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Addictions - Concertation sur l'état de santé du patient entre les médecins traitants
En sa séance du 15 octobre 2022, le Conseil national de l’Ordre des médecins a examiné la question de savoir si un médecin peut signaler les graves problèmes de dépendance d’une patiente à un gynécologue avec l’accompagnement duquel la patiente souhaite commencer un traitement de fertilité.
Il est scientifiquement prouvé que la consommation d’alcool et d’autres substances générant une dépendance dès la conception et tout au long de la grossesse a un effet très néfaste sur le développement du fœtus. Le syndrome d’alcoolisme fœtal, par exemple, se caractérise par des anomalies très graves[1] qui compromettent sérieusement les perspectives d’avenir de l’enfant à naître.
Le Conseil national considère que dans les cas graves et avérés d’éthylisme et/ou de consommation d’autres substances générant une dépendance, après que l’attention de la mère a été attirée à plusieurs reprises sur le danger pour elle-même et le futur bébé, le secret professionnel peut être rompu au nom d’un intérêt supérieur, à savoir la protection de l’intégrité physique et psychique de l’enfant à naître.
[1] Caractéristiques du syndrome d’alcoolisme fœtal
À la naissance
Retard de croissance
Dysmorphie faciale
Anomalies neurologiques
• mauvaise coordination musculaire,
• mauvais réflexe de succion, problèmes de mastication,
• hypersensibilité au son et/ou à la lumière vive,
• troubles du sommeil,
• troubles de l’attention et de la mémoire,
• troubles du langage,
• altération des capacités visuelles,
• troubles de l’apprentissage et du comportement, hyperactivité, comportement autistique,
• retard mental (QI moyen de 60).
Autres anomalies possibles
• problèmes cardiaques
• malformations du squelette et des organes internes (par exemple: le foie, les reins, les organes sexuels)
• problèmes d’audition
• malformations de l’articulation de la hanche
• scoliose
• tension musculaire trop élevée ou trop faible
• troubles de la motricité (mouvements fins)
• risque accru d’infections auriculaires et pulmonaires
• tremblements
• irritabilité
• comportement impulsif
• épilepsie
• troubles de l’équilibre
Problèmes courants chez les enfants et les adultes
• Plaintes psychiques, problèmes psychiatriques (tels que la dépression)
• Difficultés d’apprentissage, mauvais résultats scolaires, problèmes au travail
• Problèmes de comportement, comportement criminel
• Comportement sexuel inapproprié
• Problèmes liés à l’alcool et à la drogue
• Isolement social
Pratique de l’euthanasie - Souffrance psychique à la suite d’affections somatiques ou d’une polypathologie
En sa séance du 19 février 2022, le Conseil national de l’Ordre des médecins a examiné la problématique de la pratique de l’euthanasie dans le cas des patients en souffrance psychologique à la suite d’affections somatiques ou d’une polypathologie et qui ne décèderont manifestement pas à brève échéance.
1. Introduction
Cet avis vise à formuler des directives déontologiques pour aider les médecins à agir de manière avisée lorsqu’ils envisagent l’euthanasie, en particulier dans les situations où une insécurité juridique persiste en raison de la complexité du processus médical. En effet, la gravité et l’irréversibilité de la situation médicale peuvent donner lieu à des différences d’interprétation. L’avis du Conseil national « Directives déontologiques pour la pratique de l’euthanasie des patients en souffrance psychique à la suite d’une pathologie psychiatrique », mis à jour le 19 février 2022, ne peut être utilisé sans davantage de précisions dans les situations de souffrance psychique dues à des affections somatiques ou une polypathologie.
2. La loi du 28 mai 2002 relative à l’euthanasie et l’avis n° 73 du Comité consultatif de bioéthique de Belgique du 11 septembre 2017[1]
Dans le cadre d’une demande d’euthanasie, le médecin doit apprécier si les conditions prévues dans la loi du 28 mai 2002 relative à l’euthanasie (ci-après : loi euthanasie) sont remplies.
Le médecin doit notamment s’assurer que « le patient se trouve dans une situation médicale sans issue et fait état d’une souffrance physique ou psychique constante et insupportable qui ne peut être apaisée et qui résulte d’une affection accidentelle ou pathologique grave et incurable ».
Il est nécessaire d’interpréter ces conditions qui, dans des cas exceptionnels, peuvent prêter à controverse.
L’avis n° 73 du Comité consultatif de bioéthique de Belgique du 11 septembre 2017 concernant l’euthanasie dans les cas de patients hors phase terminale, de souffrance psychique et d’affections psychiatriques comprend plusieurs éléments très pertinents en relation avec les directives déontologiques de l’Ordre des médecins (voy. ci-dessous, sub 3).
Malgré un certain nombre de sujets de discussion non résolus, cet avis circonstancié relève un consensus sur les questions suivantes :
(1) seule la souffrance qui satisfait à la condition de résulter d’une affection accidentelle ou pathologique grave et incurable peut former une base légale pour l’euthanasie ;
(2) il relève de la responsabilité du médecin d’estimer le caractère incurable d’une affection accidentelle ou pathologique grave ;
(3) en revanche, il revient au patient d’apprécier le caractère constant et insupportable d’une souffrance physique ou psychique. »[2]
La loi euthanasie[3] cite également la condition suivante : « une souffrance qui ne peut être apaisée », pour déterminer si un patient est dans une situation médicale sans issue.
L’interprétation du critère de « souffrance inapaisable » et la question de savoir si c’est le médecin ou le patient qui décide si la souffrance est apaisable, sont ouvertes à la discussion.
Dans tous les cas, la détermination du caractère (in)apaisable de la souffrance nécessite « un dialogue approfondi et soutenu entre le patient et son médecin »[4].
