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Prélèvements de sang
Questions posées par un Conseil provincial:
1. Le prélèvement de sang est‑il considéré comme un acte réservé uniquement aux médecins ou est‑il autorisé aux infirmières ?
2. Dans le cas où le prélèvement est autorisé aux infirmières, la présence d'un médecin n'est‑elle pas indispensable ? En effet, à qui incomberait la responsabilité en cas d'accident ?
3. Lorsqu'un médecin généraliste effectue des prélèvements pour le compte d'un laboratoire:
- peut‑il le faire dans un rayon qui risque de le mettre en concurrence avec ses confrères généralistes de l'endroit ?
- Comment faut‑il envisager la rémunération de ce service ?
4. La situation est‑elle identique:
- Quand le prélèvement se fait au domicile du patient ?
- Quand le prélèvement se fait dans un centre dépendant d'un laboratoire ?
Réponse du Conseil national arrêtée à sa séance du 19 novembre 1983:
Le Conseil national a, en réponse aux questions numérotées 1, 2 et 4, confirmé l'avis qu'il a émis précédemment et qui a été publié au Bulletin officiel n° 29, pages 61 et suivantes (1)
Quant à la troisième question, le Conseil national estime que ce problème ne relève pas de la déontologie.
(1) BIOLOGIE CLINIQUE ‑ PRELEVEMENTS DE SANG
Prises de sang dans un laboratoire dirigé par des pharmaciens biologistes
Un pharmacien biologiste peut‑il effectuer des prises de sang ou les faire effectuer par des laborantins ?
Sur le plan légal, nous devons étudier l'arrêté n° 78 relatif à l'exercice de l'art de guérir, de l'art infirmier, des professions paramédicales et aux commissions médicales provinciales du 10 novembre 1967, modifié par la loi du 17 décembre 1973 et celle du 20 décembre 1974.
L'article 2 § 1er alinéa 1 donne les conditions requises pour exercer l'art médical.
L'article 2 § 1 alinéa 2 énumère les éléments constitutifs de l'exercice illégal de l'art médical: «Constitue l'exercice illégal de l'art médical l'accomplissement habituel par une personne ne réunissant pas l'ensemble des conditions requises par l'alinéa 1 du présent paragraphe, de tout acte ayant pour objet ou présenté comme ayant pour objet, à l'égard d'un être humain, soit l'examen de l'état de santé, soit le dépistage de maladies et déficiences, soit l'établissement du diagnostic, I'instauration ou l'exécution du traitement d'un état pathologique physique ou psychique réel ou supposé, soit la vaccination.»
«Le Roi peut, conformément aux dispositions de l'article 46, préciser les actes visés à l'alinéa précédent».
L'article 5 § 1er concerne les conditions dans lesquelles les médecins peuvent confier certains actes à des personnes exerçant une profession paramédicale ou l'art infirmier.
Article 5 § 1er: «Le Roi peut, conformément aux dispositions de l'article 46, fixer les conditions dans lesquelles les médecins peuvent, sous leurs responsabilité et contrôle, confier à des personnes exerçant une profession paramédicale, I'exécution de certains actes préparatoires au diagnostic ou relatifs à l'application du traitement ou à l'exécution de mesures de médecine préventive.
Le Roi peut également, conformément à la procédure prévue à l'article 46bis, fixer les conditions dans lesquelles les actes visés à l'alinéa précédent peuvent être confiés à des personnes habilitées à exercer l'art infirmier.
La liste des actes visés aux alinéas précédents, les modalités de leur exécution ainsi que les conditions de qualification requises sont arrêtées par le Roi: 1° conformément aux dispositions de l'article 46, s'il s'agit d'actes confiés à des personnes exerçant une profession paramédicale; 2° conformément aux dispositions de l'article 46bis, s'il s'agit d'actes confiés à des praticiens de l'art infirmier.»
L'article 5 § 2 concerne la pratique des analyses de biologie clinique par les pharmaciens ou les licenciés en sciences chimiques.
Article 5 § 2 alinéa 1: «Les porteurs du diplôme légal de pharmacien ou de licencié en sciences chimiques sont habilités à effectuer les analyses de biologie clinique que le Roi détermine conformément aux dispositions de l'article 46 et dont il fixe les modalités d'exécution dans les mêmes conditions».
