Présence continue de l'anesthésiste dans la salle d'opérations
Un médecin demande au Conseil provincial de Flandre-Orientale si la présence de l'anesthésiste dans la salle d'opérations est requise pendant toute la durée de l'anesthésie.
Le Conseil provincial propose de répondre à cette question comme suit :
1. Sur le plan déontologique :
Nous nous référons à l'article 51 du Code de déontologie médicale. Deux éléments sont importants :
- l'anesthésiste recevra du chirurgien toute information utile (entre autres: examens préopératoires) et assumera toutes ses responsabilités propres;
- l'anesthésiste a le devoir de surveiller l'anesthésie pendant toute la durée de l'intervention.
En outre, dans son avis du 8 mai 1982, le Conseil national précise: ... "Le médecin anesthésiste a le devoir de surveiller l'anesthésie pendant toute la durée de l'intervention. ... L'anesthésiste doit être en mesure de surveiller effectivement et d'intervenir sans retard auprès du patient dont il a accepté la responsabilité. Il lui incombe d'organiser son travail en conséquence. ... Il ne peut accepter de mener plus d'une anesthésie à la fois."
2. Sur le plan juridique tant au civil qu'au pénal :
L'expertise est un avis susceptible d'aider le magistrat à se forger une conviction quant au fond (en cas de suspicion d'une faute médicale), mais qui ne le lie aucunement dans son appréciation.
En cas de suspicion de fautes médicales, le juge désignera des experts qui auront la possibilité de se fonder sur les normes du "Safety First" (cf. Acta Anaesthesiologica Belgica, 1989). Celles-ci sont aussi les normes belges de sécurité des patients dans le cadre de l'anesthésie, établies par l'association scientifique et professionnelle des anesthésistes. Ces normes de qualité sont du type "standard-of-care guidelines". Si l'expert est d'accord avec ce guideline, il est très probable que le tribunal s'inspirera du guideline publié, dans son appréciation du médecin consciencieux et prévoyant. Si des expertises vont dans un autre sens, une directive jouera un rôle important dans l'appréciation du juge.
Nous citons un extrait de la Partie 2 du "Safety First" :
Recommandations de sécurité pour la pratique de l'anesthésie, Section IV : contrôle préopératoire du patient :
2.07. "Du début de l'anesthésie jusqu'à l'unité de soins post-anesthésie ou à l'unité de soins intensifs, l'anesthésiste se tient en continu dans l'immédiate proximité du patient. De ce fait, l'anesthésiste garde un contact physique permanent avec le patient, battement de coeur par battement de coeur ...".
2.09. "L'anesthésiste n'est pas autorisé à quitter le patient anesthésié pour intervenir dans une situation de danger de mort aux alentours, à moins qu'une autre personne ne soit désignée pour observer en continu les symptômes vitaux du patient et que la responsabilité générale ne soit transférée sur et acceptée par un autre médecin".
Dans un jugement récent (30 juin 1992) du Tribunal correctionnel de Leuven, un chirurgien a été condamné du chef de négligence et abstention coupable pour ne pas avoir, soit informé le Conseil médical au sujet du problème structurel et traînant en longueur depuis longtemps à propos de l'anesthésie effectuée par l'anesthésiste, soit exhorté l'anesthésiste à prendre toutes les mesures de sécurité ("l'absence de longue durée de la salle d'opérations, en conséquence d'une conversation superflue (avec un confrère), était fautive dans les circonstances données"), soit refusé d'opérer dans des conditions risquées.
3. Sur le plan de l'assurance en responsabilité :
La loi sur le contrat d'assurance terrestre du 25 juin 1992 (art.8, al. 2 et 3) dispose que l'assureur répond des sinistres causés par la faute, même lourde, du preneur d'assurance, de l'assuré ou du bénéficiaire. L'assureur peut s'exonérer de ses obligations pour les cas de faute lourde déterminés expressément et limitativement dans le contrat. Ainsi, dans diverses polices relatives à l'anesthésiste, il y a faute lourde ou exclusion de garantie lorsque le sinistre résulte de la pratique d'anesthésies simultanées ou de l'absence d'un anesthésiste pendant la durée de l'anesthésie.
4. Sur le plan de l'INAMI :
Suivant l'article 1er, § 4bis, II, A, de la nomenclature, la présence physique du médecin spécialiste en anesthésie est requise pour les prestations d'anesthésie reprises à l'article 12. Pour ces prestations, le médecin doit être présent auprès du malade et effectuer une prestation.
Le Conseil national confirme son avis du 8 mai 1982 (cf. p. 14) et n'oppose pas d'objection déontologique à la réponse du Conseil provincial.