Selon le Comité consultatif de bioéthique, « La ’fatigue de vivre’ sans fondement médical ne répond pas aux conditions de l’art. 3(1) de la loi et ne peut dès lors constituer un motif légalement acceptable de recours à l’euthanasie »[5]. La loi euthanasie prévoit que la souffrance insupportable doit résulter d’une affection accidentelle ou pathologique. Même si, pour beaucoup de patient, la souffrance résultera d'une combinaison de problèmes médicaux et psychosociaux, tels que la solitude, l'abandon et le sentiment d'inutilité, ce sont les problèmes médicaux qui doivent être à l'origine de la souffrance constante et insupportable[6].
En ce qui concerne les demandes d’euthanasie basées sur une polypathologie, tous les membres du Comité consultatif de bioéthique de Belgique estiment que « certaines formes de polypathologie – c’est-à-dire la présence de plusieurs affections - peuvent constituer un fondement médical pour prendre en considération une demande d’euthanasie à condition que le caractère insupportable et inapaisable de la souffrance de l’intéressé, et l’absence d’espoir sur le plan médical, soient provoqués par la polypathologie en question »[7].
3. Directives déontologiques
Le Conseil national considère que les directives déontologiques suivantes en vue d’une pratique avisée peuvent contribuer à prévenir les conflits juridiques.
Lors du traitement d’un patient atteint de polypathologie, une attention particulière doit être accordée à la souffrance psychique qui résulte des affections somatiques.
3.1. Concertation entre les médecins, dont au minimum un psychiatre
La loi euthanasie dispose que le médecin qui envisage la pratique de l’euthanasie doit, préalablement et dans tous les cas, consulter un autre médecin compétent quant à la pathologie concernée.[8]
Les situations médicales qui donnent lieu à des discussions sur l’interprétation des conditions légales concernent toujours des affections pour lesquelles le médecin estime que le patient ne décèdera manifestement pas à brève échéance. Dans ce cas, la loi euthanasie prévoit que le médecin doit consulter un autre médecin (appelé « deuxième médecin » dans la loi), psychiatre ou spécialiste de la pathologie concernée.[9]
D’un point de vue déontologique, il convient de toujours faire intervenir un psychiatre lors de la pratique de l’euthanasie des patients pour qui la souffrance psychique, en raison d’une ou plusieurs affections somatiques ou d’une polypathologie, joue un rôle important dans leur demande d’euthanasie.
Dans le cas où le « deuxième » médecin consulté est un spécialiste de la pathologie en question, mais n’est toutefois pas psychiatre, comme la loi l’autorise, la consultation d’un troisième médecin, psychiatre, est déontologiquement recommandée.
Les médecins consultés doivent, conformément à la loi, rédiger un rapport avec leurs constatations, qui sera consigné au dossier médical du patient.
Il est déontologiquement recommandé que le troisième médecin consulté rédige lui aussi un rapport.
En outre, le Conseil national estime qu’au-delà d’une simple consultation avec un rapport écrit, une concertation entre les médecins concernés doit avoir lieu.
Le Conseil national réitère sa demande à l’INAMI de prévoir un remboursement pour ces consultations au titre de consultation euthanasie multidisciplinaire (CEM).
3.2. Période à respecter entre la demande et l’application de l’euthanasie
La loi euthanasie dispose que, dans le cas où le médecin estime que le patient ne décèdera manifestement pas à brève échéance, il doit laisser s’écouler au moins un mois entre la demande écrite du patient et l’euthanasie.[10]
En cas de souffrance psychique due à une polypathologie, les conditions de fond[11] de la loi euthanasie sont remplies dans de nombreux cas, où le délai légal d’un mois peut suffire comme condition.
Cela ne signifie toutefois pas que tout doute soit levé et qu’il n’y ait pas matière à discussion. Dans le cas d’une polypathologie, le médecin doit s’assurer qu’il n’existe pas d’autres traitements symptomatiques susceptibles de ramener la souffrance du patient en-dessous du seuil qualifié de supportable. Le médecin peut considérer que, pour une ou plusieurs des affections, il existe un traitement complémentaire efficace. Dans la pratique, il arrive que l’ensemble de la procédure dure plus longtemps que le délai d’un mois imposé par la loi. Le médecin doit tâcher consciencieusement de continuer à se concerter avec le patient et tenter de le convaincre de se faire soigner, même s’il souffre d’autres affections qui ne peuvent être apaisées et qui peuvent être qualifiées d’incurables. Le médecin doit faire preuve de bon sens, et ne doit pas verser dans l’acharnement thérapeutique.
3.3. Implication des proches du patient dans le processus
La loi euthanasie prévoit que le médecin doit, préalablement et dans tous les cas, si telle est la volonté du patient, s’entretenir de la demande du patient avec les proches que celui-ci désigne[12].
Si le patient refuse, le refus doit être mentionné dans le dossier patient. Si le médecin l’estime opportun, il note dans le dossier patient les raisons de son refus.
Le Conseil national est conscient du fait que des conflits peuvent naître entre l'autonomie du patient d'une part et l'intérêt de la famille et/ou de la société d'autre part. Les règles de la déontologie médicale requièrent que le médecin apporte son soutien aux proches du patient qui peuvent être gravement affectés par la demande d’euthanasie, de manière à préserver la confiance générale de la société dans le corps médical.