L'article 19: «interdit à tout praticien visé aux articles 2, 3 ou 4 (médecin, accoucheur, pharmacien, licencié en sciences dentaires) de prêter d'une manière quelconque sa collaboration à un tiers ou de lui servir de prête‑nom, à l'effet de le soustraire aux peines réprimant l'exercice illégal de l'art médical ou de l'art pharmaceutique».
L'article 21bis définit les qualités requises pour exercer l'art infirmier.
L'article 21ter définit ce qu'on entend par art infirmier et son § 2 renvoie à l'art. 46bis pour la fixation des prestations visées au § 1, b et des modalités de leur exécution.
Article 21ter § 1er: «On entend par art infirmier, I'accomplissement par les personnes visées à l'article 21bis des activités suivantes:
- d'une part l'observation et la constatation des symptômes et réactions, tant physiques que psychiques du patient, afin de rencontrer ses différents besoins et de collaborer à l'établissement du diagnostic par le médecin ou à l'exécution du traitement médical en vue des besoins que requiert son état; d'autre part, la prise en charge d'une personne, saine ou malade, pour l'aider, par une assistance continue, à l'accomplissement des actes contribuant au maintien, à l'amélioration ou au rétablissement de la santé, ou pour l'assister dans son agonie; tous ces actes étant accomplis en vue d'assurer une dispensation globale des soins infirmiers;
- I'accomplissement de prestations techniques de soins infirmiers liées à l'établissement du diagnostic par le médecin ou à l'application du traitement prescrit par le médecin ou à des mesures relevant de la médecine préventive;
- I'accomplissement d'actes pouvant être confiés par un médecin conformément à l'article 5 § 1er alinéa 2 et 3.»
§ 2: «Le Roi peut conformément aux dispositions de l'article 46bis, établir la liste des prestations visées au § 1er b du présent article et fixer les modalités de leur exécution et les qualifications requises.»
L'article 21sexies est sur le plan infirmier, analogue à l'article 19 cité plus haut.
L'article 21octies institue auprès du Ministère de la Santé Publique et de la Famille un Conseil National de l'art infirmier.
L'article 21nonies détermine la mission de ce Conseil.
§ 1er: «Le Conseil National de l'art infirmier a pour tâche de donner au Ministre ayant la santé publique dans ses attributions, à sa demande ou d'initiative, des avis en toute matière relative à l'art infirmier, et en particulier, en matière d'exercice de l'art infirmier et des qualifications requises.»
L'article 21duodécies § 1er institue auprès du Ministère de la Santé Publique une Commission technique de l'art infirmier. «Cette Commission a pour mission de donner les avis visés à l'article 46bis.»
L'article 22 définit ce qu'on entend par profession paramédicale.
L'article 23 donne au Roi le pouvoir de préciser, conformément aux dispositions de l'article 46, les prestations des paramédicaux et de fixer les conditions de leur exécution.
L'article 27 est sur le plan paramédical l'analogue des articles 19 et 21 cités plus haut.
L'article 28 institue auprès du Ministère de la Santé Publique un Conseil National des professions paramédicales.
Article 29: «Le Conseil donne au Ministre qui a la santé publique dans ses attributions, à sa demande ou d'initiative, des avis en toutes matières relatives aux professions paramédicales.»
«Il peut notamment faire au Ministre des propositions en vue de l'exécution de l'article 23 § 1er, alinéa 1er.»
L'article 33 donne plus précisément pour mission à ce Conseil d'examiner les questions se rapportant aux prestations des paramédicaux et à leur collaboration à l'exécution des actes demandés par les médecins.
L'article 37 § 1er, 2a et c: donne pour mission spéciale aux Commissions médicales provinciales de vérifier les titres des praticiens de l'art médical, de l'art pharmaceutique, des médecins vétérinaires, de l'art infirmier et des professions para‑médicales et de signaler au Parquet les cas d'exercice illégal.
Les articles 46 et 46bis auxquels renvoient plusieurs articles, déterminent les dispositions dans lesquelles le Roi précise les prestations que peuvent faire les praticiens de l'art médical, de l'art pharmaceutique, de l'art infirmier et les praticiens des professions paramédicales.
L'article 46, très compliqué, précise que les Arrêtés Royaux dans ces matières sont pris sur avis des Académies mais suivant différentes modalités.
