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Déontologie

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Informatique07/02/2015 Code de document: a148006
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Le Conseil national prépare une actualisation de cet avis.

Médecins et médias numériques

Le Conseil national rappelle les règles générales en matière de protection de la vie privée qu'un médecin doit respecter lorsqu'il utilise les différentes applications numériques, surtout quand il s'agit de données de santé couvertes par le secret médical.

Avis du Conseil national :

Médecins et médias numériques

Actuellement, le cabinet médical n'est plus limité aux murs de la pièce où le médecin pratique la médecine. Le médecin est de plus en plus confronté à des applications électroniques qui visent à diminuer la charge administrative liée à l'exercice de la médecine telles que l'informatisation du dossier du patient, l'évolution récente dans le domaine des attestations de soins donnés, etc.

L'informatisation de la société impose au médecin de devenir actif dans le monde virtuel d'Internet, par son propre site, des forums médicaux et les médias sociaux.

Les présentes recommandations ont pour but de d'orienter les médecins dans les méandres de la digitalisation de l'exercice de la médecine.

Elles traitent notamment de :
1. la gestion de sites Internet par des médecins ;
2. l'utilisation des médias sociaux ;
3. le contact en ligne entre le médecin et le patient.

Ces recommandations ont été élaborées après consultation de règles en vigueur dans les pays voisins (Koninklijke Nederlandsche Maatschappij tot bevordering der Geneeskunst (1), British Medical Association (2) et General Medical Council (3), et pour le Conseil européen des Ordres des médecins (4) en termes de télémédecine. D'autres avis existants du Conseil national de l'Ordre des médecins, mis éventuellement à jour, ont été pris en considération.

Avant d'aborder ces thèmes, le Conseil national rappelle les règles générales en matière de protection de la vie privée qu'un médecin doit respecter lorsqu'il utilise les différentes applications numériques, surtout quand il s'agit de données de santé couvertes par le secret médical (5) :

- le traitement de données de santé ne peut se faire que dans l'intérêt du patient sans préjudice du droit au respect de la liberté de chacun de maîtriser l'information le concernant.

- les réseaux informatiques utilisés doivent être suffisamment protégés, régulièrement contrôlés sur des fuites et un accès à l'aide de l'eID doit être prévu ;
- le médecin doit utiliser un mot de passe suffisamment performant ;
- il doit utiliser un programme anti-virus adapté et toujours mis à jour ;
- il doit clôturer soigneusement le programme à la fin des tâches ;
- il ne peut travailler qu'avec des sociétés qui garantissent contractuellement la confidentialité ;
- il n'utilise, dans la mesure du possible, son ordinateur qu'à des fins strictement professionnelles.

Des informations plus détaillées au sujet du traitement de données à caractère personnel en général figurent dans le document « Mesures de référence en matière de sécurité applicables à tout traitement de données à caractère personnel » (6).

1. Médecins et sites Internet

De plus en plus de sites Internet apparaissent qui reprennent les nom et adresse, lieu de travail et parfois des informations plus spécifiques concernant des médecins (curriculum vitae, publications, photos, etc.). Si certains médecins communiquent leurs coordonnées à titre individuel, d'autres, et c'est le cas le plus fréquent actuellement pour les médecins spécialistes, le font, en revanche, au sein d'un site plus global élaboré au nom d'une association scientifique ou d'une institution de soins. Les cliniques ou hôpitaux développent également des sites qui reprennent des listes de médecins avec leur spécialisation. (7)

Beaucoup de sites Internet contiennent accessoirement des références à des sociétés commerciales (logos ou textes), qu'il s'agisse de sociétés pharmaceutiques ou d'autres, ou présentent, dans la marge, des textes et/ou des photos publicitaires.

La création d'un site Internet par un médecin, dans le cadre de son activité médicale, ne peut avoir d'autre but que d'informer le public de son activité professionnelle. Les sites Internet « de ou traitant de » médecins ne peuvent présenter de caractère commercial ou publicitaire.

Il est indiqué d'insérer une clause de non-responsabilité sur le site Internet après avoir fait connaître que les données personnelles du patient sont traitées avec précaution et respect envers le secret professionnel.

Lorsqu'un médecin constate la publication d'informations professionnelles à son sujet sur un site Internet a contrario avec les dispositions déontologiques, il doit prendre les mesures nécessaires à la suppression desdites informations.

1.1 Informations pouvant figurer sur le site Internet du médecin

Le médecin doit toujours être conscient des conséquences de la mise en ligne de certaines informations. Les informations publiées doivent être véridiques, objectives, pertinentes, vérifiables, discrètes et claires.

Compte tenu du but recherché par un médecin en créant un site, l'apport notamment des informations suivantes, destinées au public, se justifie :
● nom et prénom ;
● titres officiels légaux ;
● spécialité exercée selon les recommandations du Conseil national ;
● mentions destinées à faciliter la relation médecin-patient ;
● photo du médecin aux dimensions raisonnables ;
● renseignements relatifs à l'adresse et à l'accès au cabinet ;
● téléphone, fax, adresse e-mail ;
● horaires des consultations et visites ;
● conventionnement et tarifs ;
● instructions liées à la continuité des soins ;
● un logiciel de prise de rendez-vous est autorisé s'il assure la confidentialité du nom des patients inscrits ;
● une photographie de l'accès au cabinet. (8)

Il est conseillé à tout médecin qui mentionne son adresse e-mail de n'en faire usage qu'à des fins administratives et non pas, en principe, à des fins médicales telles que la dispensation de données ou d'avis médicaux. (cf. point 3 - Télémédecine)

1.1.1. Liens vers d'autres sites

Tout lien potentiel à d'autres sites n'est autorisé que dans la mesure où ces derniers observent également les mêmes critères. Sont autorisés les liens à des associations professionnelles ou scientifiques ainsi que ceux renvoyant à des informations validées pour les patients. (9)

1.1.2 Publication du rôle de garde

La publication du rôle de garde sur un site Internet est envisageable à condition de recueillir l'accord unanime des médecins qui participent au service de garde en question et de respecter les règles déontologiques en matière de publicité. Toutes les mesures doivent être prises pour que cette liste soit mise à jour en temps réel. (10)

1.1.3. Annonces de recrutement de patients pour une étude clinique

Même si la publication d'annonces sur des sites Internet de ou pour des médecins est normalement interdite, il n'y a pas d'objection à ce qu'un médecin investigateur procède par annonces au recrutement de participants à une étude scientifique médicale. L'annonce doit être conforme à l'éthique et à la déontologie ; elle ne peut être trompeuse ni contenir de la publicité pour le médecin investigateur, pour l'établissement de soins dans lequel les essais cliniques doivent se dérouler ou pour le responsable de cette étude. Il ne peut être fait référence au nom du promoteur comme il n'est pas davantage acceptable que le promoteur donne de la publicité à des expérimentations en cours via son site web.

Le mode de recrutement des participants doit figurer dans le protocole de l'étude biomédicale à l'attention du comité d'éthique médicale. Pour son évaluation, cette commission est censée s'appuyer sur des normes internationalement acceptées. (11)

1.1.4 Sites Internet monopolisateurs

Tout médecin est, en règle générale, libre de choisir une adresse pour son site Internet pour autant que ce choix ne constitue pas une forme de concurrence déloyale ou ne renvoie pas à une discipline ou une technique. Conformément au Code de déontologie médicale, en effet, le médecin doit faire preuve de grande discrétion lors du choix de son adresse Internet quant au lieu où il exerce son activité. Cette obligation déontologique est, en outre, dictée par l'esprit de loyauté dont il doit faire preuve envers ses confrères en vertu de l'article 19 dudit code.

1.2. Informations non opportunes sur le site Internet du médecin

Toute information qui ne respecte pas les règles déontologiques relatives à la publicité et dépasse ainsi le but de la création d'un site médical est prohibée. Tel est certainement le cas d'informations visant le rabattage de patients, la limitation de leur libre choix, ou qui portent atteinte à l'intérêt de la santé publique ou au secret professionnel.

Sur un plan déontologique, sont notamment interdits :
● toute forme de publicité trompeuse ou comparative ;
● un tarif comparatif des honoraires ;
● l'incitation à la réalisation d'investigations ou de traitements superflus ;
● les publications, les conférences et autres communications sans caractère scientifique ou qui poursuivent un but commercial ;
● la publication de témoignages de patients ;
● la communication de données couvertes par le secret médical, à moins qu'elle ne soit suffisamment sécurisée ;
● l'utilisation de « cookies » ou de tout autre outil visant à identifier ou à profiler les visiteurs d'un site Internet à leur insu. (12)

1.3 Déclaration obligatoire

Les médecins qui disposent d'un site Internet ou qui se proposent d'en créer un doivent soumettre leur projet à l'approbation du conseil provincial.

La déclaration est obligatoire pour tout site portant des informations relatives à un ou des médecins, qu'il soit exploité par les médecins en leur nom ou au nom d'un non-médecin, d'une société ou d'une institution.

Elle concerne également toute modification sensible de contenu d'un site Internet déjà déclaré.

Lors de la réception de cette déclaration, le conseil provincial examine la conformité du site avec les dispositions déontologiques, en particulier en ce qui concerne la publicité, et formule, le cas échéant, des recommandations.

Lorsque le site Internet d'un médecin ou d'un groupe est dépendant d'un fournisseur de services ou d'une autre société, les relations entre médecins et personnes ou société doivent faire l'objet d'une convention soumise à l'approbation du conseil provincial. (13)

2. Les médecins et les médias sociaux (14)

2.1 Introduction

Ces dernières années, la popularité des médias sociaux a rapidement augmenté. Des sites comme Facebook, LinkedIn et Twitter sont largement utilisés par les médecins et il y a un nombre croissant de blogs et de forums Internet spécifiquement axés sur les professions de santé.

