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Secret professionnel07/10/2000 Code de document: a090018
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Déclaration d'Helsinki

DECLARATION D’HELSINKI

A l’occasion de sa cinquante deuxième assemblée générale, tenue à Edimbourg du 3 au 7 octobre 2000, l’Association Médicale Mondiale a adopté le texte révisant la déclaration d’Helsinki dont l’élaboration et l’étude avaient été confiées à une commission en avril 1999.

La Déclaration princeps remonte à 1964 et quatre amendements y furent apportés (1975-1983-1989-1996).
La subdivision diffère des versions précédentes : un préambule introductif expose les principes : le chapitre suivant détaille les fondamentaux qui doivent régir l’expérimentation sur le sujet sain capable ou non d’exprimer un consentement volontaire. Le troisième traite des divers aspects de la recherche en cours de traitement.

DECLARATION D'HELSINKI DE L'ASSOCIATION MEDICALE MONDIALE

Principes éthiques applicables aux recherches médicales sur des sujets humains

Adoptée par la 18e Assemblée générale, Helsinki, Juin 1964

et amendée par les
29e Assemblée générale, Tokyo, Octobre 1975
35e Assemblée générale, Venise, Octobre 1983
41e Assemblée générale, Hong Kong, Septembre 1989
48e Assemblée générale, Somerset West (Afrique du Sud), Octobre 1996
et la 52e Assemblée générale, Edimbourg, Octobre 2000

A. INTRODUCTION

1. La Déclaration d'Helsinki, élaborée par l'Association Médicale Mondiale, constitue une déclaration de principes éthiques dont l'objectif est de fournir des recommandations aux médecins et autres participants à la recherche médicale sur des êtres humains. Celle-ci comprend également les études réalisées sur des données à caractère personnel ou des échantillons biologiques non anonymes.

2. La mission du médecin est de promouvoir et de préserver la santé de l'être humain. Il exerce ce devoir dans la plénitude de son savoir et de sa conscience.

3. Le Serment de Genève de l'Association médicale mondiale lie le médecin dans les termes suivants : "La santé de mon patient sera mon premier souci" et le Code international d'éthique médicale énonce que "le médecin devra agir uniquement dans l'intérêt de son patient lorsqu'il lui procure des soins qui peuvent avoir pour conséquence un affaiblissement de sa condition physique ou mentale".

4. Les progrès de la médecine sont fondés sur des recherches qui, in fine, peuvent imposer de recourir à l'expérimentation humaine.

5. Dans la recherche médicale sur les sujets humains, les intérêts de la science et de la société ne doivent jamais prévaloir sur le bien-être du sujet.

6. L'objectif essentiel de la recherche médicale sur des sujets humains doit être l'amélioration des méthodes diagnostiques, thérapeutiques et de prévention, ainsi que la compréhension des causes et des mécanismes des maladies. Les méthodes diagnostiques, thérapeutiques et de prévention, même les plus éprouvées, doivent constamment être remises en question par des recherches portant sur leur efficacité, leur efficience et leur accessibilité.

7. Dans la recherche médicale comme dans la pratique médicale courante, la mise en œuvre de la plupart des méthodes diagnostiques, thérapeutiques et de prévention expose à des risques et à des contraintes.

8. La recherche médicale est soumise à des normes éthiques qui visent à garantir le respect de tous les êtres humains et la protection de leur santé et de leurs droits. Certaines catégories de sujets sont plus vulnérables que d'autres et appellent une protection adaptée. Les besoins spécifiques des sujets défavorisés au plan économique comme au plan médical doivent être identifiés. Une attention particulière doit être portée aux personnes qui ne sont pas en mesure de donner ou de refuser elles-mêmes leur consentement, à celles qui sont susceptibles de donner leur consentement sous la contrainte, à celles qui ne bénéficieront pas personnellement de la recherche et à celles pour lesquelles la recherche est conduite au cours d'un traitement.

9. L'investigateur doit être attentif aux dispositions éthiques, légales et réglementaires applicables à la recherche sur les sujets humains dans son propre pays ainsi qu'aux règles internationales applicables. Aucune disposition nationale d'ordre éthique, légal et réglementaire ne doit conduire à affaiblir ou supprimer les mesures protectrices énoncées dans la présente déclaration.

B. PRINCIPES FONDAMENTAUX APPLICABLES A TOUTE FORME DE RECHERCHE MEDICALE

10. Dans la recherche médicale, le devoir du médecin est de protéger la vie, la santé, la dignité et l'intimité de la personne.

11. La recherche médicale sur des êtres humains doit se conformer aux principes scientifiques généralement reconnus. Elle doit se fonder sur une connaissance approfondie de la littérature scientifique et des autres sources pertinentes d'information ainsi que sur une expérimentation appropriée réalisée en laboratoire et, le cas échéant, sur l'animal.

12. Des précautions particulières doivent entourer les recherches pouvant porter atteinte à l'environnement et le bien-être des animaux utilisés au cours des recherches doit être préservé.

13. La conception et l'exécution de chaque phase de l'expérimentation sur des sujets humains doivent être clairement définies dans un protocole expérimental. Ce protocole doit être soumis pour examen, commentaires, avis et, le cas échéant, pour approbation, à un comité d'éthique mis en place à cet effet. Ce comité doit être indépendant du promoteur, de l'investigateur ou de toute autre forme d'influence indue. Il doit respecter les lois et règlements en vigueur dans le pays où s'effectuent les recherches. Il a le droit de suivre le déroulement des études en cours. L'investigateur a l'obligation de fournir au comité des informations sur le déroulement de l'étude portant en particulier sur la survenue d'événements indésirables d'une certaine gravité. L'investigateur doit également communiquer au comité, pour examen, les informations relatives au financement, aux promoteurs, à toute appartenance à une ou des institutions, aux éventuels conflits d'intérêt ainsi qu'aux moyens d'inciter des personnes à participer à une recherche.

14. Le protocole de la recherche doit contenir une déclaration sur les implications éthiques de cette recherche. Il doit préciser que les principes énoncés dans la présente déclaration sont respectés.

