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Déontologie

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Médecin généraliste02/10/2010 Code de document: a131012
Participation à une garde (de nuit) en semaine – Décision du cercle de médecins généralistes

Question de savoir si une participation à une garde (de nuit) en semaine votée à la majorité qualifiée lors de l'assemblée générale du cercle de médecins généralistes, est obligatoire pour tous les membres du cercle. En d'autres termes, si tous les membres du cercle, ou même tous les médecins généralistes de la zone de garde, peuvent dès lors être contraints de participer à cette garde.

Avis du Conseil national :

En sa séance du 2 octobre 2010, le Conseil national de l'Ordre des médecins a examiné la question de savoir si une participation à une garde (de nuit) en semaine, votée à la majorité qualifiée lors de l'assemblée générale du cercle de médecins généralistes, est obligatoire pour tous les membres du cercle.

Le service de garde de population des médecins généralistes est organisé par les cercles de médecins généralistes conformément à l'arrêté royal du 8 juillet 2002 (fixant les missions confiées aux cercles de médecins généralistes).

Le service de garde de médecins généralistes (art. 5, 1°) doit ‘légalement' être assuré au minimum pendant les week-ends et les jours fériés, et bien que cela ne soit pas obligatoire, il peut donc certainement être organisé pendant la semaine par les cercles de médecins généralistes, dans le même cadre légal qui leur a été attribué.

L'élargissement de l'organisation du service de garde de population - du week-end et des jours fériés - au service de garde en semaine trouve concrètement appui dans les décisions de la Commission nationale médico-mutualiste (CNMM) concernant les « honoraires de disponibilité » pendant les services de gardes :
http://www.inami.be/care/fr/doctors/availability/

« Les honoraires de disponibilité sont attribués pour les gardes "population", c'est-à-dire pour la prise en charge, par les médecins généralistes d'une zone, de toute demande de soins émanant d'une population donnée.

A partir du 1er juillet 2008, les honoraires de disponibilité couvrent les gardes des week end (48 heures par week end), des jours fériés légaux (24 heures par jour férié) et des jours de semaine (à partir de 19 heures jusqu'au lendemain matin 8 heures) et qui ont été communiquées à la Commission médicale compétente. »

Ces dispositions concernant les honoraires de disponibilité s'inscrivent dans le cadre d'une politique plus large « visant à soutenir des services de garde de médecine générale performants » conformément à l'Accord national médico-mutualiste 2009-2010, en particulier l'artikel 9 :
http://www.inami.be/care/fr/doctors/general-information/agreements/2009-2010/pdf/2009_2010acc.pdf

L'arrêté ministériel du 1er mars 2010 fixant les critères d'agrément des médecins généralistes règle la continuité et la permanence des soins, c'est-à-dire la disponibilité et l'accessibilité des médecins généralistes - et des pratiques de médecins généralistes individuelles - en relation avec le service de garde organisé par le cercle de médecins généralistes.

" [...]
CHAPITRE II. - Critères de maintien de l'agrément et du titre professionnel particulier de médecin généraliste

Art. 10 Pour conserver l'agrément et le titre professionnel particulier de médecin généraliste, le médecin généraliste exerce la médecine générale conformément aux critères suivants :
[...]

4° Le médecin généraliste agréé participe à la garde organisée par les cercles de médecins généralistes, comme prescrit dans l'arrêté royal du 8 juillet 2002 précité.

5° Le médecin généraliste agréé assure la continuité des soins des patients qu'il traite, conformément à l'article 8, § 1er. de l'arrêté royal n° 78 précité : dans le cadre de la relation avec ses patients, le médecin généraliste prend toutes les mesures pour que la prise en charge diagnostique et thérapeutique de ceux-ci soit poursuivie sans interruption.
Pendant les périodes dans lesquelles un service de garde de médecine générale n'est pas disponible, le médecin généraliste agréé prend les mesures nécessaires pour organiser la continuité des soins au profit des patients qu'il traite.

6° Le médecin généraliste agréé assure la permanence des soins. La permanence signifie pour les patients l'accès aux soins de médecine générale pendant les heures normales de service. Par heures normales de service, on entend les heures qui ne sont pas prises en compte par l'assurance obligatoire soins de santé et indemnités pour payer des honoraires de disponibilité aux médecins qui participent à des services de garde organisés, conformément à l'article 2 de l'arrêté royal du 25 novembre 2002 fixant les conditions et les modalités selon lesquelles l'assurance obligatoire soins de santé et indemnités paie des honoraires de disponibilité aux médecins qui participent à des services de garde organisés.
[...] »

La tendance générale est donc que la plupart des cercles de médecins généralistes, sinon tous, optent pour un élargissement du service de garde classique week-ends / jours fériés à une permanence en semaine, et ce suivant les dispositions de la CNMM et l'accord en vigueur, et suivant l'arrêté ministériel du 1er mars 2010 fixant les critères d'agrément des médecins généralistes.

Le cercle de médecins généralistes est une asbl, laquelle est régie par la loi relative aux asbl.

Les modalités de la prise de décision par l'assemblée générale sont définies dans les statuts du cercle de médecins généralistes.

A priori, une majorité simple au sein de l'assemblée générale est suffisante pour l'adoption de décisions ; naturellement, cette assemblée générale peut se déclarer d'accord sur la nécessité/l'opportunité d'une « majorité qualifiée » pour certaines décisions.

Dans le cadre de l'élargissement du service de garde de population à une permanence en semaine, une majorité « qualifiée » procure un soutien plus large par la base, mais elle n'est certainement pas une condition sine qua non.

Des exemptions motivées peuvent être admises pour des raisons d'âge, de santé ou d'autres motifs sérieux. Elles doivent être sollicitées individuellement. Les décisions de l'assemblée générale du cercle de médecins généralistes doivent être motivées.

Dès l'instant où l'assemblée générale du cercle de médecins généralistes a pris une décision lege artis (statuts et législation relative aux ASBL) concernant l'élargissement du service de garde, cette décision est contraignante à l'égard de tous les médecins généralistes en exercice de la zone de médecins généralistes du cercle de médecins généralistes : membres et non-membres.

Les dispositions nécessaires concernant cet élargissement du service de garde de population à une permanence en semaine doivent être reprises par la suite dans le règlement interne déjà existant du service de garde ; il ne faut donc pas absolument rédiger un règlement interne nouveau/séparé.

Il appartient au conseil provincial de l'Ordre des médecins de vérifier sur le plan déontologique les documents nécessaires (les statuts du cercle de médecins généralistes et le règlement interne du service de garde). La commission médicale provinciale (CMP) doit aussi être informée de l'élargissement à une permanence en semaine (cf. CNMM - honoraires de disponibilité).

La participation à la garde en semaine s'inscrit mutatis mutandis parmi les mêmes dispositions « contraignantes » légales et déontologiques que pour le service de garde normal des week-ends et jours fériés : la participation générale est obligatoire.

Médecin généraliste08/05/2010 Code de document: a130015
Service de garde des médecins généralistes - Obligation de déplacement du médecin de garde

Concerne l’organisation des services de garde en médecine générale. Réponse à une position du docteur DAVID SIMON (MGAction et UMGB - Union des Médecins Généralistes Borains), traduite dans des documents juridiques [1](Documents juridiques (lettre 7 décembre 2009) Marc UYTTENDAELE – Marie COOMANS) et des articles de la presse médicale (Journal du Médecin n° 2045 - 11/12/2009 et Artsenkrant n° 2048 - 22/12/2009) : « le remplacement de l’obligation de déplacement du médecin généraliste de garde par un système de triage des appels, au niveau de call centers, présentant les garanties nécessaires à une bonne administration des soins sous la responsabilité de l’Etat (TASRE - triage des appels sous la responsabilité de l’Etat) ».


Avis du Conseil national :

En sa séance du 8 mai 2010, le Conseil national de l'Ordre des médecins a examiné la problématique des services de garde - en particulier l'obligation de déplacement du médecin généraliste de garde - sur la base de documents juridiques et d'articles de la presse médicale soumis par le docteur X, qui propose des alternatives visant un triage des appels par des call centers sous la responsabilité de l'Etat.

Cette information est examinée à la lumière des dispositions actuelles du droit pénal et du droit civil, et par rapport à la législation médicale et à la déontologie.

1. Droit pénal

La piste de réflexion avancée du point de vue juridique est que, si le médecin généraliste ne reçoit pas lui-même l'appel téléphonique, il ignore totalement la situation du patient tant que la personne ayant pris l'appel ne lui a pas fait rapport. Si la personne ayant pris l'appel décide que la situation « n'est pas grave » et qu'il n'y a pas lieu d'envoyer un médecin généraliste sur place, le médecin généraliste ne sera pas averti et ne connaîtra pas l'existence d'un éventuel péril grave. Les conditions de l'article 422bis du Code pénal (obligation de venir en aide) ne seraient donc pas remplies dans le chef du médecin généraliste.

La proposition de départ est donc de contourner juridiquement la charge et la responsabilité légale du médecin généraliste de garde au sens de l'article 422bis en érigeant une barrière de fait entre le patient (ou son entourage) et le médecin généraliste de garde par la création d'une sorte d'étape intermédiaire (centre de dispatching ou call center où un « tiers » traiterait et trierait les demandes de soins). Dans ce schéma, le médecin généraliste de garde ne peut plus prendre acte personnellement de la « situation qui lui est décrite par ceux qui sollicitent son intervention (...) et il ne pourra être puni lorsque les circonstances dans lesquelles il a été invité à intervenir pouvaient lui faire croire au manque de sérieux de l'appel ou à l'existence de risques ».

• Une première question est de savoir si, dans l'esprit de l'article 422bis et au regard des responsabilités inhérentes, un médecin généraliste de garde peut se rendre « injoignable » de manière aussi permanente en confiant systématiquement à un « tiers » la gestion (réception et appréciation) des demandes de soins de ceux qui sollicitent son aide et/ou se décharger sur lui des éventuels problèmes.

L'applicabilité de l'article 422bis aux médecins [2] est cependant évidente (cf. jurisprudence). En outre, l'obligation de venir en aide pèse d'autant plus dans le cadre de l'exercice du service de garde par rapport aux médecins qui ne sont pas de garde (et qui justement peuvent invoquer une circonstance atténuante en raison précisément de l'existence d'un service de garde).

En tout cas - et certainement lorsqu'il assume un service de garde - un médecin ne peut se mettre dans l'impossibilité d'évaluer (de pouvoir évaluer) la gravité d'un danger parce que l'expertise dans l'aide à apporter est un facteur important dans ce cadre.

Le médecin ne peut se contenter d'une description de la situation par celui qui sollicite son aide (même pas par l'intermédiaire d'un confrère) ; au contraire, le médecin doit « activement » recueillir des informations, et doit juger de la situation de la manière la plus précise. Il est attendu du médecin qu'il s'informe exactement et qu'en cas de doute (ex. appels téléphoniques confus), il se rende sur place.