Les médias sociaux permettent aux médecins d'être (professionnellement) présents en ligne. Cela peut favoriser la confraternité au sein du groupe professionnel. (15)

Même si les médecins devraient être libres de profiter des nombreux avantages personnels et professionnels que les médias sociaux peuvent offrir, ils doivent être conscients des éventuels risques y afférents. (16)

2.2 Garantir la confidentialité

Les médias sociaux, par des blogs et des forums, peuvent offrir un espace aux médecins pour discuter de leurs expériences dans la pratique clinique. Vu que du matériel publié sur Internet apparait souvent dans le domaine public, il est important que les médecins fassent preuve de suffisamment de prudence lorsqu'ils discutent de détails en rapport avec des cas médicaux spécifiques. Les médecins ont l'obligation légale et déontologique de garder le secret sur les données médicales des patients. Publier des informations identifiables au sujet de patients sans leur consentement sur des blogs, forums médicaux ou des réseaux sociaux constitue une violation du secret professionnel. Bien que la plupart des médecins n'aient pas l'intention de violer le secret professionnel, ils doivent être mis en garde du risque lié au partage des informations identifiables de patients qui pourraient être saisies par des tiers. Même si l'existence de pièces séparées au sujet d'un patient n'est pas de nature à faciliter l'identification de ce dernier, l'assemblage de ces pièces va, de plus, mener à cette identification et donc, à la violation du secret professionnel. (17)

2.3 Préserver les frontières dans la relation médecin-patient

2.3.1 Demande d'ajout à une liste d'amis

Il peut arriver que des médecins aient pour amis également certaines de leurs patients. En pareil cas, les médecins doivent être conscients des barrières à ne pas franchir et se montrer attentifs à un caractère « professionnel » de la relation de soins. Vu la grande accessibilité des données personnelles, le fait de nouer des relations informelles avec des patients sur des sites Internet tels que Facebook peut augmenter le risque que la limite entre vies privée et professionnelles ne s'estompe ou ne soit franchie, et ce en particulier dans les cas où il n'existait qu'une relation professionnelle entre le médecin et le patient auparavant.

Les médecins recevant des demandes d'amis d'ex-patients ou de patients actuels doivent les refuser poliment vu qu'il serait déplacé, pour eux de les accepter. (18)

2.3.2. Un profil professionnel

Certains médecins créent un profil en ligne qui se limite exclusivement à une page professionnelle ou adhèrent à un réseau social professionnel. Les patients peuvent alors effectivement devenir ami ou fan de cette page professionnelle, qui ne contient que des informations pertinentes pour la pratique professionnelle du médecin et qui satisfait aux obligations légales et déontologiques en matière de publicité. (19)

D'autres médecins se présentent, toutefois, sous la même identité, sur Twitter, en tant que personne privée et en tant que professionnel. Sans faire l'objet d'une interdiction, la démarche accroît le risque potentiel de mélange entre la communication professionnelle et celle d'ordre personnel. À dire vrai, les médecins doivent veiller à une distinction permanente entre leurs deux profils.

2.3.3. Pseudonymes

Au point de vue pénal, il est interdit de prendre une autre (fausse) identité sous laquelle l'on pourrait s'exprimer ouvertement sur les médias sociaux (art. 231 du Code pénal).
Il est cependant admis d'opérer sous un pseudonyme ou un « avatar » dans le cadre privé si l'on veut rester actif sur certains médias sociaux. L'utilisation de pseudonymes et d'avatars sert, en règle générale, à protéger sa véritable identité et permet de demeurer actif sur les médias sociaux sans, pour autant, mêler les sphères privée et professionnelle.

L'utilisation de pseudonymes et d'avatars n'est, toutefois, pas admissible dans la sphère professionnelle.

2.3.4 Informations personnelles au sujet du médecin

Pour qu'un médecin puisse continuer à faire preuve du professionnalisme requis, il doit rester, en outre, suffisamment objectif vis-à-vis de ses patients. Les médias sociaux ont pour effet d'estomper les frontières entre la vie privée et la vie professionnelle. Les médecins ne se rendent souvent pas compte que les données personnelles qu'ils veulent partager avec des amis est sont accessibles à un public beaucoup plus large et, qu'une fois mis sur Internet, il n'est plus possible de les enlever. Alors que lors de contacts personnels, les médecins peuvent gérer le partage d'informations à leur sujet avec des patients, cette information est, par contre, beaucoup plus difficile à gérer sur les médias sociaux. (20)

C'est pourquoi il est indiqué, pour un médecin, d'avoir un profil personnel aussi discret que possible sur les médias sociaux et de contrôler régulièrement la teneur de l'information personnelle et professionnelle sur sa propre page et - autant que possible - l'exactitude et la pertinence des informations publiées par d'autres à son sujet.

Il est dès lors conseillé de ne jamais publier, sur des médias sociaux, des informations (professionnelles et privées) susceptibles de suivre leur propre chemin, voire d'être retirées de leur contexte.

2.3.3. Paramètres de vie privée

Certains médias sociaux ont des paramètres de vie privée qui permettent aux utilisateurs de contrôler et de limiter qui a accès à leurs informations personnelles. Les paramètres standards de ces sites rendent souvent possible le partage de différents types de contenu en dehors du réseau personnel d'amis.
Il est important que les médecins se familiarisent avec les règles relatives à la protection de la vie privée des différentes applications des médias sociaux et adaptent les paramètres de sorte qu'ils soient sûrs que leur contenu est protégé selon leurs souhaits ainsi que leur profil privé et professionnel. (21)

Il est conseillé d'opter pour les paramètres de vie privée les plus stricts possibles.

De plus, les médecins sont tenus de contrôler de façon régulière les paramètres de vie privée utilisés afin de vérifier s'ils sont bien conformes au niveau de protection qu'ils ont choisi. (22)

Par ailleurs, ils doivent s'assurer que le média social choisi n'a pas entretemps adapté ces paramètres, faisant apparaître une incompatibilité avec les règles déontologiques, Si un médecin constate une telle incompatibilité, il doit prendre les mesures nécessaires pour adapter ces paramètres.

En cas d'impossibilité de les adapter afin de rendre l'utilisation du média social conforme aux obligations déontologiques, le médecin doit (faire) détruire son compte et son contenu.

Cependant, il n'est pas possible de masquer ainsi tous les contenus sur les médias sociaux, certains n'ayant pas de paramètres de vie privée flexibles.

Pour celui qui ne souhaite vraiment pas que certaines personnes prennent connaissance d'une information, le plus simple est de ne pas la diffuser en ligne.

2.4. Critique

Il est important que les médecins puissent s'engager complètement dans des débats qui ont une influence sur leur vie professionnelle. Internet est en plus le forum par excellence. La liberté de s'exprimer sur des forums et des blogs n'est cependant pas absolue. Elle trouve sa limite dans la nécessité d'éviter de porter préjudice aux droits et à la réputation d'autrui. En postant un message en ligne, l'on peut se sentir moins inhibé et dire, par conséquent, des choses que l'on ne dirait pas dans un autre contexte. (23)

Bien que les discussions en ligne entre confrères sur des patients et les expériences pratiques puissent présenter un avantage éducatif aussi bien que professionnel, il faut éviter les discussions informelles au sujet de patients sur des forums publics sur Internet. Même si les médecins postent des propos de façon anonyme ou sont convaincus que ces derniers ne menacent pas le secret professionnel, ils doivent faire preuve de prudence et prévoir une éventuelle perception de forme. Ainsi, doivent-ils considérer le préjudice potentiel qu'ils pourraient causer à la confiance publique envers le corps médical. (24)

Ils doivent éviter de faire des remarques négatives inconsidérées ou non fondées à propos d'individus ou d'organisations. Omettre de mentionner un conflit d'intérêts sape non seulement la confiance publique envers le corps médical, mais compromet aussi le professionnalisme des médecins.

Si un médecin a une critique à formuler sur un confrère, il doit d'abord en référer au confrère en question. (25)

Les règles en matière de diffamation (26) sont également applicables à tout commentaire posté sur Internet, qu'il soit fait dans la sphère personnelle ou professionnelle. Elle peut donner lieu à une procédure judiciaire.

Même si un patient peut s'exprimer librement sur les médias sociaux au sujet de son état de santé, de son traitement et même du médecin choisi, ce dernier n'est pas autorisé à réagir en raison du secret professionnel médical. Un patient qui se plaint sur un forum Internet d'un traitement ne sera que dirigé vers les instances actuelles du service de médiation prévues à cette fin par la loi.

3. Les médecins et la télémédecine

Vu l'expansion d'Internet, le préfixe « télé » (téléradiologie, télédermatologie, télécardiologie, etc.) fleurit dans différentes disciplines médicales.

S'il faut éviter que ces formes de médecine entraînent la déshumanisation de la relation médecin-patient ; ces technologies peuvent, néanmoins, contribuer à l'amélioration des soins de santé.

3.1. Télémédecine (27)

3.1.1 Avis par téléphone

La forme la plus répandue de télémédecine est aujourd'hui « l'avis par téléphone. » Entrant de plus en plus dans les mœurs, il est perçu par le patient comme étant pratique, facile et comme un droit acquis. Il ne fait pas de doute que des patients peuvent appeler leur médecin pour lui adresser une « question pertinente » ou lui demander un avis peu de temps après la consultation. En revanche, la demande d'un conseil par téléphone, en cas de maladie aiguë, pour éviter une consultation, est en train de devenir une réalité quotidienne qu'il faut freiner dans la mesure du possible.

Aux yeux de bon nombre de médecins, cette consultation téléphonique « infondée » dérange, fait perdre du temps, est dangereuse et inutile en raison du manque d'éléments essentiels dont l'examen clinique est et reste la pierre angulaire.

Le patient doit se rendre compte que le fait d'appeler directement, alors que le médecin consulte, dérange et perturbe à la fois le médecin et le patient venu le consulter. (28)

Le médecin ne peut donner d'avis qu'à un patient connu et identifié, après l'avoir examiné et dans le cadre de la continuité des soins (ex. : évaluation, adaptation de la médication, effets secondaires, ...).

ll n'existe pas de code dans la nomenclature INAMI pour la facturation d'honoraires pour un avis médical par téléphone. Dans la mesure où l'on pourrait facturer quelque chose au patient pour un tel avis, ce dernier ne pourra, dès lors, de toute façon pas être remboursé. (29)

À l'égard d'un patient inconnu et non identifié (situation se présentant pendant les gardes), l'avis téléphonique doit rester bref et prudent et un contact en consultation avec le patient doit être proposé.

Le patient doit être informé du fait qu'il est impossible au médecin d'établir un diagnostic sans anamnèse et sans examen physique. Interpréter au téléphone des symptômes (aigus) comporte des risques d'erreurs et met en danger la santé publique.