15. Les études sur l'être humain doivent être conduites par des personnes scientifiquement qualifiées et sous le contrôle d'un médecin compétent. La responsabilité à l'égard d'un sujet inclus dans une recherche doit toujours incomber à une personne médicalement qualifiée et non au sujet, même consentant.

16. Toute étude doit être précédée d'une évaluation soigneuse du rapport entre d'une part, les risques et les contraintes et d'autre part, les avantages prévisibles pour le sujet ou d'autres personnes. Cela n'empêche pas la participation à des recherches médicales de volontaires sains. Le plan de toutes les études doit être accessible.

17. Un médecin ne doit entreprendre une étude que s'il estime que les risques sont correctement évalués et qu'ils peuvent être contrôlés de manière satisfaisante. Il doit être mis un terme à la recherche si les risques se révèlent l'emporter sur les bénéfices escomptés ou si des preuves consistantes de résultats positifs et bénéfiques sont apportées.

18. Une étude ne peut être réalisée que si l'importance de l'objectif recherché prévaut sur les contraintes et les risques encourus par le sujet. C'est particulièrement le cas lorsqu'il s'agit d'un volontaire sain.

19. Une recherche médicale sur des êtres humains n'est légitime que si les populations au sein desquelles elle est menée ont des chances réelles de bénéficier des résultats obtenus.

20. Les sujets se prêtant à des recherches médicales doivent être des volontaires informés des modalités de leur participation au projet de recherche.

21. Le droit du sujet à la protection de son intégrité doit toujours être respecté. Toutes précautions doivent être prises pour respecter la vie privée du sujet, la confidentialité des données le concernant et limiter les répercussions de l'étude sur son équilibre physique et psychologique.

22. Lors de toute étude, la personne se prêtant à la recherche doit être informée de manière appropriée des objectifs, méthodes, financement, conflits d'intérêts éventuels, appartenance de l'investigateur à une ou des institutions, bénéfices attendus ainsi que des risques potentiels de l'étude et des contraintes qui pourraient en résulter pour elle. Le sujet doit être informé qu'il a la faculté de ne pas participer à l'étude et qu'il est libre de revenir à tout moment sur son consentement sans crainte de préjudice. Après s'être assuré de la bonne compréhension par le sujet de l'information donnée, le médecin doit obtenir son consentement libre et éclairé, de préférence par écrit. Lorsque le consentement ne peut être obtenu sous forme écrite, la procédure de recueil doit être formellement explicitée et reposer sur l'intervention de témoins.

23. Lorsqu'il sollicite le consentement éclairé d'une personne à un projet de recherche, l'investigateur doit être particulièrement prudent si le sujet se trouve vis-à-vis de lui dans une situation de dépendance ou est exposé à donner son consentement sous une forme de contrainte. Il est alors souhaitable que le consentement soit sollicité par un médecin bien informé de l'étude mais n'y prenant pas part et non concerné par la relation sujet-investigateur.

24. Lorsque le sujet pressenti est juridiquement incapable, physiquement ou mentalement hors d'état de donner son consentement ou lorsqu'il s'agit d'un sujet mineur, l'investigateur doit obtenir le consentement éclairé du représentant légal en conformité avec le droit en vigueur. Ces personnes ne peuvent être inclues dans une étude que si celle-ci est indispensable à l'amélioration de la santé de la population à laquelle elles appartiennent et ne peut être réalisée sur des personnes aptes à donner un consentement.

25. Lorsque le sujet, bien que juridiquement incapable (un mineur par exemple), est cependant en mesure d'exprimer son accord à la participation à l'étude, l'investigateur doit obtenir que cet accord accompagne celui du représentant légal.

26. La recherche sur des personnes dont il est impossible d'obtenir le consentement éclairé, même sous forme de procuration ou d'expression préalable d'un accord, ne doit être conduite que si l'état physique ou mental qui fait obstacle à l'obtention de ce consentement est une des caractéristiques requises des sujets à inclure dans l'étude. Les raisons spécifiques d'inclure des sujets dans une étude en dépit de leur incapacité à donner un consentement éclairé doivent être exposées dans le protocole qui sera soumis au comité pour examen et approbation. Le protocole doit également préciser que le consentement du sujet ou de son représentant légal à maintenir sa participation à l'étude doit être obtenu le plus rapidement possible.

27. Les auteurs et les éditeurs de publications scientifiques ont des obligations d'ordre éthique. Lors de la publication des résultats d'une étude, les investigateurs doivent veiller à l'exactitude des résultats. Les résultats négatifs aussi bien que les résultats positifs doivent être publiés ou rendus accessibles. Le financement, l'appartenance à une ou des institutions et les éventuels conflits d'intérêt doivent être exposés dans les publications. Le compte-rendu d'une étude non conforme aux principes énoncés dans cette déclaration ne doit pas être accepté pour publication.

C. PRINCIPES APPLICABLES A LA RECHERCHE MEDICALE CONDUITE AU COURS D'UN TRAITEMENT

28. Le médecin ne peut mener une recherche médicale au cours d'un traitement que dans la mesure où cette recherche est justifiée par un possible intérêt diagnostique, thérapeutique ou de prévention. Quand la recherche est associée à des soins médicaux, les patients se prêtant à la recherche doivent bénéficier de règles supplémentaires de protection.

29. Les avantages, les risques, les contraintes et l'efficacité d'une nouvelle méthode doivent être évalués par comparaison avec les meilleures méthodes diagnostiques, thérapeutiques ou de prévention en usage. Cela n'exclut ni le recours au placebo ni l'absence d'intervention dans les études pour lesquelles il n'existe pas de méthode diagnostique, thérapeutique ou de prévention éprouvée.

30. Tous les patients ayant participé à une étude doivent être assurés de bénéficier à son terme des moyens diagnostiques, thérapeutiques et de prévention dont l'étude aura montré la supériorité.

31. Le médecin doit donner au patient une information complète sur les aspects des soins qui sont liés à des dispositions particulières du protocole de recherche. Le refus d'un patient de participer à une étude ne devra en aucun cas porter atteinte aux relations que le médecin entretient avec ce patient.