Dans le fonctionnement du service de garde - et dans le contexte de l'article 422bis - la distinction entre « venir en aide » et « procurer une aide » a de l'importance [3] : dans le premier cas, c'est agir soi-même, dans le deuxième, c'est faire appel à un tiers et encore, après avoir apporté les premiers soins.

Le fait de se rendre « injoignable » est possible uniquement pour les médecins qui ne sont pas de garde, précisément parce qu'il existe un service de garde et qu'ils y font appel pour la continuité des soins.

• Une deuxième question est de savoir si l'utilisation du procédé rend impossible l'application de l'article 422bis au médecin généraliste qui « preste » la garde et au cercle de médecins généralistes « organisateur », et ce qu'il en est de la responsabilité de ce « tiers ».

La plupart des cercles de médecins généralistes travaillent avec un système d'appel unifié local. L'appel est reçu, soit directement par le médecin généraliste de garde lui-même, soit indirectement par l'intermédiaire d'un opérateur qui, sans triage des soins mais en décrivant la demande de soins, en fait la communication standardisée et immédiate au médecin généraliste de garde. Parfois, le médecin généraliste de garde peut alors contacter lui-même le patient et recueillir des informations complémentaires (plus) directes.

• Dans les deux cas, le médecin généraliste de garde reste « joignable » et porte l'entière responsabilité de l'exécution de la demande de soins et de l'obligation de venir en aide conformément à l'article 422bis.

En revanche, dans le système suggéré d'un centre de dispatching ou d'un call center, la demande de soins y est reçue et appréciée au téléphone par un « tiers » sous l'angle de la gravité et de l'exécution : ce tiers décide du déplacement éventuel du médecin généraliste.

La qualification de ce « tiers » est en discussion : un médecin ou non ? L'appréciation systématique d'un problème médical - ou même la réalisation d'un diagnostic et la mise en relation ou non avec un acte ou un traitement - peut-elle être considérée comme un « exercice (illégal) de la médecine » ?

Reste la problématique connue de l'appréciation au téléphone [4] d'un problème médical sans pratiquer un examen (consultation/avis par téléphone), même si l'appel est reçu par un médecin.

La communication de la demande de soins ou du problème médical au médecin généraliste de garde est certainement problématique dans le système proposé et recouvre apparemment aussi la possibilité d'un « refus » d'envoyer un médecin généraliste de garde et donc que ce médecin généraliste ne soit pas informé (cf. la cause de justification « légale » de l'article 422bis).

Il existe un « triage » téléphonique des appels médicaux urgents par le service « 100 ». Ceci relève de la loi du 8 juillet 1964 relative à l'aide médicale urgente. Mais par le « 100 », une suite utile est en tout cas donnée à chaque appel et l'opérateur a même un droit de réquisition (article 4) : « Sur demande du préposé du système d'appel unifié adressée personnellement à un médecin, celui-ci est tenu de se rendre à l'endroit qui lui est indiqué et d'y porter les premiers soins nécessaires aux personnes visées à l'article premier ».

Le principal problème qui persiste est celui de la responsabilité de cette « tierce » personne intervenant systématiquement dans une étape intermédiaire entre le patient demandeur de soins et le médecin généraliste de garde, et qui est aussi chargée du triage des demandes de soins et de la décision d'envoyer ou non un médecin généraliste.

• La question qui suit est de savoir par qui l'organisation sera prise en charge le cas échéant: l'Etat (personne publique) ou une personne morale de droit privé (personne privée) ?

L'analyse juridique communiquée fait apparaître que la première option, l'organisation d'un TASRE (tri des appels sous la responsabilité de l'Etat), n'est pas une évidence.

La deuxième option est la création de centres de dispatching ou de call centers par des personnes morales de droit privé. L'analyse fait allusion à l'endossement par ces « personnes morales » de la responsabilité de la « tierce » personne (membre du personnel) assurant la réception téléphonique et l'évaluation de demandes de soins : ces personnes morales pourraient supporter la responsabilité sur la base d'une mauvaise gestion structurelle.

Les documents juridiques communiqués renvoient, dans la cadre de la création de centres de dispatching ou de call centers et de la possibilité d'un triage des soins par un « tiers », au cadre légal des cercles de médecins généralistes, à savoir l'arrêté royal du 8 juillet 2002 fixant les missions confiées aux cercles de médecins généralistes, article 5, 8° (complété par l'arrêté royal du 9 décembre 2004 modifiant l'arrêté royal du 8 juillet 2002 précité) « L'utilisation éventuelle d'un système d'appel unifié se fait conformément aux articles 2, 5°, et 4 de l'arrêté royal du 4 juin 2003 fixant les conditions [...] une intervention financière dans le fonctionnement des cercles de médecins généralistes agréés [...] ».

Il ressort de la lecture de ces arrêtés royaux que ces conclusions sont erronées tant sur le plan structurel que sur le fond et sont à tort extrapolées à un système de centres de dispatching ou de call centers avec un triage des soins.

Comme déjà souligné, la plupart des cercles de médecins généralistes ont leur propre système d'appel unifié local. Le cercle reçoit un financement de base pour ses missions, mais non pour ce système d'appel unifié ; il peut cependant obtenir un « financement complémentaire » pour la mise en place d'un système d'appel unifié (dans la zone de soins d'un ou plusieurs centres agréés), entre autres, si «le système d'appel unifié est organisé en collaboration réciproque avec d'autres disciplines professionnelles de première ligne sur une base contractuelle ».

Premièrement, sur le plan structurel, il est clair que ce « système d'appel unifié » est et reste entièrement géré par le cercle de médecins généralistes asbl organisateur et demeure sous sa responsabilité, et qu'il n'est ouvert à d'autres disciplines professionnelles de première ligne que sur une base contractuelle ( !).

Deuxièmement, sur le fond, il n'est question à aucun moment d'un quelconque triage médical des soins, mais le cas échéant uniquement d'un « dispatching » de l'appel - au sens d'un simple « renvoi » - vers la ou les discipline(s) professionnelle(s) de première ligne sollicitées.


2. Droit civil


L'organisation du service de garde de médecins généralistes est une attribution des cercles de médecins généralistes. L'arrêté royal du 8 juillet 2002 précité définit sous la Section II., article 5, les normes auxquelles le cercle de médecins généralistes doit répondre, en particulier, à l'article 5, 3° : élaborer son règlement interne pour le service de garde et à l'article 5, 5° : le service de garde sera communiqué clairement à la population, ce par quoi il faut entendre à la fois le système et les modalités de la communication avec la population.

Le cercle de médecins généralistes asbl est l'organisateur légal, le médecin généraliste local, l'exécutant. Il y a entre eux un « lien contractuel » matérialisée par le règlement interne du service de garde, contrôlé et approuvé par la commission médicale provinciale et le conseil provincial de l'Ordre.

La responsabilité civile se situe donc dans l'exécution exacte de la mission « contractuelle » du service de garde à laquelle sont parties, le cercle de médecins généralistes et le médecin généraliste de garde, et en outre, tous les médecins généralistes locaux puisqu'il font appel au service de garde (tant pendant les week-ends et jours fériés que pendant la semaine, pour la continuité normale des soins), et enfin les médecins généralistes et le cercle de médecins généralistes ensemble vis-à-vis de la population (service de garde) et/ou du patient individuel (continuité des soins).

Le service de garde des médecins généralistes - de la première ligne - est cependant chargé surtout de la dispensation régulière et normale des soins, et non pas en premier lieu de l' « aide médicale urgente » (AMU dont l'organisation entre dans un cadre légal à part et qui fait partie de la deuxième ligne), ce qui est la contradiction fondamentale dans les projets pilotes « 1733 » et autres (cf. ci-dessous).

C'est pourquoi il faut émettre des réserves quant à une approche trop exclusive de la responsabilité en ne se plaçant que du point de vue de l'obligation de venir en aide (article 422bis Code pénal), encore que bien entendu applicable en fonction de la gravité de la demande de soins.

3. Législation médicale

La base du service de garde des médecins généralistes est l'arrêté royal n° 78 du 10 novembre 1967 relatif à l'exercice des professions des soins de santé, article 8, § 1er (continuité des soins) et article 9 (institution de services de garde) : les deux articles ont pour but commun de garantir la disponibilité et la joignabilité des médecins [5].

• Dans les documents juridiques communiqués, il est suggéré d'adapter l'arrêté royal n° 78, article 9, de manière à définir les normes auxquelles devrait répondre le fonctionnement des systèmes d'appel unifié pendant le service de garde : il s'agirait en particulier de prévoir que les centres de dispatching et les call centers pourraient décider de manière autonome de la nécessité d'envoyer ou non un médecin.

Ce principe correspond au projet « 1733 » qui est, selon l'arrêté royal du 28 novembre 2008 (Charleroi, Centre et Binche, Mons) « un projet d'enregistrement de l'activité de la médecine générale durant les périodes de garde et l'analyse de faisabilité de l'organisation d'un dispatching de la médecine générale sous la coordination d'un regroupement de cercles de médecins généralistes » et est mis en œuvre de la même manière dans le projet « HA-disp » arrêté royal du 5 février 2009 (Bruges), et a récemment été étendu à toute la province du Luxembourg (les arrêtés royaux du 26 janvier 2010). Le but poursuivi est une « régulation médicale des appels à la médecine générale, ainsi que les changements législatifs nécessaires [...] ».

L'un des constats de départ des projets cités « 1733 » et autres est « que le déplacement des médecins généralistes au chevet du patient est dans un certain nombre de cas inutile ou post-posable, et entraîne une perte d'efficacité et un coût élevé, et peut bénéficier d'un triage actif des missions à la manière du tri de moyens mis en place au niveau de la centrale 100 pour les appels à l'aide médicale urgente ».

Le SPF Santé publique propose un nouveau " Numéro d'appel unifié central " organisé par lui et travaillant en collaboration avec les « numéros d'appel unifiés locaux » (des cercles de médecins généralistes de l'arrêté royal 8 juillet 2002 précité, article 5, 8°) selon des protocoles à définir dans le projet.

Le numéro d'appel unifié central du SPF se rapproche étroitement du système d'appel unifié (service 100) organisant l'aide médicale urgente (arrêté royal du 2 avril 1965 déterminant les modalités d'organisation de l'aide médicale urgente et portant désignation des communes comme centres du système d'appel unifié), et vise in fine une intégration dans le service 100.

Les projets « 1733 » et autres ont un lien direct avec la « Note de politique générale » (Chambre des représentants - 31 octobre 2008) de la ministre Onkelinx, point 8. « Amélioration de l'aide médicale urgente » (p.38) (Doc 52 1529/005).

Une telle intégration, dans l'organisation de l'« aide médicale urgente » (AMU « 100 »), de tous les appels médicaux, également de ceux destinés aux médecins généralistes dans le cadre d'une « dispensation normale et régulière des soins » tant pendant le service de garde (arrêté royal n°78, article 9) que pour la continuité des soins au quotidien (arrêté royal n° 78, article 8, § 1er) - avec un régime légal particulier - est à tout le moins contre nature et controversable : pas seulement en raison d'un triage médical des soins présenté comme la norme et en raison de l'éventuelle insertion du médecin généraliste de garde dans le système de l'AMU, mais surtout en raison de l'option prévue de ne pas du tout envoyer un médecin généraliste.

