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Incompatibilité de la fonction de médecin-chef avec celle de directeur de l’hôpital
La commission « Médecine hospitalière » du Conseil national de l’Ordre des médecins a élaboré en avril 2008 des recommandations « Missions du médecin-chef - Aspects juridiques et déontologiques ».
Ces recommandations sont basées sur la législation en vigueur, le Code de déontologie médicale et des avis antérieurs.
Plusieurs questions ont été soulevées lors de la rédaction de ces recommandations.
L’une de ces questions était de savoir s’il y a une incompatibilité de la fonction de médecin-chef avec celle de directeur de l’hôpital
Avis du Conseil national :
La loi relative aux hôpitaux et à d'autres établissements de soins, coordonnée le 10 juillet 2008, traite notamment du gestionnaire et du directeur (cf. annexe).
L’article 8, 1°, de cette loi dispose que le gestionnaire est l’organe qui, selon le statut juridique de l’hôpital, est chargé de la gestion de l’exploitation de l’hôpital.
Suivant l’article 8, 2°, il faut entendre par « directeur » la ou les personnes chargée(s) par le gestionnaire de la direction générale de l’activité journalière de l’hôpital.
La responsabilité générale et finale de l’activité hospitalière, sur le plan de l’organisation et du fonctionnement ainsi que sur le plan financier, incombe au gestionnaire (article 16, de la loi sur les hôpitaux).
Dans chaque hôpital, il y a un directeur qui est directement et exclusivement responsable devant le gestionnaire. Le directeur collabore étroitement avec le médecin-chef, le chef du département infirmier, des services paramédicaux, des services administratifs et financiers et des services techniques et avec le pharmacien hospitalier (article 17 de la loi sur les hôpitaux).
L’arrêté royal du 15 décembre 1987 (M.B. du 25 décembre 1987) portant exécution des articles 13 à 17 inclus de la loi sur les hôpitaux, traite notamment des fonctions et missions du médecin-chef :
« Art. 2., § 1er. Par médecin-chef on entend le praticien de l'art de guérir responsable du bon fonctionnement du département médical de l'hôpital. Il est responsable de l'organisation et de la coordination générales de l'activité médicale à l'hôpital, en collaboration avec les médecins-chefs de service et le staff médical, telles qu'elle est élaborée par hôpital dans le règlement médical. »
La fonction de médecin-chef est légalement incompatible avec :
- la présidence du conseil médical (article 18 de la loi sur les hôpitaux) ;
- la qualité de membre du comité d’éthique médicale (article 1er de l’arrêté royal du 12 août 1994 modifiant l'arrêté royal du 23 octobre 1964 fixant les normes auxquelles les hôpitaux et leurs services doivent répondre);
- la fonction de médiateur (article 3 de l’arrêté royal du 8 juillet 2003 fixant les conditions auxquelles la fonction de médiation dans les hôpitaux doit répondre).
Le Conseil national constate, d’une part, qu’il n’y a légalement pas d’incompatibilité entre la fonction de médecin-chef et celle de directeur de l’hôpital et, d’autre part, que les fonctions et les missions du directeur et du médecin-chef sont différentes.
La nature de la mission du médecin-chef requiert qu’il joue un rôle de liaison entre les médecins hospitaliers, le gestionnaire et la direction de l’hôpital.
« Dans l’exercice de sa fonction, le médecin-chef devra toujours avoir à l’esprit la réalisation d’un délicat équilibre entre la satisfaction des exigences d’organisation médicale qui sont posées à l’hôpital, et le respect de l’autonomie diagnostique et thérapeutique du médecin. »(1)
D’un point de vue déontologique, le Conseil national estime dès lors, qu’en raison du risque d’un conflit d’intérêts, il n’est pas indiqué que la fonction de médecin-chef soit combinée avec celle de directeur.