32. Lorsqu'au cours d'un traitement, les méthodes établies de prévention, de diagnostic ou de thérapeutique s'avèrent inexistantes ou insuffisamment efficaces, le médecin, avec le consentement éclairé du patient, doit pouvoir recourir à des méthodes non éprouvées ou nouvelles s'il juge que celles-ci offrent un espoir de sauver la vie, de rétablir la santé ou de soulager les souffrances du malade. Ces mesures doivent, dans toute la mesure du possible, faire l'objet d'une recherche destinée à évaluer leur sécurité et leur efficacité. Toute nouvelle information sera consignée et, le cas échéant, publiée. Les autres recommandations appropriées énoncées dans la présente déclaration s'appliquent.

Commentaires

Nous n’entreprendrons pas de comparer les différentes versions amendées afin de souligner les nouveautés.

Par contre, nous avons choisi de confronter ces recommandations au code de déontologie belge (chapitre VIII, articles 89 à 94, version 1992 (1) et à l’avis émis au même moment sur les Comités d’éthique (2). Cette mise en perspective sera étendue à la convention européenne sur les droits de l’homme et la biomédecine (1997) (3).

Précisons qu’il s’agit d’un document de nature éthique et non d’un texte légal. Au cours des discussions préparatoires auxquelles la délégation belge a participé, il a été précisé qu’en cas de dispositions légales contraires, les responsables de la santé d’un pays pouvaient utiliser ce texte pour convaincre leurs dirigeants politiques d’adapter leur législation aux règles de l’éthique.

Le contenu de l’article 89 du code en communauté avec celui de la Déclaration en ce que l’expérimentation animale est posée comme préalable, quoique tempérée par le terme «le cas échéant»; elle recommande en outre une attention au bien-être de l’animal.

L’article 90 traite de l’expérimentation sur le sujet sain.
Le code semble exclure le mineur; la Déclaration est discrète à ce sujet (article 25). Ceci dissimule peut-être une réflexion qui s’opère au sujet de la médication pédiatrique. Le Comité permanent des médecins européens se penche sur un projet de déclaration; les U.S.A. se sont dotés en 1999 d’une «Pediatric rule» qui encourage la recherche dans le domaine pédiatrique (4). On conviendra cependant qu’il s’agit d’un sujet difficile ayant trait surtout à l’oncologie.
Le code exclut également ceux qui sont privés de liberté au premier rang desquels figurent les prisonniers. La déclaration, à ce sujet, ne mentionne en son article 8 que «celles qui sont susceptibles de donner leur consentement sous la contrainte» mais introduit l’importante notion de dépendance vis-à-vis du médecin (assistants, étudiants, personnel) pour lesquels le consentement devrait être recueilli par un autre médecin que l’expérimentateur.
Il importe aussi de tenir compte qu’en médecine carcérale, une évolution des idées se fait jour (5). Elle tend à admettre l’expérimentation dans des conditions d’information, de consentement et d’exécution similaires à celle des sujets en liberté, et en tous cas à poursuivre une expérimentation thérapeutique débutée avant et en cours au moment de l’incarcération.
Par contre, la déclaration est plus explicite quant aux informations à délivrer à l’expérimenté, quant à la recherche du bénéfice et quant à la balance de celui-ci avec les risques.

L’article 91 cite les contre-indications à l’expérimentation.
Elles peuvent se déduire en négatif de la lecture de la déclaration, lorsque les conditions prônées ne sont pas rencontrées. Elles sont clairement détaillées aux articles 16 et 17 de la Convention européenne sur la biomédecine.

L’article 92 §1 récuse le placebo dans l’essai en cours de traitement: le sujet doit garder accès à une thérapeutique valable.
La déclaration l’admet au cas où il n’existe aucune thérapeutique «éprouvée». Puisque aucune référence n’est faite aux moyens de la preuve (E.B.M.?, META ANALYSES?), est ici entrouverte la porte que la F.D.A.(6) avait désiré rendre béante en imposant systématiquement l’épreuve contre placebo qu’elle considère comme seul point de référence fixe et fiable pour une «new drug». On peut ici regretter une insuffisante fermeté de la déclaration à considérer le placebo comme non éthique, s’agissant de patients. Qui pourrait admettre qu’un céphalalgique habituel se voit administrer un placebo ? Sinon l’expérimentateur qui considérerait que les produits habituellement prescrits n’ont pas fait leur preuve (6).

A l’article 92, §2 sont énoncées les garanties. Elles pourraient paraître désuètes si elles n’étaient appuyées par l’avis relatif aux comités d’éthique et par la loi qui les rendent obligatoires pour maintenir l’agréation d’un hôpital. Une revue de cet article contribuerait à dissiper les malentendus.
L’indépendance vis-à-vis du promoteur est à juste titre soulignée dans la déclaration. Elle aura des conséquences pratiques non négligeables.
Ce texte détaille le contenu d’un protocole évoqué par l’article du code.

L’article 92 §3 traite des essais en cas d’affection incurable. Aux incontournables conditions imposées par leur faisabilité, Helsinki ajoute l’absence de méthodes alternatives, voire même une garantie de bénéfice.
La distinction ne devrait-elle pas être opérée entre les incurables vrais et les «non curables susceptibles de le devenir»? Les objectifs nous semblent différents, de même que la rigueur à escompter.

L’article 93 est clair quant à l’indépendance financière. Il répond partiellement à notre remarque au sujet du 92 §2. la Déclaration évoque que cet aspect doit faire partie de l’information à communiquer au comité d’éthique et à la personne qui se soumet à l’expérimentation sans exiger de garantie.
Le contenu de l’article 94 se retrouve à l’état implicite dans la Déclaration qui se fait moins précise quant aux dangers de détérioration du psychisme par un produit expérimenté. Il convient également de rappeler l’article 44 du code qui garantit le secret des dossiers médicaux.

