décès (article 9, §4) et de la consultation à la demande du représentant du patient (article 15, §1er).

Le Conseil national estime que dans toutes ces situations concrètes définies par la loi, seuls des médecins peuvent être désignés comme praticiens professionnels pour consulter des dossiers médicaux. L'article 4 de la loi dit d'ailleurs que le praticien professionnel doit respecter les dispositions de la loi "dans les limites des compétences qui lui sont conférées par ou en vertu de la loi.". Ces compétences sont décrites dans l'arrêté royal n° 78 du 10 novembre 1967 relatif à l'exercice des professions des soins de santé. L'article 2, §1er, de cet arrêté royal dispose qu'il est de la compétence exclusive des médecins d'examiner l'état de santé, de dépister des maladies et déficiences, d'établir le diagnostic et d'instaurer un traitement. Il est dès lors inadmissible que des non-médecins donnent à leur mandant une seconde opinion sur l'état de santé, la maladie, le diagnostic ou le traitement d'un patient, sur la base des pièces d'un dossier médical.

LA PERSONNE DE CONFIANCE ET LE REPRESENTANT DU PATIENT

Les compétences de la personne de confiance et du représentant du patient seraient l'objet de confusion. La loi est pourtant claire à cet égard. La personne de confiance ne peut intervenir que conjointement avec ou au nom du patient capable d'exercer ses droits; le représentant n'intervient que si le patient n'est pas capable d'exercer ses droits. En outre, la loi n'accorde un rôle à la personne de confiance que dans l'exercice du droit à l'information et du droit à la consultation du dossier par le patient; le représentant exerce en principe tous les droits accordés par la loi au patient.

La personne de confiance

La loi prévoit qu'un patient capable d'exercer ses droits a la possibilité de désigner une personne de confiance afin de se renseigner sur son état de santé, que ce soit en vue d'une intervention du praticien professionnel ou non (article 7, §2, troisième alinéa, et article 8, §3). La loi prévoit aussi que la personne de confiance est entendue lorsque le patient demande que des informations ne lui soient pas fournies (article 7, §3) et qu'elle est informée de ce que le praticien professionnel ne divulgue pas, à titre exceptionnel, certaines informations au patient si la communication de celles-ci risque de causer manifestement un préjudice grave à la santé de ce patient. Il s'agit de ladite "exception thérapeutique" (article 7, §4, premier alinéa). L'article 9, §2, quatrième alinéa, prévoit que le patient peut se faire assister par une personne de confiance dans l'exercice de son droit de consultation du dossier ou exercer ce droit de consultation par l'entremise de cette personne de confiance. Il en va de
même pour le droit d'obtenir copie (article 9, §3) pour lequel on se référera aux précisions apportées ci-dessus dans le présent avis.

Le législateur n'a pas fixé les critères auxquels doit répondre la personne de confiance au moment de sa désignation, ce qui ne signifie toutefois pas que le praticien professionnel doive toujours accepter d'office le choix fait par le patient. Dans son avis du 16 février 2002, le Conseil national indique que la relation de confiance ne doit pas exister seulement entre le patient et la personne désignée, mais doit pouvoir s'établir également entre cette personne et le praticien professionnel. L'on ne peut attendre d'un praticien professionnel qu'il fournisse des informations confidentielles à propos d'un patient à une personne en qui il n'a pas confiance. Dans ce cas, le médecin doit s'en entretenir avec son patient et s'ils ne parviennent pas à un accord, cela peut constituer une raison pour le médecin de mettre un terme à la relation avec le patient.

Le Conseil national estime que seules des personnes physiques agissant en leur nom propre peuvent être désignées comme personnes de confiance. Ainsi, des employés des administrations publiques, des mutuelles ou des personnes agissant au nom d'une asbl ou d'une société ne peuvent être désignés comme personnes de confiance. Si l'administrateur provisoire des biens désigné par le juge de paix ne peut agir comme personne de confiance du chef de cette fonction, il est pourtant possible qu'un patient incapable de gérer ses biens soit à même d'exercer ses droits en tant que patient et qu'il désigne comme personne de confiance l'administrateur provisoire de ses biens.

Le représentant

Comme souligné, le représentant exerce en principe les droits attribués au patient par la loi, lorsque le patient n'est pas en état d'exercer ses droits lui-même.

Dans la mesure où un mineur n'est pas capable d'exercer ses droits de manière autonome, il est représenté par ses parents. Ceux-ci doivent agir dans l'intérêt de l'enfant. La loi prévoit en son article 15, §2, qu'ils ne peuvent s'opposer à des interventions jugées vitales, par exemple à une transfusion sanguine, et ils ne peuvent non plus obtenir consultation ou copie de pièces du dossier dans leur intérêt personnel. L'article 15, §1er, de la loi prévoit explicitement la possibilité d'un rejet de la demande de tout représentant et il est évident qu'une demande émanant d'un praticien professionnel désigné par le père ou la mère à cette fin sera aussi rejetée en cas de suspicion d'un intérêt personnel du parent concerné.

L'une des innovations importantes de la loi réside dans la réglementation légale de la représentation du patient majeur qui n'est plus à même d'exercer ses droits. Du point de vue de la déontologie médicale, il était auparavant préconisé dans le cadre du traitement de ces patients d'associer à la décision les proches parents en tant que représentants de fait mais ces derniers ne disposaient d'aucun droit. A présent, une personne majeure peut décider, à une époque où elle est capable d'exercer ses droits, qu'un "mandataire désigné" exercera ses droits à partir du moment où elle n'en serait elle-même plus capable. Cette désignation doit se faire au moyen d'un mandat écrit spécifique, daté et signé par les deux personnes concernées. Le législateur part du principe que la personne majeure prend elle-même à l'avance les précautions qui s'imposent afin que le praticien professionnel "ait connaissance de l'existence du mandat au moment où il doit être exercé" (exposé des motifs).

Le Conseil national souligne qu'il est indiqué d'attirer l'attention des patients sur le fait qu' ils doivent non seulement faire usage de cette possibilité en temps utile mais qu'ils doivent avertir dans le même temps un certain nombre de personnes dont leur médecin généraliste et ceux qui sont en charge de leur traitement, de la désignation d'un mandataire.

A cet égard, il convient de noter qu'une même personne peut être désignée à la fois comme personne de confiance et comme mandataire, et que les modalités spécifiques de chacune de ces désignations doivent être respectées.

Si le patient majeur n'a pas désigné de représentant, la loi prévoit un système de cascade pour sa représentation par les proches parents lorsqu'il n'est plus à même d'exercer ses droits.

A l'instar de ce qui est prévu pour le représentant d'un patient mineur, la demande de consultation ou de copie du dossier d'un patient majeur, incapable de manifester sa volonté, par son représentant, peut être rejetée afin de préserver la vie privée du patient.

Tant le représentant du patient majeur incapable de manifester sa volonté que le représentant du patient mineur, sont en droit d'être informés complètement de l'état de santé du patient qu'ils représentent, et le praticien professionnel doit obtenir leur consentement pour toute intervention ainsi qu'il en serait avec un patient à même d'exercer ses droits. Si le praticien professionnel et le représentant ne s'accordent pas à propos du traitement, le praticien professionnel est alors libre, à condition de prendre les dispositions nécessaires sur le plan de la continuité des soins, de mettre fin à la prise en charge, tout comme cela peut être fait lorsque médecin et patient ne s'accordent pas à ce sujet.

Parce que souvent le temps manque dans les urgences pour une concertation détaillée, l'article 8, §5, de la loi dispose que toute intervention nécessaire est pratiquée immédiatement dans l'intérêt de la santé du patient dans les cas d'urgence, lorsqu'il y a incertitude "quant à l'existence ou non d'une volonté exprimée au préalable par le patient ou son représentant". Il s'ensuit qu'en règle, l'intervention nécessaire ne peut être pratiquée dans un cas d'urgence lorsque la volonté contraire du patient ou de son représentant est certaine. Mais lorsque dans un cas d'urgence, la vie est en péril, la disposition qui s'applique est celle de l'article 15, §2. Elle prévoit que le praticien professionnel peut déroger à la décision du représentant "dans l'intérêt du patient et afin de prévenir toute menace pour sa vie ou toute atteinte grave à sa santé".

L'application de cette disposition ne se limite pas aux seuls cas d'urgence de menace pour la vie; elle vaut aussi dans tous les cas où le renoncement à une décision médicale évidente peut avoir de graves conséquences pour le patient. Il faut toutefois préciser pour être complet, que de tous les représentants, seul le mandataire désigné a la possibilité, en vertu de l'article 15, §2, de s'opposer à la décision du praticien professionnel s'il peut démontrer que l'intervention envisagée est contraire à la volonté expresse du patient.

Le praticien professionnel étant dans l'impossibilité de rechercher lui-même si un patient en incapacité de manifester sa volonté a désigné un mandataire, il va de soi que c'est à ce dernier qu'il incombe de prendre contact avec le praticien professionnel et de l'informer du mandat spécifique. Le praticien professionnel part du principe que le conjoint ou le partenaire cohabitant est normalement le représentant. Si cette personne fait défaut ou ne souhaite pas intervenir, le contact avec les proches parents fera apparaître lequel d'entre eux agira en tant que représentant. En cas de désaccord entre eux, c'est le praticien professionnel qui, suivant l'article 14, §2, veillera aux intérêts du patient, le cas échéant en concertation pluridisciplinaire, tout comme il le ferait si un représentant faisait défaut ou ne souhaitait pas intervenir.

LA DECLARATION DE VOLONTE DU PATIENT

La loi relative aux droits du patient prévoit que lorsque des décisions doivent être prises au sujet d'un patient n'étant plus à même d'exercer ses droits, la volonté du patient doit être respectée pour autant que celui-ci l'ait clairement exprimée à une époque où il en était encore capable.

L'article 8, §4, quatrième alinéa, dispose que le praticien professionnel doit respecter le refus écrit de consentement à une intervention déterminée rédigé par le patient à un moment où il était en mesure d'exercer les droits tels que fixés par la loi précitée.

Le législateur n'a pas fixé les conditions auxquelles ce refus écrit devrait répondre. Néanmoins, il est indiqué, pour éviter des contestations au sujet d'éventuelles incertitudes concernant la volonté du patient, qu'il ressorte de l'écrit contenant le refus de l'intervention que la déclaration de volonté a été rédigée en connaissance de cause à un moment où le patient était à même d'exercer ses droits. Il est recommandé que le refus soit rédigé en présence et avec le conseil d'un médecin. Il est important que le patient veille à ce que les médecins qui le traitent soient informés en temps utile de son refus de consentement afin que ces médecins puissent encore discuter avec lui du contenu de la déclaration et l'actualiser si nécessaire. Il est notamment indiqué dans ce cadre d'examiner si le refus ne résulte pas d'une pression extérieure.

Un refus de consentement formulé clairement et en connaissance de cause sera généralement accepté sans problème par les médecins amenés à traiter le patient; en cas de doute, il peut même être déterminant de l'abstention ou de l'intervention. En revanche, il n'en sera pas de même lorsqu'un refus écrit interdira une intervention susceptible de sauver la vie de la personne et/ou d'éviter une atteinte grave à sa santé. Lorsqu'il est établi aux yeux du médecin qui traite le patient que le refus coïncide avec la ferme conviction du patient, il doit le respecter tout comme il doit accepter que des patients en mesure d'exercer leurs droits renoncent parfois à des interventions pouvant être importantes pour leur santé. Lorsqu'un médecin pense que le texte littéral de la déclaration de volonté n'a pu être l'intention du patient, il doit en tous les cas se concerter avec le représentant et les dispensateurs de soins concernés, et prendre l'avis d'un confrère. Si pour des raisons dictées par sa conscience, il décide de ne pas respecter le refus, il ne peut perdre de vue qu'il pourrait être amené à justifier sa décision, éventuellement devant une juridiction.

Il peut aussi arriver en l'absence de refus écrit de consentement à une intervention déterminée que le médecin traitant soit amené à devoir respecter la volonté du patient démontrée par le mandataire désigné par ce dernier. Comme exposé plus haut, cette possibilité est prévue à l'article 15, §2. Cette situation ne se présentera qu'exceptionnellement.

Il est indiqué que le patient rédige le refus écrit de consentement à une intervention déterminée lors de la désignation de son mandataire. Ceci serait la meilleure garantie du respect de sa volonté par le médecin.

ARTICLE 95 DE LA LOI SUR LE CONTRAT D'ASSURANCE TERRESTRE

L'article 19 de la loi relative aux droits du patient modifie l'article 95 de la loi du 25 juin 1992 sur le contrat d'assurance terrestre. Le nouvel article 95 limite la quantité de données pouvant être réclamées et traitées par un assureur lors de la conclusion et de l'exécution d'un contrat d'assurance de personnes.

Le premier alinéa dit que les certificats médicaux doivent se limiter à la description de l'état de santé actuel de l'intéressé. Dès lors que la notion d'"état de santé actuel" ne sera probablement pas interprétée de façon univoque, une analyse plus approfondie en sera nécessaire.

Le deuxième alinéa de l'article 95 dispose que l'assuré ne peut remettre les certificats médicaux qu'au médecin-conseil de l'assureur. Il est désormais exclu que les certificats soient encore remis sur la base d'un consentement écrit de la personne concernée (article 7, §4, de la loi du 8 décembre 1992 relative à la protection de la vie privée à l'égard des traitements de données à caractère personnel) à d'autres personnes travaillant pour l'assureur.