3.4. Renvoi à un autre médecin dans le cas où le médecin refuse de pratiquer l’euthanasie
Selon la loi euthanasie, le médecin ne peut être tenu de pratiquer l’euthanasie.[13]
En outre, l’article 14 de la loi euthanasie dispose :
« Si le médecin consulté refuse, sur la base de sa liberté de conscience, de pratiquer une euthanasie, il est tenu d’en informer en temps utile et au plus tard dans les sept jours de la première formulation de la demande le patient ou la personne de confiance éventuelle en en précisant les raisons et en renvoyant le patient ou la personne de confiance vers un autre médecin désigné par le patient ou par la personne de confiance. »[14]
« Si le médecin consulté refuse de pratiquer une euthanasie pour une raison médicale, il est tenu d’en informer en temps utile le patient ou la personne de confiance éventuelle, en en précisant les raisons. Dans ce cas, cette raison médicale est consignée dans le dossier médical du patient. »[15]
« Le médecin qui refuse de donner suite à une requête d’euthanasie est tenu, dans tous les cas, de transmettre au patient ou à la personne de confiance les coordonnées d’un centre ou d’une association spécialisé(e) en matière de droit à l’euthanasie et, à la demande du patient ou de la personne de confiance de communiquer dans les quatre jours de cette demande le dossier médical du patient au médecin désigné par le patient ou par la personne de confiance. »[16],[17]
Dans les hôpitaux, il est recommandé de désigner une personne qui possède des connaissances en matière de droit à l’euthanasie, et qui peut informer le patient au sujet des conditions légales.
[1] Art. 3, §1, troisième tiret, loi euthanasie.
[2] Comité consultatif de bioéthique de Belgique, avis n° 73 du 11 septembre 2017 concernant l’euthanasie dans les cas de patients hors de phase terminale, de souffrance psychique et d’affections psychiatriques (ci-après : avis n° 73), p.65.
[3] Art. 3, § 1er, loi euthanasie.
[4] Comité consultatif de bioéthique de Belgique, avis n° 73, p. 44.
[5] Comité consultatif de bioéthique de Belgique, avis n° 73, pp. 65 et 69.
[6] Comité consultatif de bioéthique de Belgique, avis n° 73, p. 65
[7] Comité consultatif de bioéthique de Belgique, avis n° 73, p. 56.
[8] Art. 3, § 2, 3°, loi euthanasie.
[9] Art. 3, § 3, 1°, loi euthanasie.
[10] Art. 3, § 3, 2°, loi euthanasie.
[11] A savoir : le patient se trouve dans une situation médicale sans issue et fait état d'une souffrance physique ou psychique constante et insupportable, qui ne peut être apaisée et qui résulte d'une affection accidentelle ou pathologique grave et incurable.
[12] Art. 3, § 2, 5°, loi euthanasie.
[13] Art. 14, deuxième alinéa, loi euthanasie.
[14] Art. 14, cinquième alinéa, loi euthanasie.
[15] Art. 14, sixième alinéa, loi euthanasie.
[16] Art. 14, septième alinéa, loi euthanasie.
[17] cf. aussi ‘Obligation déontologique de renvoi en cas de refus de pratiquer une euthanasie’ – Avis du Conseil national du 6 mai 2017 (avis CN, 16 septembre 2016, a158004).
Dossier médical global (DMG) – Réglementation et gestion
En sa séance du 24 avril 2021, le Conseil national de l’Ordre des médecins a discuté de la législation et de la gestion du Dossier médical global (DMG).Le présent avis remplace l’avis La gestion du Dossier médical global (DMG) du 16 juillet 2011 (a134010).
Depuis sa création, le DMG a été soumis à de nombreuses évolutions, avec interactions entre le cadre légal, les accords nationaux médico-mutualistes successifs et les modifications et/ou adaptations complémentaires apportées aux dispositions INAMI.
Le contenu du DMG est fixé par l’arrêté royal du 26 janvier 2017 modifiant l’article 2, B, de l’annexe à l’arrêté royal du 14 septembre 1984 établissant la nomenclature des prestations de santé en matière d’assurance obligatoire soins de santé et indemnités.[1]
L’article 33 de la loi du 22 avril 2019 relative à la qualité de la pratique des soins de santé (Loi qualité)[2] détermine les données que le professionnel des soins de santé doit au minimum reprendre dans le dossier patient.
La relation médecin-patient naît d’un engagement volontaire entre le patient et le médecin dans le respect de l’autonomie tant du médecin que du patient. Tous deux peuvent s’engager dans cette relation, la refuser ou y mettre fin. Le patient dispose toujours du droit de choisir librement son médecin et de modifier ce choix. Le médecin peut estimer qu’il est impossible de poursuivre une relation thérapeutique ou de réaliser une intervention ou un traitement. Il en informe à temps le patient et éventuellement ses proches et se concerte avec eux. Il organise la continuité des soins et fournit toutes les informations utiles au médecin qui reprend sa tâche (art. 32, Code de déontologie médicale).
Il découle de la définition d’une relation thérapeutique[3] l’obligation du médecin et le droit du patient à un dossier patient correctement tenu à jour[4]. L’article 22 du Code de déontologie médicale prévoit : « Le médecin tient à jour pour chaque patient un dossier dont la composition et la conservation répondent aux exigences légales et déontologiques. Dans le respect du secret professionnel, le médecin gère le dossier des patients qui est un outil de travail, un moyen de communication, un point de référence qualitatif et un élément de preuve. »
Lors d’une première consultation d’un nouveau patient, le médecin généraliste peut l’interroger sur l’existence d’un DMG chez un autre médecin généraliste. Il peut contrôler via MyCareNet[5] si les informations que le nouveau patient lui communique sont correctes. La possibilité de demander des listes est prévue tant pour le médecin généraliste (liste des patients pour lesquels il est le médecin généraliste détenteur du DMG) que pour les autres médecins généralistes et médecins-spécialistes (consultation du droit au DMG du patient).
Toutefois, si ce premier contact a lieu dans une circonstance occasionnelle (le médecin généraliste fixe est absent, injoignable ou en congé) ou si le patient sollicite simplement une « deuxième opinion » ou s’il ne veut pas encore arrêter un choix définitif désignant un (nouveau) médecin généraliste détenteur du DMG, cela doit être respecté. Dans ce cas, imposer un DMG ou en ouvrir un constitue une faute déontologique.