L'article 46bis concerne l'art infirmier et précise que les Arrêtés en ce domaine sont pris sur avis conforme de la Commission technique de l'art infirmier.
L'article 50 § 1, alinéa 2 prévoit qu'«à titre transitoire et aussi longtemps que les arrêtés royaux prévus aux articles 5, 6, 21ter § 1er b, et 23 § 1er, n'auront pas été pris, les modalités actuelles d'accomplissement des actes ou prestations qui y sont visés, telles qu'elles sont limitées par la jurisprudence résultant de la loi du 12 mars 1818 précité, restent d'application».
En conclusion:
Il appartient au Roi de déterminer par arrêté royal, conformément aux règles de procédure prévues aux articles 46 et 46bis, les prestations que peuvent effectuer les praticiens des différentes branches de l'art de guérir, de l'art infirmier et des professions paramédicales.
On est bien obligé de constater que ces arrêtés royaux n'ont jamais été pris.
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Un arrêté royal du 10 novembre 1978 définit les règles d'agréation des laboratoires de biologie clinique.
Cet arrêté permet à un pharmacien biologiste d'être propriétaire d'un laboratoire de biologie clinique, d'exercer des analyses et d'être chargé de la direction d'un laboratoire.
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L'arrêté royal n° 79 du 10 novembre 1967 relatif à l'Ordre des Médecins ne donne à celui‑ci aucun pouvoir pour déterminer les actes autorisés pour les praticiens de chaque branche de l'art de guérir, de l'art infirmier et des professions paramédicales.
En ce domaine, les Conseils provinciaux de l'Ordre ont simplement pour mission de signaler aux autorités compétentes les actes d'exercice illégal de l'art médical dont ils ont connaissance.
On pourrait en déduire évidemment qu'ils ont le droit de juger, pour pouvoir le dénoncer, si un acte commis par quelqu'un d'autre qu'un praticien de l'art médical, est un acte de pratique illégale.
Le Conseil National de l'Ordre a publié dans le bulletin n° 27 un rapport sur le problème de la biologie clinique.
Dans le deuxième chapitre de ce rapport consacré à l'organisation et au fonctionnement des laboratoires, le Conseil écrit:
«Le problème de la direction du laboratoire a toute son importance. En effet, la biologie clinique ne fait pas intervenir seulement des médecins mais également des pharmaciens, voire des chimistes, en fonction des possibilités accordées quant à l'exercice de la biologie clinique.
L'Ordre estime qu'au niveau de la responsabilité, il faut une participation médicale dont l'importance est liée à l'activité du laboratoire. En effet, le ou les responsables doivent pouvoir assumer un rôle de consultant. Il faut préciser qu'il s'agit d'un acte médical qui est lié à la connaissance de la médecine, que seul possède le médecin.»
Nous trouvons dans ce même bulletin une directive adressée aux Conseils provinciaux et à tous les médecins.
Nous lisons page 76 sous le titre «Règles de conduite pour les médecins demandeurs d'analyses», 1, alinéa 3:
«Lorsque le problème clinique dépasse ses compétences, le médecin demandeur consultera un spécialiste en la matière. Ensemble, ils décideront des analyses à demander.»
Et au point 7 des «Règles de conduite pour le médecin biologiste», page 78: «Si des analyses paraissent injustifiées ou inutiles, le médecin biologiste doit se mettre en rapport avec le médecin demandeur. Il ne peut se retrancher derrière la responsabilité du médecin demandeur.»
Ces trois points montrent combien la présence d'un médecin biologiste à la tête du laboratoire est importante.
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La question précise du droit pour un pharmacien biologiste ou un laborantin de faire une prise de sang n'est pas explicitement résolue sur le plan légal.
L'article 5 de l'arrêté 78 prévoit cependant que le médecin peut confier certains actes préparatoires au diagnostic ... à des personnes exerçant une profession paramédicale ou l'art infirmier.
Par contre alors qu'à son § 2, cet article déclare qu'un pharmacien est habilité à effectuer des analyses de biologie clinique. Il ne prévoit nulle part qu'un médecin peut lui confier des actes préparatoires au diagnostic ou relatifs à l'application du traitement.
