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Déontologie

Résultats

Continuité des soins12/05/2007 Code de document: a117005
Refus du médecin urgentiste de poursuivre les soins

Un conseil provincial transmet la lettre conjointe d’un médecin-chef et d’un chirurgien urgentiste d’un hôpital qui s’interrogent sur la conduite à tenir face à des patients avec lesquels ils sont ou ont été en conflit.
Etant évidemment exclue la présence d'une pathologie de caractère urgent ou le danger étant écarté, des problèmes peuvent surgir dans les situations suivantes.

a) Rupture de la confiance du médecin urgentiste:

  • des patients se présentent qui, lors de précédents passages, ont eu un comportement criminel/brutal à l'égard du médecin urgentiste ;
  • des patients se présentent, qui ont intenté un procès au médecin urgentiste.

b) Rupture de la confiance de l'hôpital:

  • suite à un comportement criminel antérieur, le patient ne peut plus être admis à l'hôpital.

Avis du Conseil national :

Concernant cette question, le Conseil national se réfère aux articles 6 et 28 du Code de déontologie médicale :

« Art. 6
Tout médecin doit, quelle que soit sa fonction ou sa spécialité, porter secours d'urgence à un malade en danger immédiat.

Art. 28
Hors le cas d'urgence et celui où il manquerait à ses devoirs d'humanité, un médecin a toujours le droit de refuser ses soins pour des raisons professionnelles ou personnelles.

De même, le médecin peut se dégager de sa mission à condition d'en avertir le patient ou son entourage, d'assurer la continuité des soins, et de fournir toutes les informations utiles au médecin qui lui succède. »

Le Conseil national estime que, dans des circonstances exceptionnelles, le médecin urgentiste peut refuser de poursuivre la dispensation de soins à un patient après s'être assuré qu'il n'a pas affaire à une pathologie extrêmement urgente. Dans ces situations, il y a lieu d’agir en honneur et conscience et de tenir compte du contexte global. Il va sans dire que le médecin urgentiste doit respecter les exigences contenues dans les articles 6 et 28 du Code de déontologie médicale. Cela signifie que le médecin doit se concerter avec le patient, et le cas échéant, avec les proches de celui-ci, qu'il doit veiller à la continuité des soins et fournir toutes les informations utiles au médecin qui lui succède. Cela signifie aussi que le médecin urgentiste doit prendre un certain nombre d'initiatives et garantir la prise en charge, les soins et le traitement ultérieurs. Le médecin traitant doit de toute manière être informé. Dans un certain nombre de cas, il devra être fait appel au service social de l'hôpital.

Commercialisation de la médecine12/05/2007 Code de document: a117003
Collaboration de médecins à des salons présentant des traitements cosmétiques

Une directrice de ventes souhaite organiser une bourse d’informations à propos de toutes sortes de produits, traitements et opérations esthétiques en combinaison avec un programme de conférences destinées à en expliquer les avantages et les inconvénients au grand public. Elle souhaite savoir quelles sont les directives du Conseil national concernant la participation de médecins à ce type d’événement.

Avis du Conseil national :

Le Conseil national se réfère à l’article 10 du Code de déontologie médicale sous le titre I, chapitre II, relatif aux devoirs généraux des médecins et aux articles 12 à 17 du même Code sous le titre I, chapitre III, relatifs à la publicité. Les textes de ces articles sont les suivants :

« […]

Titre I, Chapitre II Devoirs généraux des médecins

Art. 10

L'art médical ne peut en aucun cas, ni d'aucune façon être pratiqué comme un commerce.
[…]

Titre I, Chapitre III La publicité

Art. 12

Dans le respect des dispositions du présent chapitre, les médecins peuvent porter leur activité médicale à la connaissance du public.

Art. 13

§1er. L'information donnée doit être conforme à la réalité, objective, pertinente, vérifiable, discrète et claire. Elle ne peut en aucun cas être trompeuse. Elle ne peut être comparative.
Les résultats d'examens et de traitements ne peuvent être utilisés à des fins publicitaires.

§2. La publicité ne peut porter préjudice à l'intérêt général en matière de santé publique et ne peut inciter à pratiquer des examens et traitements superflus.
Le rabattage de patients est interdit.
Les campagnes de prévention et de dépistage doivent être scientifiquement étayées et nécessitent l'autorisation préalable de l'instance ordinale compétente.

§3. Dans leur publicité, les médecins sont tenus d'observer les règles du secret professionnel médical.

Art. 14

La formulation et la présentation de la publicité ainsi que les méthodes et techniques y afférentes, en ce compris les sites Internet, plaques nominatives, en-têtes et mentions dans des annuaires, doivent être conformes aux dispositions de l'article 13.

Art. 15

Les médecins doivent s'opposer activement à toute publicité de leur activité médicale par des tiers, qui ne respecte pas les dispositions du présent chapitre.

Art. 16

Les médecins peuvent prêter leur concours aux médias en vue d'une information médicale pouvant être importante et utile pour le public.
A cet égard, les dispositions du présent chapitre doivent être respectées.

Le médecin informera préalablement le conseil provincial où il est inscrit, de sa participation aux médias.

Art. 17

Lorsque les patients sont amenés par les médias à informer le public, les médecins ne peuvent y participer que dans la mesure où la vie privée et la dignité de ces patients sont préservées. Dans ces circonstances les médecins doivent s'assurer que les patients ont été entièrement informés et que leur participation a été consentie librement.
[…] »

Sur la base de l’article 10, le Conseil national considère que la collaboration de médecins à des salons ayant un caractère commercial est inacceptable. Ni la collaboration de médecins ni la mention des noms de médecins et/ou d’hôpitaux dans ce type de manifestations ou dans l’annonce ou les dépliants de celles-ci ne sont déontologiquement acceptables.

Le Conseil national estime en outre que la participation de médecins à un programme de séminaire comportant des sessions d’information pour le grand public durant ces salons n’est, en règle générale, pas indiquée. Il est préférable que le patient s’informe, en première instance, auprès de son médecin généraliste ou de son médecin traitant, lesquels sont mieux à même d’évaluer ces situations individuelles.

Exceptionnellement, la participation d’un médecin à un programme de séminaire comportant des sessions d’information peut être envisagée à condition que le médecin concerné soit une autorité reconnue sur le plan scientifique et que son nom n’apparaisse ni dans l’annonce ni dans des dépliants ou brochures et ni ultérieurement dans aucune forme de compte rendu.

Le Conseil national renvoie également au premier alinéa de l’article 16 du Code de déontologie médicale suivant lequel les médecins peuvent prêter leur concours aux médias en vue d’une information médicale pouvant être importante et utile pour le public. Cela signifie que la participation n’est possible que si le caractère informatif n’est pas accessoire. En outre, le Conseil national rappelle que le médecin doit avertir de sa participation le conseil provincial dont il relève.

Informatique03/03/2007 Code de document: a116004
Avis du Conseil national à propos du décret de la Communauté flamande relatif au système d'information Santé

Avis du Conseil national à propos du décret de la Communauté flamande relatif au système d’information Santé

RESUME

RECOMMANDATIONS A L’EGARD DES MEDECINS

En ce qui concerne le volet opérationnel

Le consentement

Le Conseil national invite les médecins à recourir au système du consentement distinct, tel que visé à l’article 19, § 3, du décret du 16 juin 2006, à défaut d’arrangement contraire avec le patient.

Le recours au consentement dit « général » ne peut s’envisager qu’en considération des prévisions raisonnables du patient.

Le secret professionnel

Le Conseil national rappelle en outre que les principes du secret professionnel partagé n’impliquent pas de facto le droit à échanger des dossiers médicaux. Seules les données «nécessaires pour pouvoir assurer la qualité et la continuité de la dispensation des soins » (article 19) peuvent être échangées.

Consultation du dossier de santé individuel

Le Conseil national estime que la consultation du dossier médical nécessite une demande expresse du patient.

En ce qui concerne le volet épidémiologique

L’information

A défaut d’un consentement exprès, l’usager de soins doit au moins être informé complètement et avoir la possibilité de faire valoir son droit d’opposition.

L’opposition

Le Conseil national invite les médecins à informer le patient de sa possibilité de s’opposer au traitement de ses données dans le cadre du système d’information épidémiologique ainsi que de la forme de l’opposition.

Le médecin veille à ce que les données dont le patient a refusé le traitement ne soient pas reprises dans l’enregistrement électronique et dans le fichier source.
Il fait de même pour l’ensemble des données concernant les tiers.

RECOMMANDATIONS A L’EGARD DU GOUVERNEMENT FLAMAND ET/OU DES PARLEMENTAIRES FLAMANDS

Le consentement

Le Conseil national demande davantage de clarté quant à la possibilité de recourir au consentement tacite et quant à ses modalités.

En tout état de cause, le Conseil national est d’avis que le principe du consentement tacite ne pourrait aucunement être d’application générale.

L’information

Le Conseil national invite le gouvernement flamand à fixer, dans le respect des exigences déontologiques, la manière dont les médecins seront amenés à informer concrètement les patients au sens de l’article 42 du décret.

L’opposition

Le Conseil national demande que la condition fixée pour pouvoir s’opposer au traitement de données personnelles, à savoir le motif grave et justifié lié à une situation particulière, soit supprimée.

La forme de l’opposition doit en outre être considérablement allégée : la simple mention dans le dossier médical de l’opposition doit suffire.

Le Conseil national insiste en outre pour que les logiciels labellisés utilisés dans le cadre du système d’information santé prévoient la possibilité aisée de ne pas saisir certaines données dans l’enregistrement automatique.

Les droits du patient mineur

Le Conseil national demande davantage d’éclaircissements quant aux contradictions existantes entre la loi du 22 août 2002 relative aux droits du patient et le décret du 16 juin 2006 concernant :

  • la notion de « parents »;
  • la limite d’âge à l’exercice indépendant de ses droits par le mineur.

Le secret professionnel

Le Conseil national insiste auprès du Gouvernement flamand pour que la définition de la nature et du type des pseudo-identités en application de l'article 14, soit précise.

Le Conseil national demande aussi que les carrefours d'information et les organisations intermédiaires n'aient pas la possibilité d'établir eux-mêmes un lien entre les pseudo-identités et les identités.

La protection de la vie privée

Le Conseil national refuse la centralisation, par une seule instance, des systèmes de sécurité et d’identification, du notariat des transactions, de la labellisation des logiciels et, en particulier, du transfert des données (cf. avis du Conseil national du 26 novembre 2005 concernant le projet BeHealth, BCN, n° 111, p. 5).

Le Conseil national suivra attentivement la façon dont le Gouvernement flamand rendra effective l'indépendance des différentes instances.

Le Conseil national demande dès lors à être représenté au sein de la commission de contrôle, et ensuite, dans le comité sectoriel, visés à l'article 88.

AVIS

En ses séances du 20 janvier 2007 et du 3 mars 2007, le Conseil national a examiné le décret de la Communauté flamande du 16 juin 2006 relatif au système d'information Santé.

Le Conseil déplore de n'avoir pas été consulté lors de la phase préparatoire du décret alors que celui-ci est susceptible d'avoir d'importantes répercussions sur les droits du patient ainsi que sur le secret professionnel.

Le Conseil national estime nécessaire de formuler quelques remarques - non exhaustives - qui pourraient constituer un apport constructif à l'élaboration des futurs arrêtés d'exécution du décret.

A/ DROITS DU PATIENT

Les principaux bénéficiaires du système d'information Santé devraient en principe être les patients, tant sur le plan du système opérationnel que sur celui du système épidémiologique.