Dans les deux cas, il est conseillé de consigner l'appel dans le dossier ou, le cas échéant, dans le rapport de la garde. (30)

3.1.2. Avis électronique et prescription

Un médecin actif sur Internet est aussi, de plus en plus souvent, confronté à des demandes d'avis médical par e-mail ou réseaux sociaux. Les contacts électroniques entre médecin et patient doivent se limiter à l'échange d'informations administratives.

Un médecin ne peut répondre à la question d'un patient qu'à condition d'être son médecin traitant et que cela concerne un avis médical dans des cas non urgents. Il ne peut, en outre, s'agir que d'information venant en complément des informations données en consulter. Établir un diagnostic n'est pas autorisé. À cet effet, le patient devra toujours venir en consultation chez le médecin.

Cela n'empêche qu'un médecin qui a rendu publique son adresse e-mail ou qui est actif sur les médias sociaux permettant aux patients de poser directement des questions doit répondre aux e-mails et questions dans un délai raisonnable.

L'envoi électronique d'une prescription constitue une exception. Dans le cadre de l'utilisation de Recip-e (davantage d'informations à ce sujet sur http://recip-e.be/home-be), il est conforme à la déontologie que le patient, sur la base d'une telle prescription électronique obtienne des médicaments chez un pharmacien, et ce sans avoir reçu de prescription à la sortie d'une consultation chez le médecin.

L'envoi électronique au patient d'un renouvellement d'ordonnance est également autorisé. Le fait de renouveler une prescription fait, en effet, partie d'un traitement prolongé pour lequel le patient est déjà venu en consultation. En pareil cas, il peut suffire, moyennant des garanties de sécurité et de secret médical, d'envoyer ce renouvellement par voie électronique au patient.

3.1.2. Triage

Depuis peu de temps, des médecins exerçant en solo ou en groupe canalisent les flux téléphoniques vers des assistants et des centres d'appel ou de « triage ». Ainsi, le médecin peut-il, consacrer le maximum de temps disponible au patient venu en consultation.

Pour l'organisation du travail avec des intermédiaires, il faut prévoir une convention offrant les garanties de qualité nécessaires comme la définition précise des tâches, la transmission obligatoire de l'information, le suivi et le feedback, etc. Cette convention doit aussi contenir des exigences déontologiques minimales comme le libre choix du patient, le devoir de réserve, l'autorité effective sur le plan médical, etc. Elle doit être soumise au contrôle préalable du conseil provincial compétent. (31)

3.2. Télémonitoring

3.2.1. Monitoring à distance

Le télémonitoring est la surveillance de paramètres médicaux par un médecin depuis son cabinet d'un patient qui se trouve à distance. Des résultats biomédicaux objectifs sont transmis au médecin qui les interprète. (32)

Lorsqu'un médecin estime que la télésurveillance est nécessaire dans le cadre d'un traitement de longue durée (p.ex. : pour le traitement d'un patient atteint d'insuffisance cardiaque), le médecin peut demander lui-même au patient une rétribution équitable pour le travail presté, à savoir la supervision et la réaction aux alarmes. Il doit, cependant, informer le patient au préalable des dispositions à prendre lors d'alarmes et de situations urgentes. (33)

Le médecin veillera à ce que l'entreprise qui fournit les appareils prévoie les garanties nécessaires concernant la sécurité biotechnique et l'entretien des moniteurs ainsi que la disponibilité permanente des signaux enregistrés.

3.2.2. Vidéoconférence

Parallèlement au télémonitoring, il faut aussi envisager l'usage de la vidéoconférence dans les soins de santé à domicile de patients chroniques. Dans de telles situations, la vidéoconférence entre des prestataires volontaires de soins et un patient chronique rompt l'isolement de ce dernier et ouvre de nouvelles perspectives au développement de réseaux sociaux dans un cadre de soins.

Une liaison électronique suffisamment sécurisée doit être prévue afin de garantir la confidentialité des informations échangées via cette forme de communication. En outre, le patient doit avoir la possibilité de sortir, à tout moment, du projet sans retombée quelconque sur les soins. (34)

3.2.3. « Applis » médicales

Récemment, le développement de nombreuses applications (applis) médicales a permis de faire évoluer le domaine du télémonitoring. Le médecin doit s'assurer de la qualité des « applis » en collaboration avec les associations scientifiques, les instances de formation et les universités et être fermement convaincu de la sécurité et de la protection du secret professionnel avant de choisir, en accord avec le patient, cette forme de télémonitoring.

3.3. Téléconcertation

La concertation entre médecins au sujet d'un patient ne se fait plus uniquement entre les murs d'une même institution de soins. Il arrive régulièrement que des médecins d'un autre hôpital ou même d'un autre pays ayant une expérience spécifique entrent en concertation afin de discuter de la situation médicale d'un patient déterminé. Comme cette concertation ne peut que contribuer à l'amélioration de la qualité des soins et du traitement, elle tient une place indispensable dans la dispensation des soins de santé à l'heure actuelle. Grâce à elle, le réseau d'expertise médicale devient illimité. (35)

La téléconcertation, dont la vidéoconférence entre médecins est la forme principale, doit dès lors être accueillie favorablement et même stimulée pour autant qu'elle puisse avoir un effet positif sur le traitement du patient. Une telle vidéoconférence doit cependant toujours se tenir entre des médecins qui, chacun de leur côté, peuvent garantir le respect de la vie privée du patient. Dès lors, cette vidéoconférence ne peut avoir lieu que dans les mêmes conditions (déontologiquement justifiées) qu'une concertation physique et requiert au moins la vérification de l'identité de l'interlocuteur ainsi que la preuve de son statut de médecin. Lorsque, dans la mesure du raisonnable, de telles circonstances ne peuvent pas être réunies, la vidéoconférence doit être reportée à un moment où elles seront effectives.

3.4. Stocker des données de santé sur un serveur partagé (« in the cloud »)

A la suite de l'informatisation de la pratique médicale, les médecins ont de moins en moins recours aux documents papier et privilégient l'enregistrement de toutes les données, personnelles et de santé, de leurs patients sur leur ordinateur. Afin de disposer d'une copie de sauvegarde de ces données pour le cas où leur ordinateur les lâche, certains médecins sauvent ces données une deuxième fois sur un serveur partagé (« in the cloud »).

Sauvegarder des données de santé « in the cloud » demande toutefois une procédure de sécurité poussée pour préserver le secret professionnel et les informations relatives à la vie privée du patient. Il est alors notamment capital de savoir où se trouve le serveur sur lequel l'information est stockée, comment les données de santé sont sauvegardées (encryptage) et quelle législation s'applique au traitement de données de santé. Des données médicales peuvent uniquement être confiées pour stockage à des sociétés établies dans l'Union européenne et conformes à la directive 95/46/UE adoptée par le Parlement européen et le Conseil du 24 octobre 1995 quant à la protection des personnes physiques à l'égard du traitement des données à caractère personnel et à la libre circulation de ces données (JO L 281 du 23 novembre 1995). Une convention entre le médecin et la société doit reprendre les règles applicables en matière de sécurité et de confidentialité.

Des évènements récents ont démontré la vulnérabilité des informations sauvegardées électroniquement. Pour cette raison, le médecin ne pourrait être trop prudent pour stocker des données personnelles et, particulièrement, des données de santé.


1. http://knmg.artsennet.nl/Publicaties/KNMGpublicatie/62422/Richtlijn-online-artspatient-contact-2007-met-aanvulling-Handreiking-Artsen-en-Social-Media-2011.htm
2. http://www.bma.org.uk/practical-support-at-work/ethics
3. http://www.gmc-uk.org/guidance/ethical_guidance/21186.asp
4. http://ceom-ecmo.eu
5. Avis du Conseil National de l'Ordre des médecins, "Sécurité des données couvertes par le secret professionnel", 28 juin 2014.
6. http://www.privacycommission.be/sites/privacycommission/files/documents/mesures_de_reference_en_matiere_de_securite_applicables_a_tout_traitement_de_donnees_a_caractere_
7. Avis du Conseil National de l'Ordre des médecins, "Sites Internet de médecins", 20 juin 1998.
8. Avis du Conseil National de l'Ordre des médecins, "Aanpassing van de aanbevelingen van de Nationale Raad van 21 september 2002 en van 17 januari 2004 betreffende het beheer van internetsites door artsen" van 1 oktober 2005.
9. Avis du Conseil National de l'Ordre des médecins, "Adaptation des recommandations du Conseil national des 21 septembre 2002 et 17 janvier 2004 relatives à la gestion de sites Internet par des médecins", 1 octobre 2005.
10. Avis du Conseil National de l'Ordre des médecins, "Service de garde des médecins généralistes - Accessibilité - Publication du rôle de garde sur un site internet", 16 septembre 2000
11. Avis du Conseil National de l'Ordre des médecins, " Annonces de recrutement de patients pour une étude clinique", 17 janvier 2004.
12. Avis du Conseil National de l'Ordre des médecins, "Adaptation des recommandations du Conseil national des 21 septembre 2002 et 17 janvier 2004 relatives à la gestion de sites Internet par des médecins", 1 octobre 2005.
13. Avis du Conseil National de l'Ordre des médecins, "Adaptation des recommandations du Conseil national des 21 septembre 2002 et 17 janvier 2004 relatives à la gestion de sites Internet par des médecins", 1 octobre 2005.
14. Le terme de "médias sociaux" vise les plates-formes en ligne (réunissant des OU avec les) réseaux sociaux au sein desquels les utilisateurs veillent tous ensemble au contenu.
15. Artsen en Sociale Media, Koninklijke Nederlandsche Maatschappij tot bevordering der Geneeskunst, november 2011, 5
16. Using social media: practical and ethical guidance for doctors and medical students, British Medical Association, 2011
17. Using social media: practical and ethical guidance for doctors and medical students, British Medical Association, 2011
18. Using social media: practical and ethical guidance for doctors and medical students, British Medical Association, 2011
19. Artsen en Sociale Media, Koninklijke Nederlandsche Maatschappij tot bevordering der Geneeskunst, november 2011, 14
20. Using social media: practical and ethical guidance for doctors and medical students, British Medical Association, 2011
21. Using social media: practical and ethical guidance for doctors and medical students, British Medical Association, 2011
22. Artsen en Sociale Media, Koninklijke Nederlandsche Maatschappij tot bevordering der Geneeskunst, november 2011, 11
23. Using social media: practical and ethical guidance for doctors and medical students, British Medical Association, 2011
24. Using social media: practical and ethical guidance for doctors and medical students, British Medical Association, 2011
25. Artsen en Sociale Media, Koninklijke Nederlandsche Maatschappij tot bevordering der Geneeskunst, november 2011, 21
26. La diffamation sous-entend l'adoption d'une position abusive pouvant nuire à la réputation d'une personne.
27. cf. « Telefoongeneeskunde kan uw gezondheid ernstige schade aanrichten » Mededelingen Brabant (N) / Symposium du 15 octobre 2005 (La médecine par téléphone peut nuire gravement à votre santé)
28. M. DENEYER, "La médecine par téléphone peut nuire gravement à votre santé", annexe Avis du Conseil National de l'Ordre des médecins, "Avis d'un médecin par téléphone - Honoraires " 16 fevrier 2008.
29. Avis du Conseil National de l'Ordre des médecins, "Avis d'un médecin par téléphone - Honoraires" van 16 fevrier 2008.
30. M. DENEYER, "La médecine par téléphone peut nuire gravement à votre santé", annexe Avis du Conseil National de l'Ordre des médecins, "Avis d'un médecin par téléphone - Honoraires " 16 fevrier 2008.
31. M. DENEYER, "La médecine par téléphone peut nuire gravement à votre santé", annexe Avis du Conseil National de l'Ordre des médecins, "Avis d'un médecin par téléphone - Honoraires " 16 fevrier 2008.
32. Statement of the European Council of Medical Orders on Telemedicine, adopted on the 13th of June 2014.
33. Avis du Conseil National de l'Ordre des médecins, "Remboursement en cas de télémonitoring", 13 octobre 2012.
34. Avis du Conseil National de l'Ordre des médecins, "Communication par vidéoconférence en matière de soins de santé", 20 avril 2013.
35. Statement of the European Council of Medical Orders on Telemedicine, adopted on the 13th of June 2014.


