Suivi des accidents par piqûre
Un comité d'hygiène hospitalière soumet au Conseil national les questions suivantes, soulevées lors de la discussion de la procédure de suivi des accidents par piqûre:
- si une infirmière se pique avec une aiguille déjà utilisée chez le patient X, des tests sanguins peuvent-ils être pratiqués chez le patient X en vue d'exclure par exemple une hépatite, le sida, etc.;
- qui peut demander ces tests et sous quelles conditions;
- le comité d'hygiène hospitalière peut-il assumer un rôle de coordination en la matière (suivi, contacts avec le médecin du travail, etc.)?
Avis du Conseil national :
1. Lorsqu’une personne est contaminée accidentellement, d'une façon percutanée, par du sang ou un liquide biologique d’un malade, il s’agit d’un accident de travail dont la gestion médicale et juridique relève du service de la médecine du travail auquel l’intéressé(e) est affilié(e) et doit se faire en étroite collaboration avec ce service.
2. Il est souhaitable qu’un protocole de la conduite à tenir dans ce genre d’accident soit établi en concertation avec le service de prévention et de sécurité (comité de sécurité et d’hygiène), ainsi que le comité d’éthique de l’institution. Le rôle de ce comité se limite par ailleurs à cette consultation. Certains hôpitaux disposent de telles guidelines standardisées, qui doivent aussi recevoir l’approbation de la direction médicale de l’institution ( cf. annexe).
3. Si l’incident se produit dans un hôpital et que la victime se présente aux urgences, ce service peut, avec l'accord de la personne à l'origine de l'incident, avoir accès au dossier de celle-ci et tenir compte des renseignements médicaux qu’il contient, avec l’accord du patient.
4. Si la sérologie de cette personne n’est pas connue, son consentement doit être obtenu pour tout examen ou prélèvement sanguin. En cas de refus et compte tenu d’autres éléments (par exemple, sujet à risque), cela peut constituer un élément clinique de présomption d’une séropositivité.
5. Le consentement de la victime potentielle doit également être obtenu pour tout prélèvement et examen de sang. En cas de refus, la personne doit être avertie qu’ elle risque de perdre le bénéfice de l’assurance couvrant l’accident de travail.
Vous trouverez en annexe un exemple de protocole établi par un service de médecine du travail pour ce type d’accident, ainsi que d’un formulaire de consentement éclairé en cas de contamination possible par le HIV.
Annexes :
- Procédure à suivre en cas de piqûre accidentelle, établie par IDEWE (Service médical interentreprises pour employeurs, asbl, Interleuvenlaan, 58 - 3001 Leuven)
- Exemple de consentement éclairé
Annexe 1
PROCÉDURE EN CAS D'ACCIDENTS PAR PIQÛRE D'AIGUILLE, BLESSURES ET INCIDENTS AVEC CONTACT SANGUIN
1. Procédure en cas d'accidents par piqûre, éclaboussures de sang sur une peau non intacte ou des muqueuses, et blessures avec contact sanguin, ne nécessitant pas de traitement complémentaire
1.1. Procédure SOINS D'URGENCE EN CAS D'ACCIDENT (SUA)
- faire saigner le plus possible
- désinfecter soigneusement
- consigner en détail au registre SUA
1.2. Procédure PRISE DE SANG : à effectuer suivant schéma par le Service médical du travail
SANG-CONTACT, porteur de
TRAVAILLEUR | ? non connu | VHB+ VCH- VIH- | VHB- VHC+ VIH- | VHB- VHC- VIH+ | VHB- VHC- VIH- | ||
anti-corps VHB | prise de sang marqueurs VHC et VIH à 0 et 6 mois | procédure SUA uniquement | |||||
pas d'anti-corps VHB | 1. prise de sang marqueurs VHC et VIH à 0 et 6 mois 2. administration immédiate hyperimmunoglob. anti-HBs 3. éventuellement mise en oeuvre d'une vaccination VHB (uniquement au serv. méd. du trav.) | 1. administration immédiate hyperimmunoglob. anti-HBs 2. éventuellement mise en oeuvre d'une vaccination VHB (uniquement au serv. méd. du trav.) | Prise de sang mar-queurs VHC à 0 et 6 mois | Prise de sang marqueurs VIH à 0 et 6 mois! envisager thérapie antivirale* | Procédure SUA uniquement | ||
anti-corps VHB? | 1. prise de sang marqueurs VHB, VHC et VIH à 0 et 6 mois 2. administration immédiate hyperimmunoglob. anti-HBs 3. éventuellement mise en oeuvre d'une vaccination VHB (uniquement au serv. méd. du trav.) | 1. prise de sang marqueur VHB 2. administration immédiate hyperimmunoglob. anti-HBs 3. éventuellement mise en oeuvre d'une vaccination VHB (uniquement au serv. méd. du trav.) |
VHB = virus hépatite B
VHC = virus hépatite C
HIV = virus immunodéfic. Humaine
* Envisager une thérapie antivirale : demander l'avis du secteur curatif, à savoir le médecin spécialiste en médecine interne générale (...); en dehors des heures de travail : via le central téléphonique, le domicile ou la garde de supervision de la garde de médecine interne générale. Il est par conséquent nécessaire que l'intéressé prenne contact IMMEDIATEMENT (dans l'heure) avec l'un de ces médecins.