10 JUILLET 2008. - Loi relative aux hôpitaux et à d'autres établissements de soins, coordonnée le 10 juillet 2008.
Art. 8. (8) Pour l'application de la présente loi coordonnée :
1° il faut entendre par gestionnaire : l'organe qui, selon le statut juridique de l'hôpital, est chargé de la gestion de l'exploitation de l'hôpital;
2° il faut entendre par directeur : la ou les personnes chargées par le gestionnaire de la direction générale de l'activité journalière de l'hôpital;
Art. 16. (16) La responsabilité générale et finale pour l'activité hospitalière, sur le plan de l'organisation et du fonctionnement ainsi que sur le plan financier, incombe au gestionnaire.
Le gestionnaire définit la politique générale de l'hôpital; il prend les décisions de gestion en respectant les dispositions et procédures spécifiques prévues au Titre IV.
Art. 17. (17) Dans chaque hôpital, il y a un directeur qui est directement et exclusivement responsable devant le gestionnaire.
Le directeur collabore étroitement avec le médecin en chef, le chef du département infirmier, des services paramédicaux, des services administratifs et financiers et des services techniques et avec le pharmacien hospitalier.
Médecins militaires – compétence disciplinaire de l’ordre des médecins
A l’occasion d’une question lui étant soumise concernant le traitement d’un civil à l’hôpital militaire Reine Astrid par un médecin militaire, un conseil provincial attire l’attention du Conseil national sur le statut de ces médecins qui traitent aussi bien des civils que des militaires.
Le Conseil national étudie la matière et écrit aux ministres compétents.
LETTRE A MADAME LAURETTE ONKELINX, MINISTRE DES AFFAIRES SOCIALES ET DE LA SANTE PUBLIQUE ET A MONSIEUR PIETER DE CREM, MINISTRE DE LA DEFENSE :
En sa séance du 22 décembre 2007, le Conseil national de l’Ordre des médecins a rendu l’avis suivant.
L’exercice de la médecine dans le cadre d’un emploi militaire se distingue à tout le moins pour deux points de la médecine ‘civile’.
En premier lieu, les hôpitaux gérés par le ministère de la Défense ne tombent pas dans le champ d’application de la loi coordonnée sur les hôpitaux du 7 août 1987. En l’état actuel, le seul l’hôpital géré par le service public fédéral Défense est l’hôpital militaire Reine Astrid
En second lieu, seul le médecin militaire, au contraire des médecins non-militaires en activité, n’est pas légalement tenu de s’inscrire au Tableau de l’Ordre des médecins, sauf s’il pratique l’art médical en dehors de son emploi militaire (article 2 de l’arrêté royal n° 79 du 10 novembre 1967 relatif à l’Ordre des médecins).
Le Conseil national est d’avis que cette distinction n’est plus justifiée et peut nuire aux intérêts des patients.
La loi sur les hôpitaux.
L’élargissement du champ d’application de la loi sur les hôpitaux à l’hôpital militaire Reine Astrid servirait les intérêts des patients, tant civils que militaires.
La loi coordonnée sur les hôpitaux ainsi que ses nombreux arrêtés d’exécution mettent en place différentes structures ou procédures avec l’intérêt des patients pour finalité. La mise en place d’un comité d’éthique, d’un conseil médical, de services compétents en matière d’hygiène hospitalière ou encore l’organisation d’un audit médical sont autant de facteurs de qualité exigés par la loi du 7 août 1987 et ses arrêtés d’exécution.
S’abstenir de la mise en place de ces structures et procédures au sein de l’hôpital militaire Reine Astrid n’est plus justifiable. Les patients ont droit aux mêmes standards de qualité que ce soit dans un hôpital civil ou militaire.
Différents évènements récents ont par ailleurs démontré l’opportunité de la mise en place à l’hôpital militaire Reine Astrid à tout le moins d’un conseil médical et d’un comité d’éthique .
Dans son avis du 17 juillet 2004 (BCN n° 106, p. 3), le Conseil national a soutenu la mise en place d’un conseil médical au sein de l’hôpital militaire Reine Astrid.
L’inscription à l’Ordre.
Il ressort de la lecture des articles 2 et 5 de l’arrêté royal n° 79 du 10 novembre 1967 relatif à l’Ordre des médecins, que l’Ordre n’a autorité et juridiction à l’égard des médecins militaires que s’ils pratiquent l’art médical en dehors de l’exercice de leur emploi militaire.