En conclusion : Les articles du code (chapitre VIII) ont été adoptés en 1992 à la lueur du texte de la déclaration d’Helsinki de l’époque. Leur actualité se maintient et les recoupements sont nombreux. Une certaine redondance est propre au texte de l’A.M.M. qui a l’avantage de la précision sur certains points.
L’esprit de la priorité accordée à la personne apparaît clairement dans les deux textes avec le devoir du médecin de la protéger.
La brèche du placebo est regrettable; elle devrait être compensée par un texte national sans ambiguïtés.
Il n’empêche qu’il s’agit d’une déclaration de bon aloi qui a le mérite de préciser les obligations du chercheur ainsi que le rôle des comités d’éthique.

Souhaitons cependant qu’autant la Déclaration que le code abordent sous peu le problème de l’expérimentation sur l’embryon, ce que n’avait pas manqué de faire la Convention européenne sur les droits de l’homme et la biomédecine, quoiqu’en son paragraphe 1, elle se dit applicable aux «échantillons biologiques identifiables».

Mentionnons pour terminer que le Conseil national termine la mise au point de cycles de formation pour les membres des comités d’éthique de chaque province. La question de l’expérimentation y figurera pour une large part.

Pr G. De Roy
Dr F. Philippart

Notes :

1. Code de déontologie médicale (Version 1997)
Elaboré par le Conseil national de l’Ordre des médecins

2. Bioéthique et Conseil national de l’Ordre des médecins
Avis du 14.12.1991
B.C.N.O.M. n° 55, pp. 32 et sv.

3. Convention européenne sur les droits de l’homme et la biomédecine
Strasbourg, mai 1997.

4. «Les deux tiers des médicaments pour enfants ont été conçus pour les adultes»
V. LORELLE
Journal Le Monde, 03.11.2000, p. 20.

5. Santé et détention
Dr VAN MOL, 1999.

6. «Déclaration of Helsinki should be strengthened»
ROTHMAN, MICHELS, BAUM
British medical journal, 12.08.2000
Vol. 321 442-5

Consentement éclairé24/04/1999 Code de document: a085006
Formulaire de consentement éclairé

Un Conseil provincial demande l'avis du Conseil national à propos d'un document au moyen duquel un patient devrait donner son consentement éclairé.

Avis du Conseil national :

A l'heure actuelle aucun texte législatif n'impose d'une façon générale au médecin d'informer le malade, hormis des situations spécifiques et ponctuelles (avortement, essai clinique des médicaments, prélèvement d'organes sur donneur vivant, ... )

Les tribunaux se basent sur la doctrine et la jurisprudence, abondantes et détaillées, s'il échet. Doctrine et jurisprudence ont comme base dans ce domaine le respect de la personne et le droit à son intégrité physique.

L'information du malade et son corollaire le consentement éclairé sont essentiellement des obligations déontologiques, reprises dans le Code de déontologie médicale, (art. 29), le guide européen d'éthique médicale, la charte européenne du malade hospitalisé, la déclaration d'Amsterdam sur les droits du patient et la déclaration d'Helsinki en ce qui concerne l'expérimentation.

Le document de "consentement éclairé " soumis par le Conseil n'aborde pas le point de vue déontologique mais a comme but évident la couverture de la responsabilité juridique du médecin en cas de litige éventuel.

Le Conseil national ne se prononce pas sur la valeur juridique d'un tel document mais n'est pas favorable à l'utilisation systématique d'un tel formulaire, qui doit rester réservé à des situations d'exception, lorsqu'un litige est réellement à craindre. Il risque en effet d'introduire un élément juridictionnel et par là une certaine méfiance dans la relation médecin malade. Au sein de celle ci une atmosphère de confiance réciproque est nécessaire pour que l'information soit réellement efficace, adaptée à la psychologie du patient et ouverte à toutes ses questions.

Secret professionnel23/01/1999 Code de document: a083013
Avant-projet de loi relatif aux droits du patient

Le Conseil national est réuni en séance extraordinaire afin d'émettre un avis à propos :

  1. des trois avant-projets de loi concernant la réforme de l'Ordre des médecins, à savoir :

    • l'"avant-projet de loi modifiant l'arrêté royal n° 79 du 10 novembre1967 relatif à l'Ordre des médecins, l'arrêté royal n° 80 du 10 novembre 1967 relatif à l'Ordre des pharmaciens et l'arrêté royal n° 78 du 10 novembre 1967 relatif à l'exercice de l'art de guérir, de l'art infirmier, des professions paramédicales et aux commissions médicales";
    • l'"avant-projet de loi concernant les juridictions disciplinaires administratives et les juridictions disciplinaires administratives d'appel des professions de la santé";
    • l'"avant-projet de loi instituant un Conseil fédéral de déontologie des professions de la santé".

    - voir avis : BCN 83 p. 17 (a083012f) -

  2. de l'"avant-projet de loi portant modification de la loi sur les hôpitaux coordonnée le 7 août 1987 et de l'arrêté royal n° 78 du 10 novembre 1967 relatif à l'exercice de l'art de guérir, de l'art infirmier, des professions paramédicales et aux commissions médicales" (dit : avant-projet de loi relatif aux droits du patient).

AVIS DU CONSEIL NATIONAL CONCERNANT L'AVANT-PROJET DE LOI RELATIF AUX DROITS DES PATIENTS

Comme l'avant-projet de loi relatif aux droits des patients sera prochainement examiné en Commission de la Santé publique de la Chambre des Représentants, le Conseil national de l'Ordre des médecins estime opportun de donner d'initiative un avis sur cet avant-projet de loi, et de le porter à la connaissance du Ministre compétent, des Présidents et Présidents des groupes parlementaires, du Président et des membres de la Commission de la Santé publique. Le Conseil national a en effet une longue expérience en matière d'information au et à propos du patient, du consentement éclairé et dans des matières en pleine évolution comme la transmission des données médicales à caractère personnel et la consultation du dossier médical. Au fil des ans, des directives et avis dans toutes ces matières ont été donnés aux médecins.

