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Déontologie

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Consentement éclairé29/09/2001 Code de document: a094003
Témoins de Jéhovah et déclaration de volonté

Le président d'un comité de réflexion éthique souhaite connaître le point de vue actuel du Conseil national concernant une déclaration de volonté écrite par un Témoin de Jéhovah s'opposant à toute transfusion sanguine. Suivant l'avis du Conseil national du 10 décembre 1983 (Bulletin du Conseil national n° 32, 1983-1984, p. 23), une déclaration de volonté écrite (en l'occurrence le refus de transfusion sanguine) d'une personne majeure, incapable d'exprimer sa volonté, doit être respectée dans les cas d'urgence où la vie est en danger («intervention jugée indispensable»). Le comité de réflexion éthique se demande si cette façon d'agir n'est pas contraire à l'obligation d'assistance telle que fixée à l'article 422bis du Code pénal et à l'article 6 du Code de déontologie médicale. Le comité souhaite savoir si le Conseil national maintient son point de vue de 1983.

Avis du Conseil national :

Il convient de préciser au préalable que cette déclaration de volonté n'a de signification que si l'état de santé du patient est tel qu'il rend impossible une discussion approfondie des conséquences probables du refus d'une transfusion sanguine.

Le Conseil national estime, comme prescrit par l'article 31 du Code de déontologie médicale, que le médecin doit s'interdire "de heurter les convictions philosophiques, religieuses ou politiques". Ceci ne veut toutefois pas dire qu'une conviction religieuse manifestée par une déclaration de volonté écrite constitue une exception à la position récemment adoptée par le Conseil national en matière de déclarations de volonté écrites.

Le Conseil national se réfère à cet égard à l'avis qu'il a émis le 17 février 2001 au sujet de la Note conceptuelle Droits du Patient (Bulletin du Conseil national n° 91, mars 2001, p. 3), en particulier aux deux derniers paragraphes sous l'intitulé "Représentation du patient".

Dans ceux-ci il est dit que :
«Le Conseil national ne peut non plus accepter qu'un médecin soit obligé de respecter le refus écrit du consentement à une intervention déterminée, rédigé par le patient lorsqu'il était encore apte à apprécier raisonnablement ses intérêts. De tels refus ne sont qu'indicatifs et ne peuvent être contraignants.
En revanche, le Conseil national estime que le dispensateur de soins doit sérieusement tenir compte à la fois de l'avis de la personne de confiance et d'une déclaration de volonté du patient par écrit. Ces éléments peuvent même être décisifs en cas d'hésitation entre l'abstention ou l'intervention, mais il serait inadmissible de laisser mourir des personnes lorsqu'il y a de fortes chances qu'un traitement déterminé donne un bon résultat. Il est cependant indiqué, avant de prendre une décision dans de telles circonstances, que le médecin responsable demande l'avis d'un confrère et/ou de l'équipe multidisciplinaire traitante, et qu'il se concerte aussi avec la famille le cas échéant.»

Témoins de Jéhovah10/12/1983 Code de document: a032006
Temoins de Jehovah

Témoins de Jehovah

Le Conseil national est prié de préciser à nouveau l'attitude que doit avoir un médecin confronté au problème de la transfusion sanguine chez un Témoin de Jehovah.

Après examen du problème, le Conseil national, en sa séance du 10 décembre 1983, a émis l'avis suivant :

Avis du 10 décembre 1983, concernant le cas des mineurs d'âge:
  • Si le médecin estime que le mineur est capable de discernement, les règles prévues pour les adultes lui sont applicables.
  • Lorsqu'il s'agit d'un enfant mineur et que son représentant légal s'oppose à un acte thérapeutique, tel que la transfusion, jugé indispensable par le médecin, et que le représentant légal a été informé des dangers que comporterait la non-intervention, le médecin devra, s'il y a urgence, procéder à cet acte. S'il n'y a pas urgence et que le représentant légal s'oppose à l'acte thérapeutique, le médecin devra en référer à l'autorité judiciaire.
  • Lorsque, malgré tout, il n'y a pas possibilité de procéder à l'acte thérapeutique, il faut faire signer un texte analogue à celui qui a été adopté par le Conseil national pour les adultes.
  • Il y a lieu de noter que lorsqu'il s'agit d'adultes incapables de donner leur autorisation, le médecin traitant est tenu d'informer les proches, mais il ne doit pas obtenir leur autorisation pour procéder à l'acte thérapeutique qu'il juge nécessaire.
  • Cependant, lorsque le patient est porteur d'un document marquant son refus, le médecin doit respecter sa volonté.
  • Lorsque, après l'entretien avec les proches, le médecin a l'impression qu'ils ne sont pas d'accord avec l'acte thérapeutique projeté, il est recommandé que la décision de procéder à celui-ci soit prise par trois médecins.
Témoins de Jéhovah08/10/1983 Code de document: a032005
Témoins de Jehovah

Le Conseil national est prié de préciser à nouveau l'attitude que doit avoir un médecin confronté au problème de la transfusion sanguine chez un Témoin de Jehovah.