On remarquera le rôle central dont le législateur investit le médecin-conseil de l'assureur. Celui-ci n'est autorisé à communiquer à l'assureur que l'information pertinente eu égard au risque pour lequel les certificats ont été établis et cette information ne peut concerner d'autres personnes que l'assuré. Dès l'instant où le risque n'existe plus pour l'assureur, le médecin-conseil doit restituer, à leur demande, les certificats médicaux à l'assuré ou, en cas de décès, à ses ayants droit. Il est évident que ces dispositions auront des répercussions importantes dans le traitement de certificats médicaux chez les assureurs. Le Conseil national estime nécessaire, avant d'émettre un avis sur la mission des médecins-conseils, de faire examiner cette problématique par un groupe de travail comprenant des experts extérieurs.

CONCLUSION

Cet avis complémentaire ne peut en aucun cas détourner l'attention des traits déontologiques caractéristiques de la relation médecin-patient, tels qu'exposés par le Conseil national dans ses avis des 17 février 2001 et 16 février 2002.

Dans cette relation, l'obligation d'informer pour le médecin et le droit de consentir pour le patient jouent un rôle capital. Il importe pour le patient, non seulement d'être informé à propos de son état de santé, mais aussi de connaître les nouvelles possibilités que lui offre la loi relative aux droits du patient.

Le présent avis complémentaire attire l'attention, entre autres, sur le fait qu'en plus d'une personne de confiance, le patient a aussi la possibilité de désigner un mandataire, qu'il peut s'opposer à la consultation de son dossier après son décès et qu'il a aussi la faculté de rédiger un refus de consentement à une intervention déterminée. Il convient de discuter avec lui de ces possibilités en temps utile afin qu'il puisse aussi en temps opportun prendre les initiatives nécessaires.

Par le rappel des principes exposés dans les avis précités et par le présent avis complémentaire, le Conseil national souhaite contribuer à une relation patient-médecin harmonieuse et basée sur une confiance mutuelle.

Consentement éclairé22/03/2003 Code de document: a100006
Avis relatif aux soins palliatifs, à l'euthanasie et à d'autres décisions médicales concernant la fin de vie

En ses séances des 18 janvier, 15 février et 22 mars 2003, le Conseil national de l'Ordre des médecins a examiné l'impact sur la déontologie médicale de la loi du 28 mai 2002 relative à l'euthanasie et de la loi du 14 juin 2002 relative aux soins palliatifs, ainsi que l'incidence des dispositions de la loi du 22 août 2002 relative aux droits du patient sur les matières traitées dans les lois citées.

DÉONTOLOGIE et LÉGISLATION

Il ne peut être nié que bon nombre de médecins estiment que dans l'exercice de leur profession, les principes éthiques doivent primer la législation. Ce point de vue est également défendu par des organisations médicales internationales importantes qui fondent leur position sur des exemples concrets.
Toutefois, des questions éthiques peuvent faire l'objet d'une œuvre législative. Lorsqu'une législation de ce type est établie dans un état démocratique et respecte la liberté de conscience de chaque médecin, son existence ne peut être ignorée par une institution de droit public comme l'Ordre des médecins. Par conséquent, l'Ordre ne peut préconiser des règles de conduite ou prendre des décisions contraires aux lois adoptées démocratiquement dans notre pays.
Lorsque des règles de déontologie médicale ou des avis du Conseil national sont soumis au Conseil d'Etat, celui-ci les annule s'il est constaté qu'ils sont contraires à la législation. Des décisions disciplinaires qui violent la loi sont susceptibles d'être annulées par la Cour de cassation.
Dès lors, il est inexact de prétendre que des médecins puissent être sanctionnés par un conseil provincial sur la base d'un article du Code de déontologie médicale non encore modifié lorsqu'ils se sont conformés strictement à la loi. D'ailleurs, le Conseil national adapte les dispositions du Code de déontologie médicale non conformes à la loi.
Il convient de souligner que la jurisprudence permet au Conseil national d'ajouter à la législation des règles de conduite déontologiques destinées à guider les médecins dans l'exercice de leur profession.
Etant donné l’ampleur et la complexité de la coordination des lois examinées dans le présent texte, concernant des matières au sujet desquelles il n'existe pas de conception unanime tant au sein du monde médical que de la population, le Conseil national se limite dans un premier temps à émettre un avis et tiendra compte des réactions à cet avis et de l'expérience acquise pour procéder à une modification de certains articles du Code.

INFORMATION et CONSENTEMENT

Tant sur le plan légal que déontologique, le patient a droit à toutes les informations utiles sur son état et il doit donner son accord pour tout examen et tout traitement.
La loi relative aux droits du patient prévoit en son article 7, §1er, que le patient a droit à toutes les informations qui le concernent et qui peuvent lui être nécessaires pour comprendre son état de santé et son évolution probable, et en son article 8, §1er que le patient a le droit de consentir librement à toute intervention du praticien professionnel moyennant information préalable.
La problématique ici traitée nécessite aussi de faire référence à l'article 33 du Code de déontologie médicale. En vertu de cette disposition, le médecin doit communiquer à temps au patient le diagnostic et le pronostic; ceci vaut également pour un pronostic grave, voire fatal. Le deuxième alinéa ajoute qu'en tout cas, le médecin doit assurer le patient d'un traitement et d'un accompagnement ultérieurs adéquats.
Le fait de donner "à temps" l'information nécessaire lors d'un pronostic fatal est surtout important pour que le patient puisse réfléchir à la manière de quitter la vie et se concerter à ce sujet avec son ou ses médecins, avec les autres personnes qui le soignent et avec ses proches.

EUTHANASIE et SOINS PALLIATIFS

Malgré l'information largement diffusée par différents canaux, il est nécessaire de répéter que la loi relative à l'euthanasie - comme le dit son article 2 - concerne uniquement un "acte, pratiqué par un tiers, qui met intentionnellement fin à la vie d'une personne à la demande de celle-ci.". Il est de la plus grande importance que les médecins en soient conscients et qu'à ce propos, ils attirent l'attention tant de leurs patients que des proches, le cas échéant.
La loi ne s'applique pas à d'autres décisions médicales concernant la vie finissante. L'article 3, §2, 1°, de la loi relative à l'euthanasie dispose que le médecin doit informer le patient de son état de santé et de son espérance de vie, et se concerter avec lui sur sa demande d'euthanasie. Il est essentiel que cette concertation fasse apparaître clairement les motifs qui sont à la base de la demande d'euthanasie. Si des douleurs ou autres symptômes rendent sa situation insupportable, le patient doit être averti des possibilités thérapeutiques encore envisageables. Si l’atteinte à son autonomie et à sa dignité humaine rend ses souffrances insupportables, le patient doit être informé des possibilités qu'offrent les soins palliatifs.
Comme précisé à l'article 3, §2, 1°, de la loi, le médecin "doit arriver avec le patient à la conviction qu'il n'y a aucune autre solution raisonnable dans sa situation" et qu'aucune autre décision médicale concernant la fin de vie n'offre une alternative raisonnable. Il est évident que le médecin doit avoir une connaissance approfondie des produits adéquats afin qu'il puisse assurer à son patient une mort paisible et sans souffrance.

Le médecin doit aussi être convaincu que la demande du patient est entièrement volontaire, ce qui ne signifie pas seulement qu'il n'existe aucune pression extérieure d'ordre financier, psychosocial ou relationnel, mais également que l'aptitude mentale du patient soit compatible avec un libre choix.
Il convient de noter que la demande d'euthanasie telle que définie à l'article 14 de la loi n'a pas de valeur contraignante alors qu'en vertu de l'article 2 de la loi relative aux soins palliatifs, ces soins sont un droit de chaque patient, avec pour condition restrictive toutefois qu'il s'agisse de l'"accompagnement de sa fin de vie". Dans ce même article, les soins palliatifs sont définis comme étant "l'ensemble des soins apportés au patient atteint d'une maladie susceptible d'entraîner la mort une fois que cette maladie ne réagit plus aux thérapies curatives.". Toutefois, le droit à l’autonomie est garanti au patient par la déontologie médicale et par l’article 5 de la loi relative aux droits du patient. Il s'ensuit qu'un patient peut refuser des soins curatifs, à tout moment de l'évolution de son affection, également avant son stade terminal, et qu'il peut à tout moment opter pour des soins palliatifs.
Il est inacceptable que la liaison des soins palliatifs à l'accompagnement de la fin de vie ait pour conséquence d'interrompre la prise en charge spécifique par la sécurité sociale lorsqu'un patient vit plus longtemps que ne l'avaient estimé ses médecins au moment où il a été recouru aux soins palliatifs. Le Conseil national estime qu’une application souple des critères des soins palliatifs est indiquée.
Le Conseil national soutient les initiatives d’amélioration de l’offre des soins palliatifs prévues par la loi. Des soins palliatifs correctement conçus pourraient constituer une réponse adéquate à certains motifs à la base d’une demande d'euthanasie, pourraient réduire le nombre de demandes d'euthanasie et créer un espace pour discuter d'autres façons de quitter la vie.

AUTRES DÉCISIONS MÉDICALES concernant la FIN DE VIE

Bien que la loi relative à l'euthanasie ne fasse pas référence à d’autres décisions médicales concernant la fin de vie, il est certain que l'article 8, §2, de la loi relative aux droits du patient, lorsqu'il vise les alternatives possibles à une intervention, donne au patient le droit d'être informé à propos d'autres décisions médicales pouvant aussi mettre fin à court terme à "une situation médicale sans issue de souffrance physique ou psychique constante et insupportable qui ne peut être apaisée et qui résulte d'une affection accidentelle ou pathologique grave et incurable" (article 3, §1er, troisième alinéa, de la loi relative à l'euthanasie).
En l'occurrence, au droit d'être informé vient s'ajouter le droit à un consentement éclairé, préalable et libre tel que prévu par l'article 8, §1er, de la loi relative aux droits du patient.

L'arrêt ou la non-mise en œuvre d'un traitement est déontologiquement indiqué s'il est scientifiquement établi qu'il n'y a plus d'espoir d'une amélioration raisonnable et que des traitements prolongeant la vie n'augmentent pas le confort du patient et ne lui procurent plus que gêne et souffrance. Il faut dire à cet égard que ces dernières années, des protocoles dits DNR ont été élaborés en concertation pluridisciplinaire dans bon nombre d'hôpitaux et établissements de soins. Ces accords sont indiqués dans tous les lieux où l'on est régulièrement confronté à ces situations. Il est également recommandé aux médecins généralistes de prendre les initiatives nécessaires pour la mise en place de groupes de réflexion sur lesquels ils pourraient s'appuyer lorsqu'ils sont confrontés à cette problématique.
Les protocoles précités ne peuvent être mis en œuvre sans le consentement préalable du patient dûment éclairé. Comme à présent la loi relative aux droits du patient est d'application, le consentement du représentant tel que défini aux articles 12, 13 et 14 de cette loi, doit être obtenu lorsque le patient n'est plus en mesure d'exercer ses droits lui-même. Des problèmes peuvent surgir lorsque le représentant n'est pas d'accord avec l'arrêt ou la non-mise en œuvre d'un traitement et demande au médecin un acharnement thérapeutique. L'article 15, §2, de la loi relative aux droits du patient prévoit que le praticien professionnel concerné peut dans le cadre d'une concertation pluridisciplinaire s'écarter de l'avis du représentant "dans l'intérêt du patient et afin de prévenir toute menace pour sa vie ou toute atteinte grave à sa santé". Ceci fait apparaître que l'intérêt du patient prime l'avis du représentant. Ce principe ne doit pas seulement valoir pour les interventions mais aussi pour l'arrêt et pour la non-mise en œuvre d'un traitement. Il est indiqué, en cas de divergence d'opinions persistante entre le médecin concerné et le représentant du patient, que le médecin vérifie si les représentants du même rang sont du même avis. Si tel n’est pas le cas, le médecin veille aux intérêts du patient (art. 14, §2, alinéa 4, de la loi précitée).

La lutte contre la douleur revêt une importance capitale pour le patient en fin de vie. La déontologie médicale a toujours admis l’usage de médicaments, même les plus puissants, malgré la possibilité d’induire des complications qui pourraient hâter le décès.
L’emploi de ces substances, vu le risque encouru, n’est possible qu'avec le consentement du patient dûment éclairé ou de son représentant. Des problèmes se poseront rarement à cet égard. Le patient est libre de refuser la lutte contre la douleur. Par contre, si le refus émane du représentant, il est évident comme dit plus haut, que les intérêts du patient doivent primer. Il est important d'attirer l'attention des parents d'un enfant épuisé par une affection fatale que la lutte efficace contre la douleur peut avoir un effet positif sur la qualité de la vie restante.

L'aide au suicide n'est pas explicitement prévue par la loi relative à l'euthanasie en tant qu'acte mettant fin à la vie d'une personne. Du point de vue déontologique, elle peut néanmoins être assimilée à l’euthanasie pour autant que soient réunies toutes les conditions prévues par la loi pour pratiquer une euthanasie. L’aide au suicide n'est acceptable que si le médecin et le patient discutent au préalable de toutes les éventualités, si le médecin procure lui-même la substance létale qui doit être absorbée en sa présence et en suivant ses indications. Il doit demeurer présent pendant toute la durée de l'agonie pour, conformément à ce qui a été convenu, apporter à tout moment l'aide nécessaire. Compte tenu de son indication stricte et des conditions posées à son application, l'aide au suicide telle que définie plus haut ne se différencie pas de l'euthanasie. De la sorte, toutes les conditions fixées par la loi relative à l'euthanasie doivent être remplies et la procédure prévue par la loi doit être suivie (souffrance insupportable ne pouvant être apaisée, consultation d’un deuxième ou troisième médecin, demande écrite, le cas échéant un mois d’attente, déclaration à la Commission fédérale de contrôle et d’évaluation, etc.).
Toutes les formes dites d'aide au suicide qui ne répondent pas aux critères cités ci-dessus, sont déontologiquement inacceptables.