Le droit à des soins de qualité est un droit important du patient. Le médecin généraliste informe correctement le patient du bénéfice du DMG en tant qu’instrument de travail pour l’optimalisation et la qualité des soins et de ses conséquences sur le plan financier. Le médecin généraliste ouvre le DMG sur demande volontaire et expresse du patient[6] et avec son consentement informé. Il identifie le patient au moyen de sa carte d’identité électronique (eID). Créer électroniquement un DMG est simple ( seule possibilité depuis le 1er janvier 2021 pour avoir droit à ses avantages[7]). Le patient marque son accord en donnant son eID. Le médecin coche la case pour confirmation du consentement informé.
La relation médecin-patient repose sur la confiance et le respect mutuels, la communication et la participation. Le DMG accroît la qualité des soins, car toutes les informations concernant le patient sont recueillies et intégrées dans un dossier médical par le médecin généraliste. Ainsi, le médecin généraliste détenteur du DMG dispose d’une image complète de l’état de santé du patient.
Si un médecin généraliste intervient comme médecin remplaçant consulté pour assurer la continuité des soins, il ne peut ouvrir un DMG. Cette interdiction est absolue durant la garde de population tant les week-ends que les jours fériés. Cela s’applique également à une garde en semaine organisée par les médecins généralistes. Lorsque le médecin généraliste intervient comme remplaçant d’un confrère (absence, congé, maladie), cela ne peut entraîner aucun changement dans le statut du DMG.
Le médecin de garde a accès au Sumehr[8]. Il s’agit d’un extrait du dossier patient. Le Summarized Electronic Health Record est un document électronique reprenant les données minimales dont le médecin a besoin pour évaluer rapidement l’état de santé d’un patient et pour lui assurer ainsi les meilleurs soins possibles.
À l’instar du Sumehr, le DMG n’est pas un dossier distinct. Il comporte des éléments déterminés du dossier patient (bref contenu d’informations médicales d’urgence, antécédents importants du patient, etc.)[9].
Un autre droit essentiel du patient est l’autonomie et le libre choix : le droit à l’autodétermination du patient est indispensable à la construction d’une relation de confiance avec le médecin. Le patient a le droit, à tout moment, de choisir le professionnel avec lequel il souhaite s’engager dans une relation thérapeutique et il est toujours libre de modifier ce choix.
L’article 27, al. 2, du Code de déontologie médicale prévoit : « À la demande du patient ou avec son accord, le médecin transmet les informations et éléments pertinents à un autre professionnel de santé. »
Conformément à l’article 34 de la Loi qualité, le professionnel des soins de santé tient à jour le dossier du patient et le conserve sous une forme électronique, à partir d’une date encore à déterminer par arrêté royal.
Les articles 36 à 40 de la Loi qualité prévoient les conditions auxquelles le professionnel des soins de santé doit satisfaire pour obtenir accès aux données de santé du patient qui sont tenues à jour et conservées par un autre professionnel des soins de santé.
En cas de changement de médecin généraliste traitant, le médecin partage, dans le cadre de la continuité des soins, dans un délai raisonnable, toutes les données utiles et nécessaires ou informations pharmaceutiques concernant le patient au médecin désigné par le patient pour que le diagnostic ou le traitement soit continué ou complété[10]. Il est aujourd’hui d’usage que le médecin transfère une copie du dossier patient complet[11] au nouveau médecin généraliste via eHealth.
Le patient peut demander d’ajouter des informations médicales à son dossier patient ou de corriger des informations, dans certains cas.
Le médecin doit corriger gratuitement les erreurs qui peuvent être constatées objectivement (p. ex. diagnostic manifestement erroné, mauvais groupe sanguin du patient ou erreur d’orthographe dans son nom). En règle, le patient n’a pas le droit de faire supprimer des données médicales ou à caractère personnel pertinentes de son dossier médical. Par ailleurs, le médecin ne peut pas intégrer n’importe quelles données dans le dossier du patient ; il doit tenir compte des principes de minimisation des données, de proportionnalité et de nécessité. Pour davantage de précisions concernant ce qui précède, le Conseil national renvoie à son avis du 20 mars 2021 (a168007).
Dans le cadre de la qualité des soins, d’autres médecins généralistes de la même pratique de groupe ont automatiquement accès aux données du DMG des patients des uns et des autres lorsqu’ils y sont autorisés[12]. Le patient ne doit pas entreprendre de démarches administratives supplémentaires à cette fin et il peut refuser une relation thérapeutique avec un certain médecin de la pratique de groupe. Le médecin traitant en informe le patient au moment de la création du DMG.
Dans la pratique, la répartition et l’attribution des DMG en cas de dissolution des groupes de médecins posent parfois problèmes. Les médecins concernés doivent fixer des accords clairs dans leur contrat de collaboration. Quand un médecin généraliste quitte la pratique de groupe, le patient confirme qui est son médecin détenteur du DMG. Le Conseil national plaide pour que soit menée une réflexion afin d’accorder encore mieux le concept de pratique solo du médecin généraliste détenteur du DMG à l’évolution de la collaboration des médecins généralistes au sein de la pratique de groupe.
Les honoraires par DMG pour le médecin généraliste sont perçus une fois par année civile par patient. Depuis le 1er janvier 2021[13], la prolongation est automatique. Une consultation du patient doit avoir lieu un an sur deux[14].
La gestion d’un DMG est réservée aux médecins généralistes agréés. Tout médecin généraliste qui souhaite gérer des DMG doit satisfaire aux conditions d’obtention ou de maintien de cet agrément. Les médecins généralistes en formation ne peuvent pas ouvrir ni gérer de DMG[15].