Le Conseil national est d'avis qu'un travail législatif sur ces thèmes s'indique, non seulement pour le patient et ses proches, mais aussi qu'il est à même de promouvoir l'exercice déontologique de la médecine. Il est clair que si à terme une reconnaissance des règles de la déontologie médicale par le pouvoir législatif sera utile devant l'évolution sociale, technique et médicale de la société, la déontologie pourra y apporter une solution plus rapide.
A titre d'exemple, le Conseil national rappelle les directives déontologiques en matière de vie finissante, de la prise en charge des toxicomanes, des problèmes suscités par la fécondation, la stérilisation des handicapés mentaux et la transmission des données médicales à caractère personnel aux et à propos des patients.

***

Dans l'actuel avant-projet de loi, le patient est considéré comme une personne seule, isolée de son entourage, et pour laquelle des tiers n'interviennent que lorsque le patient lui-même n'est pas en état d'assimiler l'information nécessaire ou de prendre une décision. Il y est fait abstraction des relations du patient avec des personnes de son entourage qui comptent pour lui et qui peuvent le soutenir. Une approche intersubjective serait toutefois plus conforme à la réalité, parce que, dès le début d'une maladie, une interaction se crée entre le patient et son entourage. Ce dernier est habituellement associé d'emblée à l'information concernant l'affection et joue dès lors un rôle important dans les choix à faire et le consentement à donner. On n'insistera jamais assez sur le rôle du médecin traitant en ce domaine. L'avant-projet de loi isole le patient de cet entourage et procède d'une réalité fictive.

Le contenu de l'avant-projet de loi s'articule sur des prémisses artificielles et réductionnistes. La relation de confiance de type horizontal entre le patient et son médecin est ramenée à une énumération des communications à faire. Il est frappant de constater que l'avant-projet de loi ne fait pas état de la liberté de choix du médecin par le patient, élément fondamental s'il en est de toute relation de confiance. On n'y retrouve aucune trace du dialogue nécessaire entre le médecin et le patient qui ensemble doivent rechercher la meilleure solution au problème posé. Dans ce dialogue, le patient a la possibilité de poser ses questions et d'exprimer ses craintes et ses attentes alors que le médecin quant à lui recherche et présente les solutions qu'il tire de sa connaissance de l'homme et de la médecine. Cette attitude fondamentale fait défaut dans l'avant-projet qui se compose pour ainsi dire exclusivement d'obligations à l'adresse des médecins et des autres praticiens. Dès lors, le concept de base de l'avant-projet n'est pas de nature à favoriser le dialogue médecin-patient et la nécessaire relation de confiance entre eux.

***

Nonobstant les deux objections fondamentales susmentionnées, le Conseil national, après une analyse des articles de l'avant-projet de loi, constate :

  • L'avant-projet de loi ne souligne pas que le médecin n'a en principe qu'une obligation de moyen dont le résultat ne peut que rarement être déterminé au préalable avec certitude. Suivant la doctrine et la jurisprudence, il ne peut être question d'une obligation de résultat que dans des cas exceptionnels. Il serait sage de l'énoncer dans le projet de loi afin d'éviter de fausses certitudes.

  • Les informations fournies par écrit (article 7bis, § 1er, dernier alinéa) et le consentement donné par écrit (article 7ter, § 1er, 2ème alinéa) font figure, dans le projet, de garanties supplémentaires pour le médecin et le patient. Ces exigences pourraient réduire le nécessaire dialogue médecin-patient à l'établissement de formulaires standard ou à la remise d'imprimés.

  • Une personne de confiance peut assurément s'avérer utile dans certains cas (article 7bis, § 2 et § 5, article 7ter, § 4, article 17novies, § 3), mais la question se pose de savoir si cette désignation doit se faire par un mandat spécial donné par écrit stipulant quelles données peuvent être communiquées aux tiers et qui sont ces tiers. Ceci semble aller à l'encontre de la confiance dans la personne désignée.

  • Il est surprenant de constater qu'il est fait appel à l'article 458 du Code pénal pour imposer le secret tant à la personne de confiance qu'aux proches parents (article 7bis, § 5, dernier alinéa). Le Conseil national estime que si ces personnes doivent gérer avec discrétion l'information reçue, il ne se conçoit pas de les poursuivre devant les juridictions répressives pour s'en être ouvertes ou avoir demandé conseil à des personnes compétentes. Un tel secret n'existe d'ailleurs pas pour les parents d'un mineur d'âge.

  • Les restrictions imposées aux droits des mineurs sont gênantes et contraires à la Convention relative aux Droits de l'Enfant, ratifiée par la Belgique. Contrairement à l'avant-projet, cette Convention ne rend aucun droit dépendant de l'âge. Le critère déterminant de la Convention est celui de la "correspondance avec le développement des capacités de l'enfant". Dans ses avis concernant le traitement des enfants mineurs, le Conseil national se réfère aux notions d' " âge de raison" et de " capacité de discernement". Il est donc totalement dépassé de prendre comme principe, sans le nuancer, que les mineurs d'âge ne peuvent donner un consentement et qu'au-dessous de l'âge de 14 ans, par exemple, la prescription d'un anovulatoire est impossible sans le consentement des parents.

  • L'avant-projet de loi prévoit que les majeurs qui ne sont pas considérés comme aptes à apprécier raisonnablement leurs intérêts, peuvent disposer d'une personne de confiance (article 7bis, § 5). On se demande à quel moment ces majeurs doivent désigner leur personne de confiance et comment, en cas de conflit d'intérêts, les intérêts du majeur seront protégés.

  • L'avant-projet de loi prévoit à l'article 7bis, § 7, que le patient peut décider de ne pas être informé de ses données médicales à caractère personnel ou de l'être seulement partiellement. Par rapport à ce choix, il est inquiétant de constater que le praticien peut, sans l'autorisation du patient, transmettre des données à des tiers lorsqu'il le juge nécessaire pour la santé du patient (§8 de ce même article), et que le §9 de cet article précise que l'information peut malgré tout être fournie au patient, contre sa volonté, si le défaut d'information risque de porter atteinte à sa santé. Il est encore plus étonnant que le refus ou le retrait du consentement doive se faire par écrit et que malgré ce refus ou ce retrait de consentement, des examens et des traitements puissent se poursuivre afin d'éviter un préjudice grave au patient (art.7 ter, § 6).

