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Déontologie

L’accompagnement médical du patient mineur qui présente une dysphorie de genre.

Le Conseil national de l’Ordre des médecins est interrogé concernant l’accompagnement médical du patient mineur qui présente une dysphorie de genre.

Les recommandations qui suivent ont pour objet d’attirer l’attention des confrères sur des aspects déontologiques à prendre en considération.

1. La prise en charge de la dysphorie de genre chez un patient mineur est un défi, notamment du fait de l’incertitude quant aux effets à long terme des choix thérapeutiques posés. Aussi bien un traitement inadéquat que l’absence d’un traitement opportun sont de nature à porter préjudice à sa santé physique et psychique.

L’évolution du profil des patients et l’augmentation des demandes font qu’il y a consensus au sein de la communauté médicale sur la nécessité que davantage de recherches scientifiques soient menées sur les soins psycho-sociaux et médicaux aux jeunes transgenres, afin de déterminer les meilleurs standards de soins.

Cette recherche scientifique devrait clarifier les opinions actuellement très divergentes sur les causes et le traitement de la dysphorie de genre[1]. L’expérience des patients doit être prise en considération.

2. Entretemps, il est de la responsabilité des équipes de soins de répondre au mieux et avec professionnalisme aux demandes d’aide des patients et de leur famille, dans le respect de l’éthique et de la déontologie médicale.

Cela ne peut être le fait que d’une équipe multidisciplinaire expérimentée qui agit de manière concertée. La prise en charge globale et dans la durée du patient mineur, sur le plan psychique et physique, requiert en effet des compétences diverses et spécifiques notamment dans le champ de la pédiatrie, la psychologie, l’endocrinologie, la pédopsychiatre, etc. La concertation favorise une démarche clinique nuancée et minutieuse, qu’impose la complexité de la dysphorie de genre chez le mineur. La remise en question est à encourager, tenant compte notamment du caractère évolutif des recommandations de bonnes pratiques émises par les sociétés scientifiques.

3. Le contexte social et son influence sur le bien-être du jeune et l’expression de sa dysphorie sont à appréhender à leur juste mesure.

L’environnement familial du jeune patient agit fortement sur son développement et son bien-être. Les besoins propres des parents ou des proches, confrontés à une situation émotionnellement difficile et angoissante, ne peuvent pas être négligés. Leur bien-être contribue directement à celui du mineur.

4. L’information du patient et de ses parents est progressive, répétée, complète et transparente. Elle ne peut faire l’économie des effets secondaires et des risques que les traitements médicamenteux font peser sur sa santé (future) et leurs effets irréversibles. Une information écrite qui complète l’information orale est opportune.

Le Conseil national estime que l’obtention du consentement libre et éclairé du patient mineur est une étape cruciale, indispensable à tout traitement médical motivé par une discordance entre le corps et l’identité de genre.

L’évaluation de la capacité de discernement du patient mineur à apprécier raisonnablement ses intérêts face à ce type de traitement, ce qui implique notamment d’être capable de faire la balance entre les bénéfices espérés et les risques encourus mais aussi d’être capable de distinguer le genre de l’orientation sexuelle, nécessite une démarche scrupuleuse. Il s’impose de tenir compte du processus de développement physique, psychologique et cognitif (capacité de compréhension) du jeune en pleine croissance, en ce compris les bouleversements que cela peut induire sur son psychisme.

5. La prise en charge doit être menée par étapes progressives et suffisamment espacées dans le temps de façon notamment à apprécier la persistance de la demande de soins par le mineur. Cela nécessite de l’écoute et du temps, tant pour la réflexion du patient et de ses parents que pour celle de l’équipe de soins, afin de poser le meilleur choix.

L’accompagnement psychologique est continu et se poursuit après une intervention.

Si le jeune présente d’autres problèmes de santé, l’impact de ceux-ci sur la dysphorie de genre exprimée par le patient est évaluée. Le cas échéant, ils sont traités ou stabilisés avant toute intervention physique visant une transition.

Chaque étape des soins est discutée avec le patient, ses deux parents s’ils exercent conjointement l’autorité parentale ou ses représentants légaux et l’ensemble de l’équipe de soins.

Si le patient mineur capable de discernement exprime des appréhensions quant à la réaction de ses parents, l’équipe de soins doit lui apporter son expertise, son aide au dialogue et un encadrement propice pour surmonter ses craintes ou préjugés à leur égard.

S’agissant de soins non urgents aux effets irréversibles, le Conseil national recommande que le consentement exprès des deux parents du mineur soit systématiquement recueilli. Si cela s’avère impossible et que la demande de soins persiste, il est opportun que l’équipe de soins sollicite l’avis d’experts extérieurs, rendu après un contact direct avec le patient et non sur dossier, quant à l’adéquation de la proposition thérapeutique à la situation personnelle du patient tenant compte notamment de l’absence de soutien parental.

6. Le recours aux inhibiteurs de puberté et aux hormones d'affirmation du genre impose d’avoir correctement évalué la perception qu’a le patient de son identité, ses besoins spécifiques et considéré leur possible évolutivité. Le stade du développement pubertaire détermine quand un tel traitement peut être envisagé.

7. Tous les éléments relatifs à la décision doivent figurer dans le dossier médical.


[1] Gender dysphoria describes a state of distress or discomfort that may be experienced because a person’s gender identity differs from that which is physically and/or socially attributed to their sex assigned at birth, Standards of Care for the Health of Transgender and Gender Diverse People, version 8, World Professional Association for Transgender Health (WPATH) (https://www.wpath.org/ - consulté le 17 octobre 2023).