En outre, le Conseil national souligne que l'abrègement actif de la vie sans consentement préalable du patient ne peut être toléré par la déontologie, et qu'il est injustifiable d'y procéder à la demande de la famille.

CONVICTIONS du MÉDECIN

Il n'est pas seulement important que le patient soit informé à temps de son état de santé; il est tout aussi important qu'il soit informé à temps des convictions de ses médecins quant aux différentes possibilités de fin de vie. Il faut éviter qu'un patient, parce que tardivement informé des éventuelles objections de conscience de ses médecins, ne soit contraint en phase terminale de rechercher un médecin disposé à pratiquer à sa demande un mode déterminé d'arrêt de la vie. Il ne faut absolument pas que la loi relative à l'euthanasie conduise à l'apparition d'équipes et de centres d'euthanasie.

CONTINUITÉ des SOINS

Le Conseil national estime préférable que le traitement et l'accompagnement d'un patient pendant tout le déroulement d'une affection dont le pronostic est fatal, soient assurés par les mêmes médecins et la même équipe pluridisciplinaire. Ensemble et en concertation avec le patient, ils programment la manière dont il convient de traiter et de prendre en charge les différents stades de l'affection et sa phase ultime.
A cet égard, il convient de noter que, sur la base de l'article 7, §3, de la loi relative aux droits du patient, le patient peut demander que certaines informations ne lui soient pas fournies. Tout comme l'article 33 du Code de déontologie médicale recommande au médecin de tenir compte, lors de l'information du patient, de son aptitude à la recevoir et de l'étendue de l'information qu'il souhaite.
Il est évident que le patient doit être d'accord avec le plan de traitement et d'accompagnement proposé et qu'il peut changer d'avis à tout moment et revenir sur son consentement. Il est en effet établi que les choix faits peuvent se modifier, et que cela arrive aussi lorsque le moment du départ approche.
D'aucuns se demandent jusqu'à quel moment un patient se trouvant dans un état de "souffrance physique ou psychique constante et insupportable" peut encore formuler une demande d'euthanasie "réfléchie" et "volontaire". Lorsque cela a été discuté au préalable avec lui et qu'il a toujours maintenu l'option choisie, on peut dire avec une plus grande certitude que l'exécution de la procédure définie par la loi n'est rien de plus que la formalisation d'une décision bien réfléchie.

APPROCHE PLURIDISCIPLINAIRE

Les patients dont le pronostic est grave ou fatal sont rarement traités par un seul médecin. En fonction des différents stades de l'affection, ce seront des médecins possédant une expertise particulière dans l'une ou l'autre branche de la médecine qui interviendront dans le traitement ou en prendront même temporairement le relais. Une collaboration et une concertation pluridisciplinaire s'indiquent aussi dans la phase qui précède la mort. L'échange des connaissances au sujet de la pathologie spécifique et de ce que l'on sait à propos des caractéristiques du patient concerné est à cet égard un élément essentiel. Dans cette concertation collégiale, le médecin généraliste joue un rôle central. Connaissant généralement l'intéressé et les personnes de son entourage qui le soutiennent, son opinion et son intervention éventuelle peuvent être importantes dans le choix de fin de vie le plus approprié au patient.
La loi prévoit que le médecin traitant doit évoquer avec le patient les possibilités qu'offrent les soins palliatifs. Le Conseil national estime que l'intervention d'une personne qualifiée en matière de soins palliatifs est en règle générale indiquée, car les médecins ne sont pas tous suffisamment au courant des possibilités et des objectifs spécifiques de la dispensation de soins palliatifs.
Il est clair que le patient doit avoir marqué son accord pour la consultation des médecins précités et le recours à une personne qualifiée en matière de soins palliatifs.

MÉDECINS A CONSULTER

Le patient doit aussi avoir donné son autorisation pour la consultation du (des) médecin(s) prévu(s) par la loi. Pour offrir au patient un libre choix, il est indiqué de parcourir avec lui les qualifications de quelques médecins compétents en la matière et répondant aux critères prévus par la loi.
Curieusement, suivant la loi relative à l'euthanasie, ce n'est pas le médecin consulté qui informe le patient concernant les résultats de cette consultation, mais le médecin traitant. Il ne fait toutefois aucun doute que le médecin consulté entre dans le champ d'application de la loi relative aux droits du patient, qui prévoit explicitement que le patient a droit à toutes les informations le concernant, nécessaires à la compréhension de son état de santé et de son évolution probable. L'évocation d'autres solutions permettant aussi à court terme l'apaisement d'une souffrance sans issue et insupportable, fait également partie de cette information.
En outre, il est évident que le médecin traitant ne peut pas se limiter à informer le patient des résultats de la consultation. Il doit expliquer le rapport qui a été fait des constatations du ou des médecins(s) consulté(s) et s'en entretenir avec le patient. Sur la base de l'article 9, §2, de la loi relative aux droits du patient, le patient a le droit de prendre lui-même connaissance du dossier le concernant dont le rapport du médecin consulté est un élément. Il est recommandé que le médecin consulté tienne compte de cette éventualité lorsqu'il rédige son rapport.
La portée de l'indépendance des médecins consultés prévue à l'article 3, §2, 3°, deuxième alinéa, et §3, 1°, du même article, n'apparaît pas clairement.
L'absence de tout lien entre les intéressés est la meilleure garantie d'un avis indépendant des médecins consultés et de l'appréciation objective par le médecin traitant de ces avis non contraignants à son égard. Ainsi, il est indiqué qu'il n'y ait pas eu de contacts antérieurs entre le patient et les médecins consultés, tandis que l'absence de liens contractuels, matériels et moraux entre les médecins concernés est la meilleure garantie de l'indépendance visée. Il convient d'envisager s'il y a lieu de faire intervenir en premier lieu un médecin de référence en matière de soins palliatifs répondant aux exigences légales, ce qui permet de rencontrer une recommandation faite ci-dessus.

DÉCÈS NON PROCHE

Dans son avis du 17 novembre 2001, le Conseil national se prononçait contre la possibilité légale de l'euthanasie pour des patients dont la mort n'est manifestement pas proche. Le Conseil national maintient que ce groupe est extrêmement réduit, car "un examen pluridisciplinaire approfondi de patients formulant une telle demande, fera apparaître qu'il ne sont pas traités de manière compétente ou qu'ils sont insuffisamment informés ou encore que la demande procède uniquement de motifs relationnels, sociaux ou économiques.". Le Conseil national estime de son devoir d'exhorter les médecins à la plus grande prudence dans le cadre de demandes d'euthanasie de patients dont la mort n'est pas censée être proche.

MINEURS

Du point de vue déontologique, l'âge mental d'un patient est plus à prendre en considération que son âge civil. Cette approche s'inscrit en parallèle de la Convention internationale des droits de l'enfant, en vigueur en Belgique, et de la loi relative aux droits du patient dont l'article 12, §2, dit notamment: "Les droits énumérés dans cette loi peuvent être exercés de manière autonome par le patient mineur qui peut être estimé apte à apprécier raisonnablement ses intérêts.". Pour les mineurs qui n'entrent pas dans le champ d'application de cette disposition, il est prévu au premier paragraphe de l'article 12 que les droits sont exercés par les parents ou par le tuteur. Il peut être admis que ce qui précède ne vaut pas seulement pour les droits tels que définis dans la loi relative aux droits du patient, mais aussi pour le droit à des soins palliatifs.
Les patients mineurs mentalement adultes ont, sur le plan des décisions médicales concernant la fin de vie, les mêmes droits que les patients majeurs, et si le patient mineur n'a pas suffisamment de maturité pour les exercer de manière autonome, ces droits sont exercés par les parents ou par le tuteur. La mise en œuvre de l'euthanasie est une exception à cette règle.
Il est expressément précisé à l'article 3, §1er, premier tiret, de la loi relative à l'euthanasie, que le patient doit être majeur ou mineur émancipé, et la loi ne prévoit pas qu'un représentant puisse agir à la place d'un mineur. En ce qui concerne l'éventuelle mise en œuvre de l'euthanasie chez des mineurs, le médecin se retrouve dans la même situation qu'avant la loi relative à l'euthanasie et ne peut que se conformer aux règles de la déontologie.
Dans son avis du 15 janvier 2000, le Conseil national admet que "dans des circonstances exceptionnelles, le médecin peut se trouver placé devant un conflit de valeurs et de décisions qui en découlent, à savoir de ne pas provoquer délibérément la mort ou de mettre en œuvre les moyens adéquats nécessaires pour permettre à un patient de mourir dans la dignité. Dans ces circonstances, le médecin doit prendre en honneur et en conscience, et en concertation avec le patient, une décision qu'il devra toujours pouvoir justifier". L'avis cité pose comme conditions supplémentaires de demander conseil à un confrère au moins, de recueillir le cas échéant l'opinion des proches du patient ainsi que de l'équipe infirmière et/ou de l'équipe soignante.

DÉCLARATION ANTICIPÉE

Suivant l'article 4, §1er, de la loi relative à l'euthanasie, tout majeur capable peut, dans l’éventualité où il ne serait plus en état de manifester sa volonté, consigner par écrit, dans une déclaration, sa volonté qu'une euthanasie soit réalisée sur sa personne si les conditions suivantes sont réunies: être atteint d'une affection accidentelle ou pathologique grave et incurable, être inconscient et se trouver dans une situation irréversible selon l'état actuel de la science. Ces situations se présenteront rarement, car il est entre autres admis qu'en cas de démence de l'auteur de la déclaration anticipée de volonté, il ne peut être donné suite à cette dernière.
L'application de l'article 8, §4, quatrième alinéa, de la loi relative aux droits du patient sera plus fréquente. Cet alinéa dit: "Si, lorsqu'il était encore à même d'exercer les droits tels que fixés dans cette loi, le patient a fait savoir par écrit qu'il refuse son consentement à une intervention déterminée du praticien professionnel, ce refus doit être respecté aussi longtemps que le patient ne l'a pas révoqué à un moment où il est lui-même en mesure d'exercer ses droits lui-même.". Cette disposition qui ne s'applique pas à l'euthanasie, peut toutefois s'appliquer aux autres décisions médicales concernant la fin de la vie. Suivant l'article 8, §4, quatrième alinéa, l'opposition exprimée par écrit à la mise en œuvre d'un traitement comme l'alimentation par sonde, doit être respectée. Dans son avis du 16 février 2002 sur l'avant-projet de loi relatif aux droits du patient (Bulletin du Conseil national n° 95, mars 2002, p. 3), le Conseil national a estimé que le dispensateur de soins doit sérieusement tenir compte d'une déclaration écrite de volonté du patient, pouvant être décisive en cas d'hésitation entre l'abstention ou l'intervention. Une opposition par écrit à une intervention déterminée n'a pour le Conseil national dans cet avis qu'une valeur indicative et non contraignante. Lorsqu'il s'agit toutefois d'un patient qui n’est plus à même d'exercer ses droits et se trouve dans une situation médicale sans issue de souffrance physique et psychique constante et insupportable qui ne peut être apaisée et qui résulte d'une affection accidentelle ou pathologique grave et incurable, le refus écrit d'une intervention déterminée susceptible de prolonger la vie doit être respecté.

RESPONSABILITÉ

Dans son avis du 17 novembre 2001, le Conseil national attirait l'attention des médecins sur la nécessité de respecter les dispositions légales en matière d'euthanasie de manière stricte et de remplir minutieusement les documents d'enregistrement. La Commission fédérale de contrôle et d'évaluation sera probablement rarement confrontée à des dossiers devant être transmis au procureur du Roi. La loi relative à l'euthanasie n'a cependant pas limité les compétences des magistrats du parquet et des juges d'instruction, de sorte que ceux-ci peuvent très bien ouvrir une enquête lorsqu'ils sont informés d'un décès suspect.

CERTIFICAT MÉDICAL en cas de DÉCÈS

Un conseil provincial a déjà soulevé plusieurs questions au sujet du certificat médical à remettre en cas de décès au médecin-conseil de l'assureur. Le Conseil national estime indiqué de ne pas mentionner dans ce certificat qu'une euthanasie a été pratiquée à la demande de la personne décédée. L'article 15 de la loi relative à l'euthanasie précise en effet qu'une personne décédée à la suite d'une euthanasie est réputée décédée de mort naturelle. Ceci vaut tant pour les contrats d’assurance que pour les attestations de décès destinées à l’état civil. L'argument suivant lequel le médecin-conseil doit respecter son secret professionnel à l'égard de l'assureur et n'est pas en droit de lui communiquer qu'une euthanasie a été pratiquée, ne vaut qu'en partie. Suivant le dernier alinéa de l'article 95 de la loi sur le contrat d'assurance terrestre modifié par la loi relative aux droits du patient, le médecin-conseil doit restituer le certificat médical aux ayants droit de la personne décédée, lorsqu'il n'existe plus de risque pour l'assureur. Il s'ensuit que les ayants droit de la personne décédée apprennent qu'une euthanasie a été pratiquée alors qu'il n'est pas établi que telle a été la volonté du défunt.
En ce qui concerne les conséquences sur le plan des assurances vie s'il s'avérait ultérieurement que l'euthanasie pratiquée était une infraction, cette situation ne se différencierait pas des autres situations dans lesquelles il apparaît que le décès a été la conséquence d'une infraction commise par un médecin.