Le Conseil National de l'Ordre des Médecins tenant compte d'une pratique longue de nombreuses années et de l'article 5 de l'arrêté 78, regrettant l'absence d'arrêtés royaux réglant légalement la question, estime qu'un praticien de l'art infirmier peut sous la responsabilité et le contrôle d'un médecin pratiquer des prises de sang.
Le Conseil National estime indispensable une participation médicale au niveau des responsabilités d'un laboratoire de biologie clinique.
Le Conseil National ne trouve aucune justification légale ou jurisprudentielle à la pratique des ponctions veineuses par des pharmaciens biologistes.
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Remarque
Subsidiairement, remarquons que certaines ponctions veineuses ne peuvent être assimilées à de simples prises de sang effectuées pour examens de laboratoire.
Il en est ainsi notamment des prélèvements de sang pour transfusion qui exige un examen médical préalable du donneur.
La mise au point de troubles de la coagulation du sang, auxquels fait allusion à juste titre l'avocat (il parle d'hémophilie), demande également une participation plus spéciale du médecin.
On pourrait encore parler d'autres examens biologiques qui sont de la compétence exclusive du médecin mais il ne paraît pas opportun au Conseil National d'examiner, en la circonstance, ces problèmes.
Il croit avoir répondu à la question précise: un pharmacien biologiste est‑il habilité à faire des ponctions veineuses ?
L'Ordre des médecins et le problème de la biologie clinique
L'ORDRE DES MEDECINS ET LE PROBLEME DE LA BIOLOGIE CLINIQUE
Ces vingt dernières années, la Médecine a fait d'immenses progrès tant du point de vue clinique que technique.
Il en est résulté un accroissement de la consommation médicale qui, dans tous les pays, risque de compromettre l'équilibre financier des budgets nationaux.
L'ensemble de la population ayant été largement sensibilisée à ces progrès par tous les moyens possibles d'information, elle entend que les médecins mettent les examens les plus techniques au service de sa «santé».
Cette situation amène l'Ordre des Médecins à rappeler quelques considérations fondamentales.
Les analyses et méthodes cliniques mises au point ces dernières années sont devenues des éléments fondamentaux des progrès de la Médecine tant du point de vue diagnostique que thérapeutique. Les Médecins qui n'auraient pas recours à ces moyens lorsqu'ils sont réellement utiles, commettraient une faute grave dans les soins qu'ils doivent apporter à leurs patients.
Le recours à certaines méthodes techniques absolument nécessaire à la pratique d'une bonne médecine, impose aux malades et à la collectivité, une charge financière de plus en plus élevée. Eile est due aux examens de plus en plus nombreux que l'on doit effectuer pour répondre aux questions que le médecin doit se poser face à son patient s'ii veut lui assurer un diagnostic et une thérapeutique adéquats.
Ces progrès qui ne devraient servir qu'à un bon diagnostic et à une bonne thérapeutique peuvent donner lieu à des abus volontaires ou involontaires.
Il importe d'y mettre fin par une meilleure organisation de la médecine et un dépistage systématique des abus.
L'intérêt général comme l'intérêt du corps médical exigent impérieusement que les règles d'éthique qui sont à la base d'une bonne médecine soient respectées.
L'Ordre des Médecins, qui est légalement le seul compétent pour réprimer les abus en matière de liberté diagnostique et thérapeutique, est amené à émettre une série de considérations reprises dans ce rapport.
Certains des éléments qui y sont invoqués ne sont pas de sa compétence particulière, mais il estime que - ceuxci étant liés les uns aux autres - il a le devoir et le droit pour remplir sa mission, de donner son avis sur chacun d'entre eux afin d'organiser sur des bases éthiques et déontologiques valables cette spécialisation de la médecine qu'est la biologie clinique.
Le Conseil national tient à rappeler qu'il est déjà intervenu en adressant le 5 février 1978 aux Conseils provinciaux et à tous les médecins des directives précises, en vue de prévenir et de réprimer les abus.
Il y a lieu de signaler que dans les trois dernières années, 81 sanctions ont été prononcées à l'encontre des Médecins en ces matières.
Nous tenons à remercier ici les représentants des Facultés de Médecine, de l'Ordre des Pharmaciens et de l'Union Professionnelle des Médecins Spécialistes en Biologie médicale, qui ont bien voulu nous faire connaître leur avis sur le problème de la biologie clinique.