Informatique28/06/2014 Code de document: a146003
Sécurité des données couvertes par le secret professionnel

Des évènements récents ont démontré que des services secrets se sont introduits dans plusieurs banques de données contenant des informations sensibles. La question de la sécurité des données couvertes par le secret professionnel se pose.

Avis du Conseil national :

En sa séance du 28 juin 2014, le Conseil national de l'Ordre des médecins a examiné votre demande d'avis concernant l'accès abusif à des données à caractère personnel relatives à la santé, traitées électroniquement, par des services secrets.

Le Conseil national est conscient que le traitement électronique de données peut comporter des risques de fuites ou d'accès abusif à des données couvertes par le secret professionnel. Il est cependant possible de réduire ces risques à un minimum moyennant le respect des règles pratiques, non limitatives, suivantes :

- l'utilisation de réseaux informatiques suffisamment protégés, régulièrement contrôlés sur des fuites et qui prévoient un accès à l'aide de l'eID ;
- l'utilisation d'un mot de passe suffisamment performant ;
- l'utilisation d'un programme anti-virus adapté ;
- la clôture du programme lors de la cessation des activités ;
- travailler avec des sociétés qui garantissent contractuellement un principe de confidentialité ;
- utiliser l'ordinateur exclusivement à des fins professionnelles ;

Vous trouverez des informations plus détaillées au sujet du traitement de données à caractère personnel en général dans le document « Mesures de référence en matière de sécurité applicables à tout traitement de données à caractère personnel »
http://www.privacycommission.be/sites/privacycommission/files/documents/mesures_de_reference_en_matiere_de_securite_applicables_a_tout_traitement_de_donnees_a_caractere_personnel_0.pdf.

Le Conseil national souligne l'utilité de l'échange électronique de données médicales et continuera à veiller à ce que celui-ci puisse se faire dans l'intérêt du patient sans préjudice de son droit au respect de la liberté de chacun de maîtriser l'information le concernant.

Informatique10/12/2011 Code de document: a136015
Application informatique – Collaboration pluridisciplinaire dans le cadre des trajets de soins

Un conseil provincial demande l'avis du conseil national concernant le développement de MediPath, une application informatique pour la gestion de la collaboration pluridisciplinaire dans le cadre de trajets de soins.

Avis du Conseil national :

En sa séance du 10 décembre 2011, le Conseil national a examiné votre demande d'avis concernant le développement de MediPath, une application informatique pour la gestion de la collaboration pluridisciplinaire dans le cadre de trajets de soins.

Le Conseil national reconnaît l'utilité de l'échange de données médicales dans le contexte d'une équipe pluridisciplinaire.

Dans le cas présent, il a été demandé à la firme MediBridge d'élaborer une solution permettant la consultation et le suivi des données d'un patient au sein d'une équipe pluridisciplinaire de manière transparente, conviviale et sécurisée, à partir du dossier médical électronique.

Dans le projet présenté, l'équipe pluridisciplinaire se compose au minimum du médecin généraliste, d'un éducateur, d'un médecin spécialiste, d'un diététicien, d'un podologue et est éventuellement complétée par d'autres praticiens professionnels.

Le Conseil national attire l'attention sur le fait que ce transfert de données est subordonné au consentement du patient dûment informé au préalable ou de son représentant.

Le système MediPath doit être conçu de façon à ce que chaque praticien professionnel ne puisse consulter que les données nécessaires aux soins qu'il dispense. Par conséquent, l'information disponible doit être subdivisée en catégories pouvant être consultées en fonction de la discipline des différents praticiens professionnels.
Il y a lieu de prévoir un répertoire de protocoles d'accès permettant le traçage par le patient ou le médecin généraliste de l'accès aux données médicales.

Informatique07/06/2008 Code de document: a121003
La constitution et de l'organisation de la plate-forme e-Health

La constitution et de l’organisation de la plate-forme e-Health

Le Conseil national fait part aux responsables politiques concernés de son inquiétude au sujet du projet de loi portant des dispositions diverses (I), déposé le 29 mai 2008, relatif à la constitution et à l’organisation de la plate-forme e-Health.

Lettre du Conseil national à madame Onkelinx, ministre des Affaires sociales et de la Santé publique :

Le Conseil national de l’Ordre des médecins prend connaissance du projet de loi portant des dispositions diverses (I) introduit le 29 mai 2008 ainsi que des réactions dans la presse à propos de la constitution et de l’organisation de la plate-forme e-Health. Il apparaît que le projet sera discuté dans le courant de ce mois de juin à la Chambre.

Le Conseil national souligne une fois de plus que le secret professionnel du médecin est une clé de voûte du système des soins de santé. Il s’étonne qu’un projet de loi qui est susceptible d’avoir des répercussions aussi importantes sur cette clé de voûte, soit traité dans l’urgence, sans concertation avec les intéressés, et dans le cadre d’une loi portant des dispositions diverses, comme s’il s’agissait d’apporter une modification de détail à une loi approuvée après un débat approfondi par la Chambre et le Sénat.

Le Conseil national regrette de ne pas avoir été informé, malgré ses demandes réitérées, de l’état d’avancement du dossier.

Il rappelle les recommandations des instances suivantes en matière d’informatisation et de transmission électronique de données de Santé (copie en annexe) :

  • le Conseil national de l’Ordre des médecins
  • la Koninklijke Academie voor Geneeskunde van België;
  • l’Académie royale de Médecine de Belgique;
  • le Comité Permanent des Médecins Européens (CPME);
  • la World Medical Association (WMA).

Le Conseil national constate que la plate-forme e-Health ne se limite pas à un système de transmission de données personnelles concernant les patients. Elle enregistre en outre des données médicales personnelles, non expressément et préalablement déterminées. Ceci n’est assurément pas sans conséquences sur le respect de la vie privée et le secret professionnel. Ainsi par exemple, le Conseil national constate que le répertoire des références mentionne les acteurs de soins de santé auprès desquels les patients souhaitent ou non que leurs données soient conservées et les modalités de leur accès. Le simple fait de mentionner que le patient consulte tel ou tel praticien peut révéler en soi un diagnostic médical et comporte un risque de stigmatisation. En effet, le seul fait de mentionner qu’un patient consulte un psychiatre ou un spécialiste du SIDA est une donnée devant être couverte de façon absolue par le secret médical.

Par ailleurs, le Conseil national refuse et s’oppose de la façon la plus absolue à la centralisation par une seule instance des systèmes de sécurité et d’identification, de la gestion des transactions, de la labellisation des logiciels et du transfert des données. En particulier, la plate-forme e-Health ne peut assurer le rôle d’organisation intermédiaire et gérer de ce fait les clés de codification permettant d’associer les données codées aux patients.

Le Conseil national insiste sur l’importance de ce projet pour le fonctionnement des systèmes des soins de santé. Il recommande qu’il fasse l’objet d’un projet de loi à part entière, à savoir qu’il soit extrait du projet de loi dont il fait actuellement partie et fasse l’objet d’une discussion publique impliquant les différentes parties intéressées, le Conseil National se tenant à votre disposition pour participer à ce débat.

Voir également :

  • avis « Projet BeHealth » du Conseil national du 26 novembre 2005 – Bulletin du Conseil national n° 111 p. 5);
  • avis de de la Koninklijke Academie voor Geneeskunde van België, “Advies nopens het wetsvoorstel rond “Be-Health” of het “Wetsontwerp betreffende de verwerking en de informatisering van de gezondheidsgegevens alsook de toepassingen voor telegeneeskunde” goedgekeurd op de vergadering van de KAGB op 17 januari 2007 (Tijdschrift voor Geneeskunde, 63, nr. 7, 2007);
  • avis sur le projet de loi « BeHealth » de l’Académie royale de Médecine de Belgique approuvé en assemblée plénière des 25/11/2006 et 13/01/2007 (Bulletin et Mémoires de l’Académie royale de Médecine de Belgique – Volume 161/Année 2006 N° 10-11-12, p.524 à 526) ;
  • avis du Comité Permanent de Médecins Européens - Recommendations about “E-health – CPME policy statement on electronic health records” (CPME 2006/132 FINAL EN) adopted at the CPME Board meeting, Brussels, 19 October 2007;
  • avis de la World Medical Association – “The WMA Declaration on ethical considerations regarding Health Databases” adopted by the WMA General Assembly, Washington 2002.