CONCLUSION

Afin d'éviter que la qualité de la relation médecin-patient ne soit altérée dans la phase ultime de la vie, il est fondamental de ne pas se focaliser sur la formalisation juridique, mais plutôt de prêter attention à ce qui constitue l'essence des dispositions légales analysées, à savoir le respect mutuel de l'autonomie et des valeurs éthiques de chacun.
Cette attitude s’appuie sur une compréhension réciproque dans laquelle un patient dûment informé pourra faire en concertation franche avec son médecin, son choix de fin de vie.

Commercialisation de la médecine14/12/2002 Code de document: a099011
Indemnisation de donneurs de gamètes

Le président du comité d'éthique médicale d'un hôpital souhaite connaître les directives du Conseil national au sujet de l'indemnisation de donneurs de gamètes.

Avis du Conseil national

Le Conseil national estime possible d'envisager une indemnisation équitable des donneurs de gamètes. Cette compensation doit être fondée entre autres sur une évaluation raisonnable du temps consacré, des inconvénients subis, des risques associés, par exemple, au don d'ovocytes et ne peut être conçue comme un paiement des gamètes. A cet égard, il convient toutefois de tenir compte du fait que ni le corps humain ni des parties de celui-ci ne peuvent faire l'objet d'une activité commerciale. Il est indiqué que les centres de fertilité prennent des accords au sujet de l'indemnisation équitable proposée.

Le Conseil national rappelle que, conformément à l'article 88, 3ème alinéa, du Code de déontologie médicale, "Toute expérimentation en matière de procréation exige une compétence sans faille, une prudence extrême, l'accord des intéressés et le recours à une commission d'éthique". Etant donné le très long intervalle avant que des contestations apparaissent, un accord par écrit tant des receveurs que des donneurs est indiqué. Ce consentement éclairé doit aussi régler sans ambiguïté les aspects juridiques, notamment la renonciation inconditionnelle à l'enfant ou aux enfants issu(s) de ce don.

Vous trouvez de plus amples informations dans l'article "Financial incentives in recruitment of oocyte donors" rédigé par "The Ethics Committee of American Society for Reproductive Medicine" (Fertility and Sterility, vol.74, n°2, août 2000).

Le Conseil national renvoie également à cet égard à l'avis n°18 du Comité du 16 septembre 2002 relatif à la recherche sur l'embryon humain in vitro.

Secret professionnel14/12/2002 Code de document: a099010
Demande de données par le médecin du centre de guidance au médecin traitant d'un élève

Lorsqu'un médecin d'un centre de guidance estime utile de demander des données médicales au médecin traitant d'un élève, il doit le faire avec l'accord de la personne concernée (art. 109 du Code de déontologie médicale).
Le coordinateur de la cellule de soutien permanent des centres de guidance des élèves de l'Enseignement de la Communauté (flamande) souhaite être informé de l'âge que l'élève doit avoir atteint pour pouvoir donner lui-même son accord, ainsi que de la manière dont cet accord doit être donné.

Avis du Conseil national :

Le Conseil national a examiné en sa séance du 14 décembre 2002 votre lettre du 29 mars 2002 concernant la demande de données par le médecin du centre de guidance au médecin traitant d'un élève.

Plus précisément, la question qui y est posée est de savoir si le médecin et l'équipe du centre peuvent entendre par "personne concernée" qui doit donner son accord, l'élève lui-même s'il est âgé de 14 ans ou plus, ou le parent voire le tuteur dans les autres cas.

Il est aussi demandé de quelle manière la personne concernée doit donner son accord: l'absence d'opposition suffit-elle pour une guidance ou l'accord doit-il être donné par l'intermédiaire du questionnaire médical ou doit-il être exprès, verbal ou écrit, pour chaque problème qui se pose?

Il est important de noter que l'article 107 du Code de déontologie médicale dispose que les médecins exerçant dans les centres et institutions de médecine préventive, sont tenus au respect des dispositions du Code. L'article 105 dispose que, sous réserve des limites imposées en matière de secret professionnel par les articles 55 à 70, le médecin traitant doit, lorsque l'intérêt de ses patients l'exige, coopérer avec ses confrères de la médecine préventive et leurs collaborateurs. L'article 106 dispose que le médecin traitant est autorisé à transmettre, avec l'accord de l'intéressé, au médecin de l'inspection médicale scolaire (centre de guidance), les renseignements qu'il juge utiles à son patient, tandis que l'article 108 précise que le médecin d'un centre de médecine préventive, doit transmettre tout résultat utile au médecin désigné par celui qu'il examine ou, s'il s'agit d'un enfant ou d'un incapable, par ses représentants légaux.

En ce qui concerne l'âge auquel un élève peut effectivement être considéré comme étant la personne concernée, le Conseil national rappelle son avis du 20 septembre 1997 (Bulletin du Conseil national n° 79, mars 1998, p. 21). Il n'est pas possible de donner une réponse générale à la question de savoir si quelqu'un de 14 ans peut décider seul et donner son accord, et par conséquent être considéré comme personne concernée.

La doctrine établit une distinction fondamentale entre mineurs capables et incapables de discernement.

La loi du 22 août 2002 relative aux droits du patient dit aussi en son article 12, §2, que suivant son âge et sa maturité, le patient mineur est associé à l'exercice de ses droits. Les droits énumérés dans la loi relative aux droits du patient peuvent être exercés de manière autonome par le patient mineur qui peut être estimé apte à apprécier raisonnablement ses intérêts.

Le médecin du centre de guidance et son équipe devront porter une appréciation prudente et consciencieuse, en tenant compte de tous les facteurs utiles comme la personnalité de l'enfant, la nature de la prestation médicale, les conditions familiales et sociales et en l'espèce les prestations et expériences scolaires (cf. l’avis précité du Conseil national du 20 septembre 1997).

Dans le cas où il est estimé que l'enfant n'a pas atteint l'âge de discernement, le (ou les) représentant(s) légal (légaux) sera (seront) considéré(s) comme étant la (les) personne(s) concernée(s), ainsi que prévu également à l'article 12, §1er, de la loi relative aux droits du patients. L'élève doit toutefois toujours être associé à la concertation "suivant son âge et sa maturité" (article 12, §2, de la loi relative aux droits du patient).

A l'égard du mineur estimé avoir atteint l'âge de discernement, le médecin est en principe tenu au secret professionnel vis-à-vis des représentants légaux et doit considérer que la personne concernée est l'élève lui-même.

Quant à la manière dont la personne concernée doit donner son accord, l’absence d’opposition ne peut équivaloir à un accord.

Pour des raisons d'ordre pratique, le consentement exprès est cependant possible par l'intermédiaire d'un questionnaire médical rempli par la "personne concernée" après avoir reçu préalablement et en temps utile, une information claire et complète sur l'éventualité que des données médicales soient demandées au médecin traitant, pour autant que cette demande soit justifiée. Dans des circonstances spécifiques ayant un caractère délicat, le médecin concerné du centre de guidance jugera de l'opportunité d'une confirmation du consentement.

Le Conseil national attire l'attention sur le fait que la demande de données médicales à caractère personnel implique un secret médical partagé et tombe sous la surveillance et la responsabilité du médecin, le médecin du centre de guidance (loi du 8 décembre 1992 relative à la protection de la vie privée à l'égard des traitements de données à caractère personnel).

Le médecin du centre de guidance jugera de manière autonome des données médicales pouvant figurer ou non dans le dossier multidisciplinaire du centre de guidance (avis du Conseil national du 16 novembre 1998, Bulletin du Conseil national n° 83, mars 1999, p. 13 et avis du Conseil national du 16 décembre 2000, Bulletin du Conseil national n° 91, mars 2001, p. 8).

Archives médicales21/09/2002 Code de document: a098004
Délais de conservation de dossiers hospitaliers

Le Conseil national adresse la lettre suivante au président du groupe de travail "Archives" de la commission "Télématique" du ministère des Affaires sociales, de la Santé publique et de l'Environnement :

En sa séance du 21 septembre 2002, le Conseil national a examiné un projet d'avis du groupe de travail "Archives" de la commission "Normes en matière de Télématique au service du Secteur des Soins de Santé" - en abrégé commission "Télématique" - concernant la conservation long-terme des dossiers patients par les hôpitaux.
Ce projet d'avis aurait été ou serait transmis au ministre compétent pour servir de base à une modification de l'arrêté royal du 3 mai 1999 déterminant les conditions générales minimales auxquelles le dossier médical visé à l'article 15 de la loi sur les hôpitaux, coordonnée le 7 août 1987, doit répondre. Le projet d'avis porte, entre autres, une modification de l'article 1er, §3, de cet arrêté royal, disposant que le dossier médical doit être conservé à l'hôpital pendant au moins trente ans.

Le Conseil national s'étonne du contenu de ce projet d'avis qui est contraire à la législation en vigueur en matière de prescription d'une part et appelle des questions du point de vue de la déontologie médicale d'autre part.

***

Dans le projet d'avis, un délai de conservation d'au moins vingt ans est préconisé pour le dossier patient entier, sur la base de l'article 2262bis, §2, du Code civil. Cependant, ce délai de conservation ne vaut que pour les dossiers clôturés après le 27 juillet 1998 tandis que les dossiers médicaux clôturés avant cette date doivent être conservés plus longtemps en vertu des dispositions transitoires de la loi du 10 juin 1998 modifiant certaines dispositions en matière de prescription.

Dans son avis du 20 janvier 2001 concernant le délai de conservation de pièces issues d'un dossier médical auquel l'actuel article 1er, §3, de l'arrêté royal précité ne s'applique pas, le Conseil national note: "Par conséquent, […] il est également indiqué de tenir compte des délais maximaux de prescription de toutes les actions (personnelles) en indemnisation d'un dommage sur la base de la responsabilité extra-contractuelle tels que fixés par la loi du 10 juin 1998 modifiant certaines dispositions en matière de prescription, entrée en vigueur le 27 juillet 1998.
Compte tenu des dispositions transitoires de la loi, les nouveaux délais de prescription sont les suivants:

  • pour un dommage provoqué avant le 27 juillet 1988: trente ans après le fait dommageable;
  • pour un dommage provoqué dans la période du 27 juillet 1988 jusqu'au 26 juillet 1998: jusqu'au 26 juillet 2018 compris, à savoir vingt ans après l'entrée en vigueur de la nouvelle loi;
  • pour un dommage provoqué à partir du 27 juillet 1998: vingt ans après le fait dommageable.

A partir du moment où une action est intentée, il est préférable de conserver le dossier jusqu'à la décision judiciaire finale et définitive, en tenant compte le cas échéant des réserves admises." (Bulletin du Conseil national n°92, p.3).

Il est évident qu'il y a lieu, pour les dossiers médicaux hospitaliers comme pour tous les autres dossiers médicaux, d'au moins respecter le délai de conservation correspondant aux délais légaux de prescription de la responsabilité civile des médecins et des actions en dédommagement intentées par des patients. Il n'en a pas été tenu compte par la commission dans l'élaboration de son projet d'avis.

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La commission a bien accordé l'attention nécessaire à la conservation de données en fonction de la continuité des soins après l'expiration des délais de conservation prévus par la loi. Le Conseil national estime cependant que la conservation illimitée dans le temps de dossiers médicaux de synthèse passe à côté des objectifs poursuivis et que le but visé ne sera parfois pas atteint.
Il est avant tout exclu de déterminer avec une probabilité confinant à la certitude quelles données pourront s'avérer importantes pour le patient sur le long terme. Un peu d'histoire de la médecine suffit à démontrer combien les médicaments pris par un patient peuvent parfois avoir de graves conséquences ne se manifestant que très longtemps après, tandis que l'on peut aussi s'interroger sur l'utilité d'une conservation illimitée dans le temps de rapports de consultations et de rapports de sortie d'hospitalisation n'ayant mis en évidence aucune pathologie significative. Lors de la discussion de l'adaptation récente de l'article 46 du Code de déontologie médicale concernant la conservation des dossiers médicaux, le Conseil national est arrivé à la conclusion qu'un délai justifié de conservation de données médicales supérieures à trente ans, dépend de la nature des données, de la symptomatologie et de l'âge du patient. Une mesure linéaire imposant la conservation illimitée dans le temps de tous les dossiers médicaux synthétisés constituerait une disposition excessive.

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La commission a tenu compte dans l'avis qu'elle a émis, de l'importance de la conservation de données médicales en vue d'études épidémiologiques et de la recherche scientifique. Il est également suggéré d'examiner les possibilités de dépôt de dossiers patients auprès des archives générales du Royaume.
Le Conseil national peut se déclarer d'accord avec le fait que la destruction de certaines données est susceptible de nuire aux études épidémiologiques et à la recherche scientifique, mais il estime d'autre part injustifiée la conservation "aveugle" de données médicales, c'est-à-dire sans avoir déterminé au préalable le but dans lequel certaines données sont conservées. La conservation de données médicales en vue de la recherche épidémiologique ou scientifique ne peut se faire qu'avec l'autorisation du patient informé de la finalité de cette conservation de données. Le Conseil national estime que l'autorisation du patient est également requise pour la conservation de données suivant un mode non identifiable. Ce mode de conservation paraît évident au Conseil national dans le cadre d'études épidémiologiques et scientifiques.