PLAN DU RAPPORT
Enseignement et fonction clinique
Il. Organisation et fonctionnement des laboratoires:
- direction
- conditions de fonctionnement
- la connexité
- les formulaires
- les points de prélèvements
Aspect financier:
- politique de santé
- nomenclature
- dépistage de la surconsommation
- la dichotomie
Conclusion: le rôle de l'Ordre
- les abus de liberté diagnostique et thérapeutique
- la dichotomie
- multiplicité des points de prélèvements
- une information
I. Enseignement et formation clinique
Les médecins étant amenés à appliquer au cours de leur vie les notions acquises au cours de leur études, c'est au niveau de l'enseignement que l'on doit intervenir en premier lieu.
Un enseignement coordonné tant dans la théorie que dans la pratique, devrait assurer ce que l'on pourrait appeler «un bon usage» de la biologie clinique. Cet enseignement ne devrait être dispensé aux étudiants que lorsqu'ils auront eu, au cours de leurs études, des premiers contacts avec les patients et leur pathologie, et surtout aux Médecins dans les cours de recyclage et de postgraduat. De plus, cet enseignement sera une préparation aux liens d'information réciproque qui devront exister ultérieurement, au cours de la pratique professionnelle, entre le clinicien et le médecinbiologiste.
Il appartient aux Facultés de juger de la façon de dispenser cet enseignement afin qu'il réponde aux buts fixés cidessus.
L'utilité de cet enseignement se justifie également par le fait qu'il pourrait servir de point de référence lorsque des problèmes d'abus de liberté diagnostique et thérapeutique sont soumis à l'Ordre.
Lors de comparutions de médecins pour des problèmes de cette sorte, ceuxci font souvent état du fait, qu'au cours de leurs études, ils n'ont pas été renseignés de façon adéquate sur ce «bon usage» de la biologie clinique.
Il est certain que, s'ils peuvent se référer à l'existence d'un enseignement théorique approprié accompagné par des exposés explicites au lit du malade, les Conseils de l'Ordre pourront mieux réfuter les arguments avancés sur ce plan.
En conclusion, I'existence de cet enseignement d'une part, s'avère utile pour la formation du médecin et d'autre part, permettra à l'Ordre, chargé par la loi de réprimer les abus en matière diagnostique et thérapeutique, de se baser sur des références solides.
Il. Organisation et contrôle du fonctionnement des laboratoires
Devant l'ampleur des dépenses engagées pour répondre aux besoins des patients en matière de biologie clinique, les pouvoirs publics ont déjà pris une série de mesures législatives (arrêté royal du 10.11.1978), qu'ils pourraient être amenés à compléter par des mesures dont les effets seraient analogues à ceux des lois spécifiques organisant les laboratoires de biologie clinique dans d'autres pays. Ces points sont de la compétence des pouvoirs publics mais l'Ordre doit donner son avis sur certains d'entre eux.
Il est impensable que le médecin ne jouisse pas d'une liberté totale en vue de disposer des moyens que la science a mis au point pour l'aider à poser un diagnostic et choisir une thérapeutique. Il est cependant souhaitable de veiller à une utilisation médicale rationnelle et à un emploi licite des ressources fournies par l'Assurance Maladie.
Il y a lieu de prévenir une prolifération abusive de laboratoires qui peut conduire à une «commercialisation» et à un abaissement du niveau de la qualité.
Il y a lieu d'exiger de chacun des laboratoires des conditions de fonctionnement optimales, afin que le corps médical y trouve un maximum de sécurité et de garantie. Aussi fautil établir des critères stricts.
a) direction
Le problème de la direction du laboratoire a toute son importance. En effet, la biologie clinique ne fait pas intervenir seulement des médecins mais également des pharmaciens, voire des chimistes, en fonction des possibilités accordées quant à l'exercice de la biologie clinique.
L'ordre estime qu'au niveau de la responsabilité, il faut une participation médicale dont l'importance est liée à l'activité du laboratoire. En effet, le ou les responsables doivent pouvoir assumer un rôle de consultant. Il faut préciser qu'il s'agit d'un acte médical qui est lié à la connaissance de la médecine, que seul possède le médecin.