  • L'article 17decies, § 1er, de la Loi sur les Hôpitaux prévoit que, sans préjudice de l'article 7quater de l'arrêté royal n° 78, le médecin-chef permet au patient de consulter le dossier médical le concernant et d'en obtenir copie. On oublie à cet égard que le médecin-chef n'est que le dépositaire des dossiers médicaux qui lui sont confiés par les médecins hospitaliers.

    Le médecin-chef n'a pas connaissance du contenu de ces dossiers; il se borne à les tenir à la disposition des médecins hospitaliers. Il ne peut lui incomber de donner aux patients le droit de consulter des dossiers qu'il n'a pas constitués lui-même. Il ne peut juger de ce qui est "particulièrement préjudiciable" pour le patient (§ 2, 1er alinéa) et il ne peut non plus juger de l'aptitude du patient (§ 2, 2ème alinéa). De ce fait, il apparaît plus sage de confier le droit, pour un patient, de consulter les dossiers médicaux uniquement à ceux qui les ont constitués, ainsi que le prévoit l'article 7quater de l'arrêté royal n° 78.

  • En ce qui concerne la fonction d'ombudsman définie à l'article 17undecies, § 1er, le Conseil national rappelle que dans la recherche d'un règlement amiable, le médecin est limité par son contrat d'assurance en responsabilité civile: il est obligé de s'en tenir à la communication des faits et, par exemple, ne peut reconnaître avoir commis une faute. Cette limitation est encore plus grande lorsqu'à défaut d'un règlement amiable, l'ombudsman doit informer le patient des autres recours possibles (article 17undecies, §2, 2°).

Sur la base de ces remarques, non exhaustives, le Conseil national est d'avis que l'actuel avant-projet de loi doit être modifié sur des points essentiels, même en partant du concept restrictif sur lequel il est basé.

Le Conseil national estime que pour élaborer une loi concernant des matières qui, depuis tant d'années, font l'objet de réflexions, d'une doctrine, d'une jurisprudence déontologiques, il eût été souhaitable de prendre comme point de départ l'inventaire de ce qui existe. Ceci permettrait ainsi au législateur de conserver ce qui a prouvé son utilité, de rectifier et parfaire ce qui est susceptible d'être amélioré et précisé et de combler ce qui fait défaut.

Ethique médicale17/01/1998 Code de document: a080003
Réforme de l'Ordre des médecins

Par lettre du 24 octobre 1997, Monsieur M. COLLA, Ministre de la Santé publique et des Pensions, a souhaité être informé de la position du Conseil national "à propos de plusieurs points susceptibles de faire l'objet d'une actualisation de l'arrêté royal n° 79 (relatif à l'Ordre des médecins) et des arrêtés d'exécution". Le point de vue et les suggestions du Conseil national devaient lui parvenir, de préférence, dans un délai de trois mois.

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Lettre de monsieur M. COLLA, ministre de la Santé publique et des Pensions, 24 octobre 1997

Monsieur le Président,

Suite à un entretien qui a réuni mon collaborateur et les vice-présidents de votre Conseil, je souhaite être informé de la position du Conseil national à propos de plusieurs points susceptibles de faire l'objet d'une actualisation de l'arrêté royal n° 79 et des arrêtés d'exécution.

Le rôle de l'autorité de tutelle vis-à-vis de l'Ordre est actuellement très limité, voire impossible pour certains points. Un rapport analytique annuel concernant la politique normative et disciplinaire ainsi qu'un rapport financier permettraient au Ministre de se faire une idée plus concrète du fonctionnement de l'Ordre. Sans interférer dans l'autonomie de l'Ordre et de ses organes, une forme de concertation entre le Ministre et l'Ordre pourrait contribuer à une meilleure adéquation du fonctionnement de l'Ordre par rapport aux évolutions que connaît la société.

Il m'apparaît qu'une actualisation de l'article 15, § 1er, définissant la mission du Conseil national, s'avère nécessaire au regard de la Déclaration d'Amsterdam sur les droits du patient.

La sanction du Code par un arrêté royal délibéré en Conseil des Ministres permettrait de contribuer à une plus grande sécurité juridique, et pourrait résoudre certains problèmes qui se posent à l'heure actuelle vis-à-vis du Conseil d'Etat.

Il semble s'établir un consensus autour de la nécessité d'un rajeunissement des organes de l'Ordre -associé ou non à l'instauration d'une limite d'âge- et autour d'une plus grande ouverture participant d'un fonctionnement democratique.

Je me pose la question de savoir s'il n'y aurait pas lieu de prévoir une place dans la composition du Conseil national, par exemple pour des éthiciens, afin que la déontologie soit plus étroitement raccordée aux évolutions éthiques. Ceci pourrait contribuer à un renforcement de l'autorité morale de l'Ordre.

Je crois comprendre que nous partageons un certain nombre de préoccupations sur le plan du renforcement des droits de la défense, de l'élargissement des garanties accordées au prévenu, d'une fixation plus claire de la mesure de la peine, d'un éclaircissement et d'une amélioration de la position du plaignant, de la diversification des sanctions et des possibilités de sursis, de remise et de réhabilitation, ainsi que de l'introduction de la possibilité de mesures conservatoires dans les cas graves.

En ce qui concerne la publicité des audiences en première instance également, je crois comprendre que les objections, empêchant cette publicité, sont plutôt d'ordre pratique comme le fait de disposer de salles d'audience suffisamment grandes.

La cotisation à l'Ordre reste source de critique. Une plus grande transparence à propos de l'affectation des moyens et un entérinement par le Ministre du montant de la cotisation pourraient être envisagés.