Auparavant[16], l’un des critères du maintien de l’agrément était que le médecin généraliste dispense des soins tant en visite à domicile que dans un local de consultation. Maintenant, l’article 10 de l’arrêté ministériel du 1er mars 2010 fixant les critères d’agrément des médecins généralistes prévoit comme seul critère pour le maintien de la reconnaissance du médecin généraliste : « Le médecin généraliste agréé est tenu de maintenir et de développer ses compétences pendant toute sa carrière par une formation pratique et scientifique. »
Cependant, le Conseil national estime qu’un médecin généraliste détenteur du DMG doit pouvoir assurer des soins complets à ces patients.
Par cette analyse, le Conseil national souhaite assister les médecins généralistes dans la gestion du DMG de chaque patient avec le soin nécessaire et dans le respect des prescriptions déontologiques.
Modalités pratiques et documentation
https://www.ehealth.fgov.be/fr...
https://www.riziv.fgov.be/fr/t...(dernière mise à jour 13 juillet 2018)
https://www.inami.fgov.be/fr/p...(dernière mise à jour 2 mars 2021)
http://fra.mycarenet.be/sector...
[1]Article 1er. A l’article 2, B, de l’annexe à l’arrêté royal du 14 septembre 1984 établissant la nomenclature des prestations de santé en matière d’assurance obligatoire soins de santé et indemnités, remplacé par l’arrêté royal du 19 février 2013 et modifié en dernier lieu par l’arrêté royal du 30 novembre 2015, sont apportées les modifications suivantes :
1° le libellé et les règles d’application de la prestation 102771 sont remplacés par ce qui suit :
« Gestion du dossier médical global (DMG)
[…]
Le DMG contient les données suivantes mises à jour régulièrement :
a) les données socio-administratives;
b) les antécédents;
c) les problèmes;
d) les rapports des autres dispensateurs de soins;
e) les traitements chroniques;
f) les mesures préventives adoptées en fonction de l’âge et du sexe du patient et portant au minimum sur :
1. le mode de vie (alimentation, activité physique, consommation de tabac et d’alcool);
2. les maladies cardiovasculaires (anamnèse, examen clinique, acide acétylsalicylique pour les groupes à risque);
3. le dépistage du cancer colorectal, du cancer du sein et du col utérin;
4. la vaccination (diphtérie, tétanos, grippe et pneumocoque);
5. les dosages biologiques : lipides (> 50 ans), glycémie (> 65 ans), créatinine et protéinurie (pour les groupes à risque);
6. le dépistage de la dépression;
7. les soins bucco-dentaires;
g) pour un patient de 45 à 74 ans qui bénéficie du statut affection chronique, diverses données cliniques et biologiques utiles à l’évaluation de l’état de santé du patient et à l’amélioration de la qualité des soins. » […]
[2] La Loi qualité entre en vigueur le 1er juillet 2021.
[3]Pour l’application de l’alinéa 1er, on entend par relation thérapeutique toute relation entre un patient et un professionnel des soins de santé dans le cadre de laquelle des soins de santé sont dispensés. (Loi du 22 avril 2019 relative à la qualité de la pratique des soins de santé, art. 37, al. 2)
[4] Loi du 22 août 2002 relative aux droits du patient, art. 9, § 1
[5] MyCareNet est une initiative commune du Collège intermutualiste national (CIN), de eHealth (le portail santé des autorités belges) et de l’INAMI (http://fra.mycarenet.be/sector...)
[6] L’art. 1, 1°, al. 2, de l’arrêté royal du 26 janvier 2017 modifiant l’article 2, B, de l’annexe à l’arrêté royal du 14 septembre 1984 établissant la nomenclature des prestations de santé en matière d’assurance obligatoire soins de santé et indemnités prévoit : « La gestion du DMG est réalisée à la demande du patient ou de son mandataire dûment identifié; cette demande figure dans le dossier du patient ».
[7] L’INAMI a mis à jour sa page internet concernant le DMG
(https://www.riziv.fgov.be/fr/professionnels/sante/medecins/qualite/Pages/dossier-medical-global.aspx).
Depuis le 1er janvier 2021, le médecin généraliste reçoit uniquement des honoraires pour la gestion du DMG s’il utilise un dossier médical électronique (DME). Le DME doit être géré au moyen d’un logiciel enregistré par la plate-forme eHealth.
[8] Cf. https://www.vitalink.be/beknopte-medische-dossiers-delen-sumehr
La création d’un Sumehr se fait par un clic du médecin dans le logiciel. Il comporte des informations issues du dossier patient. En outre, il est possible de retrouver via COZO des lettres de spécialistes de tous les hôpitaux belges, de spécialistes collaborant en dehors de l’hôpital, de laboratoires, entre autres.
[9] Art 1, arrêté royal du 26 janvier 2017 modifiant l’article 2, B, de l’annexe à l’arrêté royal du 14 septembre 1984 établissant la nomenclature des prestations de santé en matière d’assurance obligatoire soins de santé et indemnités
[10] Code de déontologie médicale, art. 26
[11] La loi du 22 août 2002 relative aux droits du patient, art. 9, § 2, prévoit que le patient a droit à la consultation du dossier le concernant.
[12]https://www.inami.fgov.be/fr/professionnels/sante/medecins/qualite/Pages/dossier-medical-global.aspx#Continuit%C3%A9_des_soins_:_Vos_DMG_accessibles_pour_les_autres_m%C3%A9decins_g%C3%A9n%C3%A9ralistes_autoris%C3%A9s_dans_une_seule_et_m%C3%AAme_pratique_de_groupe
[13] À partir de 2021, les honoraires DMG seront versés chaque année proactivement en février. Le calcul repose sur le nombre de DMG enregistrés au 31 décembre de l’année précédente sur MyCareNet pour tous les patients inscrits auprès de la même mutualité. Pour les nouveaux patients qui souhaitent ouvrir un DMG après février, le médecin reçoit un honoraire pour cette année, après notification sur MyCareNet. Pour les patients ayant un DMG qui changent de médecin, le nouveau médecin reçoit les honoraires l’année suivante.
