Téléconsultation et triage téléphonique dans le cadre de la pandémie du COVID-19
En sa séance du 17 octobre 2020, le Conseil national a formulé un avis relatif à la téléconsultation et triage téléphonique dans le cadre de la pandémie du COVID-19, sur base des Questions et réponses (mars, avril, mai 2020) publiées dans la rubrique COVID-19 sur www.ordomedic.be.
Le Collège de Médecine Générale francophone de Belgique (CMG) et Domus Medica recommandent de privilégier le tri téléphonique des patients présentant des signes évoquant une contamination par le COVID-19.
En ce qui concerne les principes déontologiques lors de la prise en charge d'un patient sans contact physique direct avec lui ainsi que les limites et les opportunités de la consultation « à distance », le Conseil national fait référence à son avis du 21 septembre 2019 sur la téléconsultation en vue de poser un diagnostic et de proposer un traitement (a166007).
Il rappelle ce qui suit : « Une consultation à distance, si elle apparaît facile d'utilisation, n'a pas la précision d'une consultation en présence du patient et du médecin et n'offre dès lors pas la même sécurité sur le plan du diagnostic et de la prescription médicamenteuse. La téléconsultation doit être justifiée par une situation particulière qui entraîne dans le chef du patient un avantage à substituer la téléconsultation à la consultation en face à face. »
Dans les conditions actuelles de pandémie de coronavirus, la situation est particulière vu le contexte pandémique qui exige des mesures de santé publique pour limiter les risques de propagation du virus. Réduire au maximum les déplacements de patients atteints ou suspects d'être atteints du virus est une mesure prioritaire dans la gestion sanitaire de cette pandémie.
Afin de donner un avis par téléphone, le médecin doit effectuer une anamnèse complète en tenant compte des facteurs de risque liés à la pathologie (red flags), aux antécédents du patient et à ses autres affections aiguës ou chroniques pouvant le rendre plus vulnérable. Les médecins de première ligne attendent des autorités scientifiques et sanitaires qu'elles précisent et mettent à jour les signes d'alerte (red flags) liés à cette pathologie. Il importe de rappeler que les conséquences de pareille contamination restent mal connues pouvant donner des tableaux atypiques et qu'un pourcentage des patients développent une pathologie pulmonaire grave pouvant entraîner un risque vital.
Les conditions minimales pour que l'organisation de téléconsultation via images vidéo soit acceptable nécessitent que le médecin a) connaisse bien le patient et ses antécédents, b) ait accès aux informations médicales le concernant (dossier médical) et c) soit en mesure d'assurer la continuité des soins (Communiqué de presse du Conseil national du 10 mars 2020 (a167005).
En cas d'absence ou d'inaccessibilité du dossier, le médecin doit pouvoir appréhender les antécédents et la situation médicale du patient par une anamnèse soigneuse et complète qui portera particulièrement sur les traitements médicamenteux en cours.
Les directives de l'INAMI sont accessibles sur https://www.inami.fgov.be/fr/nouvelles/Pages/dispenser-soins-distance-covid19-approche-globale-plusieurs-professions.aspx.
Le médecin contacté par téléphone devra évaluer la balance des risques pour le patient et la société entre un avis téléphonique, une consultation présentielle, une visite à domicile et un renvoi vers une structure (hospitalière ou autre) organisant le dépistage et la prise en charge des patients (suspects d'être) atteints par le virus COVID-19.
Sciensano met régulièrement à jour ses recommandations aux médecins concernant la procédure pour les patients suspects d'être infectés au COVID-19 (https://covid-19.sciensano.be/fr/covid-19-procedures).
Lorsque le médecin recourt à une téléconsultation pour des patients qui ne sont sans doute pas contaminés par le COVID-19, l'avis cité du 21 septembre 2019 du Conseil national (a166007) est aussi d'application. La pandémie de coronavirus constitue une situation particulière qui entraîne dans le chef du patient et du médecin, moyennant le respect de certaines conditions décrites dans cet avis, un avantage à substituer la téléconsultation à la consultation en face à face.
Le Conseil national attire l'attention sur la nécessité de poursuivre les soins essentiels. Il va de soi que le médecin doit assurer la continuité des soins aux patients chroniques en particulier si cette surveillance est critique pour le patient : nous pensons entre autres aux diabètes graves, aux patients sous anticoagulants, aux transplantés, aux insuffisants rénaux et au suivi des accidents vasculaires cérébraux et des plaies compliquées. Les patients gériatriques et/ou psychiatriques isolés à domicile ne doivent pas être négligés. Si le médecin ne peut assurer lui-même la surveillance de ses patients, il doit les orienter vers une structure qui peut les prendre en charge.
Par ailleurs, il renvoie aux recommandations de l'INAMI s'agissant des honoraires pour une consultation à distance
(https://www.inami.fgov.be/fr/nouvelles/Pages/honoraire-specifique-avis-medicaux-telephone-covid19.aspx et https://www.inami.fgov.be/fr/nouvelles/Pages/dispenser-soins-distance-covid19-approche-globale-plusieurs-professions.aspx).
Il en va de la responsabilité de chacun d'agir avec bon sens et prudence dans l'intérêt de la santé du patient, auquel il convient d'apporter des soins consciencieux et de qualité, et de la collectivité. Le médecin qui prend une décision par téléphone doit, avant d'exclure une suspicion de contamination par le COVID-19, être attentif aux formes atypiques que peut prendre le COVID-19 (patient asymptomatique ou présentant des symptômes trompeurs), en particulier chez les patients âgés.
En ce qui concerne le recours à la télémédecine dans la médecine du travail, le Conseil national n'a, sur le plan déontologique, pas d'objection à ce que, lorsque les circonstances particulières le permettent, le médecin conseiller en prévention-médecin du travail exerce ses missions au moyen de consultations par téléphone dans le cadre de la pandémie, avec bon sens et minutie dans l'intérêt de la santé des employés.
Cela ne peut se faire que moyennant des garanties concernant l'accès aux données de santé, la connaissance des conditions de travail, l'anamnèse professionnelle, la précision sur le formulaire d'évaluation que celle-ci a été faite par téléphone et l'information du travailleur quant à la possibilité de solliciter une consultation spontanée au cabinet médical à la fin de la période de crise due à la pandémie de COVID-19.
Le SPF Emploi, Travail et Concertation sociale a émis des recommandations concernant la surveillance de la santé pendant la crise du Coronavirus (https://emploi.belgique.be/fr/themes/coronavirus/surveillance-de-la-sante-pendant-la-crise-du-coronavirus).