En ce qui concerne les pharmaciens, I'Ordre des Médecins n'ayant aucune possibilité d'action directe, des contacts ont été pris avec l'Ordre des Pharmaciens. Il a marqué son accord pour uniformiser les moyens de combattre les abus par le respect de règles déontologiques similaires à celles des Médecins et spécialement édictée à cet effet par l'Ordre des Pharmaciens.
Dès à présent, les deux ordres sont décidés à avoir des contacts constants afin de pouvoir agir en commun et dans le même sens lorsque le besoin s'en fera sentir.
b) conditions de fonctionnement
En ce qui concerne les conditions de fonctionnement, il y a lieu d'exiger la continuité des services, sauf exception possible pour certains laboratoires ou services hautement spécialisés. Il est impensable, en effet, que patients et médecins ne puissent disposer, en dehors des heures de prestations normales, des services qu'ils sont en droit d'attendre. En raison de leur coût, I'organisation de services de garde a été éliminée par certains laboratoires aux seules fins d'en augmenter les bénéfices, de même que la réalisation d'analyses non rentables financièrement mais cependant utiles. Ainsi, il est nécessaire d'exiger un fonctionnement permanent et complet.
Il va de soi que ces conditions peuvent être remplies par un regroupement ou un accord entre certains laboratoires.
Le fonctionnement technique doit être soumis à des procédures de contrôle. Cellesci doivent être de plusieurs types, intérieures et extérieures auxquelles devront se soumettre les responsables des laboratoires.
c) la connexité
Il s'agitlà d'un point important. Il est certain que les possibilités accordées à certains généralistes ou spécialistes d'effectuer des examens qui relèvent de la biologie clinique leur permettent dans un grand nombre de cas d'assurer rapidement un diagnostic et un traitement. Certains cliniciens défendent d'ailleurs l'idée d'une meilleure qualité de soins si le médecin qui procède à l'examen peut réaliser luimême les analyses nécessaires.
Si chaque Médecin s'en tenait aux articles 35 (1) et 36 (2) du Code de Déontologie, il n'y aurait aucun problème.
Force est de constater que certains généralistes et spécialistes valorisent financièrement leur profession grâce à ces possibilités. C'est, entre autres, dans ces cas que l'on trouve une interprétation et une utilisation abusive de la biologie clinique.
L'ordre ne dispose actuellement d'aucun moyen contraignant pour déceler les abus. Ceuxci, lorsqu'ils sont pratiqués peuvent l'être tant en pratique privée, qu'en pratique hospitalière.
La suppression de la connexité a des implications au niveau des valeurs relatives dans la nomenclature. Son maintien nécessite une connaissance précise de la «consommation» de chaque médecin en actes de biologie clinique.
d) les formulaires
L'utilisation de formulaires de demande pose de grands problèmes. L'emploi de ces formulaires répond incontestablement à un besoin de rationalisation. Ils trouvent aussi leur origine dans la complexité et la multiplicité des analyses en biologie clinique. S'ils sont conçus pour aider le médecin dans sa pratique courante, il n'en reste pas moins vrai que la rédaction de certains favorise une commercialisation de la Médecine.
Dans la rédaction du formulaire de demande d'analyses, il faut proscrire tout système qui permet de demander par un simple coup de crayon des longues séries d'analyses, alors que souvent quelquesunes d'entre elles bien choisies seraient suffisantes.
A un formulaire de demande devrait toujours correspondre un formulaire de réponse, obligeant entre autres le biologiste qui aurait été amené à le faire, à indiquer et motiver un éventuel changement dans la demande.
e) multiplicité des points de prélèvements
Il est évident que l'on doit donner au médecingénéraliste les mêmes possibilités qu'en pratique hospitalière afin d'assurer partout une même qualité de la médecine.
C'est pourquoi la multiplication des points de prélèvements peut faciliter grandement la tâche du médecin qui pratique en privé. Il faut bien reconnaître que l'organisation de ces points de prélèvements est souvent faite sur un modèle de distribution commerciale donnant lieu à une véritable concurrence entre laboratoires.
III. Aspect financier
a) politique de santé
En dernier ressort, il appartient aux pouvoirs publics d'adopter telle politique de santé plutôt qu'une autre, tout au moins en ce qui concerne son financement et notamment le remboursement des honoraires.
Dans la situation actuelle, on ne peut proclamer le droit à la santé par l'accès à la médecine sans provoquer une surconsommation dont le médecin n'est pas responsable.