[14] Les honoraires pour le DMG ne sont donc plus liés à un contact patient annuel obligatoire.
[15] Art. 1, arrêté royal du 26 janvier 2017 modifiant l’article 2, B, de l’annexe à l’arrêté royal du 14 septembre 1984 établissant la nomenclature des prestations de santé en matière d’assurance obligatoire soins de santé et indemnités
[16] L’arrêté ministériel du 21 février 2006 fixant les critères d’agrément des médecins généralistes cité dans l’avis du Conseil national du 16 juillet 2011 a été abrogé par le Conseil d’État. Actuellement, il existe l’arrêté ministériel du 1er mars 2010 fixant les critères d’agrément des médecins généralistes.
Droit du patient à la rectification ou à l’effacement des données de son dossier médical.
Le Conseil national de l’Ordre des médecins a examiné le droit du patient à la rectification ou à l’effacement des données de son dossier médical.
Le patient a droit à la consultation du dossier le concernant.[1] Dans le cadre du patient empowerment, le patient participe plus activement à son processus de soins et prend plus fréquemment connaissance de ses données médicales, notamment via les réseaux de santé.
En conséquence, de plus en plus de médecins reçoivent des demandes de leurs patients de rectification et/ou d’effacement de certaines données de leur dossier médical.
- Droit de rectification
Le patient a le droit d’obtenir du responsable du traitement, dans les meilleurs délais, la rectification des données à caractère personnel le concernant qui sont inexactes. Compte tenu des finalités du traitement, la personne concernée a le droit d’obtenir que les données à caractère personnel incomplètes soient complétées, y compris en fournissant une déclaration complémentaire.[2] Le droit de rectification est un droit fondamental.[3]
Les données à caractère personnel doivent être exactes et, si nécessaire, actualisées. Toutes les mesures raisonnables doivent être prises pour effacer ou rectifier, sans tarder, les données à caractère personnel qui sont inexactes, eu égard aux finalités pour lesquelles elles sont traitées.[4]
L’exactitude des données doit être examinée. Les données doivent être rectifiées ou complétées si et seulement si le médecin constate qu’elles sont inexactes ou incomplètes.
Ce droit n’est pas destiné à permettre de contester un diagnostic médical, qui est le résultat d’une appréciation professionnelle et qui constitue donc une « opinion médicale ».[5] Les contestations subjectives concernant le diagnostic sont appréciées par le médecin concerné et sont, le cas échéant, laissées sans suite. Le médecin note dans le dossier patient que le diagnostic est contesté et par qui.
Par contre, ce droit pourrait être exercé dans des situations où par exemple, le dossier contient des erreurs dues à un traitement inexact de données à caractère personnel.[6] Dans ce contexte, l’on pourrait ainsi penser à l’enregistrement erroné du groupe sanguin du patient[7], à une erreur orthographique dans le nom du patient ou à une erreur manifeste de diagnostic. Il convient de toujours corriger gratuitement les erreurs que l’on peut constater objectivement.
- Droit d’effacement des données
Dans certains cas[8], le patient a le droit d’obtenir du responsable du traitement l’effacement, dans les meilleurs délais, de données à caractère personnel le concernant.[9]
Le droit à l’effacement ne s’applique pas dans la mesure où le traitement est nécessaire pour des raisons d’intérêt général dans le domaine de la santé publique, pour la dispense de soins de santé et dans la mesure où le responsable du traitement est tenu au secret professionnel.[10]
La pertinence du droit à faire effacer gratuitement les données de santé est donc minime. Le traitement et la conservation des données de santé sont nécessaires pour la dispense de soins de qualité. Par conséquent, le patient n’a pas le droit de faire supprimer des données pertinentes à caractère personnel ou de santé de son dossier médical. Le délai de conservation des données de santé s’élève à minimum 30 ans[11] et maximum 50 ans à compter du dernier contact avec le patient.[12]
Ceci ne signifie pas que le médecin peut reprendre n’importe quelles données du dossier médical. Le médecin doit tenir compte des principes de minimisation du traitement des données, de proportionnalité et de nécessité. Autrement dit, le traitement des données est adéquat, pertinent et limité à ce qui est nécessaire pour les finalités pour lesquelles elles sont traitées.[13]
Lors de la rédaction de documents et notes, le médecin doit à chaque fois vérifier l’exactitude et la pertinence des données à caractère personnel et de santé.