1.3. Explication du schéma
- La prise de sang est effectuée dans la semaine et après 6 mois par le Service médical du travail.
Si l'on sait avec certitude que le patient est négatif pour le VHB, le VHC et le VIH, le travailleur ne doit subir aucun examen sanguin supplémentaire.
- La prescription d'hyperimmunoglobulines anti-HBs est établie par le Service médical du travail ou, en cas d'absence, par le médecin choisi.
Ces immunoglobulines sont délivrées par le pharmacien sur prescription et en dehors des heures de travail, elles s'obtiennent via le service des urgences. Les hyperimmunoglobulines anti-HBs doivent être administrées par un médecin DANS LES 24 HEURES.
- Le Service médical du travail se charge de l'éventuelle demande de remboursement du vaccin contre l'hépatite B, via le Fonds des maladies professionnelles.
1.4. Procédure de DECLARATION :
Le Service médical du travail établit l'attestation destinée à l'assurance accidents (uniquement s'il y a des prestations médicales, notamment prise de sang, consultation éventuelle chez le médecin, etc.).
Cette attestation doit être remise par le travailleur, au service du personnel, dans la semaine.
2. Toute blessure avec contact sanguin nécessitant des soins.
2.1. Procédure SUA :
- faire saigner le plus possible
- désinfecter soigneusement
- consigner en détail au registre SUA.
2.2. Procédure SOINS :
via le service des urgences
2.3. Procédure PRISE DE SANG:
- Le service des urgences administre des hyperimmunoglobulines anti-HBs.
- La prise de sang pour le repérage des marqueurs de l'hépatite et du VIH (cf. schéma) a lieu dans la semaine au Service médical du travail. Si nécessaire, la vaccination contre l'hépatite B est entreprise.
2.4. Procédure de DECLARATION :
Le service des urgences établit l'attestation destinée à l'assurance accidents.
Cette attestation doit être remise dans la semaine au service du personnel.
Incident : Peau intacte
4.1. Procédure SUA
- laver et désinfecter soigneusement et abondamment
- consigner au registre SUA
CONCLUSION
En cas de piqûre ou coupure accidentelle :
1. contacter le service des urgences (...)
- Pour toute blessure avec contact sanguin nécessitant des SOINS (point 2.2.).
- Lorsque des hyperimmunoglobulines doivent être administrées et que le Service médical du travail ou le médecin du département n'est pas joignable.
2. contacter le Service médical du travail (...)
- Dans les 24 heures pour l'administration d'hyperimmunoglobulines anti-HBs.
- Dans la semaine de l'accident si une prise de sang pour le repérage des marqueurs de l'hépatite et/ou du VIH (cf. schéma) doit être effectuée.
- Si une vaccination contre l'hépatite B est entreprise, une demande de remboursement du vaccin est introduite via le Fonds des maladies professionnelles.
- Pour établir l'attestation médicale destinée à l'assurance accidents (si nécessaire).
3. contacter le Service de sécurité (...)