***

Le Conseil national estime devoir en outre souligner que le projet d'avis contient quelques dispositions qui ne contribueront pas à la solution des "réels problèmes logistiques de stockage" pour les hôpitaux, pourtant point de départ du projet d'avis. Ainsi, la commission Télématique recommande que le délai de conservation commence à courir après le dernier contact "avec l'institution". Des visites hospitalières en ambulatoire, par exemple pour la suture d'une plaie ou pour une radio à la demande du médecin généraliste, ont pour conséquence que la totalité du dossier médical doit être conservée de manière illimitée dans le temps si l'intervalle entre ces visites n'est pas de vingt ans.

Il est frappant de voir le projet d'avis toujours évoquer le dossier patient, qui comprend le dossier médical et le dossier infirmier. Pour ce dernier, l'arrêté royal du 3 mai 1999 ne mentionne pas de délai de conservation. L'extension du délai de conservation au dossier infirmier, même si elle est justifiée, augmentera les problèmes de stockage.

En conclusion, le Conseil national estime que le projet d'avis de la commission "Télématique" concernant la conservation à long terme des dossiers des patients par les hôpitaux, n'est pas satisfaisant sur plusieurs points importants et qu'il ne peut dès lors servir de base à la modification de l'article 1er, §3, de l'arrêté royal du 3 mai 1999 relatif au délai de conservation du dossier hospitalier. Le projet d'avis ne tient en effet pas compte des dispositions transitoires de la loi du 10 juin 1998 modifiant certaines dispositions en matière de prescription. Il opte pour une conservation illimitée dans le temps de dossiers patients sous forme synthétique. Il ne respecte pas suffisamment la vie privée du patient dans le cadre de l'utilisation de données médicales pour la recherche épidémiologique et scientifique. Enfin, il ne résout pas non plus les "problèmes logistiques de stockage" des hôpitaux.

Le Conseil national estime que les problèmes logistiques de stockage se résoudront spontanément par l'informatisation du dossier hospitalier et qu'un délai de conservation de trente ans après le dernier contact avec le patient, tel que prescrit par l'article 46 du Code de déontologie médicale, est une règle de conduite simple et claire constituant un bon compromis entre le délai de conservation des dossiers médicaux imposé par la législation et celui nécessité par la continuité des soins. En fonction de la nature des données, de la symptomatologie et de l'âge du patient, certaines données peuvent toujours être conservées plus longtemps, et de même sur un mode non identifiable pour la recherche épidémiologique et scientifique, moyennant autorisation préalable du patient.

Sida25/05/2002 Code de document: a097004
report_problem Voir avis BCN 116 p. 3 (a116001).
Secret professionnel et sida - Information du partenaire

Sur la base d'une note qu'il a établie, intitulée "Sida et secret professionnel", un conseil provincial soulève la question de savoir si l'avis du Conseil national du 16 décembre 2000 ne devrait pas laisser la latitude d'invoquer l'état de nécessité. Dans cet avis, le Conseil national dit que le secret professionnel ne permet pas d'informer au sujet de cette infection transmissible le partenaire d'un patient séropositif pour le VIH si le patient n'en est pas d'accord.

Avis du Conseil national :

Il ressort de la note bien documentée du groupe de travail "Sida et secret professionnel" de votre Conseil que tous les experts consultés par le groupe de travail s'accordent sur le fait que, dans des circonstances exceptionnelles, le médecin devrait pouvoir invoquer l'état de nécessité.

Comme le démontrent des avis antérieurs, le Conseil national estime aussi que le secret professionnel n'a pas un caractère absolu et que dans certaines circonstances d'autres valeurs peuvent prédominer. Il est toutefois essentiel qu'une cause de justification invoquée par un médecin puisse être admise avec une quasi certitude par le juge disciplinaire, par le juge pénal et par la société.

Ainsi la probabilité qu'une cause de justification soit acceptée sera grande lorsqu'il résultera de manière irréfutable du diagnostic que des tiers courent un danger grave et réel compte tenu de la nature de la maladie et du comportement du patient. Il est tout aussi essentiel que des confrères du médecin traitant estiment également, sur la base de leur expérience et de leur connaissance spécifique du problème en question, que l'état de nécessité invoqué justifie de s'écarter des règles du secret professionnel. Il n'est pas besoin de souligner qu’un avis donné par ces confrères après examen du patient aura plus de poids qu’un avis donné sur la base des pièces du dossier médical. Il est de même important de s’interroger si le fait de rompre le secret professionnel ne sera pas préjudiciable au traitement ultérieur du patient ni aux possibilités de traitement de patients atteints de la même affection ou d'une affection similaire, car la communication à des tiers est susceptible d'ébranler la confiance dans la médecine.

Ces principes généraux concernant l'état de nécessité s’appliqueront sans doute dans certains cas de la problématique que vous évoquez. L'état de nécessité étant plutôt exceptionnel, le Conseil national estime qu'il ne convient pas d'y faire référence explicitement dans des avis à caractère général.

Le Conseil national tient à remercier le Conseil provincial du Brabant d'expression néerlandaise et son groupe de travail "Sida et secret professionnel" pour l'étude approfondie consacrée au problème soulevé.

Vie privée16/02/2002 Code de document: a095001
report_problem Cet avis a été remplacé par l'avis BCN 105 p. 2, a105001, en ce qui concerne le secret professionnel après le décès du patient.
Avis du Conseil national sur l'avant-projet de loi relatif aux droits du patient

En sa séance du 16 février 2002, le Conseil national a examiné l'avant-projet de loi relative aux droits du patient tenant déjà compte de l'avis émis en la matière par la section de législation du Conseil d'Etat et de l'avis de la Commission de la protection de la vie privée. Le point de départ de l'avant-projet est la Note conceptuelle Droits du patient établie antérieurement par le cabinet du ministre de la Protection de la consommation, de la Santé publique et de l'Environnement. Le Conseil national avait émis un avis sur cette Note le 17 février 2001. Le Conseil national maintient les grandes lignes de cet avis qui est l'émanation de la déontologie médicale en vigueur et forme un tout avec le présent texte. L'avis du 17 février 2001 est qualifié de critique positive dans l'exposé des motifs de l'avant-projet examiné. Dans ce même état d'esprit, le Conseil national tient à attirer l'attention du ministre compétent et des Chambres législatives sur les considérations et observations suivantes.

CHAMP D'APPLICATION (articles 2-4)

Dans son avis du 17 février 2001, le Conseil national demandait déjà d'accorder l'attention nécessaire aux définitions larges et inhabituelles, dans le texte, des notions de "patient" et de "soins de santé" et aux conséquences qui en découlent. Ainsi, il semble que des personnes examinées pour le compte de tiers par des médecins qu'elles n'ont pas librement choisis, ont les mêmes droits que ceux dont disposent les patients à l'égard des médecins qu'ils ont librement choisis. Il importe que le législateur se prononce sans ambiguïté notamment sur le droit de consultation de dossiers médicaux constitués par des médecins inspecteurs, par des médecins-conseils de mutualités et de sociétés d'assurances.

Il est curieux que la loi sur les droits du patient ne soit pas d'application au don d'organe par un donneur vivant comme si la loi du 13 juin 1986 sur le prélèvement et la transplantation d'organes et ses nombreux arrêtés d'exécution offraient déjà toutes les garanties prévues dans le présent avant-projet. On lit dans l'exposé des motifs qu'il n'est en l'occurrence pas question de soins relatifs à la santé du donneur (exposé des motifs p.13/13).

Il est frappant que, suite à l'objection soulevée par le Conseil d'Etat en matière de compétence de l'autorité fédérale et des communautés, le texte examiné se borne à traiter des droits du patient à l'égard des praticiens professionnels des soins de santé (arrêté royal n° 78 du 10 novembre 1967). Il n'y est plus question des droits du patient à l'égard des établissements de soins. Ceci fait aussi disparaître l'idée initiale d'une présomption de responsabilité centrale des établissements de soins, susceptible de beaucoup contribuer à la sécurité juridique du patient. Ce qui est regrettable dans ce dédoublement, c'est qu'il contrarie la mission commune des dispensateurs de soins, ainsi que l'objectif poursuivi par la loi coordonnée sur les hôpitaux de 1987 d'intégration des médecins hospitaliers.

En outre, il n'est pas exact de dire que les droits du patient seront toujours d'application à l'égard des praticiens professionnels dont question dans l'arrêté royal n° 78. Il est en effet peu vraisemblable que le texte examiné, lorsqu'il sera devenu loi, donne le droit au patient d'interpeller le médecin-chef d'un hôpital. Or ceci peut être très important pour lui puisque ce praticien est responsable notamment de l'organisation et de la coordination de l'activité médicale, des services de garde et de la conservation des dossiers. Dans certaines situations, il sera même le seul à y avoir accès. En tant qu'organe de l'hôpital, le médecin-chef n'entre pas dans le champ d'application de la loi en projet. Ce qui vaut pour lui, vaut tout autant pour les médecins-chefs de service dans les hôpitaux, les directeurs médicaux des centres de santé mentale, les médecins coordinateurs dans les MRS, et pour tous les médecins assumant une fonction de direction au nom de l'établissement de soins. Le patient devra à chaque fois vérifier dans quelle fonction le médecin intervient, pour savoir s'il pourra invoquer ou non les droits du patient. On peut se demander aussi dans quelle mesure des médecins en formation seront compris dans le champ d'application de la future loi puisqu'ils doivent travailler sous la responsabilité de leur maître de stage.

Le Conseil national peut dès lors souscrire à la suggestion formulée par le Conseil d'Etat, d'un accord de coopération entre l'autorité fédérale et les communautés, apportant une solution aux difficultés qui découlent de l'exercice par les autorités de compétences complémentaires (avis 32 299/3, point 5., p.25-26).

DROIT A LA PRESTATION DE SERVICES DE QUALITE (article 5)

Le Conseil national confirme sur ce point son avis du 17 février 2001 et les dispositions de la déontologie médicale visant à une dispensation de soins de qualité.
Bien que l'avant-projet de loi se borne aux droits individuels du patient et fasse référence à la Constitution pour le droit social fondamental aux soins de santé, il n'en reste pas moins qu'une dispensation de soins de qualité n'est pas uniquement fonction des compétences et du dévouement du médecin et des autres praticiens des soins de santé. Il est important que chaque discipline dispose d'effectifs et de moyens suffisants pour la réalisation de ses objectifs nobles.

DROIT AU LIBRE CHOIX DU PRATICIEN PROFESSIONNEL (article 6)

Etant donné le champ d'application restreint de l'avant-projet, le droit de librement choisir un dispensateur de soins n'est plus garanti au patient et est limité à un droit de librement choisir le praticien professionnel. Il est frappant de constater combien l'exposé des motifs s'étend sur les limitations imposées par la loi à cette liberté. Le Conseil national aurait trouvé plus indiqué d'accentuer les possibilités de limitation en cas de libre choix. Ce n'est pas parce qu'un patient effectue un séjour involontaire dans un contexte déterminé qu'un choix limité ne peut être offert, même si cela excède effectivement en grande partie les compétences des praticiens professionnels qui sur ce plan, sont dépendants du pouvoir organisateur. En outre, il est certain que la déontologie a toujours prôné que le libre choix des patients ne soit pas limité aux praticiens professionnels de la structure dans laquelle il est admis ou à laquelle il fait appel. Il n'est dès lors pas exact de dire qu'un patient n'a pas de choix lorsque n'exerce au sein de la structure qu'un seul praticien professionnel de la discipline dont le patient a besoin.

DROIT A L'INFORMATION (article 7)

Etonnamment, l'exposé des motifs fait référence, sur le plan de la communication entre le patient et son médecin librement choisi, à la législation sur l'emploi des langues.

En outre, se pose la question s’il ne serait pas souhaitable d'imposer au patient des limites quant à son droit à l'information et à la confirmation écrite de celle-ci. Il est évident que ceci peut conduire à d'énormes abus et à la décision par le médecin de cesser la prise en charge du traitement.

Le Conseil national ne peut non plus omettre de souligner que l'avant-projet ne prévoit en fait aucune qualification de la personne de confiance désignée par le patient. A ce sujet il faut souligner que la relation de confiance ne doit pas seulement exister entre le patient et la personne désignée mais doit pouvoir se nouer aussi entre cette personne et le praticien professionnel. Ainsi, on peut difficilement s’imaginer qu'un médecin ayant de bonnes raisons de douter d'une personne de confiance, puisse lui confier une information confidentielle à propos du patient.

DROIT AU CONSENTEMENT (article 8)

En ce qui concerne le droit au consentement, le Conseil national ne peut pas admettre qu'un médecin soit obligé de respecter le refus écrit du consentement à une intervention déterminée, rédigé lorsque le patient était encore à même d'exercer ses droits (art.8, §4, quatrième alinéa). Le Conseil national maintient le point de vue exposé dans son avis du 17 février 2001 formulé comme suit:

"En revanche, le Conseil national estime que le dispensateur de soins doit sérieusement tenir compte à la fois de l'avis de la personne de confiance et d'une déclaration de volonté du patient par écrit. Ces éléments peuvent même être décisifs en cas d'hésitation entre l'abstention ou l'intervention, mais il serait inadmissible de laisser mourir des personnes lorsqu'il y a de fortes chances qu'un traitement déterminé donne un bon résultat. Il est cependant indiqué, avant de prendre une décision dans de telles circonstances, que le médecin responsable demande l'avis d'un confrère et/ou de l'équipe multidisciplinaire traitante, et qu'il se concerte aussi avec la famille le cas échéant."