La loi du 22 août 2002 relative aux droits du patient a constitué un pas important dans la reconnaissance de ces droits. Cette loi a défini des droits majeurs de celui-ci.

Le Conseil national estime que le décret n'a pas été suffisamment évalué par rapport aux exigences résultant des droits du patient.

1/ Consentement

L'article 8, § 1er, de la loi du 22 août 2002, dispose:

"Le patient a le droit de consentir librement à toute intervention du praticien professionnel moyennant information préalable.
Ce consentement est donné expressément, sauf lorsque le praticien professionnel, après avoir informé suffisamment le patient, peut raisonnablement inférer du comportement de celui-ci qu'il consent à l'intervention.".

Cet article vise la transparence dans la relation médecin-patient. Le consentement libre et éclairé du patient est une condition de la confiance entre l'usager de soins et le praticien professionnel.
Le système d'information Santé compromet cette confiance tant dans le système d'information opérationnel que dans le système d'information épidémiologique.

1.1. Le système d'information opérationnel

L'article 19 du décret pose le consentement de l'usager de soins comme condition à l'échange de données dans le cadre du système d'information opérationnel.

Les troisième, quatrième et cinquième paragraphes de cet article sont néanmoins inquiétants.

Le Conseil national formule à ce sujet les remarques suivantes:

- Le "consentement distinct"

L'article 19, § 3, du décret du 16 juin 2006 dispose:
"L'usager peut demander que son consentement soit sollicité pour toute expédition spécifique de données séparément. Il peut toutefois aussi accorder à un prestataire de soins ou à une organisation œuvrant sur le terrain autorisation valable pour tous les envois spécifiques de données pour une durée déterminée ou indéterminée, étant entendu qu'il peut limiter cette autorisation à certaines catégories de données et à certaines catégories de prestataires de soins ou d'organisations œuvrant sur le terrain, ainsi que la retirer à tout moment.".

Le Conseil national se réjouit que le patient puisse exiger qu'un consentement distinct lui soit demandé pour toute expédition spécifique de données. A défaut d'autres accords, il est l'évidence même que le régime à appliquer est celui du "consentement distinct".

- Le "consentement général"

Le Conseil national ne peut accepter que l'usager de soins autorise tous les envois spécifiques de données pour une durée indéterminée (article 19, § 3). Ce type d'autorisation équivaut à donner un blanc-seing au médecin. On ne peut parler en ce cas de "consentement éclairé".

Il suit clairement de l'article 8 de la loi du 22 août 2002 que le médecin doit obtenir le consentement exprès du patient lorsque, après avoir suffisamment informé le patient, l'attitude de ce dernier ne lui permet pas de conclure raisonnablement à son consentement.

Le Conseil national en déduit qu'au sein du système du "consentement général", le médecin devra toujours tenir compte des attentes raisonnables du patient individuel: le consentement exprès de l'usager de soins est requis pour tous les envois de données auxquels le patient ne peut raisonnablement pas s'attendre. Le Conseil national recommande aux médecins d’être particulièrement prudents à ce sujet.

- Le "consentement tacite"

L'article 19, § 4, du décret relatif au système d'information Santé dispose:

"Par dérogation au § 1er et pour autant que l'usager de soins ne s'oppose pas à l'expédition de données, le consentement est réputé avoir été donné tacitement si l'expédition des données a lieu :

  1. à la suite d'un renvoi qui fait partie des soins en cours;
  2. dans le cadre d'activités de soins connexes;
  3. dans le cadre d'activités connexes d'un programme de prévention.".

Le Conseil national se rallie en principe à la position suivante de la Commission de la protection de la vie privée:

"L'article 19, § 4, de l'avant-projet de décret stipule que le consentement peut avoir été obtenu 'tacitement' lorsque la transmission a lieu à l'occasion d'un renvoi dans un traitement en cours ou d'une action de prévention.
L'échange de données à caractère personnel entre les membres d'une équipe de soins et les professionnels qui y sont intégrés, avec le consentement du patient, fait partie des attentes normales du patient et ne nécessite aucune autorisation explicite.
Toutefois, lorsqu'il s'agit d'un renvoi vers une autre équipe de soins, la Commission est d'avis qu'il n'est plus logique de supposer le consentement.".
(1)

Sur le plan déontologique, le Conseil national peut accepter que le consentement à l'échange de données soit tacite à l'égard des membres d'une équipe de soins déterminée, pour autant qu'il fasse partie des attentes normales du patient.

Ce n’est pas évident sur le plan légal. Comme la Commission de la protection de la vie privée le fait remarquer: "Toute forme de consentement tacite est illégale à la lumière de l'article 7 de la loi du 8 décembre 1992.".(2)

A propos de l'article 19, § 4, du décret, la Commission écrit ce qui suit:
"La Commission estime qu'il n'est pas possible d'insérer, dans une réglementation d'un décret, des dérogations aux règles fédérales qui procureraient au sujet de droit un niveau de protection inférieur. C'est la disposition légale qui prévoit le plus haut niveau de protection pour le citoyen qui prime.".(3)

Etant donné la contradiction entre, d'une part, l'article 7 de la loi du 8 décembre 1992 relative à la protection de la vie privée à l'égard des traitements de données à caractère personnel et, d'autre part, l'article 19, § 4, du décret du 16 juin 2006 relatif au système d'information Santé, le Conseil national recommande de demander le consentement exprès des usagers de soins avant de procéder à des échanges de données au sein du système d'information opérationnel.

A cet égard, le Conseil national demande plus de clarté au législateur.

1.2. Le système d'information épidémiologique

L'échange de données de santé au sein du système d'information épidémiologique ne requiert pas légalement le consentement de l'usager de soins.

L'article 47 du décret dispose que le patient peut toutefois s'opposer à l'introduction de ses données dans l'enregistrement électronique ou dans le fichier source, mais cela uniquement "pour des motifs graves et justifiés liés à sa situation particulière" (4).

- L'obligation d'informer

L'échange de données est nécessaire pour pouvoir fonder la politique de santé flamande le plus possible sur des preuves et pour pouvoir évaluer l'efficacité et l'adéquation de cette politique.

Cela n'empêche pas que les droits du patient doivent être respectés. A défaut d'un consentement exprès, l'usager de soins doit au moins être informé complètement et avoir la possibilité de faire valoir son droit d'opposition.

L'article 42 du décret règle la notification du système d'information Santé à l'usager de soins.

Cet article dispose:

"§ 1er. Le responsable du dossier de santé individuel informe l'usager de soins, et si celui-ci a moins de 14 ans, ses parents, du fait qu'un enregistrement électronique est tenu et que les données qui s'y trouvent peuvent être utilisées dans le cadre du système d'information opérationnel et épidémiologique.
Si l'état de l'usager de soins est légalement ou manifestement tel qu'il est incapable d'exprimer sa volonté, la communication visée dans le premier alinéa est faite à la personne telle que visée à l'article 19, § 2.
§ 2. Sans préjudice de l'information communiquée conformément à la réglementation relative à la protection de la vie privée à l'égard des traitements de données à caractère personnel et pour autant que l'usager de soins n'en ait pas encore pris connaissance, il recevra au moins les informations suivantes :
1° les catégories de données qui sont tenues dans l'enregistrement électronique en indiquant les catégories de données reprises dans le fichier source;
2° les catégories de prestataires de soins et d'organisations oeuvrant sur le terrain auxquelles des données peuvent être transmises dans le cadre du système d'information opérationnel;
3° le nom de l'organisation intermédiaire a laquelle des données sont transmises dans le cadre du système d'information épidémiologique;
4° la manière dont le droit de consulter les données dans le dossier de santé individuel et dans l'enregistrement électronique peut être exercé;
5° la manière dont il peut être fait opposition à l'utilisation des données dans le système d'information opérationnel ou épidémiologique;
6° la manière de prendre contact avec la commission de contrôle.
Le Gouvernement flamand peut arrêter les modalités relatives au contenu et au mode de la communication visée dans le premier alinéa.".

Le Conseil national attache beaucoup d'importance à la manière dont le Gouvernement flamand organisera cette information.

Il est évident qu'il n'est pratiquement pas faisable de communiquer toutes les informations prévues lors de chaque consultation.

L'affichage dans les salles d'attente des médecins de l'information commandée par la loi ne concorde pas avec l'obligation d'informer préconisée par la déontologie.

- Motifs d’opposition

L'article 47 prévoit que le patient peut s'opposer à l'introduction de ses données dans l'enregistrement électronique et dans le fichier source "pour des motifs graves et justifiés liés à sa situation particulière".

Ceci porte gravement atteinte à la relation médecin-patient. Le patient serait dans l'impossibilité, par exemple, de s'opposer à l'introduction de ses données s'il n'avait pas confiance en l'anonymisation des données: cela n'a pas de rapport avec sa situation particulière. Le Conseil national ne peut l’accepter et demande la suppression des conditions d'opposition.

L'article 47 entraîne aussi de grandes difficultés en ce qui concerne l'extraction automatique des données du dossier de santé individuel telle que prévue à l'article 13, § 1er, deuxième alinéa, du décret (5). Le Conseil national fait remarquer que le patient s'oppose rarement à l'enregistrement de ses données mais bien à leur échange. Le dispensateur de soins doit veiller à ce que les données du dossier électronique, dont le patient refuse qu'elles soient échangées, ne soient pas introduites dans l'enregistrement électronique. Si les données du dossier de santé individuel sont transposées automatiquement dans l'enregistrement électronique, le logiciel utilisé pour l'extraction automatique devrait comporter la possibilité de ne pas saisir certaines données.

- Forme de l’opposition

L'article 47, § 2, dispose:
"L'opposition visée au § 1er est communiquée par écrit au responsable du dossier de santé individuel. Elle est datée et signée et les raisons invoquées liées à la situation particulière de l'usager de soins sont motivées.

Le responsable du dossier de santé individuel mentionne l'opposition dans le dossier de santé individuel.".

Le Conseil national estime que les conditions de forme de l'opposition sont trop lourdes: elles sont de nature à décourager les patients de faire usage de leur droit d'opposition.

Il serait suffisant de mentionner simplement l'opposition dans le dossier.

2/ Consultation du dossier de santé individuel et de l'enregistrement électronique

Le droit de consultation du dossier de santé individuel et de l'enregistrement électronique est prévu à l'article 43.

Le premier paragraphe de cet article dispose:
"L'usager de soins a le droit de prendre connaissance des données le concernant conservées dans le dossier de santé individuel et dans l'enregistrement électronique, et ce directement ou par l'intermédiaire d'un praticien professionnel des soins de santé qu'il a librement choisi. Des données concernant un tiers sont exclues de ce droit de consultation.
L'usager de soins a également le droit de prendre connaissance des notes personnelles le concernant, à condition que cela se fasse indirectement par l'intermédiaire d'un praticien professionnel des soins de santé librement choisi par l'usager de soins.".

Le Conseil national estime que la consultation ne peut avoir lieu qu'à la demande du patient lui-même, adressée au médecin qui a constitué le dossier. Le motif en est que le médecin est légalement tenu d'exclure du droit de consultation les données concernant des tiers (article 9 de la loi du 22 août 2002 relative aux droits du patient) et que le médecin pourra faire application de l'exception thérapeutique dans l'intérêt du patient (article 7, § 4, de la loi du 22 août 2002).

Le Conseil national renvoie à ce sujet à son avis ci-annexé du 20 janvier 2007 concernant la consultation directe par le patient de son dossier médical électronique.