Cc. les ministres du gouvernement fédéral, les ministres du gouvernement flamand, les présidents des partis politiques, les membres de la Chambre des représentants et du Sénat

Informatique03/03/2007 Code de document: a116004
Avis du Conseil national à propos du décret de la Communauté flamande relatif au système d'information Santé

Avis du Conseil national à propos du décret de la Communauté flamande relatif au système d’information Santé

RESUME

RECOMMANDATIONS A L’EGARD DES MEDECINS

En ce qui concerne le volet opérationnel

Le consentement

Le Conseil national invite les médecins à recourir au système du consentement distinct, tel que visé à l’article 19, § 3, du décret du 16 juin 2006, à défaut d’arrangement contraire avec le patient.

Le recours au consentement dit « général » ne peut s’envisager qu’en considération des prévisions raisonnables du patient.

Le secret professionnel

Le Conseil national rappelle en outre que les principes du secret professionnel partagé n’impliquent pas de facto le droit à échanger des dossiers médicaux. Seules les données «nécessaires pour pouvoir assurer la qualité et la continuité de la dispensation des soins » (article 19) peuvent être échangées.

Consultation du dossier de santé individuel

Le Conseil national estime que la consultation du dossier médical nécessite une demande expresse du patient.

En ce qui concerne le volet épidémiologique

L’information

A défaut d’un consentement exprès, l’usager de soins doit au moins être informé complètement et avoir la possibilité de faire valoir son droit d’opposition.

L’opposition

Le Conseil national invite les médecins à informer le patient de sa possibilité de s’opposer au traitement de ses données dans le cadre du système d’information épidémiologique ainsi que de la forme de l’opposition.

Le médecin veille à ce que les données dont le patient a refusé le traitement ne soient pas reprises dans l’enregistrement électronique et dans le fichier source.
Il fait de même pour l’ensemble des données concernant les tiers.

RECOMMANDATIONS A L’EGARD DU GOUVERNEMENT FLAMAND ET/OU DES PARLEMENTAIRES FLAMANDS

Le consentement

Le Conseil national demande davantage de clarté quant à la possibilité de recourir au consentement tacite et quant à ses modalités.

En tout état de cause, le Conseil national est d’avis que le principe du consentement tacite ne pourrait aucunement être d’application générale.

L’information

Le Conseil national invite le gouvernement flamand à fixer, dans le respect des exigences déontologiques, la manière dont les médecins seront amenés à informer concrètement les patients au sens de l’article 42 du décret.

L’opposition

Le Conseil national demande que la condition fixée pour pouvoir s’opposer au traitement de données personnelles, à savoir le motif grave et justifié lié à une situation particulière, soit supprimée.

La forme de l’opposition doit en outre être considérablement allégée : la simple mention dans le dossier médical de l’opposition doit suffire.

Le Conseil national insiste en outre pour que les logiciels labellisés utilisés dans le cadre du système d’information santé prévoient la possibilité aisée de ne pas saisir certaines données dans l’enregistrement automatique.

Les droits du patient mineur

Le Conseil national demande davantage d’éclaircissements quant aux contradictions existantes entre la loi du 22 août 2002 relative aux droits du patient et le décret du 16 juin 2006 concernant :

  • la notion de « parents »;
  • la limite d’âge à l’exercice indépendant de ses droits par le mineur.

Le secret professionnel

Le Conseil national insiste auprès du Gouvernement flamand pour que la définition de la nature et du type des pseudo-identités en application de l'article 14, soit précise.

Le Conseil national demande aussi que les carrefours d'information et les organisations intermédiaires n'aient pas la possibilité d'établir eux-mêmes un lien entre les pseudo-identités et les identités.

La protection de la vie privée

Le Conseil national refuse la centralisation, par une seule instance, des systèmes de sécurité et d’identification, du notariat des transactions, de la labellisation des logiciels et, en particulier, du transfert des données (cf. avis du Conseil national du 26 novembre 2005 concernant le projet BeHealth, BCN, n° 111, p. 5).

Le Conseil national suivra attentivement la façon dont le Gouvernement flamand rendra effective l'indépendance des différentes instances.

Le Conseil national demande dès lors à être représenté au sein de la commission de contrôle, et ensuite, dans le comité sectoriel, visés à l'article 88.

AVIS

En ses séances du 20 janvier 2007 et du 3 mars 2007, le Conseil national a examiné le décret de la Communauté flamande du 16 juin 2006 relatif au système d'information Santé.

Le Conseil déplore de n'avoir pas été consulté lors de la phase préparatoire du décret alors que celui-ci est susceptible d'avoir d'importantes répercussions sur les droits du patient ainsi que sur le secret professionnel.

Le Conseil national estime nécessaire de formuler quelques remarques - non exhaustives - qui pourraient constituer un apport constructif à l'élaboration des futurs arrêtés d'exécution du décret.

A/ DROITS DU PATIENT

Les principaux bénéficiaires du système d'information Santé devraient en principe être les patients, tant sur le plan du système opérationnel que sur celui du système épidémiologique.

La loi du 22 août 2002 relative aux droits du patient a constitué un pas important dans la reconnaissance de ces droits. Cette loi a défini des droits majeurs de celui-ci.

Le Conseil national estime que le décret n'a pas été suffisamment évalué par rapport aux exigences résultant des droits du patient.

1/ Consentement

L'article 8, § 1er, de la loi du 22 août 2002, dispose:

"Le patient a le droit de consentir librement à toute intervention du praticien professionnel moyennant information préalable.
Ce consentement est donné expressément, sauf lorsque le praticien professionnel, après avoir informé suffisamment le patient, peut raisonnablement inférer du comportement de celui-ci qu'il consent à l'intervention.".

Cet article vise la transparence dans la relation médecin-patient. Le consentement libre et éclairé du patient est une condition de la confiance entre l'usager de soins et le praticien professionnel.
Le système d'information Santé compromet cette confiance tant dans le système d'information opérationnel que dans le système d'information épidémiologique.

1.1. Le système d'information opérationnel

L'article 19 du décret pose le consentement de l'usager de soins comme condition à l'échange de données dans le cadre du système d'information opérationnel.

Les troisième, quatrième et cinquième paragraphes de cet article sont néanmoins inquiétants.

Le Conseil national formule à ce sujet les remarques suivantes:

- Le "consentement distinct"

L'article 19, § 3, du décret du 16 juin 2006 dispose:
"L'usager peut demander que son consentement soit sollicité pour toute expédition spécifique de données séparément. Il peut toutefois aussi accorder à un prestataire de soins ou à une organisation œuvrant sur le terrain autorisation valable pour tous les envois spécifiques de données pour une durée déterminée ou indéterminée, étant entendu qu'il peut limiter cette autorisation à certaines catégories de données et à certaines catégories de prestataires de soins ou d'organisations œuvrant sur le terrain, ainsi que la retirer à tout moment.".

Le Conseil national se réjouit que le patient puisse exiger qu'un consentement distinct lui soit demandé pour toute expédition spécifique de données. A défaut d'autres accords, il est l'évidence même que le régime à appliquer est celui du "consentement distinct".

- Le "consentement général"

Le Conseil national ne peut accepter que l'usager de soins autorise tous les envois spécifiques de données pour une durée indéterminée (article 19, § 3). Ce type d'autorisation équivaut à donner un blanc-seing au médecin. On ne peut parler en ce cas de "consentement éclairé".

Il suit clairement de l'article 8 de la loi du 22 août 2002 que le médecin doit obtenir le consentement exprès du patient lorsque, après avoir suffisamment informé le patient, l'attitude de ce dernier ne lui permet pas de conclure raisonnablement à son consentement.

Le Conseil national en déduit qu'au sein du système du "consentement général", le médecin devra toujours tenir compte des attentes raisonnables du patient individuel: le consentement exprès de l'usager de soins est requis pour tous les envois de données auxquels le patient ne peut raisonnablement pas s'attendre. Le Conseil national recommande aux médecins d’être particulièrement prudents à ce sujet.

- Le "consentement tacite"

L'article 19, § 4, du décret relatif au système d'information Santé dispose:

"Par dérogation au § 1er et pour autant que l'usager de soins ne s'oppose pas à l'expédition de données, le consentement est réputé avoir été donné tacitement si l'expédition des données a lieu :

  1. à la suite d'un renvoi qui fait partie des soins en cours;
  2. dans le cadre d'activités de soins connexes;
  3. dans le cadre d'activités connexes d'un programme de prévention.".

Le Conseil national se rallie en principe à la position suivante de la Commission de la protection de la vie privée:

"L'article 19, § 4, de l'avant-projet de décret stipule que le consentement peut avoir été obtenu 'tacitement' lorsque la transmission a lieu à l'occasion d'un renvoi dans un traitement en cours ou d'une action de prévention.
L'échange de données à caractère personnel entre les membres d'une équipe de soins et les professionnels qui y sont intégrés, avec le consentement du patient, fait partie des attentes normales du patient et ne nécessite aucune autorisation explicite.
Toutefois, lorsqu'il s'agit d'un renvoi vers une autre équipe de soins, la Commission est d'avis qu'il n'est plus logique de supposer le consentement.".
(1)

Sur le plan déontologique, le Conseil national peut accepter que le consentement à l'échange de données soit tacite à l'égard des membres d'une équipe de soins déterminée, pour autant qu'il fasse partie des attentes normales du patient.

Ce n’est pas évident sur le plan légal. Comme la Commission de la protection de la vie privée le fait remarquer: "Toute forme de consentement tacite est illégale à la lumière de l'article 7 de la loi du 8 décembre 1992.".(2)

A propos de l'article 19, § 4, du décret, la Commission écrit ce qui suit:
"La Commission estime qu'il n'est pas possible d'insérer, dans une réglementation d'un décret, des dérogations aux règles fédérales qui procureraient au sujet de droit un niveau de protection inférieur. C'est la disposition légale qui prévoit le plus haut niveau de protection pour le citoyen qui prime.".(3)

Etant donné la contradiction entre, d'une part, l'article 7 de la loi du 8 décembre 1992 relative à la protection de la vie privée à l'égard des traitements de données à caractère personnel et, d'autre part, l'article 19, § 4, du décret du 16 juin 2006 relatif au système d'information Santé, le Conseil national recommande de demander le consentement exprès des usagers de soins avant de procéder à des échanges de données au sein du système d'information opérationnel.

A cet égard, le Conseil national demande plus de clarté au législateur.