Ce point de vue est repris intégralement dans l'exposé des motifs. Le Conseil national note avec satisfaction que le texte actuel ne retient plus le respect obligatoire de la position d'une personne de confiance désignée par le patient. Toutefois, il maintient son affirmation qu'une déclaration anticipée rejetant une intervention pourrait s'avérer extrêmement nuisible pour le patient et difficile pour le médecin. En effet, la valeur de la déclaration anticipée peut a posteriori conduire à de sérieuses discussions avec les proches parents, à l'exemple de ce qui se produit dans les querelles testamentaires.

Un exemple illustrant la position du Conseil national.
Un patient pourrait inscrire sur papier qu'il refuse à quatre-vingts ans d'être placé sous perfusion et alimenté par sonde s'il est atteint de confusion, s'il a perdu le sens du temps et de l'espace et ne reconnaît plus ses proches parents. Un tel tableau clinique peut être causé par une affection somatique pouvant être bien soignée et peut même être la manifestation d'une dépression grave mais néanmoins parfaitement curable. On ne peut demander à un médecin placé devant ce tableau clinique, de se croiser les bras et de laisser mourir un patient susceptible de trouver encore bien des satisfactions dans l'existence. Lorsqu'en revanche, une affection incurable sera à la base du tableau décrit, le médecin respectera la déclaration anticipée écrite, conformément à l'avis du Conseil national du 17 février 2001.

Dans son avis, le Conseil d'Etat souligne que l'article 9 de la Convention sur la biomédecine dispose que les "souhaits" du patient doivent être pris en compte tout en précisant que cette convention n'a pas été ratifiée par la Belgique et qu'elle n'y est donc pas obligatoire. Cette disposition conventionnelle semble n'imposer que la prise en compte de ces souhaits et non l'obligation de les respecter de manière effective (Avis 32.299/3 point 14., p. 29). Ces conceptions rejoignent complètement le point de vue du Conseil national.

Lorsque comme prévu à l'article 8, §4, un patient refuse ou retire son consentement, le médecin a la possibilité de se dégager de sa mission ainsi qu'exposé aux articles 28 et 29 du Code de déontologie médicale. Le médecin doit évidemment en aviser le patient, assurer la continuité des soins et fournir toutes les informations utiles au médecin qui lui succède. Il est indiqué de faire figurer dans le texte qu’à défaut de consensus avec le médecin consulté, le patient doit désigner un médecin disposé à prendre le relais.

A cet égard, il convient de souligner qu'il sera loisible au médecin de se dégager de sa mission dans le respect des conditions précitées, s'il estime ne pas pouvoir établir de relation constructive avec la personne de confiance désignée par le patient ou s'il estime impossible de mener avec le représentant du patient un dialogue pouvant conduire à un consensus.

Le Conseil national ne peut être d'accord avec l'article 8, §1er, 3ème alinéa et le commentaire dans l'exposé des motifs qui portent atteinte à la relation de confiance puisque le patient peut s'opposer à ce qu’un consentement verbal par lui exprimé soit noté au dossier.

DROITS RELATIFS AU DOSSIER DU PATIENT (article 9)

DROIT DE CONSULTATION (article 9,§2)

En ce qui concerne le dossier médical, le Conseil national maintient son point de vue tel que formulé dans ses avis des 23 janvier 1999 et 17 février 2001 concernant les droits du patient.

Si pour le Conseil national, le droit de consultation du dossier médical par le patient découle logiquement de l'obligation pour le médecin d'informer ce patient, il ne peut être d'accord avec la finalité de la consultation du dossier médical par le patient telle que décrite dans l'exposé des motifs. En effet, même lorsqu'il y a suspicion d'une faute médicale, la communication et le dialogue qui en découle, doivent être la finalité de la relation praticien-patient. C'est essentiel pour par exemple commenter des pièces pertinentes d'un dossier médical. Il existe là un processus continu d'information et de consultation qui ne saurait s’aliéner par l’observation d'un délai d’attente qu’il soit de quinze ou de quarante-cinq jours.

C'est seulement lorsqu'une information maximale n'a pas donné de résultat satisfaisant et qu'une éventuelle intervention de la fonction de médiation ne conduit pas à une solution, que la consultation du dossier médical devient un droit contraignant du patient.

DROIT DE PHOTOCOPIE (article 9, §3)

Le droit d'obtenir copie en tout ou partie du dossier le concernant, ainsi que prévu à l'article 9, §3, du texte examiné est un des points ardus dans l'exercice des droits du patient.

Dans son avis du 17 février 2001, le Conseil national estimait:

"Il n'est pas impensable que des tiers viennent demander, voire exiger du patient une copie de son dossier, par exemple lors d'un examen d'embauche, de la souscription d'un emprunt, de la conclusion d'un contrat d'assurance ou du règlement d'un sinistre. Il s'impose par conséquent de prévoir que des tiers ne seront pas autorisés à demander une copie du dossier aux patients."

Le Conseil national apprécie l'attention particulière que le texte examiné consacre aux risques que court le patient lui-même en usant de la possibilité qui lui est offerte d'obtenir une copie.

La solution préconisée sera difficilement réalisable dans la pratique. Il ne sera pas toujours aisé pour le praticien professionnel de déceler si une pression est exercée sur son patient pour qu'il demande une copie de son dossier afin de la communiquer à des tiers. En cas de refus d'une copie, des situations conflictuelles apparaîtront si le patient fait valoir ses droits. C'est pourquoi le Conseil national propose un droit indirect du patient à obtenir des photocopies. Ce droit peut être exercé par le médecin généraliste, par le médecin traitant ou par le médecin choisi par le patient. Aucune photocopie ne peut non plus être exigée de ce médecin, tout en lui étant évidemment loisible, qu'il soit médecin traitant ou intermédiaire, de remettre au patient les photocopies demandées lorsqu'il estime justifié de le faire. Lorsqu'il l'estime indiqué, le médecin a la possibilité, pour responsabiliser le patient, d'inscrire sur la copie qu'il s'agit de données médicales à caractère personnel n'étant pas destinées à des tiers. Ceci permet d'empêcher que des tiers n'obtiennent l'accès au dossier en faisant pression sur le patient dans la mesure où ce dernier ne peut lui-même exiger de photocopie. Par son droit de consultation directe et un droit indirect de photocopie, le patient aura ainsi toutes les informations à sa disposition en cas de (menace de) conflit.

COMPOSITION

Comme le Conseil national se le proposait dans son avis du 17 février 2001, il a approfondi la question de la composition du dossier médical. Il est indiqué d'établir une distinction entre les divers types de dossiers qui en raison de leur composition auront des implications différentes dans leur consultation. Ainsi, il y a par exemple des dossiers médicaux constitués en un bref laps de temps dans une situation de danger de mort et comportant des résultats d'examens faisant appel à la technologie de pointe et des rapports d'interventions invasives de plusieurs médecins, dont la consultation n'a de sens qu'accompagnée des commentaires nécessaires. Il n'y a pas de comparaison entre ces dossiers et les dossiers de longue durée des médecins généralistes, comportant des données arrivées au compte-gouttes, de sorte que tenir le patient au courant de la portée de toutes les constatations, ne posera guère de problèmes. D'ailleurs, bon nombre de médecins généralistes remettent à leurs patients, lorsqu'il n'y a pas de contre-indication thérapeutique à cela, des photocopies des résultats les plus importants d'examens techniques et de rapports de spécialité. Ceci augmente l'implication du patient dans l'évolution de son état, le rendant davantage responsable de sa santé qu'il surveillera plus scrupuleusement en concertation avec son médecin généraliste.

Pour le dossier hospitalier, le point de départ demeure l'arrêté royal du 3 mai 1999. Celui-ci décrit les renseignements médicaux minimaux que doit comporter le dossier hospitalier. Ce ne sont du reste pas seulement les résultats d'une série d'examens tels que précisés à l'article 2, §1er, 3°, qui font partie du dossier médical mais aussi les documents sur lesquels les protocoles sont fondés, et ce, quel que soit le lieu où ces documents sont conservés au sein de l'établissement de soins. Font également partie du dossier médical, la lettre d’envoi ainsi que toutes les données pertinentes communiquées au médecin traitant dans le cadre de la continuité des soins. Enfin, le dossier médical comprend tous les documents prévus par le texte examiné. Hormis le cas de l'exception thérapeutique, toutes ces données peuvent être soumises au patient. Il est indiqué que le patient reçoive à cet égard les explications nécessaires.

Le Conseil national estime inacceptable que le texte examiné préconise la consultation indirecte des "annotations personnelles". Les annotations personnelles, telles que définies dans l'exposé des motifs, ne font pas partie du dossier du patient parce qu'elles ne sont pas nécessaires à la continuité des soins. Elles ne sont pas transmises au médecin qui succède, lequel doit faire lui-même l'effort intellectuel nécessaire sur la base des données transmises du dossier et s'en remettre à sa propre expérience qu'il garde vive le cas échéant au moyen de notes personnelles. Un médecin a droit à sa propre idée et à ses impressions personnelles à propos de certains problèmes, mais tout aide-mémoire ou note concernant une piste de réflexion ne peut en l'occurrence faire partie du dossier. Si le présent avant-projet devient une loi, les médecins continueront de réfléchir aux problèmes des patients qui leur sont confiés et à apprendre par expérience certaines choses qu'ils continueront de noter comme aide-mémoire. Mais ils devront le faire suivant un mode non identifiable afin qu'il ne puisse être porté atteinte à l'intérêt de leurs patients à travers leurs notes.

En ce qui concerne les données hétéro-anamnestiques, il y a lieu de faire une distinction selon qu'il s'agit de données fournies avec le concours du patient ou de données confidentielles communiquées à son insu. Si ces dernières sont importantes pour la continuité des soins, elles seront reprises dans le dossier médical sans aucune mention à propos de leur source. Si elles ne sont pas importantes pour la continuité des soins, le médecin peut les détruire ou les conserver à titre d'annotations personnelles moyennant respect de la modalité précitée.

ATTITUDE

L'important est que le médecin traitant et le patient soient conscients, lors de la constitution du dossier médical, que le dossier est en premier lieu un outil essentiel au diagnostic, à la continuité et à la qualité des soins. Le médecin devra d'autre part être conscient que le regard du patient restera attaché à la composition du dossier et aux constatations qu'y notera le praticien.

LE DOSSIER APRES LE DECES (article 9, §4)

L'article 9, §4, de l'avant-projet prévoit la consultation du dossier médical d'une personne décédée, par le praticien professionnel désigné par le demandeur, pour autant que la demande soit suffisamment motivée et spécifiée et que le patient ne s'y soit pas opposé expressément. Le praticien professionnel désigné aurait également accès aux annotations personnelles. En ce qui concerne ce dernier point, le Conseil national renvoie à ce qui a déjà été dit à ce sujet.

Une commission a été chargée par le Conseil national d'étudier le secret professionnel après le décès du patient et le problème connexe, de la consultation de son dossier médical. La commission est arrivée aux conclusions suivantes.

Le principe contenu à l'article 65 du Code de déontologie médicale est maintenu dans les grandes lignes: la mort du malade ne relève pas le médecin de son secret professionnel et les héritiers ne peuvent l'en délier ni disposer du dossier de la personne décédée.
Mais le médecin traitant peut, comme il est déjà d'usage à l'heure actuelle, fournir à l'époux, à l'épouse, au partenaire ainsi qu'aux proches parents toutes informations concernant la cause de la mort et les circonstances du décès. A leur demande, le médecin traitant peut communiquer à leur médecin généraliste et/ou à leur médecin traitant toutes les données pouvant être importantes pour leur état de santé.

Des informations sur la cause de la mort ne peuvent être fournies que si la personne décédée ne s'y est pas opposée, que si elles ne portent pas atteinte à sa mémoire et ne concernent pas un tiers qui doit être protégé.

En ce qui concerne la consultation du dossier médical après le décès, par un médecin désigné, les intérêts matériels des proches parents ou de tiers comme des contestations à propos de contrats souscrits par le défunt ou à propos de ses dispositions testamentaires, sont des motivations inadmissibles.

Le Conseil national estime que cela doit figurer dans le texte afin que la volonté implicite des personnes défuntes soit respectée. Qui de son vivant pourrait admettre l'idée que le secret médical soit levé après son décès pour contester des contrats d'assurance auxquels il ou elle a souscrit? De plus, le fait pour des personnes âgées d'apprendre que leur dossier médical sera utilisé après leur mort pour juger de leurs dernières dispositions de volonté, portera sérieusement atteinte à leur confiance dans la médecine. Ces problèmes doivent être tranchés sans briser la confidentialité des données médicales.

Le Conseil national estime en revanche qu'un médecin ne peut invoquer le secret professionnel pour étouffer une éventuelle faute médicale. Si le médecin constate que la méfiance persiste à l'égard de sa personne en dépit d'une information détaillée des proches précités, il a la possibilité de faire usage des documents essentiels concernant le décès dans le dossier médical pour éclairer l'information. Si cela non plus ne conduit pas à une solution, il a la possibilité de demander la désignation d'un médecin qui parcourra avec lui toutes les pièces du dossier médical de la personne décédée pertinentes en la matière. A sa demande, des photocopies de ces pièces seront remises à ce médecin désigné. Si un consensus fait défaut à ce sujet, ledit médecin désigné s'adressera à la juridiction compétente pour que soit désigné un médecin qui tranchera le différend.

