Le médecin et les tests en vente directe en général et en particulier dans le domaine de la génétique
Avis du Conseil national :
Actuellement, un nombre croissant de tests génétiques peuvent être commandés directement sur Internet par le public. Il s'agit de tests de paternité, de maternité, de « zygosité », de lien de parenté entre frère et sœur, de l'analyse du chromosome Y, de tests prénataux, de tests pharmacogénétiques et aussi de tests comparant la probabilité de nombreuses affections chez le demandeur par rapport à la probabilité générale pour la population. Depuis 2011, même une analyse totale du génome peut être obtenue par l'entremise de la Toile.
Il va sans dire qu'à défaut d'un accompagnement correct, la réalisation et les résultats de ces tests peuvent conduire à de graves problèmes juridiques, sociaux, médicaux, économiques et existentiels. On catégorise cependant facilement ces tests dans les « lifestyle-tests » et on en légitime la libre disponibilité par référence au droit à l'autodétermination : le public peut juger lui-même de l'utilité ou non d'un test.
Si certains tests nécessitent encore une prise de sang et un dispensateur de soins qualifié et habilité pour la réalisation de cet acte, le recueil d'un autre matériel d'analyse ne requiert guère une aide professionnelle. De ce fait, ces analyses peuvent échapper à pratiquement tout contrôle professionnel.
Si des médecins sont néanmoins impliqués dans ce type de demande, ils doivent se laisser guider par les principes déontologiques qui consistent à ne pas utiliser des tests sans but médico-thérapeutique et à ne pas s'immiscer dans des questions familiales. En cette matière, les médecins sont les mieux placés pour informer les patients non seulement à propos de la valeur des tests, mais également à propos, par exemple, de la complexité du consentement éclairé. Quid de données inattendues positives ou négatives ? Quelles sont les retombées sur notre système de soins de santé ? Quelles sont les conséquences de mesures préventives non fondées médicalement et scientifiquement, consécutives à des analyses génétiques non justifiées sur le plan médical ? Quid d'une information non voulue au sujet de tiers ? Une sécurité est-elle intégrée afin d'imposer ou de permettre l'inaccessibilité de ces données pour les sociétés d'assurances ou les employeurs, ainsi que le prévoit du reste la législation existante ? Quid de la vie privée ? Qu'en est-il de la problématique de l'usage de ce type de tests chez des mineurs ? Etc.
Idéalement, nous pourrions espérer que dans un avenir proche la commande de tests génétiques par Internet soit prohibée par la loi et que dès lors leur réalisation ne soit possible que dans un laboratoire spécialement agréé, sur prescription médicale. Quant à savoir si cela est réaliste dans un monde ouvert, c'est une autre question.
A tout le moins, une campagne d'information extensive paraît dès lors nécessaire politiquement et socialement afin de placer dans un cadre préventif et largement équilibré pour le grand public les tests en vente directe en général et certainement dans le domaine génétique.
Il peut être fait appel dans ce contexte aux centres agréés de génétique médicale, lesquels disposent d'une expertise et d'une expérience particulière.