De plus, la dangereuse tendance actuelle qui exige du médecin une obligation de guérir plutôt qu'une obligation de moyens, I'amène, pour des raisons de sécurité personnelle que l'on comprend, à mettre souvent en oeuvre des moyens disproportionnés au cas à traiter.
C'est aux pouvoirs publics qu'il appartient de faire connaître honnêtement le coût de la Médecine qu'ils préconisent.
Une participation personnelle adéquate du patient aux honoraires est un moyen que l'on peut utiliser pour rendre la population consciente du coût de ses exigences. De même, la suppression du tiers payant là où il n'est pas indispensable pour des raisons sociales évidentes, est de nature à limiter les abus et les fraudes.
b) la nomenclature
La nomenclature n'est pas du ressort immédiat de l'Ordre mais celuici ne peut cependant rester sans avis à son sujet. En effet, elle constitue une réalité avec laquelle le médecin est confronté constamment.
Dans l'organisation de l'Assurance Maladie Invalidité telle que nous ia connaissons actuellement, les honoraires auxquels le Médecin a légalement droit sont liés à la nomenclature. L'utilisation abusive de celleci peut amener l'intervention de l'Ordre.
Une nomenclature non adaptée aux progrès scientifiques et techniques peut donner lieu à une surconsommation souvent involontaire mais néanmoins injustifiée.
Seule une nomenclature régulièrement adaptée à l'évolution de la pratique médicale favorisera une médecine qui répondra aux règles d'éthique en matière d'honoraires.
c) dépistage de la surconsommation
Qu'ils soient volontaires ou involontaires, il appartient à l'Ordre de sévir contre les abus. Ceuxci sontloin d'être toujours signalés et il est même évident que bien souvent, ils ne sont pas dépistés.
Cette surconsommation, souvent liée à tel Médecin plutôt qu'à tel autre, donne à la Médecine un aspect commercial particulièrement là où il y a des actes techniques accomplis à partir d'un appareillage souvent sophistiqué, ce qui est le cas fréquemment en biologie clinique.
Il est évident que l'on dispose actuellement des possibilités de déterminer le profil des prestations de chaque médecin en fonction de ses prescriptions. La systématisation de certaines de cellesci est l'un des aspects de la surconsommation. Dépister cette systématisation, valable cependant dans certains cas, est le seul moyen de déceler les abus.
Des études sont actuellement entreprises dans ce sens par les organes de l'Assurance Maladie Invalidité. Il convient cependant sous peine d'assister à une régression du niveau de la Médecine dans notre pays, d'être prudent et de ne pas choisir au vu de ces profils des normes étroites en fonction des seuls critères économiques.
La communication de ces profils aux Conseils de l'Ordre leur permettra de remplir leur mission qui consiste à réprimer les abus en matière de diagnostic et de thérapeutique.
d) la dichotomie
Il est inutile de nier qu'actuellement en matière de biologie clinique, il existe parfois une dichotomie entre médecinsprescripteurs et laboratoires de biologie. Il faut reconnaître que si les médecins sont tenus par une éthique qui condamne la dichotomie, par contre, les laboratoires de biologie clinique ou certaines institutions, lorsqu'ils sont placés sous la direction de responsables nonmédecins - dont certains n'ont pas jusqu'à ce jour les mêmes règles d'éthique - offrent souvent aux médecinsprescripteurs, des conditions de collaboration qui sont en réalité de la dichotomie.
Celleci revêt des formes multiples dont certaines sont maintenant connues. Seule une surveillance constante des contrats, des contacts entre les Ordres des Pharmaciens et des Médecins à ce sujet, des enquêtes minutieuses, permettront de repérer et de mettre fin à la dichotomie telle qu'elle existe actuellement.
IV. Conclusion: Le rôle de l'Ordre
Parmi les éléments essentiels qui conditionnent la commercialisation de la Médecine et la surconsommation en biologie clinique, il en est qui sont du ressort de l'Ordre et pour lesquels les Conseils provinciaux doivent intervenir.
On peut citer:
a) les abus de liberté diagnostique et thérapeutique visés par les articles 35 (3) + 36 (4) et 103 (5) du Code.
Encore fautil qu'ils soient avisés des abus. Ceuxci sont difficiles à dépister. Il est indispensable, si l'on veut arriver à une action utile, que les organismes publics communiquent tous les documents par lesquels on peut mettre en évidence une surconsommation et les abus qui en découlent.