DROIT A LA PROTECTION DE LA VIE PRIVEE (article 10)

Le texte examiné affirme que le patient a droit à la protection de sa vie privée, notamment en ce qui concerne les informations liées à sa santé (article 10, §1er). Cette information est principalement conservée au dossier médical. Il est étonnant que le texte examiné ne parle pas de la saisie de dossiers médicaux. Dans son avis du 17 février 2001, le Conseil national écrivait:

"A cet égard, le Conseil national attire spécialement l'attention du législateur sur la saisie de dossiers de patients par les juges d'instruction. Il est évident que rien ne s'oppose à la saisie lorsque le suspect est le médecin, mais elle est selon le Conseil national, inconcevable lorsque le suspect du délit est un patient. Les données confiées par un patient dans le cadre de son traitement ne peuvent être utilisées contre lui. Ceci réduirait à néant des relations de confiance péniblement construites avec des patients demandant et nécessitant de l'aide, souvent en raison de troubles graves du comportement. Une initiative législative devrait combler cette lacune dans la protection des droits du patient. Pour être complet, il faut ajouter que le Conseil national estime que, devant un comportement inquiétant de son patient, le médecin a la possibilité d'invoquer l'état de nécessité."

Le Conseil national a été confronté à plusieurs reprises au problème de la saisie de dossiers médicaux d'auteurs de délits par des juges d'instruction, et ce, parfois uniquement pour une enquête de moralité. Au regard des attributions des juges d'instruction, seules les Chambres législatives peuvent résoudre ce problème. La loi relative aux droits du patient en est l'occasion choisie. Sans affirmer que la médecine soit à l'heure actuelle en mesure de remédier à tous les troubles graves du comportement, le Conseil national estime que les auteurs de délits chez qui une aide professionnelle peut apporter une amélioration du comportement, doivent pouvoir bénéficier de cette opportunité. Celle-ci ne peut être hypothéquée par la saisie des confidences notées par les prestataires de soins, ce qui est susceptible d’annihiler toute relation de confiance essentielle au traitement.

DROIT A LA MEDIATION EN MATIERE DE PLAINTES (article 11)

Dans son avis du 17 février 2001, le Conseil national déclarait que l'ouverture dans la communication avec le médiateur est un principe auquel il peut être souscrit intégralement, mais que le législateur devrait veiller, dans l'élaboration d'une fonction de médiation, à ce que ni le médecin ni le patient ne deviennent les dupes de cette ouverture. Il est évident que l'exécution par le médecin de son devoir légal d'information ne peut avoir de répercussions négatives sur ses obligations à l’égard de son assureur. Dans le texte examiné, le problème est reporté à un arrêté délibéré en conseil des ministres par lequel le Roi fixera les conditions auxquelles la fonction de médiation doit répondre, notamment sur le plan du secret professionnel. Ceci exclut une législation spécifique nuancée.

Il convient surtout de noter que la restriction du champ d'application, telle qu'exposée dans ce texte, restreint aussi la compétence de la fonction nécessairement indépendante de médiation. Celle-ci est en effet limitée au traitement de plaintes en rapport avec la violation des droits du patient par les praticiens professionnels, et ce, uniquement lorsque leur contact avec le patient n'a pas eu lieu dans le cadre d'une fonction de direction dans l'établissement de soins. Une base légale d'intervention de la fonction de médiation fait défaut pour le cas de plaintes de patients à l'égard de l'établissement de soins. Il faut ajouter que souvent il n’apparaît pas clairement si la plainte est dirigée contre un praticien professionnel, contre un établissement de soins ou contre les deux. Cette constatation démontre que la restriction du champ d'application aura d'importantes conséquences par rapport à la fonction de médiation et aux attentes du patient qui ne pourront dès lors être rencontrées que partiellement.
Le Conseil national constate qu'aucune médiation des plaintes n'est prévue pour la relation patient-médecin généraliste.

REPRESENTATION DU PATIENT (articles 12-15)

Dans son avis du 17 février 2001, le Conseil national se déclarait frappé par l'absence de critères pour être désigné comme personne de confiance - s'agissant à présent "du mandataire désigné par le patient". Le texte actuel aussi prévoit trop peu de garanties du libre choix dans la désignation du mandataire, et la durée du mandat semble demeurer illimitée. Dans notre société existent des groupements qui n'accordent guère de liberté de décision à leurs membres; le soi-disant libre choix d'un patient peut avoir été dicté par d'autres impératifs que sa santé. De plus, les mises en situation virtuelles de maladie ne sont pas comparables, ne serait-ce qu'émotionnellement, avec une situation réelle: raison de plus pour ne pas délibérément s'en tenir à ce qui a été pensé et décidé avant de vivre une situation déterminée même crainte ou mal appréhendée par l'intéressé.

En revanche, le Conseil national estime positif que le mandataire désigné par le patient ne puisse plus empêcher qu'une intervention vitale ait lieu lorsque l'intéressé n'est plus capable de donner lui-même son consentement ou de faire connaître son opposition. Il ne peut être admis que cette intervention ne puisse avoir lieu parce que le mandataire désigné viendrait démontrer par des témoins, un enregistrement sur bande ou une cassette vidéo que ceci va à l'encontre de la volonté expresse du patient qui à ce moment précis, n'est pas capable de faire connaître lui-même sa volonté (article 15, §2 et exposé des motifs s'y rapportant).
Le Conseil national a déjà souligné plus haut le caractère inacceptable dans ces cas du refus écrit d'une intervention déterminée, et ce d'autant plus lorsqu'il n'existe même pas d'écrit du patient.

Tant le texte de l'avant-projet que l'exposé des motifs donnent l'impression saisissante qu'il existerait une situation de conflit latent et un climat de méfiance entre le patient et le médecin qui ne serait capable de défendre les intérêts du patient que si les représentants font défaut ou se querellent.

MODIFICATION DE L'ARTICLE 95 DE LA LOI DU 25 JUIN 1992 RELATIVE AU CONTRAT D'ASSURANCE TERRESTRE (article 19)

L'exposé des motifs du texte examiné souligne le caractère défavorable pour le patient de l'article 95 de la loi sur le contrat d'assurance terrestre. Les assureurs refusent parfois le paiement aussi longtemps que l'information la plus approfondie sur l'assuré n'a pas été fournie par le médecin.
Le Conseil d'Etat se demande si l'omission proposée de la première phrase de l'article 95 ne serait pas susceptible dans certains cas d'être préjudiciable au patient.

Sur la base d'une longue expérience du problème, le Conseil national estime qu'une distinction doit être faite entre la conclusion et l'exécution du contrat. Ainsi, il est indiqué que le candidat-assuré soit examiné par un médecin désigné par l'assureur afin que le risque à assurer puisse être évalué. Il n'est que trop souvent constaté que cet examen n'a pas lieu et que l'assureur attire le candidat en se limitant à exiger une déclaration sur l'honneur de celui-ci.

Lorsqu'il y a lieu à exécution du contrat d'assurance, des questions surgissent à l'infini sur l'histoire médicale du patient. C'est pourquoi le Conseil national pense pouvoir affirmer ce qui suit : un examen médical par un médecin désigné par l'assureur est indiqué pour la conclusion d'un contrat. Pour ce faire, le médecin pourra se fonder uniquement sur l'anamnèse de l'état de santé actuel du candidat-assuré et non sur des techniques d'analyse génétique propres à déterminer son état de santé futur.
Pour autant que l'assureur justifie de l'accord préalable de l'assuré, le médecin de celui-ci transmet au médecin-conseil de l'assureur un certificat établissant la cause du décès sans indication du début de la maladie.

Tous les certificats médicaux délivrés en exécution d'un contrat se limitent à une description de l'état de santé actuel, sans aucune information sur les antécédents.

Ceci permettra de mettre un terme à la transmission obligatoire sans restriction de données aux assureurs qui ne font pas examiner les candidats-assurés lors de la conclusion d'un contrat.

CONCLUSION

Dans le cadre d'une évaluation globale du texte analysé, le Conseil national estime que le concept initial des droits du patient a perdu en valeur et en force par la restriction de son champ d'application et la réduction de la fonction de médiation. Le texte gagnerait en clarté si le contenu des termes utilisés était plus précis (ex.: "risque" (art.8, §2), "des prestations de qualité répondant à ses besoins" (art. 5), "en temps opportun" (art.8, §3), …).

Ceci n'enlève rien au renforcement par le projet de l'égalité entre patients et praticiens professionnels. Le droit à une prestation de service de qualité, au libre choix du médecin traitant, à l'information, à la consultation du dossier du patient et le droit au consentement y contribueront, encore qu'une déclaration écrite anticipée contraignante ne soit pas un avantage.

Il s'impose de souligner aussi que le texte examiné ne renforce pas suffisamment les droits du patient à l'égard des tiers. La garantie que ce qu'il confie à ses médecins traitants ne sera jamais utilisé contre lui, fait défaut. Une modification adéquate de l'article 95 de la loi sur le contrat d'assurance terrestre, une interdiction de saisie des dossiers d'auteurs de délits et un droit seulement indirect de photocopie évitant une consultation par des tiers, constitueraient sur ce plan des progrès importants.

Avis du Conseil national concernant la Note conceptuelle droits du patient (17 février 2001), BCN n° 91, mars 2001, p. 3.

Le Conseil national de l'Ordre des médecins a examiné la Note conceptuelle Droits du patient émanant du cabinet de la ministre de la Protection de la consommation, de la Santé publique et de l'Environnement et transmise par la présidente de la commission de la Santé publique, de l'Environnement et du Renouveau de la société de la Chambre des représentants, à l'occasion des auditions organisées par cette commission. Le point de vue du Conseil national y a été exposé le 9 janvier 2001 par son président et ses vice-présidents.

Le Conseil national maintient son point de vue tel que formulé dans son avis du 23 janvier 1999 (Bulletin du Conseil national n° 83, mars 1999, p.19) émis à propos de l'avant-projet de loi relatif aux droits du patient du précédent gouvernement. Cet avis dit notamment qu'une consécration par le législateur sera utile au respect de la déontologie médicale, laquelle doit réagir rapidement aux évolutions sociales, techniques et médicales dans la société.

Les droits du patient présentés dans la Note conceptuelle de manière claire et ordonnée correspondent à bon nombre de règles déontologiques prônées depuis des années par le Conseil national de l'Ordre. Mais il s'impose d'ajouter immédiatement qu'une législation ne peut étouffer la relation de confiance médecin-patient, laquelle doit continuer d'évoluer vers un dialogue ouvert à l'intérieur d'un modèle de concertation, ce qui constitue une garantie du respect de la personne humaine et de son autonomie. Le souci à juste titre toujours plus grand d'une traduction des intérêts du patient en termes de droits ne peut conduire à une "préoccupation artificielle" avec des automatismes linéaires. Il faut surtout tenir compte de l'aspect concret et du caractère très divergent des missions des différentes disciplines des dispensateurs de soins, ainsi que des schémas d'attentes qui s'y rapportent.

En dépit des avantages qu’une loi peut apporter, demeurent indispensables éducation et évaluation qui seules permettront d'induire le changement de mentalité qui est espéré. A titre d'exemple, l'enseignement et l'entraînement dispensés au long du cursus universitaire de pré- et post- graduat y contribuent certes autant que les initiatives prises par les organisations de médecins et les conseils provinciaux soucieux de remplir leur mission préventive, sans oublier les "moments de parole" organisés dans les unités de soins et qui rassemblent les intervenants.

Champ d'application

Il semble ressortir de la Note conceptuelle que la notion de patients est utilisée dans son sens le plus large. On pourra en déduire que seront mêmement concernés ceux qui sont examinés par un médecin contrôleur, un médecin du travail ou d'assurances ou dans le cadre de l'inspection scolaire, voire des consultations prénatales.
Il importera d'examiner si les dispositions relatives aux droits énoncés sont applicables à ces diverses situations.

Droit à la prestation de services de qualité

L'article 34 du Code de déontologie médicale dispose que tant pour poser un diagnostic que pour instaurer et poursuivre un traitement, le médecin s'engage à donner au patient des soins attentifs, consciencieux et conformes aux données actuelles et acquises de la science. Dans sa lettre du 24 septembre 1997 à l'ancien ministre de la Santé publique et des Pensions, au sujet des médecines non conventionnelles, le Conseil national non seulement attirait l'attention sur la nécessité, avant d'initier un acte à visée thérapeutique, de poser un diagnostic chez tout patient qui consulte et ceci quelle que soit la pathologie présentée, mais ajoutait que seul le médecin est qualifié à cette fin en raison de sa formation scientifique longue et contrôlée et de sa formation clinique sans cesse réévaluée. Dans l'annexe à la Note conceptuelle, il est fait référence aux "normes en vigueur" pour des prestations de qualité. Le Conseil national estime que ceci n'est pas possible sans l'apport diagnostique du médecin.

Droit au libre choix du prestataire de soins

Le Conseil national constate avec satisfaction la place centrale accordée dans la Note conceptuelle au droit du libre choix du dispensateur de soins, et ce par contraste avec l'avant-projet du gouvernement précédent dans lequel ne figurait pas ce principe déontologique de base tel que formulé à l'article 27 du Code. Toutefois, le Conseil national se demande s'il est opportun de donner dès le départ aux patients des informations à propos des relations juridiques existant dans une structure de soins. Le fait d'apporter systématiquement cette information, qui peut évidemment être fournie à la demande, pourrait susciter l'impression chez le patient que les modalités relatives à la responsabilité sont plus importantes que la dispensation des soins.

Sur ce point, il y a lieu de remarquer en outre que les « ultra-spécialisations » sont nécessaires à la qualité des soins d'une part mais qu'elles limitent les possibilités de choix du patient, même dans un grand hôpital. Il est par conséquent extrêmement important que le médecin référant tente d'évaluer exactement qui sera supposé être le principal soignant afin de pouvoir en discuter avec le patient avant de le référer.