• Le Conseil national renvoie à l'avis du Conseil national du 6 décembre 2008 « Garde de médecine générale : participation obligatoire - déplacement du médecin de garde - triage téléphonique » BCN 123, attirant l'attention sur des points de friction cruciaux en ce qui concerne l'insertion du médecin généraliste de garde dans l'aide médicale urgente.

Si toutefois, un numéro d'appel unifié central analogue est introduit, à l'exemple du service 100, ou même intégré dans celui-ci, il en découlera immédiatement un droit de réquisition analogue de ce régulateur à l'égard du médecin généraliste de garde

• Le Rapport annuel 2006 [6] du service de médiation fédéral « Droits du patient » analyse (pp.58-63) les plaintes portées contre le médecin de garde : la cause de la plainte est toujours la non-intervention du médecin de garde après un appel téléphonique.

(extrait)
« [...] Le service (de médiation) insiste cependant sur l'importance de la confiance que le patient doit pouvoir placer dans un service de garde - amené à offrir un service de qualité - après l'appel téléphonique pour une situation ressentie comme urgente. Un avis du médecin donné par téléphone ne correspond d'aucune manière à une prestation de soins de qualité. [...]

- Le service de médiation fédéral « Droits du patient » se demande également ce que le patient peut comprendre par la définition même de soins de qualité dispensés par un praticien professionnel dans le cadre de la continuité des soins ou bien de l'aide médicale urgente. [...] »
(fin de l'extrait)

L'exécution correcte de la loi du 22 août 2002 relative aux droits du patient (LDP) joue donc en l'occurrence un rôle essentiel : le patient est la personne physique à qui des soins de santé sont dispensés, à sa demande ou non, entre autres, à la demande de son représentant (articles 12-15) ou dans une situation de secours d'urgence (article 8, § 5).

• Dans son avis du 8 mai 2010, le Conseil national renvoie à quelques droits fondamentaux du patient dans le cadre de la LDP :

LDP. Article 5. « Le patient a droit, de la part du praticien professionnel, à des prestations de qualité répondant à ses besoins et ce, dans le respect de sa dignité humaine et de son autonomie et sans qu'une distinction d'aucune sorte ne soit faite. »

Le médecin - également le médecin généraliste en tant que praticien professionnel pendant le service de garde - doit agir, pour dispenser ces prestations de qualité, en conformité avec les normes générales de prudence du droit de la responsabilité civile, et ce en appliquant les critères et les normes scientifiques en vigueur [7].

Pendant le service de garde, le médecin généraliste traite la plupart du temps des patients qu'il ne connaît pas et dont il ne peut dès lors évaluer ni les antécédents médicaux ni le contexte socio-familial. La difficulté est de pouvoir discerner clairement ce que sont des « besoins » médicaux objectifs/objectivables et des « souhaits » plutôt subjectifs.

Il reste hasardeux que des décisions soient prises sur la base uniquement d'une communication à distance (cf. consultations téléphoniques, systèmes de dispatching et/ou de triage) sans un quelconque examen médical sur place du « patient » par le médecin de garde. (Avis du Conseil national du 16 février 2008 « Avis d'un médecin par téléphone - Honoraires » BCN 120, p. 5 - Avis du Conseil national du 7 juin 2008 « Avis d'un médecin par téléphone - Honoraires » BCN 121, p. 6 - Les Avis du Conseil national du 6 décembre 2008 « Garde de médecine générale - Modification de l'avis du 4 octobre 2008 » « Garde de médecine générale : participation obligatoire - déplacement du médecin de garde - triage téléphonique » « Garde en médecine générale - Accompagnement d'un patient en ambulance » BCN 123).

LDP. Article 6. « Le patient a droit au libre choix du praticien professionnel et il a le droit de modifier son choix, sauf limites imposées dans ces deux cas en vertu de la loi. »

Pendant le service de garde, ce libre choix est cependant limité de facto (s'il y a plus d'un médecin généraliste de garde) ou est même inexistant (s'il n'y a qu'un seul médecin généraliste de garde).

Ce fait a un impact considérable sur la relation juridique qui naît entre le médecin et le patient étant donné l'évidente nécessité pour chaque patient de devoir faire appel dans ces circonstances à ce(s) médecin(s) de garde. De ce fait, un contrat de soins devient beaucoup moins facultatif pour les deux parties et donne encore moins la possibilité au médecin généraliste de garde de le refuser.

4. Déontologie

La mission légale du Conseil national est définie par l'arrêté royal n°79 du 10 novembre 1967 relatif à l'Ordre des médecins. Elle consiste notamment dans l'élaboration des principes et des règles qui constituent le Code de déontologie médicale à propos duquel il est précisé que « Le Code comprend notamment des règles relatives à la continuité des soins, en ce compris l'organisation des services de garde [...] ». (article 15)

Les liens avec la déontologie sont clairement stipulés dans l'arrêté royal n°78 précité.

• Comme déjà mentionné, les deux articles suivants sont complémentaires et définissent la joignabilité et la disponibilité des médecins :

Article 8, § 1er. Les conseils provinciaux de l'Ordre des médecins veillent à ce que les médecins se conforment à l'obligation de continuité des soins.

Article 9, § 1er. Les médecins généralistes qui participent aux services de garde doivent « souscrire » au règlement d'ordre intérieur du service de garde et doivent observer les règles déontologiques.

Une mission essentielle des organes ordinaux est la mise à l'épreuve rigoureuse du fonctionnement du service de garde par rapport à la déontologie et au code de déontologie médicale (CDM).

• Article 27 (CDM). Libre choix du médecin par le patient : il est en l'occurrence inévitablement limité par l'organisation pratique du service de garde et une prestation permanente de soins de qualité.

Limitation = le patient n'a pas d'autre choix que de faire appel à ce médecin de garde, si bien qu'il naît un contrat de traitement quasi obligatoire.
Permanence = il est important que la continuité des soins soit assurée en majeure partie par le service de garde.
Prestation de soins de qualité : il s'agit d'un élément essentiel du service de garde, en corrélation avec la loi relative aux droits du patient, qui, dans la cadre de la continuité doit se rapprocher très étroitement de la pratique courante de la médecine générale.
Le groupe professionnel en fixe les conditions dans le règlement interne de la garde.

• Article 28 (CDM). Hors le cas d'urgence et celui où il manquerait à ses devoirs d'humanité, un médecin a toujours le droit de refuser ses soins pour des raisons professionnelles ou personnelles.
De même, le médecin peut se dégager de sa mission à condition d'en avertir le patient [...], d'assurer la continuité des soins [...]

Durant le service de garde, le médecin généraliste de garde agit comme « suppléant » des autres médecins généralistes puisque - selon les accords - ils font appel à ce service de garde pour la continuité de leurs soins à leurs patients, et cela au sens large des soins médicaux normaux dispensés couramment au sein de la médecine générale.

Le « refus » dans le cadre du service de garde : le patient fait appel au médecin généraliste de garde précisément parce que celui-ci s'est engagé à assurer la continuité des soins et en porte la responsabilité, si bien qu'un « refus » est dans ces conditions impossible.

• Article 34, § 1er (CDM) Tant pour poser un diagnostic que pour instaurer et poursuivre un traitement, le médecin s'engage à donner au patient des soins attentifs, consciencieux et conformes aux données actuelles et acquises de la science.

Le médecin généraliste de garde qui se coupe structurellement de toute demande de soins directe des patients et qui de cette manière se rend volontairement et formellement « injoignable » (cf. article 422bis) par le dispatching, laissant à un « tiers » la décision relative aux soins, peut difficilement être considéré comme étant attentif et consciencieux.
Il est injustifiable de laisser à un « tiers » la décision de donner suite ou non à une demande de soins, ou de s'en décharger sur lui, indépendamment de sa qualification (médicale ?).

• Articles 55>57 (CDM) Le secret professionnel

L'introduction d'un « tiers » dans le dispatching de la demande de soins d'un patient est source de problèmes sur le plan du secret professionnel et de la vie privée. Il faut sérieusement se poser des questions au sujet des modalités pratiques d'une situation dans laquelle un « tiers » a la possibilité, dans le cadre de ce type de contacts téléphoniques avec les patients, de demander toutes les « informations médicales » nécessaires et pertinentes afin de pouvoir prendre une décision fondée, par exemple, celle de « faire intervenir un médecin ».
Dans quelle mesure peut-il aussi être demandé à un patient (ou à son entourage) ou exigé d'eux de d'abord répondre à des questions peut-être délicates et/ou indiscrètes d'un « tiers » avant d'obtenir la garantie qu'alors et seulement alors un médecin généraliste de garde exécutera de manière professionnelle cette demande de soins (par une consultation et/ou une visite à domicile)?

• Article 113>118 (CDM) Continuité des soins, service de garde et aide médicale urgente.
Article 116 (CDM) Les modalités de fonctionnement de ces services et leurs rôles de garde doivent être communiqués au conseil provincial.

Article 117 (CDM) L'appréciation des manquements aux règles déontologiques relatives aux services de garde relève de la compétence des conseils provinciaux.

Articel 118 (CDM) le médecin ne peut se soustraire à un appel urgent qu'après avoir acquis la conviction qu'il n'y a pas de réel danger [...].

Ceci implique, primo, que le médecin généraliste de garde a réalisé ou a pu réaliser lui-même une appréciation directe de la demande de soins (en l'occurrence de l'appel), et secundo, qu'il prend ou peut prendre lui-même, de manière autonome, la décision d'intervenir.
Ceci cadre totalement avec la problématique juridique de l'article 422bis du Code pénal.

• Article 166 (CDM) Les statuts, contrats et règlements d'ordre intérieur doivent être conformes aux règles de la déontologie médicale.
Toute clause en opposition avec les obligations dérivant pour le médecin du contrat tacite de soins qui le lie à son malade est interdite.

La mise en œuvre d'un système de dispatching central par un « tiers » devra être soumise, le cas échéant, à des conditions déontologiques strictes, si déjà de tels systèmes s'avèrent praticables contractuellement.
En tout cas, les modèles proposés ne semblent pas compatibles avec les obligations déontologiques du médecin généraliste de garde - et avec le contrat de traitement inhérent entre médecin et patient.

• Article 181 (CDM) Les médecins qui pratiquent la médecine de groupe ou qui travaillent dans les équipes dont font partie des collaborateurs médicaux, veilleront à ne pas faire accomplir à ces derniers des actes qui sortiraient du cadre de leur compétence.

La qualification et les compétences exactes du « tiers » dans un système de dispatching central sont pour l'instant imprécises.
Etant donné le triage de « problèmes médicaux », la question doit être soulevée de l'exercice illégal de la médecine visé à l'article 2, § 1er, et § 2, de l'arrêté royal n°78 précité :
« [...] tout acte ayant pour objet ou présenté comme ayant pour objet, à l'égard d'un être humain, soit l'examen de l'état de santé, soit le dépistage de maladies et déficiences, soit l'établissement du diagnostic, l'instauration ou l'exécution du traitement d'un état pathologique, physique ou psychique, réel ou supposé [...]».

