Obligation faite au pharmacien lors de la délivrance d’une prescription en dénomination commune internationale et lors de la délivrance d’une prescription d’antibiotiques et d’antimycosiques
1- L'obligation faite au pharmacien de délivrer un des médicaments les moins chers lors de l'exécution d'une prescription en DCI (dénomination commune internationale).
2- La délivrance du médicament le moins cher pour les prescriptions d'antibiotiques et d'antimycosiques, mesure assortie d'une possibilité d'objection thérapeutique de la part du médecin prescripteur.
Avis du Conseil national :
En sa séance du 14 juillet 2012, le Conseil national de l'Ordre des médecins a examiné votre courrier du 30 avril 2012 concernant la substitution d'un médicament prescrit par son médecin traitant par un médicament « moins cher ».
Dans le cadre du contrôle budgétaire, deux mesures gouvernementales ont été prises au début de cette année 2012 :
(1) L'obligation faite au pharmacien de délivrer un des médicaments les moins chers lors de l'exécution d'une prescription en DCI (dénomination commune internationale).
(2) La délivrance du médicament le moins cher pour les prescriptions d'antibiotiques et d'antimycosiques, mesure assortie d'une possibilité d'objection thérapeutique de la part du médecin prescripteur.
1. En ce qui concerne la première mesure :
Depuis le 1er avril 2012, le pharmacien est obligé de choisir, en présence d'une prescription en DCI, un médicament se trouvant dans le groupe des « médicaments les moins chers ».
C'est l'INAMI qui détermine les spécialités « les moins chères » pour chaque groupe de spécialités pharmaceutiques. Pour cela, on utilise un index calculé sur la base du coût par unité ou la base de remboursement divisée par le nombre d'unités du conditionnement. Au sein de chaque groupe, les produits dont l'index ne dépasse pas de 5 % l'index le plus bas sont considérés comme les « médicaments les moins chers ».
Si aucun médicament du groupe des moins chers ne correspond à la prescription, le pharmacien doit suivre un arbre décisionnel défini.
Il s'agit donc de critères purement économiques et logistiques que le pharmacien doit appliquer dans un but d'économie.
Cette procédure met-elle en question la liberté thérapeutique ?
Le Conseil national a émis un avis, le 11 décembre 1993, au moment où le législateur introduisait pour la première fois le concept de substitution médicamenteuse (article 34 de la loi du 6 août 1993 portant des dispositions sociales et diverses). La présente mesure élargit dans une certaine mesure ce concept aux prescriptions en DCI.
Le Conseil national avait alors estimé que, pour pratiquer une substitution dans le respect du code de déontologie, le pharmacien devrait contacter le médecin prescripteur et lui faire part de sa proposition de substitution.
A partir du moment où une médication déterminée prescrite est remplacée ou modifiée - même s'il s'agit d'un produit analogue et/ou similaire - par l'intervention d'un tiers, pour des raisons strictement budgétaires, cela constitue une interférence dans la relation thérapeutique entre le médecin et le patient, et un obstacle au libre choix du médecin et du patient d'une médication déterminée.
Pour maintenir l'équilibre entre la liberté thérapeutique du médecin et son devoir de respecter et de préserver les ressources publiques, une information adéquate des médecins est nécessaire.
Les mesures mises en place sont complexes. Elles sont précisées dans le document « Délivrer le médicament le moins cher », établi par l'Inami et envoyé à tous les médecins le 12 juillet 2012
2. En ce qui concerne la seconde mesure :
L'article 11 de l'arrêté royal n° 78 du 10 novembre 1967 relatif à l'exercice des professions des soins de santé, tel que modifié par l'article 10 de la loi du 17 février 2012 portant des dispositions diverses urgentes en matière de santé, introduit, dans des conditions particulières, une possibilité pour le pharmacien de substituer une spécialité.
Le Conseil national constate que la disposition précitée ne s'applique qu'à une situation particulière puisqu'elle ne concerne que les antibiotiques et les antimycotiques prescrits pour une affection aiguë. Elle n'introduit donc pas la possibilité de substitution d'un traitement déjà en cours.
Selon cet article, « le pharmacien peut substituer à la spécialité pharmaceutique prescrite un autre médicament avec une même substance active ou combinaison de substances actives, un même dosage, une même voie d'administration et une même fréquence d'administration, à condition que le prix soit plus avantageux et que le prescripteur n'ait consigné aucune objection thérapeutique ».
Le fait que ces objections thérapeutiques ne doivent être consignées que dans le dossier médical du patient, préserve le secret professionnel.
Le législateur a également prévu que la substitution ne se fera pas si le prescripteur mentionne une allergie à un excipient ou à tout autre composant du médicament.
Dans ces conditions particulières, la substitution, commandée par des impératifs d'économie nationale, ne se heurte pas à des obstacles d'ordre déontologique.
Dans sa version modifiée par l'article 10 de la loi du 17 février 2012, l'article 11 de l'arrêté royal n° 78 du 10 novembre 1967 permet au Roi, par arrêté délibéré en Conseil des ministres, sur avis de la Commission des médicaments à usage humain et de la Commission nationale médico-mutualiste, de déclarer la substitution applicable entièrement ou partiellement à d'autres classes thérapeutiques de médicaments et éventuellement d'y assortir des modalités.
Le Conseil national sera vigilant et examinera les extensions éventuelles de ce droit de substitution avec attention, en particulier en ce qui concerne les aspects en rapport avec la continuité des soins et le respect des objectifs du prescripteur, donc de la liberté thérapeutique.