Après examen du problème, le Conseil national, en sa séance du 8 octobre 1983, a émis l'avis suivant :

Avis du 8 octobre 1983, concernant le cas des adultes:

Tant la jurisprudence que la déontologie médicale établissent clairement que le médecin doit respecter la volonté libre et consciente d'un adulte qui jouit de sa capacité juridique même si elle peut aboutir au décès de l'adulte. Les conceptions de notre société au sujet du respect des droits de l'homme obligent le médecin à cette attitude.

Il est essentiel que le médecin, au cours d'un entretien personnel, fournisse lui-même toutes les informations nécessaires sur la nature de l'acte médical, la nécessité (éventuelle) de transfusions sanguines, et les conséquences (éventuelles) de l'abstention.

Lorsque le médecin ne parvient pas à convaincre le patient, il doit, en tenant compte de la volonté de celui-ci, décider en conscience de l'opportunité de l'acte médical. S'il estime que l'acte médical sans transfusion sanguine comporte un risque très grand, il peut renoncer à cet acte.

Dans les deux cas, il est recommandé que l'intéressé signe une déclaration précisant qu'en possession de toutes les informations nécessaires, il refuse toute transfusion sanguine.

Chirurgie01/01/1977 Code de document: a026032
Chirurgie cardio-vasculaire et les témoins de Jéhovah

CHIRURGIE CARDIO‑VASCULAIRE ET LES TEMOINS DE JEHOVAH

Le Conseil national, comme les Conseils provinciaux, a été, à plusieurs reprises confronté avec le problème de transfusions de sang chez les Témoins de Jéhovah.

Il croit intéressant de publier, à titre documentaire, un rapport américain concernant la chirurgie cardio‑vasculaire chez des Témoins de Jéhovah.

RAPPORT SUR 542 OPERATIONS SANS TRANSFUSION DE SANG

David A. Ott, Denton A. Cooley, Docteurs en médecine.

- Les témoins de Jéhovah dont l'état nécessite une opération posent un problème particulier aux médecins à cause de leur refus de recevoir toute transfusion de sang. Nous rapportons notre expérience de 20 ans avec une série de 542 témoins de Jéhovah dont l'âge varie entre 1 jour et 89 ans, et qui ont subi une opération. La mortalité précoce (dans les 30 jours de l'opération) a été de 9,4%. Chez 362 patients ayant nécessité une circulation extra-corporelle, cette mortalité a été de 10,7 %. Chez 126 malades qui ont subi un remplacement valvulaire simple ou double, la mortalité a été de 13,5 %. Dans les cas de remplacement valvulaire aortique ou de fermeture d'une communication inter‑ventriculaire, les seuls décès sont attribuables à des complications pré‑existantes à l'opération. Une anémie pré‑ ou post‑opératoire a été un facteur précipitant dans 12 décès, et une perte de sang a été la cause directe de 3 décès. Les opérations cardio‑vasculaires peuvent être pratiquées en toute sécurité sans transfusion sanguine.
(JAMA 238: 1256‑1258, 1977)

Dans le passé, les patients qui refusaient des transfusions sanguines pour des motifs religieux étaient souvent privés du bénéfice d'un traitement chirurgical. En 1964, nous avons rapporté la première opération à coeur ouvert chez un témoin de Jéhovah. Alors que d'autres chirurgiens avaient pratiqué des interventions chez ces patients, peu de cas ont été rapportés dans la littérature médicale (*). C'est pourquoi nous estimons qu'un rapport de notre expérience est justifié. Une analyse rétrospective a été faite, de 542 patients qui, depuis 1957, ont subi des interventions cardio-vasculaires sans transfusion de sang, au Texas Heart Institute.

CONSIDERATIONS TECHNIQUES

Chez chaque patient, on a appliqué la technique chirurgicale la plus simple, avec une hémostase soignée. L'opération chez des patients devant subir une circulation extra‑corporelle a été pratiquée dans des conditions d'hypothermie systématique modérée, ou normothermique. On a utilisé des oxygénateurs à bulles qui ont tous été amorcés avec un volume de 20 à 30 ml/kg de lactate de Ringer. Le débit délivré par la pompe atteignait en moyenne 40 à 100 ml/min/kg. Avant le retrait de la canule aortique, tout le sang restant dans le circuit extra‑corporel a été rendu au patient. On n'a pas ajouté de sang, ni avant, ni pendant, ni après l'opération; aucun dérivé du sang, à savoir plasma, plaquettes, fibrinogène, albumine ou cryoprécipité n'ont été administrés. On n'a utilisé des solutions crystalloïdiennes que pour remplacer le volume manquant. On n'a pas utilisé de dextran à cause des effets néfastes que l'on connaît sur l'hémostase, mais on a généralement administré du dextran + fer (Imferon) en injection avantl'intervention afin de stimuler l'érythropoièse.

