Consultation du dossier médical par un médecin légiste
Avis du Conseil national :
En sa séance du 24 mars 2012, le Conseil national de l'Ordre des médecins a examiné votre courrier du 19 octobre 2011 par lequel vous sollicitez des explications complémentaires concernant l'avis du Conseil national du 28 mai 2011 intitulé « Consultation du dossier médical par un médecin légiste », BCN n° 134.
Plus précisément, vous l'interrogez concernant la modification éventuelle de l'article 62b du Code de déontologie médicale, en ce qu'il prévoit l'accord du patient, alors que tel n'est pas toujours le cas en matière pénale.
1. Dans le cadre d'une enquête pénale, le parquet ou le juge d'instruction peuvent, selon les modalités définies par la loi, faire usage de la contrainte pour saisir un dossier médical. Dans ce cas, le consentement du patient n'est pas requis.
Le juge d'instruction a le pouvoir de faire saisir un dossier médical ou de requérir pour le consulter un médecin expert, sans l'accord du patient.
Le procureur du Roi ne dispose de ce pouvoir qu'en cas de flagrant délit. En dehors de ce cas, il ne peut requérir un médecin expert pour consulter un dossier médical sans avoir préalablement obtenu l'accord du patient concerné ou l'accord de son représentant ou de son mandataire.
Il s'ensuit que c'est l'autorité judiciaire qui décide de saisir un dossier ou d'ordonner la consultation de données médicales, et non l'expert désigné.
2. Dans le cadre d'une procédure civile, le juge du fond peut décider qu'un médecin expert prenne connaissance du dossier médical du patient.
Plusieurs situations peuvent se présenter :
o le patient a introduit une procédure en justice pour obtenir réparation d'un dommage. La loi lui impose de faire la preuve de la faute, du dommage et du lien de causalité entre eux. S'il refuse l'accès du médecin légiste à son dossier médical, il risque de se voir reprocher de ne pas rapporter cette preuve et de voir rejetée sa demande d'indemnisation.
o le patient a introduit une procédure en justice pour obtenir réparation d'un dommage qu'il impute à une faute de son médecin, dont il met en cause la responsabilité. Dans ce cas, le juge du fond peut ordonner la production du dossier ou sa consultation par le médecin expert (art. 877 du Code judiciaire).
Deux situations sont envisageables :
si le patient, partie demanderesse, s'y oppose, le tribunal constatera que l'expertise ne peut avoir lieu, ce qui aura des conséquences pour la preuve de la faute ;
si le médecin, partie défenderesse, s'y oppose, il appartiendra au tribunal de vérifier si les motifs d'opposition sont ou non valables, que le médecin invoque le secret médical ou toute autre cause.
3. Dans sa rédaction actuelle, l'article 62b ne vise pas la communication de données médicales à la suite d'une contrainte judiciaire.
Cette disposition ne saurait d'ailleurs en toute hypothèse faire échec à l'application de règles légales d'ordre public (Code d'instruction criminelle).
Sur la base de cette clarification, le Conseil national estime qu'il n'est pas nécessaire d'apporter de modification à l'article 62b du Code de déontologie.