* * *

CONCLUSION

Le Conseil national est conscient de l'existence de problèmes pratiques relatifs à l'organisation du service de garde de médecins généralistes. L'élaboration de solutions nécessite toutefois une analyse très approfondie des diverses causes et conséquences possibles en tenant compte des angles d'approche complexes esquissés ainsi que des charges et responsabilités tant sur le plan légal que déontologique.

La déontologie joue en l'occurrence un rôle fondamental, d'une part, parce que les services de garde reposent sur la confraternité et la solidarité entre médecins et d'autre part, parce que les droits du patient requièrent des soins de qualité, a fortiori aussi pendant le service de garde et pour la continuité des soins en l'absence du médecin du patient.

Le Conseil national a déjà souligné, dans le cadre des services de garde (Avis du Conseil national du 21 avril 2007 « Garde de médecine générale » BCN 116, p.9), la plus-value qualitative d'une consultation au cabinet par rapport à une visite au domicile. L'obligation de déplacement dans le chef du médecin généraliste de garde doit par conséquent être nuancée : tout comme dans la pratique médicale courante au quotidien, les patients peuvent être invités activement à se rendre durant le service de garde à la consultation au cabinet ou au poste de garde de médecine générale plutôt que de recourir à la visite au domicile.

Ceci nécessite une approche pragmatique et un dialogue entre le patient demandeur de soins et le médecin généraliste de garde pour ensemble réfléchir aux possibilités/difficultés du (des) déplacement(s), en discuter et en décider clairement de manière à ce qu'une suite utile soit donnée dans chaque cas particulier à la demande de soins individuelle.

cc. Dr. X

[1] Lettre du 7 décembre 2009 : Marc UYTTENDAELE – Marie COOMANS.

[2]NYS, H., Geneeskunde Recht en medisch handelen, 2005, p. 195, n°s 434 et sv.

[3] Liber Amicorum Jean du Jardin par Hendrik VUYE, Kluwer, 2001, p. 462 et sv.

[4]Rechtspraak- en wetgevingsbundel Gezondheidsrecht 2007 (Thierry Vansweevelt, 10ème édition, p. 200) Rb. Brugge 19 december 1994 : aansprakelijkheid huisarts – huisbezoek – telefonische diagnose – hulpverleningsplicht.

[5] NYS, H., Geneeskunde Recht en medisch handelen, 2005, p.194, n° 433.

[6] Service de médiation fédéral « Droits du patient » :

http://www.health.belgium.be/eportal/Myhealth/PatientrightsandInterculturalm/Patientrights/FederalOmbudsperson/index.htm?fodnlang=fr

[7] NYS, H., Geneeskunde Recht en Medisch handelen, 2005, p.145, n° 324 et sv.

Médecin généraliste08/05/2010 Code de document: a130016
Service de garde des médecins généralistes – Proposition de modification de l’art. 9, §1, de l’arrêté royal n° 78 du 10 novembre 1967 relatif à l’exercice des professions des soins de santé

Lettre du docteur JP BARROY, président CPO Brabant (F) concernant une demande d’avis de madame Dominique TILMANS, sénatrice

1. Le premier angle d’approche de madame Tilmans - à titre de motivation - est la problématique de l’obligation pour le médecin généraliste de garde de se déplacer pendant la garde : selon l’article 9, § 1er, de l’arrêté royal n°78 du 10 novembre 1967 relatif à l’exercice des professions des soins de santé, il est seulement question de dispenser des soins tant en milieu hospitalier qu’ « à domicile ».

Il pourrait être conclu de la lecture de cette disposition que les soins « au cabinet » du médecin généraliste n’ont pas été prévus, et que de ce fait, le déplacement du médecin généraliste « à domicile » est implicitement impératif.

2. Le deuxième angle d’approche de madame Tilmans est de faire dépendre exclusivement de « l’appréciation du médecin concerné » la décision du choix d’une consultation au cabinet ou d’une visite à domicile, et donc de se déplacer ou non lors d’une demande de soins pendant le service de garde.

Ceci permettrait de moduler en fonction de la justification médicale la nécessité pour le médecin généraliste de se déplacer. Pour contrer des abus manifestes », le médecin généraliste de garde aurait même la possibilité de répondre par un refus radical sans induire une responsabilité pénale (Code pénal 422bis) pour « non assistance à personne en danger ».

Avis du Conseil national :

En sa séance du 8 mai 2010, le Conseil national a examiné la demande d'avis de madame D. Tilmans concernant une modification de l'article 9, § 1er, de l'arrêté royal n° 78, du 10 novembre 1967 relatif à l'exercice des professions des soins de santé.

En ce qui concerne le premier point, le Conseil national estime, à la lecture de l'arrêté royal n° 78, article 9, § 1er, que le but de l'instauration de services de garde est de garantir à la population « la dispensation régulière et normale des soins de santé tant en milieu hospitalier qu'à domicile ». Cette dernière précision du texte vise plutôt une distinction entre la médecine spécialisée intramurale de deuxième ligne et la médecine générale extramurale de première ligne.

Dans des avis antérieurs du Conseil national (Avis du Conseil national du12 décembre 1998 « Gardes en médecine générale » BCN 84, p. 12 - Avis du Conseil national du 16 septembre 2000 « Service de garde des médecins généralistes - Accessibilité - Publication du rôle de garde sur un site Internet » BCN 90, p. 11), il a été souligné que pour garantir la continuité des soins, le médecin de garde doit, d'une part, être joignable et disponible pour ses patients et, d'autre part, disposer d'un cabinet correctement équipé sur le territoire de la garde.

En ce qui concerne la réalisation concrète de l'arrêté royal n° 78, article 9, § 1er, (« que des groupements constitués à cet effet peuvent instituer des services de garde »), l'arrêté royal du 8 juillet 2002 fixant les missions confiées aux cercles de médecins généralistes définit les « Missions » des cercles de médecins généralistes, et dans sa section II, les modalités de l' « Organisation du service de garde de médecins généralistes » ; en particulier, l'article 5, 3°, dispose que le cercle de médecins généralistes doit élaborer son règlement interne pour le service de garde où sont fixées les modalités pratiques relatives à l'organisation et aux engagements entre les prestataires, et que ce règlement doit en outre spécifier les modalités pour le contrôle interne de la qualité.

Le service de garde de population engage donc, sur le plan des charges et de la responsabilité, tant le cercle de médecins généralistes organisateur que le ou les médecin(s) généraliste(s) qui preste(nt) les gardes : toutes les règles légales et déontologiques à ce sujet sont fixées par le règlement interne pour le service de garde, lequel est contraignant et doit être contrôlé et approuvé à la fois par la commission médicale provinciale et par le conseil provincial de l'Ordre compétents.

Ce règlement interne pour le service de garde stipule, entre autres, qu'à l'intérieur d'une zone de médecins généralistes, seuls sont en mesure et ont le droit de participer à la garde les médecins généralistes qui disposent d'un cabinet équipé, cela par analogie avec les exigences déontologiques.

En outre, bon nombre de cercles de médecins généralistes dans les villes et grandes villes ont déjà créé des postes de garde de médecins généralistes disposant de cabinets médicaux correctement équipés. Ces types de projets sont légalement reconnus et subventionnés parce qu'ils contribuent à une plus grande joignabilité, à davantage de visibilité et à une meilleure accessibilité pour la population.

Pour autant que l'expression « à domicile », dans l'article 9, § 1er, de l'arrêté royal n° 78, soit (puisse être) source d'imprécision pour l'interprétation à lui donner et permette de la comprendre comme une limitation légale unilatérale (involontaire) des interventions du service de garde de population à des visites à domicile, excluant la possibilité de proposer/effectuer des consultations dans un cabinet, ce n'est pas ce qu'attestent les modalités de fonctionnement des services de garde des médecins généralistes dans la pratique ni leur réalisation dans les faits depuis plus de 40 ans après l'entrée en vigueur de cet arrêté royal n° 78 (10 novembre 1967).

L'arrêté ministériel du 1er mars 2010 fixant les critères d'agrément des médecins généralistes détermine au chapitre II, article 10, les « Critères de maintien de l'agrément et du titre professionnel particulier de médecin généraliste » (extrait) :

« 1° [...] Le médecin généraliste agréé dispense ces soins tant au domicile du patient que dans son cabinet et prend en charge les patients sans aucune forme de discrimination. [...]

4° Le médecin généraliste agréé participe à la garde organisée par les cercles de médecins généralistes, comme prescrit dans l'arrêté royal du 8 juillet 2002 précité.

5° Le médecin généraliste agréé assure la continuité des soins des patients qu'il traite, conformément à l'article 8, § 1er, de l'arrêté royal n° 78 précité : dans le cadre de la relation avec ses patients, le médecin généraliste prend toutes les mesures pour que la prise en charge diagnostique et thérapeutique de ceux-ci soit poursuivie sans interruption.

Pendant les périodes dans lesquelles un service de garde de médecine générale n'est pas disponible, le médecin généraliste agréé prend les mesures nécessaires pour organiser la continuité des soins au profit des patients qu'il traite.

6° Le médecin généraliste agréé assure la permanence des soins. La permanence signifie pour les patients l'accès aux soins de médecine générale pendant les heures normales de service. Par heures normales de service, on entend les heures qui ne sont pas prises en compte par l'assurance obligatoire soins de santé et indemnités pour payer des honoraires de disponibilité aux médecins qui participent à des services de garde organisés, [...] ».

De cela il découle que la médecine de première ligne - exercée par les médecins généralistes agréés - dispense des soins tant au cabinet qu'au domicile du patient, et prend en charge les patients sans aucune forme de discrimination (arrêté ministériel du 1er mars 2010, article 10, 1°).

Dans le cadre de cette continuité des soins assurée par un autre praticien ayant la même qualification légale (arrêté royal n° 78, article 8, § 1er), les médecins généralistes agréés font appel de préférence aux services de garde organisés par les cercles de médecins généralistes, auxquels ils sont légalement tenus de participer (arrêté ministériel du 1er mars 2010, article 10, 4°) et ce tant les week-ends et les jours fériés que pendant la semaine « en dehors des heures normales de service » par des permanences hebdomadaires.

La dispensation des soins médicaux pendant les gardes exclusivement par d'autres médecins généralistes agréés (arrêté ministériel du 1er mars 2010) et des MGF (médecins généralistes en formation) est une condition sine qua non étant donné la qualification légale requise. Il est donc évident que, durant tous les services de garde organisés de/par des médecins généralistes agréés, des visites « au domicile » sont possibles et peuvent être nécessaires pour la « dispensation régulière et normale des soins de santé » tout comme des consultations dans un cabinet, car cela constitue par définition la base de la médecine générale.

Ceci a déjà été affirmé antérieurement par le Conseil national (Avis du Conseil national du 6 décembre 2008 « Garde de médecine générale : participation obligatoire - déplacement du médecin de garde - triage téléphonique », BCN 123).