[1] Article 9, § 2, Loi du 22 août 2002 concernant les droits du patient
[2] Article 16, Règlement général sur la protection des données
[3] Cour d’appel de Bruxelles – 2020/AR/721
[4] Article 5, 1, Règlement général sur la protection des données ; article 170, Loi du 30 juillet 2018 relative à la protection des personnes physiques à l’égard des traitements de données à caractère personnel
[5] Décision 21/2020 du 30 avril 2020 de la Chambre contentieuse de l’Autorité de protection des données ; Cour d’appel de Bruxelles – 2020/AR/721
[6] Décision 21/2020 du 30 avril 2020 de la Chambre contentieuse de l’Autorité de protection des données
[7] Cour d’appel de Bruxelles – 2020/AR/721
[8] (a) les données à caractère personnel ne sont plus nécessaires au regard des finalités pour lesquelles elles ont été collectées ou traitées d’une autre manière ; (b) la personne concernée retire le consentement sur lequel est fondé le traitement, et il n’existe pas d’autre fondement juridique au traitement ; (c) la personne concernée s’oppose au traitement et il n’existe pas de motif légitime impérieux pour le traitement ; (d) les données à caractère personnel ont fait l’objet d’un traitement illicite ; (e) les données à caractère personnel doivent être effacées pour respecter une obligation légale ; (f) les données à caractère personnel ont été collectées dans le cadre de l’offre de services de la société de l’information aux mineurs
[9] Article 17, 1 et 2, Règlement général sur la protection des données
[10] Article 17, 3, Règlement général sur la protection des données
[11] Article 24, Code de déontologie médicale
[12] Article 35, Loi du 22 avril 2019 relative à la qualité de la pratique des soins de santé
[13] Article 5, 1, c), Règlement général sur la protection des données
Décision concernant les codes DNR - Patient atteint d´un « handicap mental sévère » irréversible
Le Conseil national de l'Ordre des médecins a examiné la question de savoir si un médecin traitant peut prendre une décision concernant les codes DNR pour un patient atteint d'un « handicap mental sévère » irréversible.
Notes préliminaires
Le terme DNR (« do not resuscitate » ou « do not reanimate ») est plus large que la décision unique de ne plus réanimer. Dès lors, certaines institutions, à l'instar du Conseil national de l'Ordre des médecins, privilégient le terme CLT (« codes relatifs à la limitation de la thérapie »).
Sur le plan déontologique, une décision CLT est justifiée s'il est scientifiquement établi que le traitement n'offre pas de possibilité d'une amélioration raisonnable de l'état de santé du patient et que les traitements visant à prolonger la vie du patient porteraient gravement atteinte à son confort. Poursuivre le traitement ou l'étendre pourrait mener, dans ce contexte, à un acharnement thérapeutique.(1)
Les codes relatifs à la limitation de la thérapie peuvent impliquer ce qui suit(2) :
- Code 0 : pas de limitation de la thérapie ;
- Code 1 : pas de réanimation ;
- Code 2 : pas d'élargissement de la thérapie, avec mention explicite des traitements qui ne peuvent pas être lancés ;
- Code 3 : arrêt progressif de la thérapie, avec mention explicite des traitements qui doivent être arrêtés.
Avis du Conseil national
Dans ses avis précédents, le Conseil national de l'Ordre des médecins a exposé les principes déontologiques en cas d'application de la décision CLT.(3) Ces principes sont également d'application pour les patients atteints d'un "handicap mental sévère ». En soi, cette déficience ne constitue pas une raison suffisante pour prendre une décision CLT. Le médecin traitant ne juge pas de l'opportunité de la vie du patient ayant un « handicap mental sévère » ; il prendra uniquement l'initiative d'appliquer une décision CLT s'il est scientifiquement établi que le traitement n'offre pas de possibilités d'une amélioration raisonnable de l'état de santé du patient et que les traitements visant à prolonger la vie du patient porteraient gravement atteinte à son confort.
Pour rappel, les principes suivants sont notamment d'application :
1/ Respect de l'autonomie du patient
Le patient a droit, de la part du praticien professionnel, à toutes les informations qui le concernent et peuvent lui être nécessaires pour comprendre son état de santé et son évolution probable. La communication avec le patient se déroule dans une langue claire.(4)
Le patient a le droit de consentir librement à toute intervention du praticien professionnel moyennant information préalable.(5)
Si la personne majeure est incapable d'exprimer sa volonté, par exemple en raison d'un "handicap mental sévère", ses droits seront exercés par un représentant conformément au règlement en cascade tel que prévu à l'article 14 de la loi du 22 août 2002 relative aux droits du patient.
Le médecin qui prend l'initiative de procéder à une décision CLT se concertera largement avec le représentant du patient atteint d'un « handicap mental sévère ». Sauf dans des situations urgentes et exceptionnelles, la décision CLT peut uniquement être appliquée si le représentant y consent.
Enfin, le patient est associé à l'exercice de ses droits autant qu'il est possible et compte tenu de sa capacité de compréhension.(6)
2/ Traitement pluridisciplinaire
Avant que le médecin traitant propose l’application d’une décision CLT au patient ou à son représentant, il est recommandé de se concerter avec les autres médecins traitants de ce patient (p. ex. son médecin généraliste). Les autres professionnels des soins de santé qui font partie de l’équipe soignante, en particulier le personnel infirmier, doivent aussi être consultés.
3/ Mention dans le dossier médical
Le dossier médical doit clairement indiquer les constatations qui motivent la décision CLT et faire ressortir qu'elles sont toujours d'actualité. La décision CLT doit être prise au cas par cas et être revue à plusieurs reprises selon l'évolution de l'état clinique du patient ; elle prend fin lorsque le patient quitte l'institution ou en cas de transfert du dossier médical vers un autre médecin.
En outre, il convient de consigner dans le dossier médical les informations communiquées aux proches.
(1) Avis du Conseil national de l’Ordre des médecins du 22 mars 2003, Avis relatif aux soins palliatifs, à l’euthanasie et à d’autres décisions médicales concernant la fin de vie, a100006 ; Avis du Conseil national de l’Ordre des médecins du 27 septembre 2003, Mention DNR dans le dossier médical hospitalier, a102001
(2) https://belraiwiki.health.belgium.be/nl/attach/Woordenlijst/DNR-codes.pdf
(3) Avis du Conseil national de l’Ordre des médecins du 18 janvier 1997, Do Not Resuscitate (DNR), a076010 ; avis du Conseil national de l’Ordre des médecin du 22 mars 2003, Avis relatif aux soins palliatifs, à l’euthanasie et à d’autres décisions médicales concernant la fin de vie, a100006 ; Avis du Conseil national de l’Ordre des médecins du 27 septembre 2003, Mention DNR dans le dossier médical hospitalier, a102001
(4) Art. 7, §§ 1 et 2, loi du 22 août 2002 relative aux droits du patient
(5) Art. 8, § 1, loi du 22 août 2002 relative aux droits du patient
(6) Art. 14, § 4, loi du 22 août 2002 relative aux droits du patient
Patient insolvable – Obligation déontologique du médecin
En sa séance du 19 octobre 2019, le Conseil national de l'Ordre des médecins a examiné si un médecin est déontologiquement contraint de soigner un patient insolvable.
