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Déontologie

L’usage off label de médicaments fournis par le médecin lors d’une consultation

Le Conseil national de l'Ordre des médecins est interrogé sur la pratique du médecin qui lors d'une consultation administre des cures de chélateurs, principalement le DMPS ou DIMAVAL, à un patient dans le cadre du traitement de la fatigue chronique ou de la dépression.

Avis du Conseil national :

Le Conseil national de l'Ordre des médecins est interrogé sur la pratique du médecin qui lors d'une consultation administre des cures de chélateurs, principalement le DMPS ou DIMAVAL, à un patient dans le cadre du traitement de la fatigue chronique ou de la dépression.

1° L'intervention du pharmacien est essentielle pour un bon usage des médicaments. Il est en outre garant de la qualité du médicament qu'il délivre.

La qualité, la sécurité et l'efficacité des médicaments achetés via internet hors du circuit légal, et donc hors du contrôle des autorités compétentes (agence fédérale des médicaments et produits de santé), n'est pas certaine. Les médicaments peuvent avoir été contrefaits ou falsifiés.

En l'espèce, le Conseil national constate que le DMPS ou DIMAVAL n'est délivrable en Belgique que par le centre antipoisons en cas d'intoxication aigüe aux métaux lourd.

Il est contraire à la déontologie médicale, notamment au vu des risques encourus par le patient, qu'un médecin préconise ou utilise pour un traitement médical un médicament qui n'a pas été obtenu auprès d'un pharmacien ou d'une autorité compétente, sauf exception légale.

Le Conseil national rappelle que la vente d'un médicament par un médecin est interdite, sauf exception légale (articles 6 et 22 de la loi coordonnée du 10 mai 2015 relative à l'exercice des professions de soins de santé).

2° L'usage d'un médicament pour d'autres indications que celles annoncées dans la notice (off-label), pose la question de la sécurité du patient.

La sécurité, l'intérêt du patient et le respect du principe éthique de non-malfaisance doivent impérativement guider le médecin dans sa prise en charge médicale et ses choix thérapeutiques, sous peine de constituer un abus de sa liberté thérapeutique.

En l'espèce, la toxicité potentielle des cures de chélateurs ne peut être négligée. Le risque inhérent au traitement médical ne peut se justifier que par un bénéfice qui peut être raisonnablement et objectivement escompté, ce qui semble faire défaut dans leur usage pour le traitement de la fatigue chronique ou de la dépression.

3° L'usage off label d'un médicament pose également la question de l'efficacité de cet usage. Il est contraire à la déontologie médicale de prescrire inutilement des examens ou des traitements onéreux(1) .

Le médecin doit pouvoir justifier du caractère rationnel de l'utilisation d'un médicament.

En l'espèce, le recours aux chélateurs pour traiter le syndrome de fatigue chronique ou la dépression requiert qu'une relation entre ces maladies et l'intoxication par le mercure ou d'autres éléments métalliques existe.

Suivant l'avis d'experts, une telle relation n'a pas été établie de manière formelle.

4° Le médecin doit justifier ses choix thérapeutiques auprès du patient.

Il doit l'informer de l'objectif, la nature, le degré d'urgence, la durée, la fréquence, les contre-indications, les effets secondaires, les risques inhérents au traitement, de son efficacité et les alternatives possibles.

Le médecin doit expliquer au patient l'usage off-label du médicament(2) .

Il doit enfin lui faire connaître les répercussions financières du traitement médical proposé(3) .

En conclusion, le Conseil national met en garde les médecins contre l'usage de ces médicaments dans des indications non reconnues.


1.Article 36, a, du Code de déontologie médicale
2.Avis du 26 juin 2010 du conseil national, intitulé « la prescription de médicaments « off-label », Bulletin du Conseil national n°130.
3.Article 8, §2, de la loi du 22 août 2002 relative aux droits du patient