Le Conseil national est d’avis que ce régime dérogatoire va à l’encontre des intérêts des patients et est difficilement compatible avec les réalités du terrain.
En premier lieu, il fait observer que la notion « d’emploi militaire » prête à confusion. Comme le Conseil national le soulignait dans son avis du 17 juillet 2004 : « Lorsque les médecins militaires ne soignent presqu’exclusivement que des civils dans certains services des hôpitaux militaires, on peut s’interroger s’ils agissent toujours bien ‘dans le cadre de leurs activités militaires’. Le Conseil d’Etat, dans son arrêt n° 131.903 du 28 mai 2004 , donne un éclairage nouveau à cette interrogation :
« Considérant […] que les médecins qui exercent leur art à l’hôpital militaire de la base Reine Astrid sont des médecins militaires ; que, dans la pratique de l’art médical, ils relèvent de l’autorité de l’Ordre des médecins […] ».
Cette interprétation des articles 2 et 5 de l’arrêté royal n° 79 du 10 novembre 1967 montre à suffisance l’impraticabilité du régime dérogatoire mis en place.Deuxièmement, le Conseil national constate, dans son avis du 17 juillet 2004, ceci :
« Il convient de noter que pratiquement tous les médecins militaires sont inscrits au Tableau de l'Ordre, car ils exercent l'art médical également en dehors de leur emploi militaire. Il en résulte que les règles de la déontologie médicale leur sont connues et qu'ils sont convaincus de l'importance du respect de ces règles dans leurs contacts avec les patients, les référants et les établissements de soins dans la société civile. Le Conseil national constate avec satisfaction que les médecins militaires suivent les mêmes règles déontologiques dans leurs contacts avec les patients de la société civile tant dans le cadre qu'en dehors de leur emploi militaire, et la même chose peut être relevée en ce qui concerne leurs contacts avec les référants. Ainsi, patients et référants ressentent peu de différence entre les hôpitaux militaires et les hôpitaux civils dans leurs contacts, par exemple, avec les centres de brûlés ». Ce constat démontre l’inutilité de la dérogation.En troisième lieu, le Conseil national constate que l’hôpital militaire Reine Astrid ne comprend pas que des médecins militaires. Certains médecins sont des médecins civils sans statut militaire et comme tels inscrits au Tableau de l’Ordre des médecins : Il n’y a pas lieu de soumettre les médecins militaires et civils travaillant dans une même institution, à des règles de déontologie et à une discipline différentes. Il y va de la protection des patients.
Enfin, le Conseil national prend acte de la formulation nouvelle de l’article 157 de la Constitution, révisée le 17 décembre 2002 en vue de supprimer les juridictions militaires en temps de paix. Suite à cette révision constitutionnelle, les compétences des juridictions militaires sont désormais exercées par « les juridictions civiles traitant des matières pénales (tribunaux de première instance, tribunaux de police, cours d’assises et cours d’appel). Les infractions commises par les militaires seront recherchées, poursuivies et jugées de la même manière que les infractions commises par d’autres citoyens » . Il n’y a pas de raison de ne pas suivre cette option sur le plan disciplinaire.
Pour ces raisons, le Conseil national estime nécessaire de modifier les articles 2 et 5 de l’arrêté royal n° 79 du 10 novembre 1967 de manière à ce que tous les médecins exerçant la médecine en Belgique ressortissent à l’autorité et à la juridiction de l’Ordre des médecins. L’application des règles de discipline de l’Ordre des médecins n’empêche aucunement en parallèle l’application d’un régime disciplinaire propre au régime militaire.
Le Conseil national apprécierait de connaître la suite réservée à cette affaire.
Voyez la question parlementaire n° 14612 de Mr T. KELCHTERMANS au ministre de la défense sur « les expériences à l’Hôpital militaire de Neder-over-Heembeek concernant les nouveaux produits médicaux à développer », Q.R., Ch.repr., 2006-2007, COM 1256, 26/03/2007.
www.raadvst-consetat.be
Révision de l’article 157 de la constitution, Doc. Parl., Sén., sess.ord. 2001-2002, n° 2-697/4, p. 6.