Je suis ouvert à la discussion des autres points qui vous préoccupent : la communication des sanctions aux intéressés entrant en considération, la communication de sanctions au niveau européen, la position du Conseil national en tant qu'organe consultatif dans l'établissement de la politique à suivre, la différence entre les délais d'appel dont disposent les magistrats assesseurs d'une part et les prévenus d'autre part, la problématique de l'activité médicale dispersée en plusieurs provinces et celle des Conseils du Brabant par rapport à la Région de Bruxelles-Capitale.

Je vous saurais gré de me faire connaître le point de vue et les suggestions du Conseil national à propos de tous les points précités, de préférence dans un délai de trois mois.

Réponse du Conseil national :

Le Conseil national de l'Ordre des médecins a examiné votre lettre du 24 octobre 1997 par laquelle vous demandez à être informé de la position du Conseil national à propos de plusieurs points susceptibles de faire l'objet d'une actualisation de l'arrêté royal n° 79 et de ses arrêtés d'exécution.

Le Conseil national estime qu'une réflexion s'impose à partir d'une série de mutations fondamentales qui sont intervenues dans les trente dernières années. On peut citer la modification des structures de l'Etat, la concrétisation croissante des droits de l'homme, les nouvelles tendances en matière de droit disciplinaire et les grands changements qui se sont opérés dans l'exercice de la médecine. C'est seulement à partir de ce cadre de réflexion étendu ainsi que d'une connaissance exacte du fonctionnement actuel de l'Ordre des médecins que peut avoir lieu une évaluation impartiale et nuancée de la législation actuelle.

Il faut rappeler que depuis 1967, le pays a connu différentes réformes constitutionnelles ayant entraîné, notamment sur le plan de la santé publique, une importante redistribution des compétences entre les autorités fédérales des communautés et des régions. Dès lors il faut prendre en considération les répercussions de la réforme de l'Etat sur le Conseil national et ses sections. Le Conseil national a examiné l'incidence que peut avoir la nouvelle répartition institutionnelle de l'Etat fédéral en ce qui concerne l'organisation ordinale pour l'ancienne province du Brabant; il a eu à ce sujet un échange de correspondance avec votre prédécesseur.
A l'initiative des magistrats des conseils de l'Ordre, la procédure disciplinaire a été adaptée à plusieurs reprises pour satisfaire à la Convention européenne des droits de l'homme, à la jurisprudence de la Cour européenne et aux différents arrêts de la Cour de cassation. Alors qu'initialement, l'accent était mis sur les droits de la défense, on voit apparaître ces dernières années une préoccupation sociale croissante pour les droits de la victime. Afin de rencontrer cette préoccupation, une série d'initiatives législatives sont prises à l'heure actuelle, susceptibles de se répercuter sur les principes fondamentaux du droit disciplinaire. Il apparaît aussi que des groupes suffisamment importants pour la société, toujours plus nombreux, prennent conscience de leurs obligations déontologiques envers la collectivité et envisagent, entre autres, la création de collèges disciplinaires. Jusqu'à présent, il a été communément admis que l'intérêt général est la finalité du droit disciplinaire et que celui-ci ne vise pas la protection directe d'intérêts particuliers. Si, pour quelque raison que ce soit, une révision de ce principe devait s'indiquer il y aurait lieu bien évidemment d'associer à cette discussion toutes les professions soumises au droit disciplinaire.

On constate ces dernières décennies, en médecine tant curative que préventive, un glissement de la dispensation individuelle de soins vers une dispensation par des équipes monodisciplinaires ou multidisciplinaires, dont font partie de plus en plus des non-médecins. Si sur le plan normatif cette évolution pose peu de problèmes elle conduit en revanche à des difficulités dans le traitement des plaintes lorsqu'elles s'adressent à charge d'une équipe. Le principe de la responsabilité individuelle des membres de l'équipe méconnaît l'essence même de la notion d'équipe : le travail qui s'accomplit en commun mais sans responsabilité collective apparente.

De ce qui précède, il apparaît que l'Ordre des médecins se caractérise par une forte imbrication de la médecine et du droit, personnifiée par la présence de magistrats dans les différents organes de l'Ordre. Leur présence dans les Conseils provinciaux garantit le respect de la législation et des évolutions de la procédure en matière disciplinaire; par ailleurs, ils disposent au sein des Conseils d'appel d'une voix prépondérante lors de la détermination de la mesure de la peine. En ce qui concerne le Conseil national, la présidence leur en est confiée en la personne d'un conseiller à la Cour de cassation. Vu la relation étroite au sein de l'Ordre entre le droit et la médecine, et l'importante collaboration structurelle entre magistrats et médecins, il s'indique d'en tenir compte à l'occasion d'une actualisation de la législation.

La nomination par le Roi, sur présentation par le ministre compétent, des magistrats, professeurs et greffiers dans les différents conseils de l'Ordre, représente un apport équilibré par l'Autorité qui n'hypothèque pas l'indépendance et l'impartialité des organes de l'Ordre, compte tenu du nombre et du mode d'élection des autres membres. Au sein du Conseil national, le pluralisme est non seulement assuré par la diversité des membres élus, mais aussi par les représentants des différentes Facultés de Médecine du pays.

Toutes les tendances, pour autant que leur importance soit significative, ont la possibilité de faire élire au scrutin secret leur représentant au sein des Conseils de l'Ordre lors d'élections trisannuelles auxquelles tous les médecins sont obligés de participer. La représentativité de l'Ordre ne peut être contestée. Ce mode d'élection est la garantie pour les médecins d'être entendus et jugés par leurs pairs. La Cour européenne des droits de l'homme a d'ailleurs jugé dès 1981 que les collèges disciplinaires de l'Ordre des médecins répondent aux critères d'indépendance et d'impartialité. L'autonomie de tous les organes de l'Ordre est essentielle à l'accomplissement de leur mission. Cette indépendance morale et professionnelle ne peut être garantie que si l'Ordre est indépendant sur le plan matériel et que des médecins conseillers élus par l'ensemble du corps médical déterminent de manière autonome la cotisation des médecins nécessaire à un fonctionnement efficace des Conseils de l'Ordre.

