Enquête sur l’aptitude physique d’un assuré – rôle du médecin mandaté par l’entreprise d’assurance.
Le Conseil national de l’Ordre des médecins a examiné le rôle du médecin-contrôle mandaté par une entreprise d’assurance en cas de soupçon que l'état de santé avancé par l'assuré ne correspond pas à la réalité.
1. La loi du 18 mai 2024 réglementant la recherche privée interdit à l’enquêteur de recueillir des données sur la santé de l’intéressé ou de les faire connaître à son mandant (art. 57).
Elle prévoit cependant une exception à cette interdiction lorsque le mandant de l’enquêteur est une compagnie d’assurance qui soupçonne que l'état de santé avancé par l'assuré ne correspond pas à la réalité. Cette exception est de stricte interprétation et est soumise à des conditions impératives (art. 60 de la loi du 18 mai 2024).
Parmi celles-ci, l’exigence d’une demande écrite d'un médecin-contrôle (ainsi désigné par la loi du 18 mai 2024) désigné par le mandant et qui a examiné l'intéressé ou qui a convoqué l'intéressé à trois reprises pour un examen sans que l'intéressé y ait donné suite (art. 60, 3°, de la loi du 18 mai 2024).
2. Le Code de déontologie médicale énonce que le médecin chargé d’une mission d’expert, de médecin conseil ou de médecin contrôleur l’exécute conformément aux règles légales et aux principes déontologiques, dans le respect du patient et des limites propres à sa mission et à sa fonction (art. 43).
Le rôle du médecin mandaté par une entreprise d’assurance est d’évaluer l’aptitude physique de l’assuré, et non de lutter contre la fraude.
Il doit procéder avec objectivité, rigueur et se limiter à des considérations médicales.
S’il suspecte que l'état de santé avancé par l'intéressé ne correspond pas à la réalité, il exprime d'une façon objective ses constatations médicales dans son rapport d'expertise qui est accessible à toutes les parties et soumis à la contradiction.
Le médecin doit être conscient des conséquences de ses affirmations et donc agir avec prudence et circonspection.
3. Sur base du rapport du médecin-contrôle, il appartient au gestionnaire du dossier au sein de la compagnie d’assurance d’apprécier l’opportunité de recourir aux services d’un détective privé.
Celui-ci peut uniquement être chargé d’enquêter sur les activités et les comportements qui peuvent étayer le soupçon de simulation. L’enquête n’implique pas le recueil d’informations directes (de quelle maladie ou de quelle lésion souffre l’intéressé), mais uniquement des informations indirectes (quelles activités sont accomplies par l’intéressé) (Doc Parl., La Chambre, 55-3935/001, page 49).
Pour que cette mission soit légale, il faut que les informations recherchées soient nécessaires soit pour la gestion des litiges de la compagnie d'assurance, soit pour respecter une obligation légale.
4. La loi exige en outre que le médecin-contrôle désigné par l’entreprise d’assurance, et qui a examiné l'intéressé ou qui a convoqué l'intéressé à trois reprises pour un examen sans que l'intéressé y ait donné suite, cautionne la mission, sous forme d’une demande écrite.
Le médecin-contrôle prend cette décision qui engage sa responsabilité professionnelle en toute indépendance. Il est libre de refuser s’il constate que toutes les conditions énumérées à l’article 60 de la loi du 18 mai 2024 ne sont pas remplies. Tel sera notamment le cas si le médecin-contrôle n’a pas de soupçon que l'état de santé avancé par l'intéressé ne correspond pas à la réalité, s’il estime que l’objet de la mission dépasse ce qui est légalement admis ou que l’enquête n’apportera pas d’éléments utiles pour l’exercice de sa mission.
Le soupçon doit être justifié par un faisceau d’éléments tels que l’absence d’objectivation des plaintes, l’inconsistance de la symptomatologie, les contradictions, etc.
Le médecin ne peut donner aucun renseignement couvert par le secret médical au détective.
Les résultats de la recherche privée sont communiqués par l’entreprise d’assurance exclusivement au médecin-contrôle.
Le présent avis annule et remplace l’avis du 18 novembre 2017, Enquête sur l’aptitude physique d’un assuré dans le cadre d’une expertise médicale-détective privé, a159006.