DONNEES CLINIQUES ET RESULTATS

De 1957 à 1977, 542 patients, dont l'âge variait de 1 jour à 89 ans, ont subi des interventions importantes sans transfusion sanguine. La mortalité précoce globale (dans les 30 jours suivant l'opération) a été de 9,4 % (51 décès). 362 patients ont subi une circulation extra‑corporelle et la mortalité précoce a été de 39 décès, c'est‑à‑dire 10,7 %. Une intervention cardiaque sans circulation extra‑corporelle a été pratiquée chez 75 patients, avec 7 décès précoces (9,3 %). Une intervention non cardiaque a été pratiquée chez 105 patients, avec 5 décès précoces (4,8 %).

Parmi les 67 patients ayant subi un remplacement valvulaire aortique, la mortalité globale a été de 14,9 % (10 patients). Des facteurs anatomiques ou physiologiques importants ont influencé le résultat final dans ces 10 décès. Trois de ces patients ont nécessité une circulation extra‑corporelle pour la seconde fois; chez un des trois patients, on a réalisé un shunt aorto‑coronnarien simultané. Un des trois patients avait arrêté de prendre des anti-coagulants et présentait un oedème pulmonaire aigu et de l'hypotension. Elle a subi une ré‑intervention d'urgence pour une thrombose valvulaire aiguë. Deux patients presque moribonds souffraient d'endocardite bactérienne aiguë, nécessitant une intervention d'urgence. Avant l'opération, un de ces patients était en anurie et l'autre présentait un taux d'hémoglobine de 6,5 gr/dl. Deux des patients ayant subi une résection simultanée d'un anévrisme de l'aorte ascendante sont décédés; chez 3 patients, on réalisa la fermeture d'une communication inter‑ventriculaire au moment du remplacement de la valve aortique. Il n'y eut pas de décès chez les patients qui ont subi un remplacement de la valve aortique pour un défaut de celle‑ci, sans complications.

Chez 43 patients qui ont subi le remplacement de valves mitrales, la mortalité a été de 11,6 % (5 patients). Un décès a été causé par une embolie cérébrale et un autre par un infarctus myocardique post‑opératoire. Un patient fit brusquement un arrêt cardiaque, le 8ème jour après l'opération, et un autre mourut de complications d'hypertension pulmonaire. Une hémolyse importante s'est développée chez la 5ème patiente, suite à une annuloplastie mitrale nécessitant le remplacement d'une valve mitrale d'urgence. Elle décéda finalement d'une insuffisance rénale.

Seize patients ont subi dans le même temps le remplacement de valves mitrale et aortique simultané, avec une mortalité précoce de 12,5 % (2 patients).

Le shunt aorto‑coronnarien, accompagné ou non de la résection d'un anévrisme ventriculaire gauche, a été réalisé chez 123 patients, avec une mortalité de 6,5 %. Des 8 patients qui sont morts, trois d'entre eux avaient subi une résection simultanée d'un anévrisme ventriculaire gauche. Un arrêt cardiaque s'est produit chez une patiente au cours du cathétérime cardiaque, et elle fut transférée en salle d'opération alors qu'elle était soumise à une réanimation cardio‑pulmonaire. Elle est morte après shunt aorto‑coronnarien. Deux patients sont morts après infarctus du myocarde. Deux autres sont morts en salle d'opération: I'un de fibrillation ventriculaire rebelle et l'autre d'un choc cardiogénique.

La mortalité chez 25 patients ayant subi une commissuretomie mitrale ouverte a été de 8 % (2 patients). L'un est mort à la suite d'une défaillance cardiaque congestive aiguë, et chez l'autre se développa une diathèse hémorragique d'étiologie inconnue. Il n'y eut aucun décès chez les 25 patients qui avaient subi une fermeture d'une communication inter‑ventriculaire non compliquée. Deux patients sur 15 moururent après une correction complète de la tétralogie de Fallot. Une pneumonie de déglutition causa la mort d'un patient. Chez l'autre, âgé de 24 ans, on pratiqua la fermeture simultanée d'un shunt aorte ascendante‑artère pulmonaire droite. L'artère pulmonaire était friable et le patient succomba à une perte de sang.

Sept décès se produisirent parmi les 75 patients qui subirent diverses interventions cardiaques ne nécessitant pas une circulation extra‑corporelle cardio‑pulmonaire. La mortalité opératoire a été de 9,3 %. 105 patients subirent une série d'interventions non cardiaque, avec une mortalité de 4,8 %.