3/ Les droits du patient mineur

Le chapitre IV de la loi du 22 août 2002 relative aux droits du patient concerne la représentation du patient.

En ce qui concerne les patients, l'article 12 dispose:
"§ 1er. Si le patient est mineur, les droits fixés par la présente loi sont exercés par les parents exerçant l'autorité sur le mineur ou par son tuteur.

§ 2. Suivant son âge et sa maturité, le patient est associé à l'exercice de ses droits. Les droits énumérés dans cette loi peuvent être exercés de manière autonome par le patient mineur qui peut être estimé apte à apprécier raisonnablement ses intérêts.".

3.1. Sur la notion de "parents"

Le décret du 16 juin 2006 prévoit que les droits du patient de moins de quatorze ans sont exercés, dans le cadre du système d'information Santé, par ses parents (cf. articles 19, 42, 43, 47).

Le terme "parents" est défini comme suit à l'article 2, 13°:
"les titulaires de l'autorité parentale ou les personnes qui ont la garde d'un mineur, de droit ou de fait;".

En vertu de la loi relative aux droits du patient, les droits du patient mineur sont exercés par les "parents exerçant l'autorité sur le mineur". En vertu du décret, ces droits pourraient aussi être exercés, par exemple, par le beau-père dans une famille recomposée.

La contradiction entre les textes légaux fédéral et flamand doit être résolue dans l'intérêt des mineurs. Une concertation entre les législateurs fédéral et décrétal est par conséquent nécessaire. La commission fédérale "Droits du patient" devrait être associée à cette concertation.

3.2. Sur la limite d'âge

Le Conseil national constate également une imprécision concernant l'exercice indépendant de ses droits par le mineur.

Contrairement au décret, la loi du 22 août 2002 relative aux droits du patient ne fixe pas de limite d'âge à cet égard.

Le Conseil national partage le point de vue de la Commission de la protection de la vie privée:

"Concernant l'introduction dans le projet de décret d'une limite d'âge déterminée, fixée à quatorze ans, pour la transmission de données (article 19) et l'exercice du droit de consultation (article 43), la Commission veut faire remarquer que cet âge peut effectivement servir d'âge de référence mais qu'il ne peut pas servir de critère absolu auquel on ne pourrait pas déroger. Vu l'impossibilité de déterminer uniformément, pour tous les individus, le moment où ils sont censés disposer de la maturité suffisante pour exercer leurs droits de manière tout à fait autonome, le prestataire de soins doit toujours pouvoir juger de l'acquisition de la maturité suffisante pour agir de manière autonome pour les jeunes qui se situent sous cette limite d'âge."(6).

B/ SECRET PROFESSIONNEL

Le décret de la Communauté flamande du 16 juin 2006 relatif au système d'information Santé a pour but l'optimalisation de l'échange de données entre les prestataires de soins pour "assurer" la continuité et la qualité de la dispensation de soins et pour pouvoir mieux évaluer les soins de santé (article 4).

Les membres du Conseil national déduisent de leur expérience médicale que l'échange de données est utile à la qualité des soins.

Ils savent aussi que le secret professionnel constitue une condition de la non moins nécessaire confiance dans la relation médecin-patient.

Le Conseil national craint que quelques-unes des dispositions du décret du 16 juin 2006 ne compromettent le secret professionnel.

1/ Le système d'information opérationnel

1.1. L'accès aux données versus l'accès au dossier

Le décret du 16 juin 2006 prévoit l'échange de données relatives à la santé. Il n'y est nullement question de l'échange de dossiers de santé. Les articles 10 et 19 ne laissent aucun doute à ce sujet. Les données qui entrent en considération pour être échangées sont celles qui sont "nécessaires pour pouvoir assurer la continuité et la qualité de la dispensation de soins" (article 19).

Il est évident que, dans la pratique, la convivialité du logiciel sera déterminante de l'échange effectif de données issues du dossier de santé individuel. Le logiciel doit offrir la possibilité de classer facilement les données des dossiers de santé d'une part, et d'exclure facilement des données de l'échange d'autre part. Pour pouvoir être utilisé dans la pratique, le logiciel doit offrir une convivialité suffisante pour permettre au médecin de respecter le secret professionnel.

Le Conseil national demande aux autorités compétentes pour le label du logiciel d'en tenir compte.

1.2. Conditions du secret professionnel partagé

Le secret professionnel peut être partagé dans certaines circonstances.

Cette possibilité est toutefois délimitée par quelques conditions. L'application de la notion de "secret professionnel partagé" ne requiert pas uniquement que le destinataire de l'information confidentielle soit lié par le secret professionnel. Seules les informations nécessaires à la continuité et à la qualité des soins du patient doivent être partagées. La transmission des données doit également se faire avec le consentement du bénéficiaire du secret.

L'application pratique de cette notion requiert, en cas de dossier de santé commun tel que visé à l'article 6 du décret, que le responsable du dossier de santé individuel soit exclusivement un médecin traitant.

Cette remarque s'applique également au responsable du dossier de santé individuel dont question aux articles 44, 45 et 46.

En ce qui concerne l'application des conditions du secret professionnel partagé dans les centres d'encadrement des élèves, le Conseil national renvoie à son avis du 21 octobre 2006 (7).

1.3 Dossiers médicaux tels que visés à l'article 11 du décret

Le Conseil national fait remarquer que l'article 11 du décret n'offre pas de garanties suffisantes de l'efficacité du système d'information opérationnel et du respect du secret professionnel.

Le dossier pluridisciplinaire

L'article 11, § 1er, du décret dispose que pour les centres d'encadrement des élèves, le dossier pluridisciplinaire visé à l'article 10 du décret du 1er décembre 1998 relatif aux centres d'encadrement des élèves, constitue le dossier de santé individuel visé dans le contexte du système d'information Santé.

Dans son avis du 21 octobre 2006 concernant la gestion des dossiers médicaux dans les centres d'encadrement des élèves, le Conseil national a démontré qu'en application des règles du secret professionnel partagé, le médecin du centre d’encadrement des élèves doit tenir un dossier médical séparé en plus du dossier pluridisciplinaire, lequel doit se limiter aux données pertinentes pour l'encadrement pédagogique de l'enfant (8) .

Les données qui sont pertinentes pour la continuité des soins, ainsi que d'ailleurs pour les études épidémiologiques, ne sont donc pas toujours inscrites dans le dossier pluridisciplinaire visé à l'article 10 du décret du 1er décembre 1998.

Le dossier médical général (DMG)

L'article 11, § 4, dispose:
"Pour les médecins généralistes, le dossier médical général visé à l'article 35duodecies de l'arrêté royal n° 78 du 10 novembre 1967 relatif à l'exercice des professions de santé constitue le dossier de santé individuel et les dispositions relatives à ce dossier sont d'application pour autant qu'elles divergent des articles 6 à 9 inclus et à l'article 10, alinéa deux.".

Le dossier médical général tel que visé à l'article 35duodecies de l'AR n°78, également appelé dossier médical global (cf. article 1er, § 4, de l'AR du 3 mai 1999 relatif au dossier médical global), n'empêche pas qu'un patient consulte plusieurs médecins généralistes. Le patient n'est, en outre, pas obligé de désigner un médecin généraliste gestionnaire du dossier médical général: le patient n'a donc pas toujours un DMG.

Il suit de l'article 11, § 4, du décret que le système d'information Santé ne sera utilisé que pour les patients au sujet desquels un DMG est tenu.

2/ Le système d'information épidémiologique

Le Conseil national constate que le respect du secret professionnel dans le cadre du système d'information épidémiologique dépend en grande partie de la nature des données enregistrées dans le fichier source.

Les fichiers sources qui sont communiqués aux organisations intermédiaires et aux carrefours d'information ne comportent pas que des données anonymes (cf. article 2, 10°).

La plupart des données en possession des carrefours d'information et des organisations intermédiaires peuvent encore être reliées à une personne identifiée ou indentifiable.

Le Conseil national déplore que les données ne soient pas communiquées sous forme anonyme. Ni les intérêts scientifiques ni les intérêts économiques ne peuvent justifier le risque pris par le patient sur le plan de sa vie privée.

Le décret étant maintenant adopté et publié, le Conseil national insiste auprès du Gouvernement flamand pour que la définition de la nature et du type des pseudo-identités en application de l'article 14, soit précise.

Le Conseil national demande aussi que les carrefours d'information et les organisations intermédiaires n'aient pas la possibilité d'établir eux-mêmes un lien entre les pseudo-identités et les identités.

Les praticiens professionnels doivent veiller à ce que l'enregistrement électronique en soi ne permette pas de retrouver l'identité du patient. Le patient ne devrait pouvoir être identifié qu'à travers sa pseudo-identité. Ils doivent aussi veiller à ce que les données relatives à des tiers ne soient pas introduites dans l'enregistrement électronique.

C/ VIE PRIVEE

Le décret du 16 juin 2006 soulève différentes questions sur le plan de la protection de la vie privée des patients.

L'indépendance des carrefours d'information et des organisations intermédiaires à l'égard du responsable ultérieur du traitement constitue le principal point d'achoppement.

Le Conseil national refuse la centralisation, par une seule instance, des systèmes de sécurité et d’identification, du notariat des transactions, de la labellisation des logiciels et, en particulier, du transfert des données (cf. avis du Conseil national du 26 novembre 2005 concernant le projet BeHealth, BCN, n°111, p.5).

Le Conseil national suivra attentivement la façon dont le Gouvernement flamand rendra effective l'indépendance de ces différentes instances.

Le Conseil national demande dès lors à être représenté au sein de la commission de contrôle, et ensuite, dans le comité sectoriel, visés à l'article 88.

D/ FAISABILITE

A la lecture des dispositions du décret, nous nous interrogeons sur la possibilité de leur mise en pratique.

- L'informatisation

Le décret repose entièrement sur le postulat que les professionnels de la santé disposent d'un matériel informatique suffisant et qu'ils gèrent leurs dossiers patients à l'aide de programmes spécifiques compatibles entre eux. L'informatisation complète et organisée de tous les professionnels de la santé nécessitera du temps et de la volonté. On peut donc raisonnablement douter des possibilités réelles de mise en œuvre sur le terrain, actuellement et à moyen terme, des mesures sur lesquelles le décret insiste.

- Le financement

L'informatisation généralisée des dossiers de santé représente un coût important.

Le décret ne précise pas comment les mesures qui y sont préconisées seront financées ni quel budget y sera consacré. Il est cependant évident que la mise en pratique des dispositions du décret sera en grande partie fonction du financement alloué.

Le Conseil national s'interroge à propos de la faisabilité du décret sur le plan financier.

- L'obligation d'informer

L'article 42 du décret règle la notification du système d'information Santé à l'usager de soins. Le Conseil national renvoie à ce sujet aux remarques formulées ci-dessus.

La question se pose concrètement de savoir comment les médecins réussiront à donner aux patients toutes les informations que ceux-ci doivent obligatoirement recevoir.

- Système d'information Santé / BeHealth

Le Conseil national se pose beaucoup de questions au sujet de la compatibilité future du système d'information Santé avec la plateforme BeHealth.

Les médecins craignent que l'enregistrement de toutes les données du système d'information Santé ne leur occasionne une surcharge administrative. Les doublons d'enregistrement doivent absolument être évités.

Le Conseil national n'a pas connaissance d'une concertation entre l'autorité fédérale et le Gouvernement flamand à ce sujet (cf. article 23, § 2, du décret).