* * *

En ce qui concerne le deuxième point - l'octroi d'un pouvoir d'appréciation au médecin généraliste de garde pour lui permettre, après évaluation de la demande de soins et pour contrer des abus manifestes, de décider sous sa responsabilité de l'opportunité d'un déplacement - le Conseil national souhaite souligner que la problématique est complexe et qu'elle doit être appréhendée dans un cadre plus large parce qu'elle concerne plusieurs parties impliquées et intéressées : le patient, le cercle de médecins généralistes organisateur, les médecins généralistes locaux et le médecin généraliste qui preste la garde.

1° Le patient a des droits précis en vertu de la loi du 22 août 2002 relative aux droits du patient (LDP) : il est la personne physique à qui des soins de santé sont dispensés à sa demande ou non, entre autres, à la demande de son représentant (articles 12-15) ou dans une situation de secours d'urgence (article 8, § 5).

LDP. Article 5. « Le patient a droit, de la part du praticien professionnel, à des prestations de qualité répondant à ses besoins et ce, dans le respect de sa dignité humaine et de son autonomie et sans qu'une distinction d'aucune sorte ne soit faite. »

Le médecin - également le médecin généraliste en tant que praticien professionnel pendant le service de garde - doit agir, pour dispenser ces prestations de qualité, en conformité avec les normes générales de prudence du droit de la responsabilité civile, et ce en appliquant les critères et les normes scientifiques en vigueur .

Toute appréciation individuelle/personnelle du médecin généraliste de garde doit donc être relativisée et doit pouvoir être jaugée à l'aune de ce qui est généralement admis et courant dans le groupe professionnel comme étant l'exercice normal de la profession (en bon père de famille).

Pendant le service de garde, le médecin généraliste traite la plupart du temps des patients dont il ne connaît ni les antécédents médicaux ni le contexte socio-familial. La difficulté est alors de pouvoir discerner clairement ce que sont des « besoins » médicaux objectifs/objectivables et des « souhaits » plutôt subjectifs qui ne nécessiteraient pas une intervention médicale. Il reste hasardeux que des décisions finales soient prises sur la base uniquement d'une communication à distance (cf. consultations téléphoniques, systèmes de dispatching et/ou de triage) en étant fondées indirectement sur une évaluation subjective de plaintes relatées par le patient ou son entourage, parfois imprécises ou plutôt vaguement formulées, sans un quelconque examen médical direct sur place par le médecin de garde. (Avis du Conseil national du 16 février 2008 « Avis d'un médecin par téléphone - Honoraires » BCN 120, p. 5 - Avis du Conseil national du 7 juin 2008 « Avis d'un médecin par téléphone - Honoraires » BCN 121, p. 6 - Les avis du Conseil national du 6 décembre 2008 « Garde de médecine générale - Modification de l'avis du 4 octobre 2008 » « Garde de médecine générale : participation obligatoire - déplacement du médecin de garde - triage téléphonique » « Garde en médecine générale - Accompagnement d'un patient en ambulance » BCN 123).

Le Conseil national a déjà souligné, dans l'intérêt du patient, la plus-value qualitative d'une consultation au cabinet par rapport à une visite à domicile, notamment pendant le service de garde (Avis du Conseil national du 21 avril 2007 « Garde de médecine générale » BCN 116, p.9). C'est pourquoi un dialogue est recommandé entre le patient et le médecin généraliste de garde afin de discuter ensemble des possibilités et/ou des difficultés de déplacement et de se mettre d'accord clairement à ce sujet. Cela doit permettre de donner dans chaque cas la suite adéquate à la demande de soins.

Ces dernières années, la population a pris conscience qu'il est préférable de se rendre à la consultation pour recevoir des soins médicaux - également du médecin généraliste - et de réserver la visite à domicile aux situations urgentes et/ou exceptionnelles. La statistique révèle donc une diminution des visites à domicile et une augmentation des consultations.

Un certain nombre de patients - des personnes âgées, notamment en MR et MRS en tant qu'environnement remplaçant le domicile - ne peuvent toutefois simplement pas se déplacer, et ce pour des raisons tant médicales que sociales.

LDP. Article 6. « Le patient a droit au libre choix du praticien professionnel et il a le droit de modifier son choix, sauf limites imposées dans ces deux cas en vertu de la loi. »

Pendant la garde de médecine générale, ce libre choix est cependant limité de facto (s'il y a plus d'un médecin généraliste de garde) ou est même inexistant (s'il n'y a qu'un seul médecin généraliste de garde). Ce fait a un impact considérable sur la relation juridique qui naît entre le médecin et le patient étant donné l'évidente nécessité pour chaque patient de devoir faire appel dans ces circonstances à ce(s) médecin(s) généraliste(s) de garde. De ce fait, le contrat de soins devient beaucoup moins facultatif pour les deux parties et donne encore moins la possibilité au médecin généraliste de garde de le refuser.

Si un médecin généraliste de garde écarte un appel et, notamment, « refuse », pour une quelconque raison, d'effectuer une visite à domicile, il se peut que le patient utilise son « libre choix » ou le modifie, et s'adresse directement à la deuxième ligne et aux hôpitaux. En ce cas, il existe un régime légal pour le transport en ambulance d'une part, et d'autre part, l'accès à l'admission d'urgence ne sera aucunement limité étant donné l'obligation d'assistance.

2° Suivant l'arrêté royal n° 78, article 9, § 1er, élaboré concrètement par l'arrêté royal du 8 juillet 2002, la deuxième partie est le cercle de médecins généralistes organisateur.

Le cercle de médecins généralistes représente ces derniers (article 3 de l'arrêté royal du 8 juillet 2002) et compte parmi ses attributions la promotion des soins de santé de première ligne et le travail des médecins généralistes en particulier, ainsi que l'optimalisation de l'accès à la médecine générale pour tous les patients de la zone de médecins généralistes.

Cela vaut en particulier pour l'organisation du service de garde définie comme sa deuxième mission. Les modalités du service de garde sont décrites dans le règlement interne pour le service de garde (article 5, 3° de l'arrêté royal du 8 juillet 2002) « contractuellement » contraignant pour le médecin généraliste de garde puisqu'il doit y « souscrire » (arrêté royal n° 78, article 9, § 1er).

Plus spécifiquement, le cercle de médecins généralistes doit communiquer clairement le service de garde à la population (article 5, 5° de l'arrêté royal du 8 juillet 2002) et doit enregistrer et rapporter dans un rapport annuel les plaintes des patients et les plaintes à propos des services (article 7° de l'arrêté royal du 8 juillet 2002).

Les cercles de médecins généralistes (arrêté royal 8 juillet 2002) sont investis par la loi de la charge et de la responsabilité de toutes les missions qui leur sont attribuées, ils jouissent en tant qu'asbl de la personnalité juridique. Le cercle de médecins généralistes asbl exerce dès lors un contrôle direct de toutes les facettes du fonctionnement du service de garde.

3° Les médecins généralistes locaux sont la troisième partie concernée.

Les médecins généralistes participent à l'organisation du service de garde, car ils siègent dans l'assemblée générale du cercle de médecins généralistes, qui fixe en concertation collégiale les modalités concrètes de fonctionnement du service de garde reprises dans le règlement interne pour le service de garde.

Les pratiques de médecins généralistes individuelles et les cercles de médecins généralistes sont parvenus à travailler en symbiose, particulièrement sur le plan de la continuité des soins.

Dans les accords collégiaux, la délimitation entre la permanence pour la patientèle (l'obligation individuelle de continuité des soins (arrêté royal n° 78, article 8, § 1er) et le début du service de garde de population (arrêté royal n° 78, article 9) est un élément essentiel (arrêté royal 8 juillet 2002, article 5, 3°- 6° et arrêté ministériel 1er mars 2010, article 10, 4°, 5° et 6°) pour la mise en place de la continuité des soins en médecine générale « en dehors des heures normales de service ».

Il s'ensuit de facto que le service de garde de médecins généralistes a la responsabilité tant « de la dispensation régulière et normale des soins » pour la population (arrêté royal n° 78, article 9, § 1er) que de la « continuité des soins » (arrêté royal n° 78, article 8, 1er) des médecins généralistes individuels.

Ceci implique que ce service de garde doit être le plus proche possible de la pratique quotidienne telle qu'exercée normalement par les médecins généralistes au sein de la première ligne. Si cela n'était plus le cas, les médecins généralistes pourraient être obligés de rechercher d'autres solutions pour répondre à leur obligation individuelle de continuité des soins, indépendamment des services de garde.

4° La quatrième partie est le médecin généraliste qui preste la garde.

Le médecin généraliste de garde exerce dans les limites strictes d'un cadre légal et déontologique qui, comme développé ci-avant, est fixé in extenso dans le règlement interne pour le service de garde du cercle de médecins généralistes organisateur, auquel il doit « souscrire » : il a l'obligation de se tenir à ces dispositions et aux modalités pratiques de fonctionnement pendant la garde.

Durant le service de garde, le médecin généraliste de garde agit comme « suppléant » des autres médecins généralistes puisque - selon les accords - ils font appel à ce service de garde pour la continuité de leurs soins à leurs patients, et cela au sens large des soins médicaux normaux dispensés couramment au sein de la médecine générale.

Le service de garde des médecins généralistes crée donc un schéma évident d'attentes à la fois du patient et du médecin généraliste local tant sur le plan de la joignabilité que de la disponibilité. Du point de vue de la société également, le service de garde des médecins généralistes constitue une nécessité absolue pour la dispensation normale des soins de santé outre l'aide médicale urgente organisée alors en collaboration avec la deuxième ligne.

Le médecin généraliste de garde a, en tant que médecin, toutes les compétences professionnelles telles qu'attribuées et définies par l'arrêté royal n° 78, notamment la liberté diagnostique et thérapeutique. Et l'exécution de cette mission entre totalement, d'un point de vue médical, dans le champ de sa responsabilité professionnelle.

L'article 422bis du Code pénal (obligation d'assistance) a une signification particulière en ce qui concerne les médecins, certainement lorsqu'il est fait appel à des médecins généralistes durant le service de garde. Dans ce cadre, la notion de « connaissance du péril grave » est d'un intérêt crucial pour l'appréciation d'un appel téléphonique par le médecin généraliste de garde. Il existe une ample jurisprudence à ce sujet où notamment des médecins ont été condamnés pour s'être abstenus d'aller s'assurer personnellement sur place de la gravité médicale de la situation.

Mais, même pour des appels demandant des soins normaux et non urgents, la responsabilité civile (cf. obligation « contractuelle » via le règlement interne du service de garde) impose le devoir général de prudence, qui peut être attendu de tout médecin généraliste dans l'exercice de la médecine générale, en tant que composante de la « mission » du service de garde de médecins généralistes dans le cadre de la garantie de la continuité des soins.

Dès lors, toute demande de soins adressée au service de garde de médecins généralistes doit être appréciée avec la plus grande prudence - de préférence par le médecin généraliste de garde lui-même - et ce médecin généraliste de garde doit en outre toujours y donner une « suite adéquate ».