COMMENTAIRE

En 1881, un tailleur de Pennsylvannie, Charles Russel, fonda le «Watchtower Bible and Tract Society», une extension du groupe local d'étude de la Bible. Grâce au travail d'évangélisation de ses successeurs et à un volume prodigieux de publications, ce mouvement religieux a connu une croissance phénoménale. Plus de 2 millions de personnes dans 210 pays pratiquent cette religion. En 1951, les membres se donnèrent le nom de Témoins de Jéhovah, se basant sur le passage de la Bible suivant: «Vous êtes mes témoins, dit Jéhovah» (Isaïe, 43:10).

La secte est de nature «fondamentaliste»: nombre de ses règles se basant sur une interprétation littérale des Ecritures. Leur doctrine à propos des transfusions sanguines est précisée dans une publication «Sang, Médecine et Loi de Dieu», qui se réfère à des passages bibliques tels que celui‑ci:

La vie de toute chair, c'est son sang, et j'ai dit aux enfants d'lsraël: «Vous ne mangerez du sang d'aucune chair car la vie de toute chair, c'est son sang, et quiconque en mangera sera supprimé.» (Lévitiques 17:14)

D'après leurs croyances, recevoir du sang ou un dérivé du sang prive l'individu de la résurrection et du salut éternel. Les témoins de Jéhovah sont sincères et inébranlables dans leur refus de recevoir du sang. Les implications médico‑légales et éthiques d'une telle philosophie ont été largement discutées. (2)

Le chirurgien qui accepte de soigner un témoin de Jéhovah devrait respecter ses convictions religieuses ou bien l'envoyer chez un confrère.

Notre expérience nous a montré que ces patients étaient coopérateurs aussi longtemps que leurs normes en matière de chirurgie étaient respectées. Malgré le caractère litigieux de notre société, aucune plainte n'a été introduite, à notre connaissance, contre un médecin pour ne pas avoir donné du sang à un témoin de Jéhovah. Nous estimons que le patient devrait avoir le droit de décider lui‑même et que le médecin a le devoir moral de respecter les désirs de son patient. Nous n'avons jamais violé l'accord fait avant l'opération, selon lequel il n'y aura pas de transfusion sanguine, quelles que soient les circonstances ou les besoins.

Quand il s'agit d'enfants, la question doit être envisagée de manière plus attentive. Si l'on prévoit une perte de sang massive, il est déconseillé d'opérer. Si l'intervention est simple, comme la fermeture d'un canal artériel, d'une communication inter‑auriculaire, d'une communication inter‑ventriculaire, on ne rencontre généralement pas de difficultés. Mais chez les enfants présentant de plus graves anomalies, comme la transposition des grands vaisseaux ou la tétralogie de Fallot, la décision opératoire est plus difficile à prendre.

Dans ce groupe de patients, 3 des 51 décès ont été directement causés par une perte de sang. L'anémie post‑opératoire a été un facteur précipitant dans 12 autres décès. Notre expérience confirme que les patients qui refusent une transfusion sanguine pour des motifs religieux peuvent néanmoins subir des interventions cardio‑vasculaires importantes avec un risque relativement peu élevé.

***

(1)
(*) Sandiford F.M., Chiariello L., Hallman G.L., et al.: Aortocoronary bypass in Jehovah's Witnesses: Report of 36 patients. J. Thorac Cardiovasc. Surg. 68:1‑7, 1974.
(*) Zaorski J.R., Hallman G.L., Cooley D.A.: Open heart surgery for acquired heart disease in Jehovah's Witnesses: A report of 42 operations. Am J. Cardiol 29: 186‑189, 1972.
(*) Simmons C.W. Jr, Messmer B.J., Hallman G.L., et al.: Vascular surgery in Jehovah's Witnesses. JAMA 213:1032‑1034, 1970.
(*) Cooley D.A., Bloodwell R.D., Beall A.C. Jr, et al.: Cardiac valve replacement without blood transfusion. Am J. Surg. 112:743‑751, 1966.

(2)
(*) Schechter D.C.: Problems relevant to major surgical operations in Jehovah's Witnesses. Am J. Surg. 116:73‑80, 1968.
(*) Gardner B., Bivona J., Alfonso A., et al.: Major surgery in Jehovah's Witnesses. NY State J. Med. 76:765‑767, 1976.
(*) Winters R.G., Dornette W.H.: Jehovah's Witnesses and consent. J. Legal. Med. 2:9, 1974.
(*) Fitts W.T., Orloff M.J.: Blood transfusion and Jehovah's Witnesses. Surg. Gynecol Obstet 108:502‑512, 1959.