- Surcharge administrative

Le Conseil national constate aussi que l'enregistrement des données à caractère personnel dans le cadre du système d'information Santé entraînera du travail administratif.

Le médecin n'est pas en droit d'introduire les données relatives à des tiers ainsi que ses annotations personnelles dans son dossier médical électronique si l'enregistrement électronique repose sur une extraction automatique des données du dossier.

Il doit veiller à ce que le droit d'opposition du patient soit respecté, et à ce que les données dans le fichier source ne renvoient pas directement à une identité.


1 Avis n° 05/2004 du 10 mai 2004 "Avant-projet de décret du Gouvernement flamand relatif au système d'information de santé", online: www.privacycommission.be
2 Ibid.
3 Ibid.
4 L'article 47 dispose:
"§ 1er. Pour des motifs graves et justifiés liés à sa situation particulière, l'usager de soins peut s'opposer à l'introduction de ses données dans l'enregistrement électronique. Cette opposition a automatiquement comme conséquence que les données ne sont pas introduites dans le fichier source.
Pour des motifs graves et justifiés liés à sa situation particulière, l'usager de soins peut s'opposer à l'introduction dans le fichier source des données le concernant reprises dans l'enregistrement électronique.
§ 2. L'opposition visée au § 1er est communiquée par écrit au responsable du dossier de santé individuel. Elle est datée et signée et les raisons invoquées liées à la situation particulière de l'usager de soins sont motivées.
Le responsable du dossier de santé individuel mentionne l'opposition dans le dossier de santé individuel.
§ 3. Si l'usager de soins a moins de 14 ans, l'opposition visée au § 1er peut également être introduite par ses parents. Le cas échéant, l'usager de soins est associé le plus possible à l'appréciation du motif d'opposition invoqué par ses parents et il est tenu compte de son avis selon sa maturité et sa capacité de jugement.
Si l'état de l'usager de soins est légalement ou manifestement tel qu'il est incapable d'exprimer sa volonté, l'opposition visée au § 1er est faite par la personne telle que visée à l'article 19, § 2.".
5 L'article 13, § 1er, dispose:
§ 1er. Le dossier de santé individuel constitue la base d'un enregistrement électronique qui résume d'une manière uniforme et standardisée les données de ce dossier.
Si le dossier de santé individuel est tenu sous forme électronique, l'enregistrement électronique peut reposer sur une extraction ou une transposition automatiques de données de ce dossier.
6 Avis n°05/2004 du 10 mai 2004 "Avant-projet de décret du Gouvernement flamand relatif au système d'information de santé", online: www.privacycommission.be
7 online: www.ordomedic.be
8 L'avis du 21 octobre 2006 précise ce qui suit:
"La tâche de l'équipe multidisciplinaire du centre d’encadrement des élèves n'est pas le suivi médical, mais bien le suivi pédagogique. Les données médicales qui sont importantes uniquement pour le suivi médical de l'enfant, et qui ne sont pas pertinentes pour l'encadrement scolaire de l'élève, ne doivent par conséquent pas figurer dans le dossier multidisciplinaire.
Le Conseil national reste dès lors d’avis que le médecin du centre d’encadrement des élèves doit tenir un dossier médical en plus du dossier multidisciplinaire ainsi limité.".

Sida03/02/2007 Code de document: a116001
Secret professionnel et sida - Information du partenaire

Suite à une question d’un médecin concernant l’information du (des) partenaire(s) d’un patient séropositif pour le VIH, un conseil provincial a examiné les avis émis en la matière par le Conseil national.
Le 16 décembre 2000, le Conseil national a confirmé son point de vue du 16 octobre 1993 suivant lequel « sauf demande expresse du patient, le secret professionnel interdit au médecin d'informer de l'infection les partenaires d'une personne séropositive. ».
Le 25 mai 2002, le Conseil national a dit « que dans certaines circonstances d'autres valeurs peuvent prédominer (sur le caractère absolu du secret professionnel) », que l’état de nécessité est « plutôt exceptionnel » et que pour l’invoquer, il est essentiel que le médecin avance une cause de justification « qui puisse être admise avec une quasi-certitude par le juge disciplinaire, par le juge pénal et par la société ».
Le conseil provincial estime néanmoins que l’on fait peser une lourde responsabilité sur le médecin et demande au Conseil national de soumettre à une nouvelle analyse la problématique d’informer ou de ne pas informer des tiers dont la santé est exposée à un risque important.

Avis du Conseil national :

En sa séance du 3 février 2007, le Conseil national a examiné les questions suivantes : un médecin demande quelle attitude adopter vis-à-vis d’un patient séropositif pour le VIH qui déclare refuser de prendre les mesures nécessaires pour éviter de contaminer son partenaire (rapports sexuels protégés ou abstention de rapports sexuels) ? Ce médecin peut-il, en invoquant l’état de nécessité, informer le ou la partenaire de la séropositivité du patient ? Ces questions appellent différentes considérations :

1. En l’état actuel de la déontologie et de la loi (Code pénal), tout patient bénéficie du secret professionnel médical et la séropositivité pour le VIH ne constitue pas en soi un critère d’exception.

2. La stratégie actuelle de lutte contre le sida passe par le dépistage des patients séropositifs pour le VIH, leur traitement précoce et la mise en route des mesures de prévention. Le dépistage de la séropositivité est la pierre angulaire de cette stratégie. Le dépistage en Belgique se réalise sur une base volontaire. Iil est favorisé par la garantie du secret médical et sa réalisation serait probablement freinée par la perte de confiance qu’entraînerait la transgression systématique du secret médical.

3. Le secret professionnel du médecin concernant la séropositivité apparaît servir tant la santé du patient (le traitement du patient dépisté séropositif) que la santé publique (grâce aux mesures de prévention que permet le dépistage).

4. Le cas particulier de la protection du partenaire sexuel stable peut constituer pour le médecin un état de nécessité lui permettant de transgresser le secret médical. Cette démarche ne peut être réalisée qu’exceptionnellement et lorsque les différentes étapes suivantes ont été préalablement réalisées.

  1. Inviter de façon répétée le patient à communiquer lui-même le fait de sa séropositivité à son partenaire sexuel.
  2. Proposer toute l’aide nécessaire à la concrétisation de cette information, dont sa réalisation en présence du médecin.
  3. Informer le patient de sa responsabilité civile et pénale s’il agit de façon telle qu’il met gravement en danger la santé de son partenaire sexuel.
  4. Colliger au dossier médical du patient à la fois les démarches répétées et la persistance de son refus de prendre les précautions nécessaires à la protection du partenaire.
  5. Solliciter l’avis d’un collègue ayant une expérience particulière dans la prise en charge des patients séropositifs pour le HIV.
  6. Informer le patient de l’obligation morale du médecin d’informer le partenaire afin de le protéger du danger découlant du refus de prendre les mesures nécessaires à sa protection.
  7. Réaliser l’information tout en ayant averti le patient.

(…)

Relation médecin-patient20/01/2007 Code de document: a115004
report_problem Cet avis a été revu dans l'avis du Conseil national du 19 septembre 2015 (a150010).
Consultation directe par le patient de son dossier médical électronique

Dans le cadre du projet de Télématique "Réseau de Santé Wallon", un conseil provincial souhaite savoir si la consultation directe par le patient de son dossier médical électronique est déontologiquement acceptable.

Avis du Conseil national :

En sa séance du 20 janvier 2007, le Conseil national a terminé la discussion de la question de l'acceptabilité, sur le plan déontologique, d'une consultation directe par le patient de son dossier médical électronique.

Cette question a trait à des aspects nouveaux de la relation médecin-patient.

Aucune disposition légale ni avis du Conseil national ne font une distinction fondamentale entre le dossier médical classique et le dossier médical électronique. Ce sont les données personnelles qui caractérisent un dossier médical. Rien, à ce point de vue, ne différencie le dossier papier classique du dossier électronique. Néanmoins, la nature du support, papier ou fichier électronique, peut entraîner des problèmes spécifiques en rapport, par exemple, avec l'accès ou la portabilité.

Ces problèmes ont donné lieu aux avis du Conseil national des 15 juin 2002 (Bulletin du Conseil national n°97, septembre 2002, p. 6) et 18 septembre 2004 (Bulletin du Conseil national n°106, déçembre 2004, p. 4).

La loi du 22 août 2002 relative aux droits du patient prévoit un droit de consultation de son dossier. Elle précise que la demande de consultation du dossier doit émaner du patient concerné.

La loi dispose qu'il doit être donné suite à la demande, par le patient, de consultation du dossier le concernant, dans les meilleurs délais et au plus tard dans les quinze jours de la réception de la demande (article 9, § 2).

Sans demande expresse du patient, le médecin ne peut, de facto, ni donner suite à ses obligations légales et déontologiques, ni garantir l’exercice du droit de consultation, ni respecter les droits de tiers.

A titre non exhaustif, les obligations suivantes peuvent être mentionnées :

  1. fournir au patient les explications nécessaires dans un langage intelligible (art. 7, § 1 et 2);
  2. ne pas divulguer, à titre exceptionnel, certaines informations médicales dans l’hypothèse où la communication de l’information risque de causer un préjudice grave à la santé du patient (exception thérapeutique) (art. 7, § 4)
  3. ne pas donner accès aux données concernant des tiers (art. 9, § 2, troisième alinéa) ni aux annotations personnelles du médecin;
  4. empêcher, motifs à l’appui, de donner copie du dossier si le praticien dispose d’indications claires de pression sur le patient pour qu’il communique son dossier à des tiers, par exemple, dans le cadre d’un examen d’embauche ou d’un contrat d’assurance. A cet égard, il convient de noter qu’un droit de copie illimité du dossier médical sans donner la possibilité au médecin d’indiquer au patient les dangers éventuels de la copie, reviendrait à rendre inopérantes les dispositions favorables au patient de l’article 95 de la loi du 25 juin 1992 sur le contrat d’assurance terrestre.

Le Conseil national conclut que la consultation par le patient de son dossier médical électronique, sans demande préalable au médecin, ne permet pas à ce dernier de s’acquitter de ses obligations légales et déontologiques et que la relation médecin-patient risque d’en souffrir.

Le Conseil national estime en outre que la consultation du dossier médical par le patient doit avoir lieu en présence du médecin qui a constitué le dossier ou qui en assume la responsabilité.

Dans son avis du 22 août 2001 concernant l'avant-projet de loi relatif aux droits du patient, la Commission de la protection de la vie privée spécifie:

« La Commission n'interprète pas l'intervention d'un praticien comme étant une limitation au droit d'accès. Elle renvoie à ce propos aux considérations qu'elle a émises dans ses avis n° 36/95 du 22 décembre 1995 (interprétation de l'article 10, § 3, de la loi du 8 décembre 1992, en particulier le numéro 6) et n° 30/96 du 13 novembre 1996 (relatif à l'avant-projet de loi adaptant la loi du 8 décembre 1992 à la directive 95/46/CE, en particulier le numéro 31).

L'intervention d'un praticien vise principalement à renforcer le caractère effectif du droit d'accès. La fonction du médecin est de traduire l'information dans un langage intelligible pour l'intéressé. ».

Le Conseil national estime qu'en cas d'indisponibilité du médecin ou de conflit majeur entre le médecin et son patient, la consultation du dossier médical par le patient devrait se faire de préférence par l’intermédiaire d’un médecin mandaté par le médecin concerné et accepté par le patient.

