Personne de confiance dans le cadre de la violence et du harcèlement moral ou sexuel au travail - Incompatibilité avec la fonction de médecin du travail
Suite au complément de législation récent en la matière, la question est posée à deux conseils provinciaux différents de savoir si un médecin du travail peut intervenir au sein d'une même entreprise en tant que personne de confiance et/ou conseiller en prévention lors de plaintes de violence, harcèlement moral ou sexuel au travail.
Les conseils provinciaux concernés demandent au Conseil national si son avis du 20 février 1993 (Bulletin du Conseil national, n°60, juin 1993, p. 22) est toujours d'application.
Avis du Conseil national:
Dans son avis du 20 février 1993, le Conseil national avait estimé que moyennant le respect de certaines conditions, rien ne s'opposait sur le plan déontologique à ce que le médecin du travail fût désigné comme personne de confiance dans le cadre de l'arrêté royal du 18 septembre 1992 (Moniteur belge 7 octobre 1992) organisant la protection des travailleurs contre le harcèlement sexuel sur les lieux de travail.
L'article 5 de la loi du 11 juin 2002 (Moniteur belge du 22 juin 2002) relative à la protection contre la violence et le harcèlement moral ou sexuel au travail et l'arrêté royal du 11 juillet 2002 (Moniteur belge du 18 juillet 2002) relatif à la protection contre la violence et le harcèlement moral ou sexuel au travail, comportent des dispositions qui remettent en question l'avis émis en 1993.
En effet, ces nouvelles dispositions créent une étroite imbrication des fonctions de personne de confiance et de conseiller en prévention spécialisé dans les aspects psycho-sociaux du travail et de la violence et du harcèlement moral ou sexuel au travail, et il existe une incompatibilité entre la fonction de conseiller en prévention dans ce cadre et l'exercice de la médecine du travail.
L'article 32sexies inséré par la loi du 11 juin 2002 dans la loi du 4 août 1996 relative au bien-être des travailleurs lors de l'exécution de leur travail, dispose que la personne de confiance assiste le conseiller en prévention spécialisé dans les aspects psycho-sociaux du travail, et l'arrêté royal du 11 juillet 2002 détaille les modalités de cette assistance par la personne de confiance.
De plus, l'article 32sexies, § 1er, de la loi du 4 août 1996 relative au bien-être des travailleurs lors de l'exécution de leur travail dispose que le conseiller en prévention spécialisé dans les aspects psycho-sociaux du travail et de la violence et du harcèlement moral ou sexuel au travail ne peut pas être un conseiller en prévention compétent pour la médecine du travail. Compte tenu de l'étroite imbrication des missions de la personne de confiance et du conseiller en prévention spécialisé dans les aspects psycho-sociaux du travail et de la subordination que fait apparaître la description de leurs fonctions, il n'est pas logique de désigner un médecin du travail comme personne de confiance.
Il convient en outre de se référer à l'article 7 de l'arrêté royal du 11 juillet 2002 suivant lequel le conseiller en prévention compétent pour la médecine du travail qui constate que l'état de santé d'un travailleur est altéré du fait de la violence, du harcèlement moral ou sexuel au travail, doit informer les victimes des possibilités de s'adresser au conseiller en prévention compétent ou à la personne de confiance; si le conseiller en prévention pour la médecine du travail estime que la victime n'est pas en état de s'adresser elle-même au conseiller en prévention compétent, le conseiller en prévention pour la médecine du travail peut, avec l'accord de la victime, lui-même informer le conseiller en prévention compétent. Il apparaît que dans ce contexte également, le conseiller en prévention pour la médecine du travail et la personne de confiance peuvent difficilement être la même personne au sein d'une même entreprise.
Enfin, l'article 10, deuxième alinéa, de l'arrêté royal du 11 juillet 2002, souligne que la personne de confiance doit non seulement entendre la victime mais aussi, à la demande de la victime, rechercher une conciliation avec l'auteur de la violence ou du harcèlement moral ou sexuel au travail. De toute évidence, le 'conseiller en prévention-médecin du travail' jetterait le discrédit sur sa neutralité en tant que médecin du travail s'il revêtait le rôle de conciliateur. Il n'est dès lors pas indiqué qu'il assume cette mission.
En conclusion, le Conseil national estime que la combinaison des fonctions de médecin du travail et de personne de confiance dans une même entreprise n'est plus possible. L'avis du 20 février 1993 est par conséquent caduc.