Dans la semaine si une attestation médicale a été établie pour l'assurance accidents.
contacter le médecin spécialiste en Médecine interne générale :
IMMEDIATEMENT (=dans l'heure du contact avec le sang d'un patient VIH+)
PROPHYLAXIE DE L'INFECTION APRES UN ACCIDENT PAR PIQÛRE D'AIGUILLE : INFECTION VIH
Ces directives s'appliquent uniquement aux cas de contamination percutanée avec du sang/ du liquide sanguinolent provenant de patients dont la séropositivité VIH est connue. Elles ne s'appliquent pas aux accidents avec du sang de patients présentant des facteurs de risque pour le VIH ou dont le statut VIH n'est pas connu. Elles ne s'appliquent pas à des accidents dans lesquels il n'y a pas eu de contact avec le sang de patients. Les directives sont fondées sur des opinions théoriques concernant la transmission du VIH, les effets de la thérapie antirétrovirale dans d'autres cadres et des données rétrospectives limitées concernant l'usage de l'AZT (Retrovir, zidovudine) lors d'accidents par piqûre dans le passé.
Globalement, le risque d'infection par piqûre d'aiguille est faible : ±0.3%. Dans des cas sélectionnés, il est toutefois plus élevé et peut apparemment être diminué par l'administration de médicaments.
Procédure
1. La prophylaxie par médicaments après un accident par piqûre d'aiguille chez un patient séropositif VIH est une urgence. Si des médicaments sont estimés nécessaires, ils doivent être administrés le plus rapidement possible, de préférence dans les 2 heures. N'attendez pas le lendemain matin !
2.Contactez le plus rapidement possible un membre de l'équipe du département Médecine interne générale ayant de l'expérience dans le domaine de l'infection VIH, par exemple,... . S'ils ne sont pas joignables à l'hôpital, ces médecins peuvent être appelés chez eux via le central téléphonique.
3. Si aucun des médecins précités n'est disponible, une concertation doit avoir lieu avec le médecin de garde en médecine interne générale aux urgences, sur la base des critères ci-dessous.
4.Contacter le médecin du travail (IDEWE) pendant les heures de travail. Il effectuera la prise de sang pour les tests VIH.
Quels accidents entrent en ligne de compte pour une prophylaxie au moyen de médicaments ?
Facteurs de risque
1. Exposition percutanée : piqûre à travers la peau (saignement), coupure, contact avec une blessure du travailleur. Transfusion ou injection.
2. Grande quantité de sang: Piqûre avec une aiguille creuse qui a été en contact avec du sang ou scalpel souillé de sang. Des aiguilles ayant servi à une prise de sang ou à une injection intravasculaire directe représentent le risque le plus élevé. Une aiguille ayant servi, par exemple, à une injection via une porte de perfusion en latex à distance du patient comporte un risque insignifiant et ne constitue pas une indication.
3. Tous les patients ne sont pas contagieux au même degré. Les plus contagieux sont les patients présentant une infection VIH avancée ("Sida") ou une charge virale élevée connue ( 30 000, cf. dossier patient). Le risque est plus faible chez des patients sans symptômes avec une assez bonne immunité (ex.: CD4 >200, cf. dossier patient).
Pratiquement
Si percutané, grande quantité, le plus contagieux : recommandation
Retrovir, AZT, zidovudine 3 x 200mg (=2) par jour
plus
Epivir, 3TC, lamivudine 2 x 150mg (=1) par jour
plus
Crixivan, Indinavir 3 x 800mg (=2) par jour
(donc au total 14 cachets par jour à répartir sur vingt-quatre heures)Si percutané, grande quantité de sang, pour le degré de contagion n'étant pas le plus élevé : recommandation
- Retrovir comme ci-dessus
plus
- Epivir comme ci-dessus
(donc au total 8 cachets par jour).
Si le patient prend déjà et du Retrovir et de l'Epivir depuis plus de 6 mois, l'association de Crixivan dans la même dose est indiquée.Si percutané, quantité de sang moindre: à étudier
Retrovir + Epivir comme ci-dessus. Dans ce cas, l'utilité d'une prophylaxie est en rapport avec les risques moins évidents.