Informatique30/09/2006 Code de document: a114004
Projet de loi portant dispositions diverses en matière de santé

Le projet de loi portant dispositions diverses en matière de santé a été adopté par la Chambre de Représentants le 13 juillet 2006 (DOC 51 2594/009) et a été soumis au Sénat pour examen et amendement éventuel (article 78 de la Constitution) (1). La loi aborde une série d’aspects de la pratique des soins qui soulèvent des questions déontologiques telles par exemple : l’élargissement des compétences des sages-femmes, la protection des données personnelles, la médecine de contrôle, la reconnaissance des comités d’éthique médicale.
Le Conseil national de l’Ordre des médecins fait part aux sénateurs de certaines réserves relatives au texte proposé.

Avis du Conseil national :

1/ Chapitre premier : sages-femmes.

Les articles 2 à 29 du projet de loi inquiètent à différents égards.

Le Conseil national de l’Ordre des médecins considère la collaboration multidisciplinaire comme un principe de base de la déontologie médicale. Cette collaboration est d’autant plus nécessaire que chaque profession de santé a ses spécificités propres. L’article 177 du Code de déontologie guide le médecin dans ses relations avec les autres professions médicales. Le Conseil national estime que le projet exige une nouvelle approche de la collaboration entre les médecins et les sages-femmes. La spécificité de chacune des professions de santé entraîne la responsabilité propre de chacun des acteurs : il s’agit là d’une condition de la collaboration entre les professionnels de santé. Dès lors qu’une grossesse sera qualifiée de « normale », la responsabilité entre les médecins et les sages-femmes devra être distinguée, chacun engageant sa responsabilité pour les actes qu’il pose. Différents problèmes de responsabilité peuvent surgir, notamment quant à la détermination du caractère « normal » ou « à risque » d’une grossesse ou quant à la définition des actes qui ressortissent, dans le cadre d’une grossesse dite « normale », de la compétence exclusive des médecins et ceux pouvant être le fait des sages-femmes. A cet égard, il faut aussi mettre l’accent sur le fait que la grossesse et l’accouchement se caractérisent par des évolutions parfois inattendues, avec pour résultat que ce qui est « normal » peut vite devenir « anormal » et « à risque » et même mettre la vie en danger. Des accords contraignants doivent être faits pour le transfert des patientes et la prise en charge des complications. Une définition claire des compétences propres de chacun est indispensable de manière à éviter que l’ensemble de la responsabilité n’incombe aux médecins. Les sages-femmes doivent par conséquent s’assurer adéquatement

En ce qui concerne la prévention des risques, le Conseil national regrette le fait que le texte accorde au Roi, après avoir recueilli le seul avis du Conseil fédéral des Sages-femmes, le devoir de préciser les actes qui peuvent être accomplis par les sages-femmes. Certes, si le Conseil fédéral des Sages-femmes doit encore être constitué (article 21 noviesdecies, nouveau, §4), il est permis de penser qu’il sera composé à juste titre majoritairement d’accoucheuses. La détermination des actes qui peuvent être effectués par les sages-femmes nécessite toutefois que soit pris en compte l’avis de médecins. La détermination des risques potentiels d’un acte déterminé et de la compétence requise pour les poser ne peut être le fait des seules sages-femmes. Le Conseil national estime que le Roi devrait s’enquérir, outre de l’avis du Conseil fédéral des Sages-femmes, de celui de l’Académie Royale de Médecine, et des autres sociétés scientifiques concernées.
Le projet de loi prévoit que les sages-femmes pourront prescrire des médicaments, dans le cadre entre autres du suivi de la grossesse normale, de l’accouchement et des soins des nouveaux-nés bien portants, tant en-dehors qu’à l’hôpital. L’acceptabilité d’un tel projet dépend évidemment des connaissances des sages-femmes en matière de pathologie et de pharmacologie. Une évaluation approfondie des divers aspects de la formation conduisant à l’obtention du titre de sage-femme est indispensable.

Le projet de loi permet aussi aux titulaires du titre professionnel de sage-femme de réaliser des échographies fonctionnelles. Il est indispensable que les sages-femmes disposent des compétences scientifiquement reconnues pour procéder à ce type d’échographie et que les échographies de surveillance de la grossesse qui nécessitent des compétences médicales, soient réalisées sous le contrôle et la responsabilité d’un médecin spécialisé.

2/ Chapitre III : Modifications de la loi du 5 juillet 1994 relative au sang et aux dérivés du sang d’origine humaine.

L’article 21 de la loi du 5 juillet 1994 prévoit que les médecins fonctionnaires désignés par le Roi, sont chargés du contrôle de l'application de la présente loi et des arrêtés pris en exécution de celle-ci.

Le Conseil national est particulièrement attentif à ce que les tâches nécessitant une compétence médicale soit le fait de médecins et que les données personnelles de santé, dont le traçage est légitimement prévu, ne soient traitées que par des professionnels des soins de santé tenus par le secret professionnel.

3/ Chapitre V : modifications de la loi du 29 avril 1996 portant des dispositions sociales.

Le Conseil national se pose des questions quant au respect de la vie privée des patients, dans le système proposé par le projet de loi, notamment quant à la communication des données non encore anonymisées à la cellule technique visée aux articles 155 et 156 de la loi du 29 avril 1996 portant des dispositions sociales.

Il convient de constater que la commission pour la protection de la vie privée s’est déjà à plusieurs reprises exprimées quant à l’application de l’article 156. Le Conseil national estime indispensable, pour un projet de l’ampleur décrite, d’y associer cette commission.
Le Conseil national regrette en outre que le législateur prévoit qu’aucune autorisation ne sera requise dans le cadre de la loi du 8 décembre 1992 relative à la protection de la vie privée à l’égard du traitement des données à caractère personnel, pour la mise à disposition et l’utilisation des données visées aux alinéas 2 et 3 du troisième paragraphe de l’article 156, alors que dans un même temps, les modalités d’application de ces mêmes alinéas 2 et 3 sont confiées à la compétence du Roi. Cela revient à donner au Roi un large blanc-seing, et à limiter les possibilités de contrôle de son action.

4/ Chapitre VI : Registre du cancer

Le Conseil national émet de sérieuses réserves quant au respect du secret professionnel et de la vie privée des patients dans le cadre de l’article 45 quinquies de l’arrêté royal n° 78 du 10 novembre 1967, tel que proposé par l’article 39 du projet de loi.

D’abord, le Conseil estime illégitime de collecter au profit de la Fondation « Registre du cancer », le numéro d’identification de la sécurité sociale (NISS). Il estime que le respect de la vie privée exige que soit garanti une étanchéité des circuits d’informations entre les données à caractère personnel relatives à la santé et celles de sécurité sociale, ainsi qu’entre les données à caractère personnel relatives à la santé et celles du registre national (voyez l’avis du Conseil national du 26 novembre 2005 concernant le projet « BeHealth », Bulletin du Conseil national n° 111, p. 5 ; voyez aussi les avis de la Commission pour la protection de la vie privée qui y sont mentionnés).

En outre, le Conseil national ne peut accepter que les personnes employées au sein de la Fondation aient un accès illimité aux données personnelles. Des mesures strictes de codage s’imposent déjà au niveau de la collecte des données auprès des organismes assureurs.

5/ Chapitre VII : comité sectoriel des données de santé

Le Conseil national renvoie à ce sujet à son avis du 26 novembre 2005 concernant le projet « BeHealth », repris en annexe, point 4/.

6/ Chapitre VIII : Hôpitaux ; section 2 : droits du patient.

Le Conseil national est d’avis que les dispositions proposées à l’article 48 du projet vont dans le sens de la transparence à l’égard du patient.

7/ Chapitre X : Droits des patients

Le Conseil national note avec satisfaction que le législateur apporte, par l’article 61 proposé, de la clarté quant au champ d’application de la loi du 22 août 2002 relative aux droits du patient.
En ce qui concerne l’article 62, le Conseil regrette que la proposition ne tient pas compte du point de vue suivant déjà exprimé dans son avis du 16 février 2002 (Bulletin du Conseil national, n° 95, p. 3) :
Le Conseil national ne peut non plus omettre de souligner que l'avant-projet ne prévoit en fait aucune qualification de la personne de confiance désignée par le patient. A ce sujet il faut souligner que la relation de confiance ne doit pas seulement exister entre le patient et la personne désignée mais doit pouvoir se nouer aussi entre cette personne et le praticien professionnel. Ainsi, on peut difficilement s’imaginer qu'un médecin ayant de bonnes raisons de douter d'une personne de confiance, puisse lui confier une information confidentielle à propos du patient.
En ce qui concerne enfin la proposition d’article 64, le Conseil national émet certaines réserves.

D’un point de vue linguistique d’abord , la formulation de l’article, et particulièrement des mots « par dérogation aux §1er et 2 », prête à confusion. Quant au fond ensuite, si le Conseil national n’a pas d’objection de principe à ce que le mandataire désigné par le patient, l’époux cohabitant, le partenaire cohabitant légal ou le partenaire cohabitant de fait, ait la possibilité d’introduire une plainte, le texte devrait être plus clair quant au fait que cette possibilité n’existerait que si le patient majeur n’est plus en mesure d’exercer ses droits lui-même et ne relève donc pas d’un des statuts visés à l’article 13 de la loi du 22 août 2002.

Plus fondamentalement, le droit d’introduire une plainte ne devrait pas dans ces cas-là donner systématiquement droit à connaître de l’ensemble de la cause. Dans de nombreux cas, le fait de communiquer certaines données dont dispose le service de médiation au mandataire ou au conjoint pourrait nuire gravement aux intérêts du patient par exemple lorsque le patient a refusé de communiquer des données personnelles le concernant.

8/ Chapitre XIII : Responsabilisation de prestataires de soins

En ce qui concerne la proposition de modification de l’article 140 de la loi du 14 juillet 1994 (art. 96 du projet), le Conseil national s’interroge sur le sens de la diminution de sa représentation au sein du Comité du Service d’évaluation et de contrôle médicaux. Il estime en outre important que ses représentants disposent d’une voix délibérative. La représentation ordinale sert l’intérêt général.

En ce qui concerne l’article 108 du projet, le Conseil national s’interroge sur l’étendue de la responsabilité du maître de stage prévue à l’article 157, § 2 de la loi du 14 juillet 1994.

9/ Chapitre XVIII : modifications de la loi du 7 mai 2004 relative aux expérimentations sur la personne humaine.

Le Conseil national constate qu’il ait été tenu compte de son avis du 13 décembre 2003 (Bulletin du Conseil national n° 103, p. 10) en ce que le nombre de protocoles analysés nécessaires à l’habilitation ministérielle du comité d’éthique soit diminué.

(1) Ce projet de loi a été approuvé le 26/10/2006, en séance plénière du Sénat, quasi sans modification.
Consentement éclairé15/07/2006 Code de document: a113005
Donneurs à coeur non battant

Donneurs à cœur non battant

Un conseil provincial souhaite connaître la position du Conseil national concernant le prélèvement d'organes, à des fins de transplantation, chez des donneurs à cœur non battant. Suivant le protocole de Maastricht, quatre catégories de patients entrent en considération (allant du décès lors de l'arrivée à l'hôpital à l'état végétatif persistant). Des problèmes peuvent se poser, notamment en ce qui concerne la relation de confiance médecin-patient, la responsabilité des médecins traitants du donneur potentiel, l'indépendance des médecins de l'équipe de transplantation, etc.
Le président du conseil provincial souhaite savoir si la législation actuelle relative à la transplantation d'organes et les avis émis par le Conseil national en la matière s'appliquent aussi au prélèvement d'organes chez des donneurs à cœur non battant.