La Constitution belge dispose que chacun a le droit à la sécurité sociale, à la protection de la santé et à l'aide sociale, médicale et juridique (article 23, troisième alinéa, 2°, Constitution belge). Il se fait néanmoins que certaines personnes ne bénéficient pas à un moment donné de la sécurité sociale. Il s'agit en particulier des patients sans domicile, des personnes non assurées et des personnes en séjour illégal.
Malgré les systèmes de protection que sont les CPAS et la CAAMI, les médecins peuvent se retrouver face à des patients complètement démunis de moyens de paiement.
L'Ordre des médecins est interrogé sur l'attitude à adopter si, après la mise en route d'un traitement, il apparaît qu'aucune instance ne prend en charge les honoraires et frais engagés et que le patient n'a pas de fonds propres.
Il lui revient que, dans certains hôpitaux, les frais seraient réclamés au médecin hospitalier lui-même. Pourtant, le BMF (budget des moyens financiers des hôpitaux) prévoit un poste de financement destiné à l'accompagnement des patients avec problèmes sociaux ou financiers (le B8). Le montant de ce poste est calculé sur la base des caractéristiques socio-économiques des patients admis.
Des patients bénéficiant de la sécurité sociale peuvent avoir des difficultés à assumer les frais engendrés par leur état de santé et leur traitement.
Les autorités ont pris des mesures pour prévenir ces situations, dont le maximum à facturer (MAF), le tiers payant automatique et les avantages financiers liés au dossier médical global et au renvoi vers un spécialiste par un généraliste. Il y a également le Fonds spécial de solidarité(1).
La loi relative aux droits du patient stipule que le patient a droit, de la part du praticien professionnel, à des prestations de qualité répondant à ses besoins (art. 5, Loi du 22 août 2002 relative aux droits du patient).
Le Code de déontologie médicale précise que le médecin soigne avec la même conscience et sans discrimination tous les patients (art. 30, Code de déontologie médicale 2018).
Ce principe déontologique de non-discrimination signifie que le médecin ne peut jamais faire dépendre sa décision de prendre en charge un patient de la situation financière de celui-ci. Le médecin ne peut pas faire de discrimination basée sur le patrimoine et a, en outre, le devoir de traiter avec la même qualité tous ses patients.
Chaque patient doit avoir accès au système de soins et a droit à tous les soins nécessaires à une vie conforme à la dignité humaine. Le médecin peut devoir orienter le patient, après lui avoir administré les soins urgents nécessaires, vers les instances spécialement mises en place pour assurer l'aide aux personnes insolvables. Cette situation existe dans une ville comme Bruxelles où les CPAS ont des accords avec certains hôpitaux. Un patient admis dans l'institution « la plus proche » peut devoir être transféré vers une institution agréée par le CPAS dont il dépend.
En pratique, le Conseil national ne peut définir d'attitude uniforme à adopter face aux situations de précarité et d'insolvabilité en ce qui concerne tant l'accès aux soins que la procédure de recouvrement des factures de soins.
Pour trouver la meilleure solution face aux cas particuliers, que ce soit dans le cadre des soins hospitaliers ou des cercles de médecins généralistes, on pourrait mettre en place des « groupes de réflexion » qui pourraient élaborer des directives concernant l'accès aux soins de qualité pour tous les patients et réfléchir au budget à y consacrer et aux modalités de recouvrement des factures de soins impayées.
Lors de l'élaboration des directives, le respect de la dignité humaine doit rester la règle de base. En effet, il est ici question du droit aux soins d'un groupe particulièrement vulnérable de la population.
Pour les soins hospitaliers, le groupe de réflexion pourrait se composer d'un médecin traitant, d'un membre du comité d'éthique, d'un délégué du conseil médical, du médecin-chef et du directeur financier ou administratif ou de l'un de ses représentants. Les services sociaux compétents pourraient aussi être consultés dans ce cadre. Au vu de la complexité des statuts légaux(2), il est préférable d'impliquer également le juriste hospitalier dans cette matière.
Pour la première ligne, ce groupe de réflexion pourrait se composer du président du cercle de médecins généralistes, d'un éthicien, d'un ou de plusieurs médecins généralistes, ainsi que d'un travailleur social et/ou d'un juriste.
Le groupe de réflexion se réunirait de façon ad hoc. Il respecterait le secret professionnel et le Règlement général sur la protection des données(3).
(2) https://www.riziv.fgov.be/fr/themes/cout-remboursement/facilite-financiere/Pages/default.aspx#.XYCQD2bLi70 ; http://www.agii.be/thema/vreemdelingenrecht-internationaal-privaatrecht/sociaal-medisch/wie-betaalt-welke-medische-kosten/medische-kosten-per-betalingsregeling; http://www.agii.be/thema/vreemdelingenrecht-internationaal-privaatrecht/sociaal-medisch/wie-betaalt-welke-medische-kosten/medische-kosten-per-verblijfssituatie
(3) Règlement (UE) 2016/679 du Parlement européen et du Conseil du 27 avril 2016 relatif à la protection des personnes physiques à l'égard du traitement des données à caractère personnel et à la libre circulation de ces données, et abrogeant la directive 95/46/CE
voir AR du 23 décembre 2021 : les données nécessaires dans le DMG restent inchangées.