Droit à l'information sur l'état de santé

Le droit à l'information est aussi une transposition des articles 29 et 33 du Code de déontologie médicale. Le principe proposé est celui de la communication à temps par le médecin du diagnostic et du pronostic, en tenant compte lors de l'information de l'aptitude du patient à la recevoir et de l'étendue de l'information que celui-ci souhaite.

Le Conseil national estime que l'obligation d'informer et le droit du patient à l'information doivent conduire à un dialogue ouvert dans lequel médecin et patient recherchent ensemble la meilleure solution au problème posé. Dans ce dialogue, le patient a la possibilité de poser des questions, d'exprimer ses craintes et ses attentes. Le médecin de son côté, propose des solutions possibles en s'appuyant sur sa connaissance de l'être humain et de la médecine. Mais le médecin aussi attend de son patient toutes les informations susceptibles d'avoir de l'importance dans les choix à faire.

A chaque fois qu'a été soulignée l'importance du dialogue, l'on ne s'est peut-être pas encore suffisamment arrêté à la nécessité d'effectifs suffisants à tous les échelons et adéquatement rémunérés. Un manque de personnel et de temps n'est pas une excuse valable dans un Etat-providence.

Droit au consentement

La Note met à juste titre l'accent sur le consentement implicite qui est certainement la règle générale dans la pratique quotidienne du médecin généraliste mais aussi du spécialiste, quoique ceci puisse poser des problèmes si la relation médecin-patient se "juridicise". Il est évidemment important qu'une autorisation soit explicitement demandée par le médecin lorsque les examens et traitements proposés comportent un risque réel. Le médecin fera bien à cet égard de souligner qu'il peut garantir des soins optimaux mais pas toujours le résultat escompté.

Droits relatifs au dossier du patient

Le droit de consultation directe du dossier médical par le patient se situe dans le prolongement de l'obligation d'information et de la communication ouverte préconisée. La déontologie médicale prévoit à l'article 42 du Code de déontologie médicale que le médecin peut remettre au patient, lorsque celui-ci en fait la demande, les éléments objectifs du dossier médical. La Note conceptuelle précise par ailleurs que "les annotations personnelles du praticien professionnel et les données concernant des tiers n'entrent pas dans le cadre de ce droit de consultation." Le dossier médical comporte en outre d'autres données encore qui ne sont considérées ni comme "données objectives" ni comme entrant dans la catégorie des données qui suivant la Note conceptuelle sont exclues du droit de consultation. Des exercices de réflexion et une concertation seront à chaque fois nécessaires pour déterminer dans quelle catégorie se range une donnée du dossier médical. L'article 2 de l'arrêté royal du 3 mai 1999 qui détermine les documents et renseignements minimaux que doit comporter le dossier médical dans un hôpital, constituera une référence en la matière et la question peut déjà être soulevée de savoir si les données hétéro-anamnestiques sont des données ayant trait à des tiers.

Jusqu'à présent, le dossier médical était un outil de travail du médecin établi en fonction de la continuité et de la qualité des soins. Il doit par conséquent être évité que la qualité du dossier ne souffre du droit de consultation du patient. La transmission de données entre médecins sera probablement plus rationnelle et il faudra quelque temps aux médecins pour développer un style de communication n'ayant pas de répercussions sur le courant de l'information à présent que le patient consulte le dossier.

La Note conceptuelle prévoit que le patient a le droit de recevoir une copie partielle ou totale du dossier qui le concerne. Si l'on admet le droit de consultation directe, aucun argument ne pourra être avancé du point de vue déontologique pour refuser une photocopie de son dossier au patient.

Le Conseil national attire tout particulièrement l'attention du législateur sur le risque que la possibilité d'obtenir une copie du dossier fait courir au patient lui-même. Il n'est pas impensable que des tiers viennent demander, voire exiger du patient une copie de son dossier, par exemple lors d'un examen d'embauche, de la souscription d'un emprunt, de la conclusion d'un contrat d'assurance ou du règlement d'un sinistre. Il s'impose par conséquent de prévoir que des tiers ne seront pas autorisés à demander une copie du dossier aux patients.

Droit à la protection de la vie privée

La Note conceptuelle souligne très justement la nécessité de revoir l'article 95 de la loi du 25 juin 1992 sur le contrat d'assurance terrestre. Les médecins sont régulièrement mis sous pression par des patients qui ne recevront pas de paiement tant qu'ils ne présenteront pas certains documents comme des rapports d'observation dans le cadre d'assurances hospitalisation ou des déclarations médicales concernant de proches parents dans le cadre d'assurances en annulation de voyage.

De plus, les patients doivent aussi être protégés, dans le cadre de la recherche scientifique, contre l'utilisation de leurs données par leur propre médecin sans qu'ils y aient consenti d'une quelconque façon. Il conviendrait d'imposer le consentement explicite du patient à l'utilisation de ses données codées. Telle est d'ailleurs également la position adoptée dans la version la plus récente de la Déclaration d'Helsinki.

En ce qui concerne le droit du patient à la protection de sa vie privée, la Note conceptuelle souligne que les informations relatives à l'état de santé du patient, parmi lesquelles son dossier, doivent demeurer confidentielles. A cet égard, le Conseil national attire spécialement l'attention du législateur sur la saisie de dossiers de patients par les juges d'instruction. Il est évident que rien ne s'oppose à la saisie lorsque le suspect est le médecin, mais elle est selon le Conseil national, inconcevable lorsque le suspect du délit est un patient. Les données confiées par un patient dans le cadre de son traitement ne peuvent être utilisées contre lui. Ceci réduirait à néant des relations de confiance péniblement construites avec des patients demandant et nécessitant de l'aide, souvent en raison de troubles graves du comportement. Une initiative législative devrait combler cette lacune dans la protection des droits du patient. Pour être complet, il faut ajouter que le Conseil national estime que, devant un comportement inquiétant de son patient, le médecin a la possibilité d'invoquer l'état de nécessité.

Droit à la médiation en matière de plaintes

Par rapport au droit à la médiation en matière de plaintes, il est exact que beaucoup de mécontentement, d'insatisfaction et même de procès pourraient être évités par la médiation d'une instance facilement accessible. Il va sans dire qu'une médiation n'a de sens que si tous les intéressés peuvent parler ouvertement et peuvent aborder non seulement les faits mais aussi les fautes. La grande majorité des contrats responsabilité civile des médecins ne le permettent toutefois pas. On peut donc s'interroger sur ce qui attendra les médecins lorsqu'un règlement amiable ne sera pas atteint et qu'ils auront avoué une faute. L'ouverture dans la communication avec le médiateur est un principe auquel il peut être souscrit intégralement, mais ni le médecin ni le patient ne peuvent en devenir les dupes. Le législateur devrait tenir compte de cet aspect dans l'élaboration d'une fonction de médiation.

Lors de l'audition devant la commission de la Santé publique, de l'Environnement et du Renouveau de la société à la Chambre des représentants, le président du Conseil national a souligné qu'au niveau des conséquences de l'acte médical, les droits du patient auront inévitablement des répercussions sur le plan matériel, s'agissant de l'indemnisation des conséquences dommageables de l'acte médical fautif ou non fautif. Ce problème dont l'expérience montre à quel point il est complexe et se heurte à d'importantes préoccupations et difficultés d'ordre budgétaire, devra être résolu d'urgence si l'on veut préserver les droits des patients. Dans ce domaine, la question budgétaire vient se greffer au problème essentiel de la définition de l'instance vers laquelle se tourner pour obtenir une indemnisation. Cette problématique, dont l'aspect budgétaire n'a pas un caractère strictement déontologique, et celle des droits du patient sont à ce point intimement liées qu'il s'indique d'observer une certaine simultanéité dans leur réglementation. Le Conseil national ne peut que se rallier à ce point de vue.

Représentation du patient

En ce qui concerne la représentation du patient, la Note conceptuelle propose des solutions qui ne s'inscrivent qu'en partie dans la ligne de la déontologie médicale actuelle. La déontologie connaît aussi, à côté du représentant légal, le représentant de fait et attribue un rôle important à l'entourage sans définir plus précisément les personnes dont il s'agit. Le Conseil national a toujours attaché beaucoup d'importance aux liens du patient avec des personnes et des figures de soutien de son entourage. Le Conseil national estime qu'une approche intersubjective correspond à la réalité, que l'interaction entre le patient et son entourage se noue dès le début de la maladie. L'entourage est en général immédiatement associé à l'information sur la maladie et joue un rôle important dans les choix à faire et le consentement. La cascade de représentants proposée sera certainement cohérente sur le plan juridique, mais elle perd de vue la réalité du système dont le patient fait partie et continue de faire partie, même lorsqu'il n'est plus en état de comprendre l'information nécessaire et de donner son consentement.

Il est prévu tant dans le droit à l'information que dans le droit au consentement, qu'une personne de confiance désignée par le patient majeur lorsqu'il était encore apte à apprécier raisonnablement ses intérêts, pourra se substituer à lui lorsqu'il ne sera plus en état de juger lui-même de ses intérêts. L'on est frappé par l'absence de toute précision à propos du profil de la personne de confiance et du fait par exemple, que l'on n'ait pas estimé utile de prévoir qu'elle ne pouvait avoir un intérêt personnel direct ou indirect dans les décisions concernant le sort du patient. Il est tout aussi essentiel de fixer toutes les garanties nécessaires de libre choix du patient lors de la désignation de la personne de confiance et notamment de limiter la durée du mandat.

Même si les garanties nécessaires sont prévues, il demeurera inacceptable que le médecin ne puisse déroger à la décision prise par la personne de confiance. L'article 14 de la Note conceptuelle prévoit que le médecin peut déroger à la décision prise par les parents ou par le tuteur, afin de prévenir toute menace pour la vie du patient ou toute atteinte grave à sa santé. Le Conseil national estime qu'il doit en aller de même pour la décision prise par la personne de confiance.

Le Conseil national ne peut non plus accepter qu'un médecin soit obligé de respecter le refus écrit du consentement à une intervention déterminée, rédigé par le patient lorsqu'il était encore apte à apprécier raisonnablement ses intérêts. De tels refus ne sont qu'indicatifs et ne peuvent être contraignants.

En revanche, le Conseil national estime que le dispensateur de soins doit sérieusement tenir compte à la fois de l'avis de la personne de confiance et d'une déclaration de volonté du patient par écrit. Ces éléments peuvent même être décisifs en cas d'hésitation entre l'abstention ou l'intervention, mais il serait inadmissible de laisser mourir des personnes lorsqu'il y a de fortes chances qu'un traitement déterminé donne un bon résultat. Il est cependant indiqué, avant de prendre une décision dans de telles circonstances, que le médecin responsable demande l'avis d'un confrère et/ou de l'équipe multidisciplinaire traitante, et qu'il se concerte aussi avec la famille le cas échéant.

Commission consultative fédérale "Droits du patient"

En ce qui concerne la commission consultative fédérale, il tombe sous le sens qu'une évaluation et un ajustement continus des droits du patient sont nécessaires en conséquence de l'évolution rapide des vues de la société en cette matière.

Au regard des missions attribuées à la commission consultative fédérale, décrites en annexe à la Note conceptuelle, l'Ordre des médecins pense avoir sa place dans une composition équilibrée de cette commission et pouvoir revendiquer la participation aux travaux.

Conclusion

En conclusion, on peut dire que le Conseil national apprécie dans ses grandes lignes le contenu de la Note conceptuelle où il retrouve beaucoup des principes déontologiques prônés par l'Ordre des médecins.

Le Conseil national estime toutefois nécessaire de faire figurer dans le texte des garanties supplémentaires de protection complète des données du patient et du dossier du patient dans son ensemble afin que des tiers ne puissent jamais en faire un quelconque usage, sauf exception légale.

Enfin, le Conseil national estime que les décisions de la personne de confiance et la déclaration de volonté du patient par écrit ne peuvent détruire les chances d'une vie digne et humaine, car ce serait contraire à l'intérêt du patient et au respect de sa personne.

Archives médicales15/12/2001 Code de document: a095009
Délais de conservation des cartes de Guthrie

Le médecin directeur de la section Soins préventifs et sociaux auprès du ministère de la Communauté flamande soumet au Conseil national un projet d'arrêté ministériel modifiant l'arrêté ministériel du 23 mars 1998 réglant la procédure de fonctionnement et d'agrément relative aux centres de dépistage des anomalies congénitales métaboliques. Il y est proposé, à la demande des responsables des centres de dépistage flamands, de détruire les fiches de sang cinq ans après leur examen pour le dépistage d'anomalies congénitales métaboliques (cartes de Guthrie). Ceci écarte la possibilité de pratiquer des tests génétiques sur le sang restant des fiches ainsi que d'utiliser les fiches à l'insu des parents pour la réalisation de tests auxquels elles ne sont pas destinées.

Avis du Conseil national:

Le Conseil national estime fondée la crainte d'utilisation des cartes restantes à des fins de tests génétiques et ce, à l'insu des parents.
Il n'a dès lors, aucune objection à formuler quant à la proposition de limitation de la durée de conservation à 5 ans au centre de dépistage.

Il souhaite par ailleurs qu'une concertation soit initiée entre tous les centres du pays qui sont agréés pour effectuer ces dépistages. En effet, les aspects scientifiques de ceux-ci conduisent à s'interroger sur le nombre d'anomalies détectables, le moment de leur détection et la possibilité de retour sur des faux négatifs. De plus, il ne paraît pas indiqué, en matière d'égalité des chances, que le nombre d'anomalies détectables diffère d'un centre à l'autre.