Avis du Conseil national:

En sa séance du 15 juillet 2006, le Conseil national a examiné votre demande concernant la problématique des donneurs « non-heart-beating ».

La transplantation d’organe est une modalité thérapeutique permettant la survie et la revalidation de nombreux patients. La pénurie relative d’organes à transplanter limite cependant le développement de cette thérapeutique et de nombreux patients décèdent avant de disposer de l’organe qui leur est nécessaire. Dès lors, des recherches ont été entreprises pour accroître la source de donneurs. Une des solutions possibles est le recours à des donneurs en arrêt cardiorespiratoire (« non-heart-beating donor »). Il y est fait de plus en plus fréquemment appel.

Lorsqu’un prélèvement est envisagé chez un donneur en arrêt cardiorespiratoire, des conflits peuvent surgir entre l’obligation des soins à assurer au donneur potentiel et l’importance pour les receveurs de la préservation optimale des organes à transplanter. L’assistance au donneur potentiel et à sa famille doit toujours être la priorité.

Le Conseil national estime que les règles définies dans la loi du 13 Juin 1986 sur le prélèvement et la transplantation d’organes ainsi que les recommandations reprises dans les avis du Conseil national du 20 juin 1992 (Bulletin n° 57, septembre 1992, p. 32) et du 19 février 1994 (Bulletin n° 64, juin 1994, p. 32) s’appliquent mutatis mutandis aux prélèvements effectués chez des donneurs « non-heart-beating ».

En particulier, le Registre national doit être consulté afin de s’assurer que le donneur potentiel n’a pas de son vivant exprimé d’opposition aux prélèvements d ‘organes ou de tissus.

Avis du Conseil national du 20 juin 1992, BCN 57, p. 32 :

Prélèvement de tissus sur cadavres

1. Concrètement, la question est de savoir si le prélèvement de tissus ou d'organes "à froid" est soumis aux mêmes dispositions légales que le prélèvement de tissus ou d'organes "à chaud".

2. Les chapitres III et IV, art.10 à 14, de la loi du 13 juin 1986 sur le prélèvement et la transplantation de tissus et d'organes règlent les aspects essentiels de la matière:
2.1. Ia mort doit être constatée suivant l'état le plus récent de la science
2.2. Ie prélèvement ne peut avoir lieu si le défunt s'y était opposé ou si des proches s'y opposent
2.3 Ie décès doit être constaté par trois médecins, à l'exclusion de ceux qui traitent le receveur ou qui effectueront le prélèvement ou la transplantation
2.4. Ie prélèvement des organes et la suture du corps doivent être effectués dans le respect de la dépouille mortelle et en ménageant les sentiments de la famille

3. Bien que la loi ne le mentionne pas de manière expresse, on peut déduire de l'art.11 qu'il s'agit d'un prélèvement "à chaud", c'est à dire chez une personne dont le coeur pompe encore et chez qui la pression sanguine et l'hématose tissulaire sont maintenues artificiellement.
Ces personnes ne sont donc pas mortes suivant les critères cardio respiratoires classiques, mais elles le sont, en tout cas, suivant les critères neurologiques.

4. En ce qui concerne le prélèvement de tissus ou organes "à froid" en vue de leur transplantation, donc chez des personnes qui ont été déclarées mortes suivant les critères cardio respiratoires (il s'agit de la peau, des vaisseaux sanguins, des valves cardiaques, des yeux, des osselets de l'oreille, etc.), il n'y a évidemment pas de raison de faire constater le décès par trois médecins.
Afin que le médecin qui constate le décès soit au dessus de tout soupçon, il nous paraît recommandable qu'en cette circonstance aussi, ni lui ni ses collaborateurs ne prélèvent ou n'utilisent des tissus ou organes de leurs patients (cf.2.3.).

Etant donné que le prélèvement de tissus ou d'organes "à froid" entraîne tout autant de modifications post mortem et étant donné que ces tissus ou organes sont destinés à être utilisés chez des personnes vivantes, il n'y a pas de raison de s'écarter des prescriptions de l'art.10, § 4 (1°, 2° et 3°) concernant l'opposition au prélèvement.

5. Il convient de conclure de ce qui précède que pour ce qui concerne le prélèvement de tissus et/ou d'organes "à froid" (c'est à dire un certain temps après l'apparition des signes cardiorespiratoires du décès), le chapitre III de la loi du 13 juin 1986 est d'application dans sa totalité, exception faite de ce que dispose l'art.11, 1°, à savoir qu'il suffit en l'occurrence que le décès soit constaté par un seul médecin.

6. Addendum: I'art.12 dispose que le prélèvement des organes et la suture du corps doivent être effectués dans le respect de la dépouille mortelle et en ménageant les sentiments de la famille. L'article 3 précise que tout prélèvement et toute transplantation de tissus ou d'organes doivent être effectués par un médecin dans un hôpital.
Contrairement au prélèvement "à chaud", le prélèvement "à froid" ne s'effectue pas dans la salle d'opération, mais à la morgue de l'hôpital. La morgue est partie intégrante d'un hôpital, de sorte que rien ne peut y être objecté.
Cependant, qui veillera à ce que le prélèvement soit effectué par un médecin et à ce que le corps soit suturé soigneusement et rendu présentable ?
Si on se réfère à R. DIERKENS (Les droits sur le corps et le cadavre de l'homme, Masson & Cie, Paris 1966), lequel pose qu'un cadavre ne peut faire l'objet d'un droit de propriété, mais bien d'un droit et d'un devoir d'en disposer, qui reviennent en principe aux proches parents du défunt, à moins que le procureur du Roi ou le juge d'instruction n'en dispose temporairement, on se demande qui a la disposition d'un cadavre se trouvant dans la morgue d'un hôpital, lorsque la cause du décès était une cause naturelle.
La famille a incontestablement le droit de décider du culte, de l'enterrement, etc., mais elle n'a pas librement accès à la morgue et par conséquent au corps.

Il nous paraît indiscutable que le médecin, auquel le défunt s'en était remis de son vivant, reste le gardien du corps aussi longtemps qu'il se trouve dans l'hôpital, fût ce à la morgue (ce qui équivaut tout autant à un devoir de disposition et à un droit de disposition).

En effet, c'est à ce médecin traitant qu'il appartient de requérir une autopsie diagnostique ou d'élever des objections à l'encontre d'un prélèvement de tissus ou d'organes. Dans la pratique, le droit et le devoir de disposition sont toutefois exercés, pendant la durée du séjour du corps à la morgue de l'hôpital, par le préposé (en chef) à la morgue, sur ordre de la direction.

Dans beaucoup d'hôpitaux, mais non pas dans tous, loin s'en faut, les préposés à la morgue travaillent sous la supervision de l'anatomo-pathologiste. Etant donné que, pour des raisons pratiques, le médecin traitant ne peut surveiller ce que l'on fait de celui qui fut son patient, nous pensons qu'il doit confier cette responsabilité à un confrère de l'hôpital, de préférence l'anatomo pathologiste.

Il va de soi que toutes les analyses qui assurent la qualité clinique du prélèvement, afin de garantir la sécurité du patient pour lequel ce matériel humain sera utilisé, doivent être réalisées, y compris la recherche du virus HIV, laquelle est d'ailleurs obligatoire lors d'un prélèvement de sang pour transfusion.

Avis du Conseil national du 19 février 1994, BCN 64, p. 32 :

Dons d'organes - Constatation du décès

1. Le Conseil national renvoie à la loi du 13 juin 1986 sur le prélèvement et la transplantation d'organes, et à son avis du 20 octobre 1984 (BULLETIN OFFICIEL DU CONSEIL NATIONAL DE L'ORDRE DES MÉDECINS, N° 33, 1984 1985, P.32).

2. Le Conseil national renvoie à son avis du 20 juin 1992 pour ce qui concerne le prélèvement d'un organe ou d'un tissu "à froid" (BULLETIN DU CONSEIL NATIONAL DE L'ORDRE DES MÉDECINS, N° 57, SEPTEMBRE 1992, P.32).

3. Le décès du donneur doit être constaté par trois médecins, à l'exclusion de ceux qui traitent le receveur ou qui effectueront le prélèvement ou la transplantation.

Par dérogation à l'avis du 20 juin 1992, le décès est constaté par trois médecins.

Par dérogation à l'avis du 20 octobre 1984, ces médecins peuvent exercer la même discipline.
Ces médecins mentionnent dans un protocole daté et signé, la date et l'heure du décès et la méthode de sa constatation. Le protocole est conservé dans le dossier médical du donneur. Dès que le décès est constaté, une perfusion froide peut être mise en place.
Les prescriptions de l'article 10 de la loi du 13 juin 1986 doivent être respectées pour que le prélèvement des reins (ou d'autres organes) puisse avoir lieu.
Le chapitre III de la loi du 13 juin 1986 est par conséquent d'application dans son intégralité.

Informatique26/11/2005 Code de document: a111003
Projet BeHealth

En sa séance du 26 novembre 2005, le Conseil national s’est à nouveau penché sur le projet BeHealth. Il constate que le projet est actuellement en phase de réalisation. Il a à cet égard appris par les annales parlementaires que « la stratégie de développement des soins de santé par voie électronique s’appuie sur trois chantiers complémentaires et distincts », devant chacun faire l’objet d’une initiative réglementaire spécifique.

Le Conseil national vous fait connaître ses objections par rapport au dernier avant-projet de loi dont il a connaissance et tel qu’il lui a avez fait parvenir par e-mail en date du 10 octobre 2005 afin que vous puissiez prendre en compte ses remarques dans le cadre des trois « chantiers » visant la mise en place du projet BeHealth.

Ces remarques sont les suivantes :

1/ Les données de santé.

L’article 2, 1° de l’avant-projet de loi définit les données de santé comme suit :

« toute donnée à caractère personnel qui livre par son contenu ou par son utilisation une information sur l’état antérieur, actuel ou futur de la santé physique ou psychique d’une personne physique identifiée ou identifiable, à l’exception des données qui sont légitimement et exclusivement utilisées pour des finalités administratives ou comptables relatives à la prévention, aux soins ou à l’application des droits sociaux».

Cette définition n’est pas vide de conséquences en matière de secret professionnel. Elle est en outre manifestement inadéquate.

1.1/ Une définition inadéquate

Le Conseil national est d’avis que la définition de données de santé, telle que reprise dans l’avant-projet de loi, souffre au moins deux écueils :

1/ Si une donnée personnelle relative à la santé constitue en soi une donnée de santé, le contraire n’est pas toujours vrai : une donnée de santé n’est pas toujours personnelle. (Un simple numéro de nomenclature par exemple constitue une donnée de santé sans pour autant, dans tous les cas, constituer une donnée personnelle relative à la santé. Tel ne serait le cas que si le numéro de nomenclature attesterait d’un soin donné à une personne identifiée ou identifiable).

Une donnée de santé anonyme ne nécessite pas nécessairement de protection particulière en matière de vie privée ou en matière de secret professionnel. Une donnée personnelle relative à la santé par contre mérite une protection particulière du fait même qu’elle concerne une personne identifiée ou identifiable.

La législation en matière de vie privée, relayée en cela par la commission de la protection de la vie privée, a toujours considéré les données à caractère personnelles relatives à la santé comme des données sensibles dès lors qu’elles s’attachent à une personne identifiée ou identifiable, et pas dès lors qu’elles sont utilisées dans un contexte déterminé.

La définition, telle que reprise dans l’avant-projet de loi, ne reflète pas cette évidence.