La prophylaxie n'est pas administrée à des femmes dont il est possible qu'elles soient enceintes, la grossesse étant à exclure pour cette prophylaxie. Après un accident par piqûre d'aiguille, le travailleur doit être considéré théoriquement comme contagieux (pas de contacts sexuels non protégés (préservatif), pas de don de sang). De toute manière, il y a lieu de prendre contact (le jour suivant, au plus tard après le week-end) avec les médecins précités pour un avis définitif. Si, suivant les critères, des médicaments sont nécessaires, il est préférable de commencer et d'ensuite éventuellement arrêter après concertation plutôt que de ne commencer qu'après quelques jours !
Le remboursement de cette médication n'est pas prévu pour le moment, ni par l'INAMI, ni par la médecine du travail ou l'assurance.
Addenda :
- consentement éclairé: formulaire de consentement
- notice Retrovir, Epivir, information patient Crixivan.
Annexe 2
Consentement éclairé
Vous venez d’être victime d’un accident de travail avec un liquide biologique (potentiellement) contaminé par le virus de l’immunodéficience humaine (VIH) : sang ou autre liquide biologique. Il existe une possibilité de contamination, qui est estimée à 1/300 en cas de piqûre avec une aiguille souillée par du sang provenant d’un patient infecté par le VIH. Bien que le risque d’infection soit faible, il existe un bénéfice théorique à se traiter préventivement (prophylaxie médicamenteuse). La diminution du risque est de 79% et malheureusement pas de 100%.
L’indication et le type de chimioprophylaxie sont déterminés en fonction du type d’exposition (percutanée, muqueuse ou cutanée), du liquide biologique potentiellement infectant, des caractéristiques virologiques, immunitaires et thérapeutiques du patient source ainsi que de votre état de santé. La chimioprophylaxie éventuelle consiste en l’association de plusieurs molécules, habituellement trois (tri-thérapie) et plus rarement deux (bi-thérapie). Elle doit être débutée dès que possible après l’accident ; idéalement dans les 2 heures et certainement dans les 4 heures. Ce traitement doit être poursuivi pour une durée totale de 4 semaines.
Comme pour tout médicament, il existe un risque d’effets secondaires qui varient selon les molécules prescrites (cf. tableau en annexe). Cependant, les antirétroviraux (médicaments contre le virus VIH) sont des médicaments relativement récents et il existe peut-être des effets secondaires à plus long terme qui ne sont pas encore connus. En cas d’apparition d’effets indésirables, il est souvent possible de modifier le schéma thérapeutique. Il est donc indispensable, en cas d’intolérance, de prendre contact, dès que possible, avec le médecin qui a prescrit la prophylaxie médicamenteuse. Nous vous conseillons vivement de ne pas arrêter le traitement de vous-même.
Un suivi clinique et biologique en consultation vous est proposé. La première consultation a lieu au service des urgences. La chimioprophylaxie est discutée et débutée s’il y a indication. Ensuite, un premier test sanguin est réalisé (sérologie HIV, Hépatite B et Hépatite C) et la procédure classique en cas d’accident de travail est respectée. Une déclaration d’accident est remplie et vous recevez les informations nécessaires pour l’assurance et le suivi.
Habituellement, vous êtes revu(e) une fois par semaine (jour 7, 14, 21, 28) en consultation de Médecine Interne Générale (-1, B3) pour contrôle de la tolérance clinique et biologique au traitement prescrit. Des contrôles sérologiques et/ou la recherche du génome viral par des techniques de biologie moléculaire seront réalisés à 1.5, 3, 6 et 12 mois après l’accident. Les contrôles de sérologie Hépatite B et Hépatite C seront également réalisés lors de ces consultations. Les frais de traitement, de consultation et de prise de sang devront être déclarés à l’assurance de votre employeur. Aucun frais ne pourra vous être imputé.
Pendant 3 mois, vous devrez respecter certaines règles dans votre vie quotidienne et notamment avoir des relations sexuelles protégées et vous abstenir de tout don de sang ou d’organe.
En cas de grossesse, un traitement prophylactique est possible mais le choix des médicaments prescrits est plus délicat.
N’hésitez pas à poser des questions. Le médecin qui s’occupe de vous aux services des urgences y répondra. Vous pouvez également joindre par téléphone les membres du Centre de Prise en Charge (infirmières, psychologue, médecins, °). Vous êtes naturellement libre d’accepter ou de refuser le traitement prophylactique proposé. En cas de refus, nous vous garantissons la même qualité du suivi et des soins.