Par la présence de membres des organes de l'Ordre au sein du Comité consultatif de bioéthique, des Académies royales de Médecine, des Facultés de Médecine et des Commissions médicales provinciales, ainsi que par sa participation active aux travaux des associations internationales axées sur la déontologie et l'éthique médicale, le Conseil national est bien impliqué dans toutes les évolutions éthiques concernant l'exercice de la médecine.

Cette présence au niveau international a permis au Conseil national de prendre connaissance, en primeur, de la Déclaration d'Amsterdam à laquelle votre lettre fait référence. Après un travail préparatoire en commission, cette Déclaration a été examinée en détail par le Conseil national. Il est ressorti de cet échange de vues que le Conseil national pouvait se rallier aux principes de base de la Déclaration et que la plupart des droits individuels du patient y mentionnés sont déjà contenus implicitement ou explicitement dans le Code de déontologie médicale et les avis du Conseil national.

Cette Déclaration sur la promotion des droits des patients en Europe recommande, parmi les stratégies à suivre, un code de conduite pour les médecins. Le Conseil national a été surpris de constater qu'au symposium international "Patient's Rights" le droit disciplinaire n'est pas repris dans les "pistes possibles" de protection des droits du patient.

Le Conseil national constate avec regret un écart croissant entre le Ministre de la Santé publique et l'organe de droit public garant de la déontologie médicale.

Confiant de ce que votre lettre du 24 octobre 1997 constitue l'amorce d'un dialogue ouvert et constructif, qui ne peut cependant se limiter aux seuls points retenus, je vous prie d'agréer, Monsieur le Ministre, l'assurance de ma haute considération.

Secret professionnel03/01/0001
Notes (annotations) personnelles dans le dossier patient

Le 27 avril 2019, le Conseil national a rendu un avis concernant les notes (annotations) personnelles dans le dossier patient.

1°/ La loi du 22 août 2002 relative aux droits du patient ne définit pas les notes personnelles.

Ses travaux préparatoires énoncent qu'il s'agit des notes quele médecin a dissimulées à des tiers, voire aux autres membres de l'équipe de soins, qui ne sont jamais accessibles et qui sont réservées à l'usage personnel du prestataire de soins(1).

Le patient ne peut pas les consulter ou en recevoir copie, bien que ces notes fassent partie du dossier patient(2), même s'il est lui-même un praticien professionnel(3). Par contre, s'il exerce son droit de consultation ou de copie de son dossier patient par l'intermédiaire d'une personne de confiance qui est elle-même un praticien professionnel, celle-ci a accès aux notes personnelles du médecin(4).

2°/ Le concept des notes personnelles ne peut pas être utilisé pour des données de santé dont l’accès est limité aux autres professionnels de santé du fait de la volonté du patient.

Tel peut être par exemple le cas de ses confidences sur des aspects qui touchent particulièrement à son intimité.

Les données confiées par le patient sont consultables par celui-ci et ne constituent donc pas une note personnelle.

3°/ Les notes personnelles ne sont pas non plus à confondre avec les données relatives à la santé du patient qui, à titre exceptionnel, ne lui sont pas communiquées en cas de risque manifeste de causer un préjudice grave à sa santé (exception thérapeutique)(5).

L'application de l'exception thérapeutique requiert en effet impérativement que le médecin ait consulté un autre praticien professionnel et en informe l'éventuelle personne de confiance du patient.

4°/ Plus de quinze ans après l'entrée en vigueur de la loi relative aux droits du patient, des questions demeurent concernant les informations qui peuvent être qualifiées de notes personnelles au sens de la loi relative aux droits des patients.

Il ne revient pas au Conseil national de formuler une définition exhaustive mais d'émettre des recommandations de bonne conduite, tenant compte des évolutions intervenues depuis 2002 sur le plan législatif (6), dans la pratique médicale (approche pluridisciplinaire) et dans le domaine des technologies de l'information et de la communication (logiciel de dossier médical électronique ne prévoyant pas toujours une fenêtre destinée aux annotations personnelles).

Le Conseil national considère que les données relatives à la santé physique ou psychique du patient et les données sur lesquelles le médecin fonde les soins qu'il dispense au patient (examen de l'état de santé, élaboration et suivi du diagnostic et du traitement, action de prévention) ne peuvent pas être qualifiées de notes personnelles. Sauf dans le cas de l'exception thérapeutique, il ne se conçoit pas que de telles données ne soient pas accessibles au patient.

N'est pas non plus une note personnelle une information utile à la continuité des soins ou à la prise en charge du patient par un autre professionnel des soins de santé ; il en va de même d'une information relative à la santé du patient reçue d'un autre professionnel des soins de santé.

La rédaction du dossier médical, dont font partie les notes personnelles, doit être empreinte de correction et respecter la dignité du patient. Dès lors, le Conseil national préconise que le médecin s'abstienne de considérations subjectives relatives à la personne du patient étrangères à l'anamnèse ou à la thérapeutique.

Enfin, il partage le constat de la Commission fédérale « Droits du patient » que compte tenu de l'évolution d'une pratique monodisciplinaire vers une collaboration multidisciplinaire, la question se pose de savoir si la notion de notes personnelles, telle qu'elle est décrite dans l'exposé des motifs, est encore suffisamment actuelle(7).



(1) Doc Parl., La Chambre, 50-1642/001, page 33

(2) Avis du 21 novembre 2017 de la Commission fédérale « Droits du patient », Le dossier patient, p. 6

(3) Avis du 11 février 2011 de la Commission fédérale « Droits du patient », Accès d'un prestataire de soins à son propre dossier de patient, p. 3

(4) Article 9, § 2 et § 3, de la loi du 22 août 2002 relative aux droits du patient

(5) Article 7, § 4, et art. 9, § 2, alinéa 5 et § 3,

(6) Loi du 30 juillet 2018 relative à la protection des personnes physiques à l'égard des traitements de données à caractère personnel et projet de loi relatif à la qualité de la pratique des soins de santé

(7) Avis du 21 novembre 2017 de la Commission fédérale « Droits du patient », Le dossier patient, p. 6