Il est indispensable qu'il y ait une application rigoureuse et coordonnée de la loi du 9.8.1963 qui stipule en son article 35: «Le Médecin apprécie en conscience et en toute liberté les soins à donner. Toutes les prestations abusives contraires à la déontologie seront soumises à l'appréciation des Conseils de l'Ordre des Médecins.»
A l'aide du profil prévu ou d'autres renseignements fournis par les organes d'Assurance Maladie Invalidité, on pourra dépister les éventuels abus dans le cadre de l'article 36 du Code. Ces informations transmises systématiquement aux Conseils de l'Ordre leur permettront d'intervenir.
Chaque fois qu'il y aura des indices d'abus, les Conseils Provinciaux devront entreprendre une enquête.
Il y aura lieu d'examiner les formulaires et d'établir une sorte de formulaire type de manière à décourager les tentatives de surconsommation tout en sauvegardant les possibilités cliniques.
b) la dichotomie
Celleci fait notamment l'objet des articles 80 (6) et 81 (7) du Code que les Conseils veilleront à faire respecter strictement.
Les Conseils devront en outre agir sur deux plans:
Une révision attentive de tous les contrats dans lesquels des médecins sont professionnellement impliqués.
De nombreux cas de dichotomie ayant été signalés à la suite d'accords pris avec des pharmaciensdirecteurs des laboratoires cliniques, il y aura lieu de maintenir des contacts constants avec l'Ordre des Pharmaciens, celuici ayant décidé de veiller à appliquer des règles d'éthiques nouvellement rédigées et qui concernent les pharmaciens biologistes.
multiplicité des points de prélèvements
Les Conseils auront aussi à intervenir dans la règlementation de ceuxci.
d) information
Le Conseil National procèdera à une information des Conseils Provinciaux en transmettant ce rapport complété par un autre où l'on trouvera:
- les articles du Code particulièrement appropriés à la situation actuelle en biologie clinique;
- des règles de conduite particulières à la biologie clinique qui serviront de guide aux médecins demandeurs, aux médecins spécialistes en biologie clinique et aux médecins connexistes.
Le Conseil national adressera une lettre à tous les médecins qui recevront les documents mentionnés sous a) et b).
Le Conseil national transmettra ce rapport ainsi que le deuxième document susmentionné aux autorités.
Le Conseil national informera la population du contenu des deux documents en organisant une conférence de presse au début du mois d'octobre.
En outre, le Conseil national veillera à ce que les conseils provinciaux soient mis en possession de toutes les sanctions disciplinaires relatives à la biologie clinique.
(1) Article 35: «Sauf force majeure, le médecin ne peut exercer sa profession dans des conditions qui compromettent la qualité des soins et des actes médicaux. Il doit éviter d'outrepasser sa compétence.»
(2) Article 36: «Le médecin jouit de la liberté diagnostique et thérapeutique. Il s'interdira de prescrire des examens et des traitements inutilement onéreux ou d'exécuter des prestations superflues.»
(3) Art. 35: «Sauf force majeure, le médecin ne peut exercer sa profession dans des conditions qui compromettent la qualité des soins et des actes médicaux. Il doit éviter d'outrepasser sa compétence.»
(4) Art. 36: «Le médecin jouit de la liberté diagnostique et thérapeutique. Il s'interdira de prescrire des examens et des traitements inutilement onéreux ou d'exécuter des prestations superflues.»
(5) Art. 103: «Sans préjudice de l'article 36, alinéa 1er, relatif à la liberté diagnostique et thérapeutique, le médecin doit être conscient de ses responsabilités sociales. L'existence d'une assurance privée ou publique ne doit pas l'amener à déroger aux prescriptions de l'article 36, alinéa 2, visant les abus de la liberté diagnostique et thérapeutique.»
(1) Art. 80: «Le partage d'honoraires entre médecins est autorisé s'il correspond à un service rendu directement ou indirectement au malade dans le cadre d'une médecine de groupe. Hormis ce cas, I'acceptation, I'offre ou la demande d'un partage d'honoraires, même non suivi d'effet, constitue une faute grave.»
(2) Art. 81: «Tout partage d'honoraires entre médecins et non médecins est interdit.»