1.2. Le système d'information épidémiologique

L'échange de données de santé au sein du système d'information épidémiologique ne requiert pas légalement le consentement de l'usager de soins.

L'article 47 du décret dispose que le patient peut toutefois s'opposer à l'introduction de ses données dans l'enregistrement électronique ou dans le fichier source, mais cela uniquement "pour des motifs graves et justifiés liés à sa situation particulière" (4).

- L'obligation d'informer

L'échange de données est nécessaire pour pouvoir fonder la politique de santé flamande le plus possible sur des preuves et pour pouvoir évaluer l'efficacité et l'adéquation de cette politique.

Cela n'empêche pas que les droits du patient doivent être respectés. A défaut d'un consentement exprès, l'usager de soins doit au moins être informé complètement et avoir la possibilité de faire valoir son droit d'opposition.

L'article 42 du décret règle la notification du système d'information Santé à l'usager de soins.

Cet article dispose:

"§ 1er. Le responsable du dossier de santé individuel informe l'usager de soins, et si celui-ci a moins de 14 ans, ses parents, du fait qu'un enregistrement électronique est tenu et que les données qui s'y trouvent peuvent être utilisées dans le cadre du système d'information opérationnel et épidémiologique.
Si l'état de l'usager de soins est légalement ou manifestement tel qu'il est incapable d'exprimer sa volonté, la communication visée dans le premier alinéa est faite à la personne telle que visée à l'article 19, § 2.
§ 2. Sans préjudice de l'information communiquée conformément à la réglementation relative à la protection de la vie privée à l'égard des traitements de données à caractère personnel et pour autant que l'usager de soins n'en ait pas encore pris connaissance, il recevra au moins les informations suivantes :
1° les catégories de données qui sont tenues dans l'enregistrement électronique en indiquant les catégories de données reprises dans le fichier source;
2° les catégories de prestataires de soins et d'organisations oeuvrant sur le terrain auxquelles des données peuvent être transmises dans le cadre du système d'information opérationnel;
3° le nom de l'organisation intermédiaire a laquelle des données sont transmises dans le cadre du système d'information épidémiologique;
4° la manière dont le droit de consulter les données dans le dossier de santé individuel et dans l'enregistrement électronique peut être exercé;
5° la manière dont il peut être fait opposition à l'utilisation des données dans le système d'information opérationnel ou épidémiologique;
6° la manière de prendre contact avec la commission de contrôle.
Le Gouvernement flamand peut arrêter les modalités relatives au contenu et au mode de la communication visée dans le premier alinéa.".

Le Conseil national attache beaucoup d'importance à la manière dont le Gouvernement flamand organisera cette information.

Il est évident qu'il n'est pratiquement pas faisable de communiquer toutes les informations prévues lors de chaque consultation.

L'affichage dans les salles d'attente des médecins de l'information commandée par la loi ne concorde pas avec l'obligation d'informer préconisée par la déontologie.

- Motifs d’opposition

L'article 47 prévoit que le patient peut s'opposer à l'introduction de ses données dans l'enregistrement électronique et dans le fichier source "pour des motifs graves et justifiés liés à sa situation particulière".

Ceci porte gravement atteinte à la relation médecin-patient. Le patient serait dans l'impossibilité, par exemple, de s'opposer à l'introduction de ses données s'il n'avait pas confiance en l'anonymisation des données: cela n'a pas de rapport avec sa situation particulière. Le Conseil national ne peut l’accepter et demande la suppression des conditions d'opposition.

L'article 47 entraîne aussi de grandes difficultés en ce qui concerne l'extraction automatique des données du dossier de santé individuel telle que prévue à l'article 13, § 1er, deuxième alinéa, du décret (5). Le Conseil national fait remarquer que le patient s'oppose rarement à l'enregistrement de ses données mais bien à leur échange. Le dispensateur de soins doit veiller à ce que les données du dossier électronique, dont le patient refuse qu'elles soient échangées, ne soient pas introduites dans l'enregistrement électronique. Si les données du dossier de santé individuel sont transposées automatiquement dans l'enregistrement électronique, le logiciel utilisé pour l'extraction automatique devrait comporter la possibilité de ne pas saisir certaines données.

- Forme de l’opposition

L'article 47, § 2, dispose:
"L'opposition visée au § 1er est communiquée par écrit au responsable du dossier de santé individuel. Elle est datée et signée et les raisons invoquées liées à la situation particulière de l'usager de soins sont motivées.

Le responsable du dossier de santé individuel mentionne l'opposition dans le dossier de santé individuel.".

Le Conseil national estime que les conditions de forme de l'opposition sont trop lourdes: elles sont de nature à décourager les patients de faire usage de leur droit d'opposition.

Il serait suffisant de mentionner simplement l'opposition dans le dossier.

2/ Consultation du dossier de santé individuel et de l'enregistrement électronique

Le droit de consultation du dossier de santé individuel et de l'enregistrement électronique est prévu à l'article 43.

Le premier paragraphe de cet article dispose:
"L'usager de soins a le droit de prendre connaissance des données le concernant conservées dans le dossier de santé individuel et dans l'enregistrement électronique, et ce directement ou par l'intermédiaire d'un praticien professionnel des soins de santé qu'il a librement choisi. Des données concernant un tiers sont exclues de ce droit de consultation.
L'usager de soins a également le droit de prendre connaissance des notes personnelles le concernant, à condition que cela se fasse indirectement par l'intermédiaire d'un praticien professionnel des soins de santé librement choisi par l'usager de soins.".

Le Conseil national estime que la consultation ne peut avoir lieu qu'à la demande du patient lui-même, adressée au médecin qui a constitué le dossier. Le motif en est que le médecin est légalement tenu d'exclure du droit de consultation les données concernant des tiers (article 9 de la loi du 22 août 2002 relative aux droits du patient) et que le médecin pourra faire application de l'exception thérapeutique dans l'intérêt du patient (article 7, § 4, de la loi du 22 août 2002).

Le Conseil national renvoie à ce sujet à son avis ci-annexé du 20 janvier 2007 concernant la consultation directe par le patient de son dossier médical électronique.

3/ Les droits du patient mineur

Le chapitre IV de la loi du 22 août 2002 relative aux droits du patient concerne la représentation du patient.

En ce qui concerne les patients, l'article 12 dispose:
"§ 1er. Si le patient est mineur, les droits fixés par la présente loi sont exercés par les parents exerçant l'autorité sur le mineur ou par son tuteur.

§ 2. Suivant son âge et sa maturité, le patient est associé à l'exercice de ses droits. Les droits énumérés dans cette loi peuvent être exercés de manière autonome par le patient mineur qui peut être estimé apte à apprécier raisonnablement ses intérêts.".

3.1. Sur la notion de "parents"

Le décret du 16 juin 2006 prévoit que les droits du patient de moins de quatorze ans sont exercés, dans le cadre du système d'information Santé, par ses parents (cf. articles 19, 42, 43, 47).

Le terme "parents" est défini comme suit à l'article 2, 13°:
"les titulaires de l'autorité parentale ou les personnes qui ont la garde d'un mineur, de droit ou de fait;".

En vertu de la loi relative aux droits du patient, les droits du patient mineur sont exercés par les "parents exerçant l'autorité sur le mineur". En vertu du décret, ces droits pourraient aussi être exercés, par exemple, par le beau-père dans une famille recomposée.

La contradiction entre les textes légaux fédéral et flamand doit être résolue dans l'intérêt des mineurs. Une concertation entre les législateurs fédéral et décrétal est par conséquent nécessaire. La commission fédérale "Droits du patient" devrait être associée à cette concertation.

3.2. Sur la limite d'âge

Le Conseil national constate également une imprécision concernant l'exercice indépendant de ses droits par le mineur.

Contrairement au décret, la loi du 22 août 2002 relative aux droits du patient ne fixe pas de limite d'âge à cet égard.

Le Conseil national partage le point de vue de la Commission de la protection de la vie privée:

"Concernant l'introduction dans le projet de décret d'une limite d'âge déterminée, fixée à quatorze ans, pour la transmission de données (article 19) et l'exercice du droit de consultation (article 43), la Commission veut faire remarquer que cet âge peut effectivement servir d'âge de référence mais qu'il ne peut pas servir de critère absolu auquel on ne pourrait pas déroger. Vu l'impossibilité de déterminer uniformément, pour tous les individus, le moment où ils sont censés disposer de la maturité suffisante pour exercer leurs droits de manière tout à fait autonome, le prestataire de soins doit toujours pouvoir juger de l'acquisition de la maturité suffisante pour agir de manière autonome pour les jeunes qui se situent sous cette limite d'âge."(6).

B/ SECRET PROFESSIONNEL

Le décret de la Communauté flamande du 16 juin 2006 relatif au système d'information Santé a pour but l'optimalisation de l'échange de données entre les prestataires de soins pour "assurer" la continuité et la qualité de la dispensation de soins et pour pouvoir mieux évaluer les soins de santé (article 4).

Les membres du Conseil national déduisent de leur expérience médicale que l'échange de données est utile à la qualité des soins.

Ils savent aussi que le secret professionnel constitue une condition de la non moins nécessaire confiance dans la relation médecin-patient.

Le Conseil national craint que quelques-unes des dispositions du décret du 16 juin 2006 ne compromettent le secret professionnel.

1/ Le système d'information opérationnel

1.1. L'accès aux données versus l'accès au dossier

Le décret du 16 juin 2006 prévoit l'échange de données relatives à la santé. Il n'y est nullement question de l'échange de dossiers de santé. Les articles 10 et 19 ne laissent aucun doute à ce sujet. Les données qui entrent en considération pour être échangées sont celles qui sont "nécessaires pour pouvoir assurer la continuité et la qualité de la dispensation de soins" (article 19).

Il est évident que, dans la pratique, la convivialité du logiciel sera déterminante de l'échange effectif de données issues du dossier de santé individuel. Le logiciel doit offrir la possibilité de classer facilement les données des dossiers de santé d'une part, et d'exclure facilement des données de l'échange d'autre part. Pour pouvoir être utilisé dans la pratique, le logiciel doit offrir une convivialité suffisante pour permettre au médecin de respecter le secret professionnel.

Le Conseil national demande aux autorités compétentes pour le label du logiciel d'en tenir compte.