Le Conseil national remarque que, dans la proposition de modification de l'arrêté royal n° 78, article 9, § 1er, le pouvoir d'appréciation et la décision qui s'y rapporte concernant le choix entre une consultation au cabinet ou un déplacement sont dévolus « exclusivement » au médecin généraliste de garde.

Mises à part les réserves qu'appelle cette « exclusivité » du droit de décision étant donné les autres parties impliquées et intéressées, une première conclusion sera que l'offre du choix est duale et qu'en tout cas, il doit y avoir une consultation ou une visite à domicile, et que par conséquent, il peut être conclu de l'actuelle proposition législative qu'un refus du médecin généraliste de garde n'est pas une troisième option.

Une deuxième conclusion est que dans les projets, cités par madame D. Tilmans, de « dispatching » par des « tiers » des appels au service de garde de médecins généralistes, dont le projet « 1733 », les modalités de ce dispatching sont opposées au droit exclusif préconisé d'appréciation/de décision par le médecin généraliste de garde. Ces « tiers » peuvent en outre être médecins ou ne pas l'être, et ils peuvent même ne pas être présents physiquement sur les lieux du dispatching et n'être que « joignables ».

Conclusion

Dans la constellation légale actuelle du service de garde de médecins généralistes, deux parties sont revêtues des charges et responsabilités du service de garde, suivant les modalités prévues par le règlement interne du service de garde : le cercle de médecins généralistes organisateur et le médecin généraliste qui preste la garde.

S'il y a, à l'extérieur du cercle de médecins généralistes, un « dispatching » par des tiers des appels destinés au service de garde de médecins généralistes - quel qu'en soit le modèle ou projet - le modèle organisationnel en vigueur change dans une importante mesure, les charges et responsabilités se répartissent autrement et le contexte juridique devient (encore) beaucoup plus complexe.

Les propositions de loi et/ou projets précités sont porteurs de changements fondamentaux pour le service de garde des médecins généralistes. Aussi, étant donné les angles d'approche et les interactions de diverses législations, le Conseil national estime que ces propositions et projets doivent être étudiés au préalable avec la plus grande attention et avec prudence du point de vue légal et déontologique.

cc. Madame D. Tilmans - Sénatrice

Continuité des soins06/03/2010 Code de document: a129022
Collaboration du service médical d’un centre d’accueil géré par FEDASIL avec les services de garde de population

Sollicité par un cercle de Médecins généralistes, un conseil provincial demande si l’avis relatif à l’intervention du Médecin de garde au centre 127 bis, du 4 octobre 2008 est également d’application pour les centres FEDASIL – agence fédérale pour l’accueil des demandeurs d’asile.

Avis du Conseil national :

En sa séance du 6 mars 2010, le Conseil national de l'Ordre des médecins a examiné votre lettre du 23 juin 2009 demandant si son avis du 4 octobre 2008 relatif au fonctionnement du service médical d'un centre de rapatriement s'applique aux centres FEDASIL.

En leurs principes, l'avis du Conseil national du 21 novembre 2009 relatif au service de garde des prisons (BCN n° 128) et celui du 4 octobre 2008 relatif au fonctionnement du service médical d'un centre de rapatriement - continuité des soins (BCN n° 122) sont applicables aux centres d'accueil gérés par FEDASIL.

La loi du 12 janvier 2007 sur l'accueil des demandeurs d'asile et de certaines autres catégories d'étrangers prévoit qu'une aide matérielle est octroyée au demandeur d'asile pendant toute sa procédure d'asile. L'aide matérielle comprend l'accompagnement médical, défini aux articles 23 à 29, dont a besoin le bénéficiaire de l'accueil pour mener une vie conforme à la dignité humaine.

FEDASIL est compétente pour assurer cet accompagnement médical. L'article 25 énonce que chaque structure d'accueil garantit au bénéficiaire de l'accueil l'accès effectif à un accompagnement médical.

L'organisation de cet accompagnement doit garantir la continuité des soins.

A cette fin, FEDASIL peut passer des accords, notamment avec les cercles locaux de généralistes moyennant approbation suivant les règles de procédure du règlement interne des gardes. Ces accords doivent clairement préciser les modalités de la prestation de service et, en tout cas, garantir que la dispensation régulière des soins de santé dans le cadre du service de garde de population ne pourra être compromise.

Les projets d'accords doivent être soumis à l'approbation du conseil provincial compétent.

Le résidant du centre d'accueil conserve le libre choix du médecin et peut donc demander de manière autonome qu'il soit fait appel à un médecin généraliste externe et, à défaut de ce dernier, un médecin généraliste par l'intermédiaire de la garde.

Médecin généraliste19/12/2009 Code de document: a128005
Cercles de médecins généralistes – Service de garde

Demande d'avis sur des points de discussion d'une réunion d'information (31/01/2009) avec des représentants des cercles de médecins généralistes.

Avis du Conseil national :

En séance du 19 décembre 2009, le Conseil national de l'Ordre des médecins a examiné les points de discussion suivants.

1° L'Ordre peut-il, en accord avec la commission médicale provinciale, imposer/proposer une limite d'âge en rapport avec la dispense de participation au service de garde, et cet avis peut-il être ensuite soumis par le Conseil national au ministre compétent et à l'INAMI ?

Ou est-il préférable que le Conseil national adhère au principe que, aussi longtemps qu'un médecin généraliste est à même d'exercer, il est censé être aussi à même de participer au service de garde, le cas échéant en rapport avec ses possibilités ?

Le Conseil national doute que ce soit bien une mission déontologique d'imposer des critères d'âge déterminés, en particulier une limite d'âge obligatoire et d'application générale pour une dispense de participation au service de garde.

L'organisation de la garde de population est confiée par la loi aux cercles de médecins généralistes (arrêté royal du 8 juillet 2002 fixant les missions confiées aux cercles de médecins généralistes).

Le Code de déontologie médicale dispose à l'article 117 qu' « il est du devoir de chaque médecin inscrit au Tableau de l'Ordre de participer à ces services de garde, compte tenu de sa compétence, et le cas échéant, d'intervenir dans les frais de fonctionnement de ceux-ci. Des exceptions peuvent être admises pour des raisons d'âge, de santé ou d'autres motifs justifiés. L'appréciation des manquements aux règles déontologiques relatives aux services de garde relève de la compétence des conseils provinciaux ».

La définition de critères/limites d'âge pour être dispensé de participer au service de garde relève de la responsabilité locale de chaque cercle organisateur. Celui-ci peut prendre des décisions en ayant connaissance de l'aire géographique, des modalités de fonctionnement (par exemple, des postes de garde de médecine générale) et surtout en tenant compte du quota de participants nécessaire pour garantir une dispensation normale et régulière des soins de santé pendant le service de garde.

Le Conseil national a également discuté de cette problématique avec le Centre pour l'égalité des chances et la lutte contre le racisme, sous l'angle des implications possibles, de la loi du 10 mai 2007 tendant à lutter contre certaines formes de discrimination, dans le cadre d'une dispense de service de garde pour les médecins généralistes ayant atteint une limite d'âge.

Au sujet de l'accomplissement des services de garde, le Centre pour l'égalité des chances et la lutte contre le racisme renvoie à l'article 12, § 1er, de la loi anti-discrimination permettant à titre exceptionnel de prévoir des conditions et circonstances de travail spéciales pour les travailleurs jeunes ou plus âgés si elles sont objectivement et raisonnablement justifiées.

Cependant, dans le contexte de la profession de médecin généraliste et de la charge de travail des services de garde, le Centre déconseille d'accorder des dispenses uniquement parce qu'une limite d'âge déterminée est atteinte. Une approche généralisée et stéréotypée ne fournit en principe pas une justification légitime d'une différence de traitement et cela a été confirmé à maintes reprises par la jurisprudence.

Le Conseil national estime qu'il est de la responsabilité du cercle de médecins généralistes de prendre ces décisions lors de son assemblée générale, en concertation collégiale avec les confrères qui effectuent les gardes, et moyennant motivation des critères de dispense et des dispenses individuelles elles-mêmes.

Le Conseil national renvoie aussi à son avis du 21 avril 2007 « Garde de médecine générale », BCN n° 116, p. 9 (en annexe).

Le Conseil national souligne la nécessité de prévoir, le cas échéant, une majorité qualifiée pour la prise de décision en assemblée générale, en fonction de classes d'âge parmi les membres du cercle de médecins généralistes ayant voix délibérative, et ce afin de ne pas miner l'équilibre démocratique dans la prise de décision, en particulier lors de la définition de critères et dispenses de participation au service de garde sur la base de l'âge.

Lors de manquements dans l'organisation, les conseils provinciaux jouent un rôle dans le règlement des problèmes déontologiques entre les parties (cercle de médecins généralistes organisateur et médecins généralistes effectuant les gardes) et les commissions médicales provinciales.

2. La discussion a mis en évidence que les médecins sont peu associés, ne le sont pas ou trop tard, aux discussions avec les autorités lors de la préparation de réglementations futures en matière de services de garde. Le Conseil national peut-il prendre des initiatives vis-à-vis des autorités pour remédier à cela ?

Les cercles de médecins généralistes sont associés aux discussions avec les autorités par l'entremise du Conseil fédéral des cercles de médecins généralistes (arrêté royal du 16 février 2006 instituant un Conseil fédéral des Cercles de médecins généralistes), lequel donne des avis au ministre concerné.

Les cercles de médecins généralistes peuvent s'adresser en premier lieu à ce Conseil fédéral pour tout problème, en particulier relativement au service de garde.

En outre, le Conseil national peut prendre lui-même des initiatives, et répondre aux questions émanant du groupe professionnel ou des autorités (cf. avis du 21 avril 2007, BCN n° 116, p. 9).

3. La problématique du médecin, inscrit au Tableau de Flandre orientale, qui effectue des services de garde dans une commune limitrophe du Brabant flamand et la responsabilité de la commission médicale provinciale.

Sur le plan déontologique, le médecin généraliste relève du conseil provincial où il est inscrit, également pour les activités médicales à l'extérieur du cadre provincial.

La prémisse qu'un « médecin n'ayant pas de pratique dans le secteur de la garde » peut sans plus participer au service de garde (s'il dispose d'un cabinet bien équipé et paie la cotisation) est une affirmation inexacte. C'est par le cercle organisateur que seront définis les critères de participation ou non, et ce par la voie du règlement d'ordre intérieur du service de garde.

En outre, chaque médecin généraliste participant doit adhérer à ce règlement interne.

Le terme « médecin » est beaucoup trop sommaire, au regard de la qualification professionnelle nécessaire de médecin généraliste agréé ou de médecin généraliste en formation, pour être en mesure de ou être autorisé à participer au service de garde des médecins généralistes.

L'arrêté royal précité du 8 juillet 2002 prévoit uniquement une obligation d'acceptation en qualité de membre pour tout médecin généraliste qui exerce au sein de la zone de médecins généralistes du cercle de médecins généralistes. Il n'est en effet pas obligatoire d'appartenir au cercle pour participer au service de garde, mais cela ne veut pas dire inversement que tout médecin généraliste - également le médecin exerçant (loin) hors de cette zone de médecins généralistes - peut sans plus revendiquer une participation à ce service de garde, par exemple, seulement et uniquement sur la base de la cotisation payée.