2/ En outre, le Conseil national est d’avis que le fait de définir une donnée personnelle relative à la santé par l’utilisation qui en sera faite constitue une erreur de logique.

Tout comme une chaise reste une chaise même lorsque personne n’est assis dessus, une donnée personnelle relative à la santé en reste une même si elle est utilisée dans un contexte administratif ou comptable.

A cet égard, le Conseil national constate qu’il découle clairement de l’article 7 de la loi du 8 décembre 1992 relative à la protection de la vie privée à l’égard des traitements de données à caractère personnel (et particulièrement des articles 7, §2, b), c) et i)) que les données personnelles relatives à la santé le restent, même utilisées dans un contexte administratif ou comptable.

1.2/ Une définition lourde de conséquences.

La définition de « donnée de santé » reprise à l’article 2 de l’avant-projet de loi est lourde de conséquences négatives en matière de secret professionnel et de protection de la vie privée.

- Le secret professionnel

Pour rappel, l’article 458 du Code pénal est rédigé comme suit :

«Les médecins, chirurgiens, officiers de santé, pharmaciens, sages-femmes et toutes autres personnes dépositaires, par état ou par profession, des secrets qu'on leur confie, qui, hors le cas où ils sont appelés à rendre témoignage en justice (ou devant une commission d'enquête parlementaire) et celui où la loi les oblige à faire connaître ces secrets, les auront révélés, seront punis d'un emprisonnement de huit jours à six mois et d'une amende de cent francs à cinq cents francs ».

La Cour de cassation, dans un arrêt de principe du 16 décembre 1992, énonce que « le secret professionnel auquel l’article 458 du Code pénal soumet les praticiens de l’art de guérir, repose sur la nécessité d’assurer une entière sécurité à ceux qui doivent se confier à eux ».

La nouvelle définition de donnée de santé réduit considérablement la portée du secret professionnel, en considérant les données utilisées dans un contexte administratif ou comptable comme des données librement transmissibles.

Dès lors que les données à caractère personnel relatives à la santé ne perdent pas leur caractère personnel lorsqu’elles sont utilisées dans un contexte administratif ou comptable, le Conseil national est d’avis que la divulgation de ces données dans de tels contextes est susceptible de violer le secret professionnel.

Maintenir le principe du secret professionnel en en limitant progressivement et considérablement les possibilités d’application conduit à faire du secret une « coquille vide ». Les conséquences pratiques pour le patient pourraient être multiples.

Les patients sont très attachés au secret professionnel de leurs médecins : il en va de leur intérêt.

- La protection de la vie privée.

La définition de « donnée de santé » reprise à l’article 2 de l’avant-projet de loi est également lourde de conséquences négatives en matière de protection de la vie privée. S’il n’est pas exact qu’une donnée personnelle relative à la santé perdrait son caractère personnel dans un contexte administratif ou comptable, il apparaît légitime que même dans ces contextes, une protection de ces données soit garantie.

L’article 7 de la loi du 8 décembre 1992 ne s’y est d’ailleurs pas trompé.

L’expérience du Conseil national et des conseils provinciaux de l’Ordre des médecins montre à suffisance que les données à caractère personnel relatives à la santé méritent largement, si pas particulièrement, une protection en matière de secret professionnel et de vie privée dans le contexte administratif ou comptable, dans le domaine de la prévention ou encore dans celui des droits sociaux.

Le Conseil national est dès lors d‘avis qu’il serait davantage opportun de définir les données à caractère personnel relatives à la santé plutôt que, plus largement, les données de santé.

Cette définition serait la suivante : « toute donnée à caractère personnel qui livre une information sur l’état antérieur, actuel ou futur de la santé physique ou psychique d’une personne physique identifiée ou identifiable ».

2/ Le numéro d’identification santé personnel (NISP)

L’idée d’un identifiant de santé spécifique pour chaque individu, grâce auquel l’on pourrait accéder à la totalité de ses épisodes de santé depuis le berceau jusqu’à la tombe, à condition bien entendu que chaque épisode ait été rapporté par l’unité de soins ou par le médecin soignant et que toutes les institutions aient été interconnectées, n’est pas neuve.

Dans le cas présent, il s’agit d’attribuer un numéro unique sous lequel seront groupées toutes les données à caractère personnel relatives à la santé de l’individu, quelque soit l’endroit ou le moment où les soins lui ont été donnés.

Le Conseil national s’inquiète de l’utilisation qui pourrait être faite du numéro d’identification santé personnel pour d’autres finalités que les soins médicaux ou la recherche scientifique.

Certes, la commission de la protection de la vie privée a, à plusieurs reprises, recommandé l’usage d’un numéro de patient unique (avis n° 14/2002 du 8 avril 2002, avis n° 19/2002 du 10 juin 2002, avis n° 30/2002 du 12 août 2002, avis n° 33/2002 du 22 août 2002, avis n° 10/2004 du 23 septembre 2004, avis n° 01/2005 du 10 janvier 2005). Toutefois, cette recommandation s’accompagnait régulièrement d’une mise en garde : il convient de garantir une étanchéité des circuits d’informations entre les données à caractère personnel relatives à la santé et celles de sécurité sociale, ainsi qu’entre les données à caractère personnel relatives à la santé et celles du registre national.

Cette étanchéité n’est pas garantie dans l’état actuel du projet gouvernemental, et ce, pour au moins trois raisons :

1/ L’article 3, §1er in fine :

Le couplage logique entre le NISP (numéro d’identification santé personnel) et le NISS (numéro d’identification de la sécurité sociale), même s’il est réputé individuellement irréversible, permet la reconstitution d’un fichier national des NISP à partir du Registre national ou du registre des NISS.

Le Conseil national considère que le NISP doit impérativement être généré de manière aléatoire, et en aucune façon issu de la transformation logique de données à caractère personnel, fut-elle réputée irréversible.

2/ L’article 3, §3, 5°.

Le quinto du 3ème paragraphe de l’article 3 permet le couplage entre les données de sécurité sociale et les données à caractère personnel relatives à la santé.

3/ L’article 12, §3.

L’article 12, §3, du projet est rédigé comme suit :

« Pour les cas où le médecin traitant est le gestionnaire du dossier médical global du patient, les Organismes assureurs fournissent les données suivantes :

l’identification du médecin généraliste agréé
l’identification du patient via un numéro d’identification santé personnel ».

Si l’Organisme assureur peut fournir le numéro d’identification santé personnel du patient, il nous faut en conclure qu’il peut coupler le NISP et le NISS.

Le Conseil national s’inquiète en outre de ce que Be-Health organise lui-même le contrôle des transactions de données de santé qu’il opère.

3/ Le dossier de santé partagé.

L’avant-projet de loi met en place le principe d’un dossier de santé partagé. Différentes remarques peuvent être émises à ce sujet.

3.1/ La méthodologie.

Le Conseil national n’est pas convaincu de la réelle plus-value thérapeutique du dossier de santé partagé tel que décrit dans l’actuel projet.

La transmission de l’intégralité des données à caractère personnel relatives à la santé d’un individu n’est pas toujours nécessaire pour l’administration de soins de qualité et il n’est généralement pas requis de disposer de l’inventaire complet du passé médical du patient, mais uniquement de ses éléments pertinents.

Le dossier de santé partagé tel que décrit ne devrait pas être mis en place sans que son utilité scientifique ne soit démontrée.

3.2/ La vie privée et le secret professionnel

Il est évident que le dossier de santé partagé entraîne d’importants bouleversements dans la manière dont il est jusqu’ici requis de protéger la vie privée. Le Conseil national estime ne pas disposer jusqu’ici de suffisamment d’éléments pour pouvoir saisir la portée de ces bouleversements.

Le principe toutefois du dossier de santé partagé, tel qu’il est décrit dans l’avant-projet, suscite d’emblée la remarque suivante : il n’est pas acceptable que chaque professionnel de la santé (en ce compris les pharmaciens, kinésithérapeutes, dentistes et infirmiers) participant aux soins ait accès à l’ensemble des données concernant le patient.

La manière dont seront désignés les professionnels participant aux soins est en outre particulièrement nébuleuse (voir ci-dessous). La question de savoir si l’échange des informations est suffisamment sécurisé reste très largement en suspens. Cette question est pourtant essentielle afin de garantir la confidentialité des données à caractère personnel relatives à la santé du patient. Le Conseil national tient à faire remarquer à cet égard que l’accès au dossier de santé partagé DOIT faire l’objet d’une application différenciée selon la catégorie ou la spécialité du professionnel de santé.

Il nous faut également constater que la manière dont sont traitées les données personnelles peut varier d’une profession à l’autre, étant donné que la notion de « secret professionnel » peut être appliquée différemment entre deux droits disciplinaires différents. Le dossier de santé partagé interroge donc également le droit disciplinaire.

Le Conseil national estime que le principe de « dossier de santé partagé » mérite une large réflexion.

3.3/ La faisabilité

A la lecture des dispositions de l’avant-projet concernant le dossier de santé partagé, il nous est permis de nous interroger sur sa faisabilité pratique.

- L’informatisation

L’idée du dossier partagé repose entièrement sur le postulat suivant lequel les professionnels de la santé disposent d’un matériel informatique suffisant et qu’ils gèrent les dossiers de leurs patients via des logiciels spécifiques, compatibles entre eux.

L’informatisation globale et organisée de l’ensemble des professionnels de la santé nécessite du temps et de la volonté : il nous est permis de douter quant aux possibilités réelles d’application sur le terrain, à l’heure actuelle et à moyen terme, des mesures que préconise l’avant-projet de loi.

- Le financement

L’informatisation généralisée des dossiers de santé représente un coût important.

L’avant-projet de loi ne précise pas de quelle manière les mesures qu’il préconise seront financées et quel budget y sera consacré. Il est évident toutefois que l’application pratique des dispositions de l’avant-projet dépendra en grande partie du financement octroyé.

Le Conseil national s’interroge sur la faisabilité financière de l’avant-projet de loi.

- La surcharge administrative

La mise en place du dossier de santé partagé, tel que prévu dans l’avant-projet, implique une surcharge de travail administratif pour le médecin.

Il est demandé au médecin de diviser le dossier santé partagé en sections : le « dossier santé résumé », le « dossier santé historique » et d’éventuelles sections spécifiques (article 12). Ce tri entraîne assurément un surcroît de travail administratif.

- L’accès au DMP

En principe, seuls les médecins amenés à soigner le patient auraient accès au dossier de santé partagé. Dans l’exposé des motifs de l’avant-projet de loi, on peut lire ceci :

« Après avoir été identifié et authentifié, à la fois comme personne et comme professionnel de la santé, le praticien doit recevoir une autorisation d’accès à une application loco-régionale et à un dossier individuel géré au niveau de cette application. Cette autorisation ne lui est octroyée que s’il exerce une relation effective de soignant vis-à-vis du patient. Si un patient change de médecin, le médecin qui le traitait perd son accès au dossier. Le secret médical est organisé par le médecin traitant du patient (généraliste ou, le cas échéant, spécialiste) qui décidera, comme c’est le cas actuellement, quels sont les professionnels de l’équipe qui auront accès à quelles données, et cela en fonction de leur participation aux soins à ce patient ».

A la lecture de cet extrait, il nous est permis de nous interroger quant à savoir si l’on entend soumettre l’accès au dossier de santé partagé à l’autorisation préalable du médecin traitant.

Ce serait à la fois critiquable du point de vue de la déontologie et du libre choix du médecin mais ce serait également irréaliste.