1.2. Conditions du secret professionnel partagé

Le secret professionnel peut être partagé dans certaines circonstances.

Cette possibilité est toutefois délimitée par quelques conditions. L'application de la notion de "secret professionnel partagé" ne requiert pas uniquement que le destinataire de l'information confidentielle soit lié par le secret professionnel. Seules les informations nécessaires à la continuité et à la qualité des soins du patient doivent être partagées. La transmission des données doit également se faire avec le consentement du bénéficiaire du secret.

L'application pratique de cette notion requiert, en cas de dossier de santé commun tel que visé à l'article 6 du décret, que le responsable du dossier de santé individuel soit exclusivement un médecin traitant.

Cette remarque s'applique également au responsable du dossier de santé individuel dont question aux articles 44, 45 et 46.

En ce qui concerne l'application des conditions du secret professionnel partagé dans les centres d'encadrement des élèves, le Conseil national renvoie à son avis du 21 octobre 2006 (7).

1.3 Dossiers médicaux tels que visés à l'article 11 du décret

Le Conseil national fait remarquer que l'article 11 du décret n'offre pas de garanties suffisantes de l'efficacité du système d'information opérationnel et du respect du secret professionnel.

Le dossier pluridisciplinaire

L'article 11, § 1er, du décret dispose que pour les centres d'encadrement des élèves, le dossier pluridisciplinaire visé à l'article 10 du décret du 1er décembre 1998 relatif aux centres d'encadrement des élèves, constitue le dossier de santé individuel visé dans le contexte du système d'information Santé.

Dans son avis du 21 octobre 2006 concernant la gestion des dossiers médicaux dans les centres d'encadrement des élèves, le Conseil national a démontré qu'en application des règles du secret professionnel partagé, le médecin du centre d’encadrement des élèves doit tenir un dossier médical séparé en plus du dossier pluridisciplinaire, lequel doit se limiter aux données pertinentes pour l'encadrement pédagogique de l'enfant (8) .

Les données qui sont pertinentes pour la continuité des soins, ainsi que d'ailleurs pour les études épidémiologiques, ne sont donc pas toujours inscrites dans le dossier pluridisciplinaire visé à l'article 10 du décret du 1er décembre 1998.

Le dossier médical général (DMG)

L'article 11, § 4, dispose:
"Pour les médecins généralistes, le dossier médical général visé à l'article 35duodecies de l'arrêté royal n° 78 du 10 novembre 1967 relatif à l'exercice des professions de santé constitue le dossier de santé individuel et les dispositions relatives à ce dossier sont d'application pour autant qu'elles divergent des articles 6 à 9 inclus et à l'article 10, alinéa deux.".

Le dossier médical général tel que visé à l'article 35duodecies de l'AR n°78, également appelé dossier médical global (cf. article 1er, § 4, de l'AR du 3 mai 1999 relatif au dossier médical global), n'empêche pas qu'un patient consulte plusieurs médecins généralistes. Le patient n'est, en outre, pas obligé de désigner un médecin généraliste gestionnaire du dossier médical général: le patient n'a donc pas toujours un DMG.

Il suit de l'article 11, § 4, du décret que le système d'information Santé ne sera utilisé que pour les patients au sujet desquels un DMG est tenu.

2/ Le système d'information épidémiologique

Le Conseil national constate que le respect du secret professionnel dans le cadre du système d'information épidémiologique dépend en grande partie de la nature des données enregistrées dans le fichier source.

Les fichiers sources qui sont communiqués aux organisations intermédiaires et aux carrefours d'information ne comportent pas que des données anonymes (cf. article 2, 10°).

La plupart des données en possession des carrefours d'information et des organisations intermédiaires peuvent encore être reliées à une personne identifiée ou indentifiable.

Le Conseil national déplore que les données ne soient pas communiquées sous forme anonyme. Ni les intérêts scientifiques ni les intérêts économiques ne peuvent justifier le risque pris par le patient sur le plan de sa vie privée.

Le décret étant maintenant adopté et publié, le Conseil national insiste auprès du Gouvernement flamand pour que la définition de la nature et du type des pseudo-identités en application de l'article 14, soit précise.

Le Conseil national demande aussi que les carrefours d'information et les organisations intermédiaires n'aient pas la possibilité d'établir eux-mêmes un lien entre les pseudo-identités et les identités.

Les praticiens professionnels doivent veiller à ce que l'enregistrement électronique en soi ne permette pas de retrouver l'identité du patient. Le patient ne devrait pouvoir être identifié qu'à travers sa pseudo-identité. Ils doivent aussi veiller à ce que les données relatives à des tiers ne soient pas introduites dans l'enregistrement électronique.

C/ VIE PRIVEE

Le décret du 16 juin 2006 soulève différentes questions sur le plan de la protection de la vie privée des patients.

L'indépendance des carrefours d'information et des organisations intermédiaires à l'égard du responsable ultérieur du traitement constitue le principal point d'achoppement.

Le Conseil national refuse la centralisation, par une seule instance, des systèmes de sécurité et d’identification, du notariat des transactions, de la labellisation des logiciels et, en particulier, du transfert des données (cf. avis du Conseil national du 26 novembre 2005 concernant le projet BeHealth, BCN, n°111, p.5).

Le Conseil national suivra attentivement la façon dont le Gouvernement flamand rendra effective l'indépendance de ces différentes instances.

Le Conseil national demande dès lors à être représenté au sein de la commission de contrôle, et ensuite, dans le comité sectoriel, visés à l'article 88.

D/ FAISABILITE

A la lecture des dispositions du décret, nous nous interrogeons sur la possibilité de leur mise en pratique.

- L'informatisation

Le décret repose entièrement sur le postulat que les professionnels de la santé disposent d'un matériel informatique suffisant et qu'ils gèrent leurs dossiers patients à l'aide de programmes spécifiques compatibles entre eux. L'informatisation complète et organisée de tous les professionnels de la santé nécessitera du temps et de la volonté. On peut donc raisonnablement douter des possibilités réelles de mise en œuvre sur le terrain, actuellement et à moyen terme, des mesures sur lesquelles le décret insiste.

- Le financement

L'informatisation généralisée des dossiers de santé représente un coût important.

Le décret ne précise pas comment les mesures qui y sont préconisées seront financées ni quel budget y sera consacré. Il est cependant évident que la mise en pratique des dispositions du décret sera en grande partie fonction du financement alloué.

Le Conseil national s'interroge à propos de la faisabilité du décret sur le plan financier.

- L'obligation d'informer

L'article 42 du décret règle la notification du système d'information Santé à l'usager de soins. Le Conseil national renvoie à ce sujet aux remarques formulées ci-dessus.

La question se pose concrètement de savoir comment les médecins réussiront à donner aux patients toutes les informations que ceux-ci doivent obligatoirement recevoir.

- Système d'information Santé / BeHealth

Le Conseil national se pose beaucoup de questions au sujet de la compatibilité future du système d'information Santé avec la plateforme BeHealth.

Les médecins craignent que l'enregistrement de toutes les données du système d'information Santé ne leur occasionne une surcharge administrative. Les doublons d'enregistrement doivent absolument être évités.

Le Conseil national n'a pas connaissance d'une concertation entre l'autorité fédérale et le Gouvernement flamand à ce sujet (cf. article 23, § 2, du décret).

- Surcharge administrative

Le Conseil national constate aussi que l'enregistrement des données à caractère personnel dans le cadre du système d'information Santé entraînera du travail administratif.

Le médecin n'est pas en droit d'introduire les données relatives à des tiers ainsi que ses annotations personnelles dans son dossier médical électronique si l'enregistrement électronique repose sur une extraction automatique des données du dossier.

Il doit veiller à ce que le droit d'opposition du patient soit respecté, et à ce que les données dans le fichier source ne renvoient pas directement à une identité.


1 Avis n° 05/2004 du 10 mai 2004 "Avant-projet de décret du Gouvernement flamand relatif au système d'information de santé", online: www.privacycommission.be
2 Ibid.
3 Ibid.
4 L'article 47 dispose:
"§ 1er. Pour des motifs graves et justifiés liés à sa situation particulière, l'usager de soins peut s'opposer à l'introduction de ses données dans l'enregistrement électronique. Cette opposition a automatiquement comme conséquence que les données ne sont pas introduites dans le fichier source.
Pour des motifs graves et justifiés liés à sa situation particulière, l'usager de soins peut s'opposer à l'introduction dans le fichier source des données le concernant reprises dans l'enregistrement électronique.
§ 2. L'opposition visée au § 1er est communiquée par écrit au responsable du dossier de santé individuel. Elle est datée et signée et les raisons invoquées liées à la situation particulière de l'usager de soins sont motivées.
Le responsable du dossier de santé individuel mentionne l'opposition dans le dossier de santé individuel.
§ 3. Si l'usager de soins a moins de 14 ans, l'opposition visée au § 1er peut également être introduite par ses parents. Le cas échéant, l'usager de soins est associé le plus possible à l'appréciation du motif d'opposition invoqué par ses parents et il est tenu compte de son avis selon sa maturité et sa capacité de jugement.
Si l'état de l'usager de soins est légalement ou manifestement tel qu'il est incapable d'exprimer sa volonté, l'opposition visée au § 1er est faite par la personne telle que visée à l'article 19, § 2.".
5 L'article 13, § 1er, dispose:
§ 1er. Le dossier de santé individuel constitue la base d'un enregistrement électronique qui résume d'une manière uniforme et standardisée les données de ce dossier.
Si le dossier de santé individuel est tenu sous forme électronique, l'enregistrement électronique peut reposer sur une extraction ou une transposition automatiques de données de ce dossier.
6 Avis n°05/2004 du 10 mai 2004 "Avant-projet de décret du Gouvernement flamand relatif au système d'information de santé", online: www.privacycommission.be
7 online: www.ordomedic.be
8 L'avis du 21 octobre 2006 précise ce qui suit:
"La tâche de l'équipe multidisciplinaire du centre d’encadrement des élèves n'est pas le suivi médical, mais bien le suivi pédagogique. Les données médicales qui sont importantes uniquement pour le suivi médical de l'enfant, et qui ne sont pas pertinentes pour l'encadrement scolaire de l'élève, ne doivent par conséquent pas figurer dans le dossier multidisciplinaire.
Le Conseil national reste dès lors d’avis que le médecin du centre d’encadrement des élèves doit tenir un dossier médical en plus du dossier multidisciplinaire ainsi limité.".