Une participation à deux ou plusieurs services de garde n'est pas évidente. En ce cas aussi, le règlement d'ordre intérieur du (des) service(s) de garde sera décisif. Les services de garde peuvent en effet appartenir à différentes unités du service de garde d'un ou plusieurs cercles, ce qui déterminera la relation juridique.

La question de la compétence de la commission médicale provinciale dans le cadre d'activités au-delà des limites de la province peut leur être posée.

4. Il semble qu'il sera peut-être proposé dans Impulseo III que l'assistant du médecin dans sa pratique de médecin généraliste puisse être une infirmier (ère). Sur le plan déontologique, il faut examiner si seul peut faire appel à cet(te) infirmier (ère) le médecin dans le cabinet duquel l'infirmier (ère) travaille ou si les autres médecins de l'accord de collaboration peuvent utiliser ses services et, de même, en cas d'extension, pour les autres médecins de la région.

Pour un examen plus approfondi de ce problème, il est préférable d'attendre l'intervention du législateur.

Veuillez agréer, Monsieur le Président, l'expression de mes sentiments distingués.


Annexe : avis du 21 avril 2007

Continuité des soins21/11/2009 Code de document: a128002
Service de garde des prisons

Le président d'un cercle de médecins généralistes souhaite savoir si, en raison d'une pénurie de médecins des prisons, la direction d'une prison peut faire appel au service de garde régulier pour prêter main-forte au service de garde des prisons.

Avis du Conseil national :

En ses séances des 25 juillet et 21 novembre 2009, le Conseil national a examiné votre lettre du 14 avril 2009 demandant si, pour leur service de garde des week-ends et jours fériés, les prisons peuvent faire appel au service de garde régulier de votre région, et ce en raison de la pénurie de médecins des prisons.

Le Conseil national voit une similitude avec la situation relative à l'organisation de la garde dans les centres de rapatriement pour étrangers.
Dans son avis du 4 octobre 2008 à ce sujet, le Conseil national a rappelé l'obligation légale des pouvoirs publics de mettre à disposition tous les moyens nécessaires pour assurer une continuité des soins de qualité.

En ce qui concerne l'administration pénitentiaire, une même obligation s'impose aux pouvoirs publics, en l'occurrence au SPF Justice, en vertu des articles 87 à 98 de la loi de principes du 12 janvier 2005 concernant l'administration pénitentiaire ainsi que le statut juridique des détenus.

Dans l'attente d'une optimalisation la plus rapide possible des soins de santé dans le cadre du SPF Justice, le Conseil national peut provisoirement admettre, dans l'intérêt légitime des patients détenus, que des médecins externes assurent aussi des services de garde qui, en principe, doivent être assurés par des médecins des prisons.

A cette fin, les cercles locaux de garde peuvent, moyennant approbation suivant les règles de procédure de leur règlement interne, passer des accords avec la direction d'une prison.

A défaut d'un tel accord collectif, les médecins peuvent, à titre individuel, conclure un accord avec la direction d'une prison.

Ces accords doivent clairement préciser les modalités de la prestation de services et, en tout cas, garantir que la dispensation régulière des soins de santé dans le cadre du service de garde de population ne pourra être compromise par des circonstances propres à la prestation de services dans les prisons.

Ces projets d'accords doivent être soumis à l'approbation du conseil provincial compétent.

Urgences05/09/2009 Code de document: a127004
Garde d’urgences pédiatriques

En sa séance du 5 septembre 2009, le Conseil national de l'Ordre des médecins a examiné le courrier émanant d'un médecin anesthésiste réanimateur responsable d'une unité de soins intensifs prenant en charge essentiellement des patients adultes. L'institution se propose de développer une unité de pédiatrie. Des lors, l'unité de soins intensifs précitée deviendrait le premier chaînon de la procédure d'appel en cas d'urgence vitale en néonatologie et en pédiatrie.

Le médecin souligne que, même si durant sa formation l'anesthésiste réanimateur est en contact avec des enfants, et plus rarement des nouveau-nés, cela ne garantit pas une formation à part entière en médecine d'urgence intensive en pédiatrie et moins encore en néonatologie.

Le médecin pose la question de sa responsabilité et de l'attitude à avoir vis-à-vis de la direction de l'institution.

Le Conseil national rappelle et renvoie à un avis qu'il a émis le 18 novembre 2000 en réponse à une question analogue posée par un chirurgien orthopédiste (BCN 91, p. 7).

Le Conseil national est d'avis que le praticien qui accepte d'assurer une fonction doit disposer d'une compétence actualisée vis-à-vis des patients et des pathologies qu'il sera amené à rencontrer. Toute prestation de sa part engage sa responsabilité.

Si un médecin invité à prester pareille fonction estime n'être pas dans les conditions de compétence optimale, il doit pouvoir solliciter une dérogation auprès du médecin-chef, des médecins chefs de service concernés et du conseil médical. En cas de litige, le conseil provincial peut intervenir et proposer une conciliation.

Le Conseil national considère par ailleurs que si une institution souhaite développer une nouvelle fonction, il lui incombe de recruter le personnel médical et paramédical compétent nécessaire pour garantir les différents aspects de la fonction pédiatrique dans les meilleures conditions de qualité et de sécurité, et de créer l'infrastructure nécessaire

Médecin généraliste06/12/2008 Code de document: a123013
Garde de médecine générale : participation obligatoire - Déplacement du médecin de garde - Triage téléphonique

Le « Syndicaat van Vlaamse Huisartsen » (SVH) soumet quelques questions au Conseil national relatives au service de garde des médecins généralistes, notamment à propos du point 7 de l’avis du Conseil national du 21 avril 2007 (Bulletin du Conseil national, n°116, p.9).

Avis du Conseil national :

En sa séance du 6 décembre 2008, le Conseil national de l’Ordre des médecins a discuté des questions que vous lui avez soumises.

Question 1 : Participation obligatoire au service de garde : cadre légal et déontologique.

Le service de garde de population est organisé suivant l’article 9, § 1er, de l’arrêté royal n° 78 du 10 novembre 1967 relatif à l’exercice des professions des soins de santé,. Cet article fait référence à « la dispensation régulière et normale des soins de santé » et expressément aussi « à domicile » : le service de garde de population a donc pour objectif principal les soins médicaux normaux tels que dispensés couramment par les médecins généralistes, en ce y compris les visites à domicile.

Cela n’est pas étonnant puisque, conformément à l’article 8 de l’arrêté royal n° 78, la continuité des soins pour les médecins généralistes est généralement assurée par d’autres médecins généralistes ayant la qualification requise de « médecin généraliste agréé » (cf. aussi les critères d’agrément) dans le cadre des services de garde organisés(1).

Le patient a droit - durant le service de garde et dans le cadre de la continuité - à des soins analogues/équivalents, comme si les soins étaient dispensés par son propre médecin généraliste.

Les groupements de médecins généralistes constitués à cet effet sont les cercles de médecins généralistes, dont le statut légal est fixé par l’arrêté royal du 8 juillet 2008 fixant les missions confiées aux cercles de médecins généralistes. Il appartient au groupe professionnel d’organiser ces services de garde, en toute autonomie mais aussi en toute responsabilité.

Dans le cas de carences dans le service de garde de population, la CMP (commission médicale provinciale, arrêté royal n° 78 précité, article 9, § 3) prendra les mesures nécessaires et, le cas échéant, fera appel au cercle de médecins généralistes local pour compléter le service de garde. Si l’insuffisance persiste, le CPM peut même obliger des médecins à participer à la garde et cette obligation est sanctionnée (arrêté royal n° 78 précité, article 38, § 1, 3°).

L’arrêté ministériel du 21 février 2006 fixant les critères d'agrément des médecins généralistes définit clairement les conditions pour conserver cet agrément (article 10, 1°, 4° et 5°), parmi lesquelles figure la participation au service de garde.

Les règles déontologiques concernant la participation au service de garde figurent au chapitre III du Code de déontologie médicale « Continuité des soins, services de garde et aide médicale urgente », en particulier à l’article 117.

D’une manière générale, les dispositions déontologiques correspondent aux obligations légales en vigueur de participation au service de garde.

Question 2. Déplacement du médecin généraliste de garde

Comme indiqué à l’article 9 de l’arrêté royal n° 78 précité, le service de garde de population a pour finalité la dispensation régulière et normale des soins de santé, également à domicile. Cette dispensation n’a pas vraiment trait aux soins de santé urgents mais à des soins courants, journaliers de la pratique de médecin généraliste.

Le groupe professionnel est conscient du fait qu’un certain nombre de patients pourraient sans doute (aussi) venir à la consultation au lieu que le médecin généraliste ne se rende sur place, pour une visite à domicile, dans des conditions parfois difficiles. La visibilité publique des postes fixes de médecine générale - dans les agglomérations urbaines - y a déjà contribué, ainsi que la sensibilisation de la population (dans la pratique journalière de la médecine générale aussi) afin de se rendre toujours de préférence à la consultation, et de réserver la visite à domicile pour des circonstances exceptionnelles.

Cette position correspond à l’avis du Conseil national du 21 avril 2007 « Garde de médecine générale » (point 7) (BCN 116, p.9) mettant l’accent sur la qualité de la consultation par rapport à la visite à domicile, cette dernière étant de préférence réservée au patient « qui ne peut se déplacer ».

Le point épineux est le fait pour le patient de « ne pas pouvoir se déplacer » : il n’y a pas de transport médical organisé pour le service de garde de population des médecins généralistes, contrairement à la médecine intramurale et aux hospitalisations d’urgence pour lesquelles le concept de services ambulanciers agréés a été développé.

En attendant une éventuelle réglementation ambulancière analogue, même dans ce cas encore sous extrême réserve, le médecin généraliste doit donc se déplacer « à domicile », toujours à la demande expresse du patient ou de son entourage.

Le phénomène de « l’opportunité médicale » ou de la pertinence de la demande d’une visite à domicile ne concerne pas exclusivement le service de garde. Chaque médecin généraliste y est confronté aussi quasi quotidiennement dans l’exercice normal de sa pratique durant la semaine. La différence majeure est toujours que le médecin généraliste peut évaluer et juger, mieux et plus correctement, la demande pour ses propres patients.

Le demande de soins médicaux provient du patient - ou de son entourage proche - et le médecin généraliste doit toujours y donner une « suite utile », en particulier durant le service de garde pour des patients qu’il ne connaît pas : non par téléphone ou à distance, sans voir le patient, mais au contraire en procédant à un examen approfondi, personnel et physique afin d’éviter des plaintes du chef d’abstention coupable pour avoir ignoré une éventuelle pathologie grave.

Il ne fait aucun doute que la « visite à domicile » constitue - outre la « consultation » - un élément essentiel et à part entière de l’activité médicale normale du médecin généraliste, qui se différencie en cela de la médecine spécialisée.
La nomenclature des soins de santé (Inami) est par conséquent claire : on entend par visite au domicile du bénéficiaire, la dispensation demandée par le bénéficiaire à son lieu de résidence habituelle ou temporaire (…).