La manière dont les médecins auront accès au dossier de santé partagé est en tous les cas décrite de manière particulièrement nébuleuse dans l’avant-projet de loi. Des éclaircissements sont indispensables.

En outre, le Conseil national constate que l’authentification du statut de médecin est réalisée par la consultation de la banque de données fédérales des professionnels de la santé, visée par la loi du 29 janvier 2003 (art. 13, 2°). Le Conseil souligne qu’une telle authentification relève, en vertu de l’arrêté royal n° 79 du 10 novembre 1967, de la compétence des Conseils provinciaux de l’Ordre des médecins, chargés de la constitution du Tableau.

4/ Les organes télématiques.

A côté de la Commission « normes en matière de télématique au service du secteur des soins de santé » et de la commission de la vie privée, de nouveaux « organes» sont créés qui recevraient un certain nombre de compétences en matière de télématique :

  • un « comité sectoriel pour les données de santé », créé au sein de la commission de la protection de la vie privée.
  • une « plate-forme télématique Be-health ».

Le rôle spécifique de chacun de ces organes ainsi que leurs interrelations ne sont pas très claires. Des doutes subsistent en outre quant à leur indépendance par rapport aux autorités politiques et par rapport aux organismes de sécurité sociale.

5/ La télémédecine.

En ce qui concerne le volet de l’avant-projet de loi touchant spécifiquement à la télémédecine, le Conseil national rappelle deux considérations fondamentales, dont le respect ne semble pas garanti dans le projet de loi actuel :

1/ Dans le cadre de la communication électronique les télé-experts ne peuvent s’engager à faire des diagnostics ou à installer des traitements, sans avoir ni interrogé ni examiné personnellement le patient. Leur rôle est donc celui d’aide au diagnostic et à la décision. Le lieu où l’acte médical est posé reste celui où se trouve le médecin traitant demandeur. Il s’agit ici aussi d’un problème de responsabilité médicale.

2/ La prescription électronique établie par un professionnel de la santé habilité, sous la forme d’un fichier électronique doit respecter le libre choix du patient.

Le Conseil national invite à se référer à ses avis exprimés précédemment en matière de télémédecine et d’exercice de la médecine à distance.

CONCLUSION

Le Conseil national

1/ refuse la définition de donnée de santé telle que reprise dans le projet : il l’estime attentatoire au secret professionnel et à la législation relative à la protection de la vie privée. Le recours aux termes « données à caractère personnel relatives à la santé » apparaît plus judicieux.

2/ refuse toute forme de couplage logique entre le NISP, d’une part, et le NISS ou le NRN (numéro de registre national), d’autre part. Le NISP ne peut être généré que de façon aléatoire et en aucune façon issu de la transformation logique de données à caractère personnel, fut-elle réputée irréversible.

L’utilisation du NISP doit rester circonscrite strictement à l’administration des soins.

3/ constate que les modalités de mises en place et d’accès au « dossier médical partagé » sont imprécises et ne permettent pas, en l’état, de garantir la confidentialité. Le Conseil national estime que la communication des données de santé par voie électronique entre professionnels de la santé, par un réseau public ou par un réseau privé non local, ne peut en aucune circonstance fonctionner sans recours préalables à des méthodes sécurisées de cryptage et de signature certifiée.

4/ souligne le manque d’indépendance de la « plate-forme télématique Be-Health », vis-à-vis tant des autorités publiques (notamment compétentes en matière de sécurité sociale) que des organismes assureurs.

5/ estime que la télémédecine doit être au service du requérant qui est médecin traitant.

6/ refuse la centralisation, par une seule instance, des systèmes de sécurité et d’identification, du notariat des transactions, de la labellisation des logiciels et, en particulier, du transfert des données.

7/ n’est pas convaincu de la réelle plus-value thérapeutique du concept de « dossier de santé partagé », tel que repris dans le projet.

Pour ces motifs, le Conseil national souhaite une révision du projet de loi dans un sens plus respectueux des impératifs, légaux et déontologiques, nécessaires aux relations médecins-patients.

Demande d’explications de M. Jan STEVELYNCK au ministre des Affaires sociales et de la Santé Publique sur « le plan d’action relatif aux e-soins de santé », n°3-1060, 27 octobre 2005, Annales du Sénat n ° 3-131, p. 59.

Médecin généraliste23/04/2005 Code de document: a109003
Prélèvement d'un échantillon d'urines à la requête de l'autorité judiciaire

Prélèvement d’un échantillon d’urines à la requête de l’autorité judiciaire

Un conseil provincial soumet un document en se basant sur une certaine zone de police dans laquelle il est fait référence au médecin généraliste pour effectuer le prélèvement d’un échantillon d’urines. Le résultat de ce contrôle a été transmis sous pli fermé au médecin généraliste et ensuite au service de police.
Le conseil provincial estime que cette façon de procéder ne correspond pas à la déontologie médicale étant donné que le médecin généraliste intervient ici en tant qu’expert, un titre qui semble incompatible avec le titre de médecin traitant.

Avis du Conseil national :

Le Conseil national constate qu’il n’existe pas de législation ou de réglementation spécifiques en la matière. Le médecin généraliste n’est dès lors pas obligé de procéder à un prélèvement d’un échantillon d’urines. En outre, l’intervention du médecin généraliste risque de compromettre la relation de confiance qu’il entretient avec son patient.

Lorsqu’un tel test d’urines est imposé dans le cadre des conditions de probation acceptées par le patient devant le tribunal et que le patient en fait la demande expresse à son médecin généraliste, le Conseil national estime que le médecin peut accéder à cette demande. En effet, dans ces circonstances la relation de confiance n’est pas compromise.

Dans ce cas, le médecin généraliste doit informer le patient de la procédure qui doit être suivie scrupuleusement. Le médecin généraliste devra ainsi veiller à ce que l ‘échantillon d’urines soit prélevé et envoyé au laboratoire de manière correcte et que le résultat soit remis au patient.

Vie privée15/11/2003 Code de document: a103007
Mutualités - Utilisation des données de facturation

Un conseil provincial fait parvenir la lettre conjointe d'un médecin directeur et d'un médecin directeur adjoint d'une mutualité, demandant si un médecin-conseil statutairement engagé par un organisme assureur, qui a connaissance des pathologies exactes des assurés par le biais des données de facturation ou de consultation, peut inviter ces assurés à des séances d'information ou leur adresser un courrier informatif ciblé.

Avis du Conseil national:

Ainsi que les demandeurs le mentionnent, les bases légales qui régissent ces éventualités peuvent être trouvées dans un éventail de lois à savoir celles relatives aux mutualités, à la charte de l'assuré social, à la protection de la vie privée à l'égard de données à caractère personnel, à la Banque carrefour de la sécurité sociale, l'arrêté royal n° 35 du 20 juillet 1967 portant le statut et le barème des médecins-conseil chargés d’assurer auprès des organismes assureur le contrôle médical de l’incapacité primaire et des prestations de santé en vertu de la loi relative à l’assurance obligatoire soins de santé et indemnités, coordonnée le 14 juillet 1994 portant entre autres choses sur la mission du médecin conseil et ses obligations déontologiques, auxquels il faut ajouter le prescrit du Code de déontologie médicale notamment celui de son chapitre IV.

La loi du 6 août 1990 concernant les mutualités leur impose, parmi d'autres obligations, d'instaurer un service qui a pour but "l'octroi d'aide, d'information, de guidance et d'assistance en vue de promouvoir le bien être physique, psychique et social" à leurs assurés mais ce, plus spécifiquement en ce qui concerne la participation à l'exécution de l'assurance et l'intervention financière pour leurs affiliés. Conclure de ces devoirs que les mutualités ont vis-à-vis de leurs membres une obligation d'éducation sanitaire collective et surtout personnalisée semble une extension d'interprétation disproportionnée ou à tout le moins excessive.

La loi du 8 décembre 1992 relative à la protection de la vie privée à l'égard des traitements de données à caractère personnel quant à elle précise que "les données à caractère personnel doivent être collectées pour des finalités déterminées, explicites et légitimes, et ne pas être traitées ultérieurement de manière incompatible avec ces finalités ... " Il est logique de se demander si la mission première des médecins-conseils des organismes assureurs qui consiste notamment à contrôler l'incapacité de travail et plus récemment à accorder des autorisations de remboursement, notamment de médicaments, ne déborde pas de sa finalité initiale quand, sur base des renseignements de pathologie fournis par les médecins traitants, le médecin-conseil propose ou indique une orientation préventive dans ce cadre pathologique. De plus, cette même loi en son article 4, §1er, 1°, précise que les données à caractère personnel doivent être traitées loyalement et licitement ce qui sous-entend qu'elles ne peuvent être traitées qu'en conformité avec toutes les dispositions légales liées au contexte dans lequel le traitement est envisagé.

La question de la licéité du traitement peut se poser au moins sous deux points de vue. Non seulement sous l'angle de la loi précitée qui précise en son article 7, § 1er, que le traitement de données à caractère personnel relatives à la santé est interdit et où ainsi il apparaît à première vue illégal et déviant d'utiliser des données d'un assuré social récoltées dans le cadre d'une mission de contrôle des incapacités de travail ou d'octroi de remboursement afin de lui adresser un courrier informatif ciblé relatif à sa pathologie mais aussi au vu de l'arrêté royal n° 35 portant le statut des médecins conseils dans l'article 26 duquel il est précisé, dit autrement, que si le médecin conseil, dans l'exercice de sa mission de contrôle, examine les possibilités de préciser le diagnostic et d'améliorer la thérapeutique, il le fait en liaison avec le médecin traitant. Envoyer un courrier informatif ou personnalisé au patient sans cette liaison avec le médecin traitant sort du cadre légal.
Toutefois, il est utile de préciser que si la loi relative à la protection de la vie privée dispose en son article 7 que si le traitement de données à caractère personnel relatives à la santé est interdit, cette interdiction peut être levée dans onze cas et notamment lorsque la personne concernée a donné son consentement par écrit à un tel traitement ou aussi lorsque le traitement est nécessaire aux fins de médecine préventive, ... dans l'intérêt de la personne concernée et que les données sont traitées sous la surveillance d'un praticien des soins de santé (dont les qualifications et les compétences précises ne sont pas définies dans cette loi).

Le Conseil national estime cependant au vu notamment de l'esprit des récentes dispositions législatives telles que la loi relative aux droits du patient et celle relative à l'euthanasie, qui consacrent une large place aux volontés et desiderata du malade, que cette dernière levée d'interdiction n'est pas absolue et ne peut suffire à permettre d'entreprendre la mise en oeuvre d'actions de médecine préventive par le médecin conseil statutairement engagé par un organisme assureur. Il considère qu'elle doit être couplée à l'enregistrement du consentement écrit de la personne concernée et qui plus est, en conformité avec l'article 26 de l'arrêté royal du 13 février 2001 sur les conditions pour le traitement de données à caractère personnel, qui précise, entre autres, que le responsable du traitement doit préalablement communiquer à la personne concernée les motifs pour lesquelles ces données sont traitées. Il lui semble essentiel qu'il apparaisse que la finalité du traitement des données recueillies par le biais de renseignements de facturation de prestations de santé n'a pas le même objet que la mise en route de mesures de prévention collective ou individuelle.

Pour exercer leur mission de médecine préventive à l’égard de leurs assurés, les mutualités peuvent disposer de la diffusion de leurs périodiques.

Par contre, toute action personnalisée sans échange préalable avec le médecin traitant du patient, est inacceptable sur le plan de la déontologie médicale.