On ne peut donc contester qu’il s’agit d’un droit fondamental de chaque patient de demander, dans notre système de soins de santé, la visite à domicile d’un médecin généraliste, quel que soit le motif sous-jacent ou la pertinence médicale de cette demande.
Cette appréciation médicale qualifiée ne peut d’ailleurs être donnée qu’après l’examen médical du patient concerné, et encore, par le médecin généraliste lui-même.

Le fait de ne pas donner suite à cette demande de soins, et certainement pendant le service de garde, expose le médecin généraliste à des retombées juridiques et déontologiques graves. Refuser la dispensation de soins - telle que définie par la loi (arrêté royal n° 78 précité, article 9) - porte gravement préjudice à l’image de la profession de médecin généraliste et ne satisfait pas à la mission des services de garde de population organisés par les cercles de médecins généralistes.

Question 3. Triage au téléphone

Le triage au téléphone, même par un personnel non médical bien formé, n’est une solution ni légale ni déontologique au « rejet au sens strict » par un tiers de la demande de soins d’un patient réclamant expressément une visite à domicile pendant le service de garde, au motif que le patient serait censé pouvoir se déplacer lui-même.

Comme le dit le Syndicaat van Vlaamse Huisartsen lui-même, un triage au téléphone, de surcroît par un non médecin, reste une « évaluation » de la situation du patient, mais sous la responsabilité finale « d’un médecin », en l’occurrence le médecin généraliste de garde.

***

En conclusion, le Conseil national estime que tous ses avis en matière de service de garde restent pertinents.

En particulier, l’obligation déontologique de participer au service de garde et l’obligation d’effectuer pendant le service de garde toutes les visites à domicile demandées, c’est-à-dire à la demande expresse du patient ou de son entourage proche, restent entières.

Le triage au téléphone, comme la proposition de faire purement et simplement rejeter des demandes, en l’occurrence la visite à domicile, par un tiers non médecin, est peu pertinent et compromet la responsabilité finale du médecin généraliste de garde.

(1) Arrêté ministériel du 21 février 2006 fixant les critères d’agrément des médecins généralistes.

Médecin généraliste06/12/2008 Code de document: a123015
Garde de médecine générale - Modification de l’avis du 4 octobre 2008

A la demande de deux médecins, le Conseil national a décidé d’adapter l’avis qu’il a émis le 4 octobre 2008 concernant les gardes de médecine générale.

Avis du Conseil national :

Modification de l’avis du 4 octobre 2008 concernant les gardes en médecine générale :

En sa séance du 4 octobre 2008, le Conseil national de l’Ordre des médecins a examiné votre courrier du 23 novembre 2007 concernant les conclusions de travail d’une Commission d’information concernant les gardes en médecine générale.

Le Conseil national émet les commentaires suivants.

1. Définition de la continuité des soins et du service de garde en médecine générale.

Apparemment, il y a une confusion d’interprétation entre la « participation » effective au service de garde et les moyens de « communication » (point 3).

Le médecin généraliste de garde ne doit pas seulement être à tout moment « joignable » (quel que soit le moyen de communication), il doit surtout donner une suite adéquate à la demande de soins pendant le service de garde : une distinction nette doit être opérée entre la « consultation téléphonique » citée et « l’exécution concrète de la mission de garde » lors de chaque demande de soins.

On ne peut qu’émettre des réserves sérieuses – légales et déontologiques - quant à la « consultation téléphonique » telle que présentée, comme alternative à part entière à une visite effective, surtout dans le cadre du service de garde où le généraliste de garde ne connaît (généralement) pas le « patient ».

2. Notion de compétences en médecine générale.

Les qualifications des « médecins de médecine générale » et des «médecins généralistes agréés » sont régies par les prescriptions de l’INAMI en la matière (nouvelles dispositions 1er juillet 2006) pour les numéros (000>009) :
http://www.inami.fgov.be/care/fr/infos/infobox/pdf/part2.pdf.

Les médecins « de médecine générale » qui sont inscrits à l’Ordre après le 31 décembre 1994 et avant le 1er janvier 2005 ont un numéro INAMI se terminant en 009 : ils ne peuvent compter que des « consultations ».

La participation au service de garde constitue un critère d’agrément des médecins généralistes (arrêté ministériel du 21 février 2006 fixant les critères d'agrément des médecins généralistes). La participation au service de garde de médecine générale requiert que le médecin généraliste soit agréé ou qu’il soit candidat généraliste en formation suivant les conditions de l’article 8 de l’arrêté ministériel du 21 février 2006 fixant les critères d'agrément des médecins généralistes.

3. Utilisation des techniques de communication

Les moyens de communication proposés sont pertinents. Il faut toutefois émettre des réserves en ce qui concerne la « consultation téléphonique » par l’intermédiaire d’une tierce personne non-médecin généraliste.

4. Gestion de l’appel

Le traitement personnel de la demande de soins par le généraliste de garde a certainement la préférence. Il est essentiel de fixer des accords clairs avec le patient à propos de l’exécution pratique de la demande de soins : le patient vient-il en consultation ou est-ce le médecin qui fait une visite ?

Conclusion :

Les modalités de fonctionnement pratiques doivent être reprises dans le règlement d’ordre intérieur du service de garde, accompagnées des prémisses déontologiques nécessaires.

Certificat06/12/2008 Code de document: a123012
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Depuis le 1er juillet 2022, l’Ordre des médecins est compétent pour accorder les dispenses de participer à la permanence (art. 26, Loi qualité). L’organisation de la permanence reste une compétence des cercles de médecins généralistes (voir commentaire art. 13 CDM).

Participation au service de garde - Incapacité pour raisons médicales

Dans le cadre des règlements d’ordre intérieur des services de garde de médecins généralistes devant lui être soumis pour approbation, un conseil provincial a analysé les différentes raisons pour lesquelles certains médecins généralistes estiment ne pas ou ne plus être en mesure de participer au service de garde.
Le cas est soumis au Conseil national d’un médecin qui, après avoir essuyé plusieurs refus à sa demande d’exemption pour raisons personnelles, a remis au responsable de l’organisation de la garde un certificat médical d’incapacité pour raisons médicales.

Avis du Conseil national :

Le règlement d’ordre intérieur (ROI) du service de garde est le document essentiel. Il a la valeur d’un accord contractuel entre parties - le cercle de médecins généralistes organisateur et le médecin généraliste exécutant - dont les droits et les devoirs doivent être exactement définis.

Le ROI doit décrire la procédure pour établir le rôle de garde. D’abord la liste des médecins généralistes participants. Cela comporte également les modalités de dispense légitime avec la description des critères admissibles et admis, fixés annuellement par l’assemblée générale du cercle de médecins généralistes en tenant compte des besoins du service de garde et du quorum nécessaire pour pouvoir accomplir cette mission.

Lorsqu’il souhaite une dispense, le médecin généraliste concerné doit en adresser la demande motivée au conseil d’administration du cercle de médecins généralistes.

La forme et le contenu de cette motivation - en l’occurrence la maladie ou des raisons médicales - ne sont généralement pas précisés dans le ROI.

Un certificat médical de maladie établi par un autre médecin traitant est-il absolument nécessaire - et dans quelle mesure ne s’agit-il pas parfois de certificats de complaisance - ou dans certains cas, une déclaration personnelle du médecin concerné peut-elle suffire ?

  • S’il s’agit de maladies aiguës, la problématique des dispenses n’entre pas en jeu. On peut admettre qu’il suffit que le médecin généraliste concerné le signale à temps au responsable du service de garde, qui s’occupe alors de son remplacement dans le rôle de garde. Le cercle de médecins généralistes peut dans ce cas décider que le collègue concerné devra, après sa guérison, rattraper ses tours de garde prévus.

  • Pour des maladies chroniques, la « dispense » joue effectivement un rôle lors de la composition du rôle de garde.

Des pathologies prolongées ou mortelles rendant complètement impossible l’exercice de la médecine au jour le jour, semblent, - par extension au service de garde - une cause de justification évidente. On pourrait ici demander au médecin de remettre un certificat médical, en particulier avec mention de la durée de la maladie, afin de pouvoir en tenir compte pour le rôle de garde.

Certains médecins disent que, pour cause de maladie ou pour raisons de santé , ils ont une incapacité partielle et ne peuvent plus participer spécifiquement aux services de garde, mais qu’ils peuvent néanmoins encore exercer normalement au jour le jour. Une position discutable parce que, d’une part, on invoque une impossibilité sélective d’exercer la médecine, uniquement pour les weekends et les jours fériés, et, d’autre part, parce que la participation au service de garde de population fait partie intégrante des conditions d’agrément comme médecin généraliste, et du maintien de cet agrément (arrêté ministériel du 21 février 2006 fixant les critères d'agrément des médecins généralistes, art. 10, 4°).

Reste la question fondamentale de la valeur juridique d’un tel « certificat de maladie » dans la relation « contractuelle » décrite (cf. le ROI) entre le médecin généraliste de garde et le cercle de médecins généralistes organisateur. Ce certificat médical est utilisé dans ce contexte spécifiquement comme raison de ne pas devoir travailler - en l’occurrence, l’impossibilité complète/partielle d’exercer la médecine - pendant ce service de garde.

Il est clair que cette problématique est très délicate, et non le moins pour des raisons de secret professionnel ou de vie privée : que doit/peut présenter le médecin concerné au cercle de médecins généralistes comme preuve de cette motivation « maladie et/ou raisons médicales » et quelles sont les possibilités de contrôle a posteriori, qui peut faire ce contrôle, entre autres dans le cadre des compétences de la CMP et du Conseil provincial ?

Accomplir le service de garde est une obligation légale passible d’une sanction pénale aux termes de l’arrêté royal n° 78, art. 38, § 1, 3°, et une obligation déontologique, pour lesquelles interviennent respectivement la CMP et le Conseil provincial.

En particulier, la procédure pour l’arbitrage des contestations/différends doit être prévue dans le ROI : les compétences des instances de contrôle - Conseil provincial et CMP - doivent être définies de manière à ce que les parties litigantes, médecin généraliste et cercle de médecins généralistes, puissent recourir à une procédure cohérente et légitime, tenant compte des compétences respectives de toutes les parties concernées.

La délimitation des compétences du Conseil provincial et de la CMP relève d’une concertation bilatérale qui aboutira aux accords nécessaires à propos de la répartition des fonctions.

Il faut en particulier accorder de l’importance à la possibilité d’arbitrage, où les parties se rallient volontairement au règlement définitif d’une contestation ou d’un différend par cette procédure.

Dans le cadre de la problématique de la dispense controversée de participation pour raisons médicales, cette procédure d’arbitrage peut offrir une solution au caractère délicat de la possibilité de contrôle de ces raisons médicales, tout en respectant le secret professionnel. En effet, par cet arbitrage, les arbitres ont la possibilité de désigner des experts, en l’occurrence des médecins, qui peuvent émettre un avis en toute sérénité.