Informatique30/09/2006 Code de document: a114004
Projet de loi portant dispositions diverses en matière de santé

Le projet de loi portant dispositions diverses en matière de santé a été adopté par la Chambre de Représentants le 13 juillet 2006 (DOC 51 2594/009) et a été soumis au Sénat pour examen et amendement éventuel (article 78 de la Constitution) (1). La loi aborde une série d’aspects de la pratique des soins qui soulèvent des questions déontologiques telles par exemple : l’élargissement des compétences des sages-femmes, la protection des données personnelles, la médecine de contrôle, la reconnaissance des comités d’éthique médicale.
Le Conseil national de l’Ordre des médecins fait part aux sénateurs de certaines réserves relatives au texte proposé.

Avis du Conseil national :

1/ Chapitre premier : sages-femmes.

Les articles 2 à 29 du projet de loi inquiètent à différents égards.

Le Conseil national de l’Ordre des médecins considère la collaboration multidisciplinaire comme un principe de base de la déontologie médicale. Cette collaboration est d’autant plus nécessaire que chaque profession de santé a ses spécificités propres. L’article 177 du Code de déontologie guide le médecin dans ses relations avec les autres professions médicales. Le Conseil national estime que le projet exige une nouvelle approche de la collaboration entre les médecins et les sages-femmes. La spécificité de chacune des professions de santé entraîne la responsabilité propre de chacun des acteurs : il s’agit là d’une condition de la collaboration entre les professionnels de santé. Dès lors qu’une grossesse sera qualifiée de « normale », la responsabilité entre les médecins et les sages-femmes devra être distinguée, chacun engageant sa responsabilité pour les actes qu’il pose. Différents problèmes de responsabilité peuvent surgir, notamment quant à la détermination du caractère « normal » ou « à risque » d’une grossesse ou quant à la définition des actes qui ressortissent, dans le cadre d’une grossesse dite « normale », de la compétence exclusive des médecins et ceux pouvant être le fait des sages-femmes. A cet égard, il faut aussi mettre l’accent sur le fait que la grossesse et l’accouchement se caractérisent par des évolutions parfois inattendues, avec pour résultat que ce qui est « normal » peut vite devenir « anormal » et « à risque » et même mettre la vie en danger. Des accords contraignants doivent être faits pour le transfert des patientes et la prise en charge des complications. Une définition claire des compétences propres de chacun est indispensable de manière à éviter que l’ensemble de la responsabilité n’incombe aux médecins. Les sages-femmes doivent par conséquent s’assurer adéquatement

En ce qui concerne la prévention des risques, le Conseil national regrette le fait que le texte accorde au Roi, après avoir recueilli le seul avis du Conseil fédéral des Sages-femmes, le devoir de préciser les actes qui peuvent être accomplis par les sages-femmes. Certes, si le Conseil fédéral des Sages-femmes doit encore être constitué (article 21 noviesdecies, nouveau, §4), il est permis de penser qu’il sera composé à juste titre majoritairement d’accoucheuses. La détermination des actes qui peuvent être effectués par les sages-femmes nécessite toutefois que soit pris en compte l’avis de médecins. La détermination des risques potentiels d’un acte déterminé et de la compétence requise pour les poser ne peut être le fait des seules sages-femmes. Le Conseil national estime que le Roi devrait s’enquérir, outre de l’avis du Conseil fédéral des Sages-femmes, de celui de l’Académie Royale de Médecine, et des autres sociétés scientifiques concernées.
Le projet de loi prévoit que les sages-femmes pourront prescrire des médicaments, dans le cadre entre autres du suivi de la grossesse normale, de l’accouchement et des soins des nouveaux-nés bien portants, tant en-dehors qu’à l’hôpital. L’acceptabilité d’un tel projet dépend évidemment des connaissances des sages-femmes en matière de pathologie et de pharmacologie. Une évaluation approfondie des divers aspects de la formation conduisant à l’obtention du titre de sage-femme est indispensable.

Le projet de loi permet aussi aux titulaires du titre professionnel de sage-femme de réaliser des échographies fonctionnelles. Il est indispensable que les sages-femmes disposent des compétences scientifiquement reconnues pour procéder à ce type d’échographie et que les échographies de surveillance de la grossesse qui nécessitent des compétences médicales, soient réalisées sous le contrôle et la responsabilité d’un médecin spécialisé.

2/ Chapitre III : Modifications de la loi du 5 juillet 1994 relative au sang et aux dérivés du sang d’origine humaine.

L’article 21 de la loi du 5 juillet 1994 prévoit que les médecins fonctionnaires désignés par le Roi, sont chargés du contrôle de l'application de la présente loi et des arrêtés pris en exécution de celle-ci.

Le Conseil national est particulièrement attentif à ce que les tâches nécessitant une compétence médicale soit le fait de médecins et que les données personnelles de santé, dont le traçage est légitimement prévu, ne soient traitées que par des professionnels des soins de santé tenus par le secret professionnel.

3/ Chapitre V : modifications de la loi du 29 avril 1996 portant des dispositions sociales.

Le Conseil national se pose des questions quant au respect de la vie privée des patients, dans le système proposé par le projet de loi, notamment quant à la communication des données non encore anonymisées à la cellule technique visée aux articles 155 et 156 de la loi du 29 avril 1996 portant des dispositions sociales.

Il convient de constater que la commission pour la protection de la vie privée s’est déjà à plusieurs reprises exprimées quant à l’application de l’article 156. Le Conseil national estime indispensable, pour un projet de l’ampleur décrite, d’y associer cette commission.
Le Conseil national regrette en outre que le législateur prévoit qu’aucune autorisation ne sera requise dans le cadre de la loi du 8 décembre 1992 relative à la protection de la vie privée à l’égard du traitement des données à caractère personnel, pour la mise à disposition et l’utilisation des données visées aux alinéas 2 et 3 du troisième paragraphe de l’article 156, alors que dans un même temps, les modalités d’application de ces mêmes alinéas 2 et 3 sont confiées à la compétence du Roi. Cela revient à donner au Roi un large blanc-seing, et à limiter les possibilités de contrôle de son action.

4/ Chapitre VI : Registre du cancer

Le Conseil national émet de sérieuses réserves quant au respect du secret professionnel et de la vie privée des patients dans le cadre de l’article 45 quinquies de l’arrêté royal n° 78 du 10 novembre 1967, tel que proposé par l’article 39 du projet de loi.

D’abord, le Conseil estime illégitime de collecter au profit de la Fondation « Registre du cancer », le numéro d’identification de la sécurité sociale (NISS). Il estime que le respect de la vie privée exige que soit garanti une étanchéité des circuits d’informations entre les données à caractère personnel relatives à la santé et celles de sécurité sociale, ainsi qu’entre les données à caractère personnel relatives à la santé et celles du registre national (voyez l’avis du Conseil national du 26 novembre 2005 concernant le projet « BeHealth », Bulletin du Conseil national n° 111, p. 5 ; voyez aussi les avis de la Commission pour la protection de la vie privée qui y sont mentionnés).

En outre, le Conseil national ne peut accepter que les personnes employées au sein de la Fondation aient un accès illimité aux données personnelles. Des mesures strictes de codage s’imposent déjà au niveau de la collecte des données auprès des organismes assureurs.

5/ Chapitre VII : comité sectoriel des données de santé

Le Conseil national renvoie à ce sujet à son avis du 26 novembre 2005 concernant le projet « BeHealth », repris en annexe, point 4/.

6/ Chapitre VIII : Hôpitaux ; section 2 : droits du patient.

Le Conseil national est d’avis que les dispositions proposées à l’article 48 du projet vont dans le sens de la transparence à l’égard du patient.

7/ Chapitre X : Droits des patients

Le Conseil national note avec satisfaction que le législateur apporte, par l’article 61 proposé, de la clarté quant au champ d’application de la loi du 22 août 2002 relative aux droits du patient.
En ce qui concerne l’article 62, le Conseil regrette que la proposition ne tient pas compte du point de vue suivant déjà exprimé dans son avis du 16 février 2002 (Bulletin du Conseil national, n° 95, p. 3) :
Le Conseil national ne peut non plus omettre de souligner que l'avant-projet ne prévoit en fait aucune qualification de la personne de confiance désignée par le patient. A ce sujet il faut souligner que la relation de confiance ne doit pas seulement exister entre le patient et la personne désignée mais doit pouvoir se nouer aussi entre cette personne et le praticien professionnel. Ainsi, on peut difficilement s’imaginer qu'un médecin ayant de bonnes raisons de douter d'une personne de confiance, puisse lui confier une information confidentielle à propos du patient.
En ce qui concerne enfin la proposition d’article 64, le Conseil national émet certaines réserves.

D’un point de vue linguistique d’abord , la formulation de l’article, et particulièrement des mots « par dérogation aux §1er et 2 », prête à confusion. Quant au fond ensuite, si le Conseil national n’a pas d’objection de principe à ce que le mandataire désigné par le patient, l’époux cohabitant, le partenaire cohabitant légal ou le partenaire cohabitant de fait, ait la possibilité d’introduire une plainte, le texte devrait être plus clair quant au fait que cette possibilité n’existerait que si le patient majeur n’est plus en mesure d’exercer ses droits lui-même et ne relève donc pas d’un des statuts visés à l’article 13 de la loi du 22 août 2002.

Plus fondamentalement, le droit d’introduire une plainte ne devrait pas dans ces cas-là donner systématiquement droit à connaître de l’ensemble de la cause. Dans de nombreux cas, le fait de communiquer certaines données dont dispose le service de médiation au mandataire ou au conjoint pourrait nuire gravement aux intérêts du patient par exemple lorsque le patient a refusé de communiquer des données personnelles le concernant.

8/ Chapitre XIII : Responsabilisation de prestataires de soins

En ce qui concerne la proposition de modification de l’article 140 de la loi du 14 juillet 1994 (art. 96 du projet), le Conseil national s’interroge sur le sens de la diminution de sa représentation au sein du Comité du Service d’évaluation et de contrôle médicaux. Il estime en outre important que ses représentants disposent d’une voix délibérative. La représentation ordinale sert l’intérêt général.

En ce qui concerne l’article 108 du projet, le Conseil national s’interroge sur l’étendue de la responsabilité du maître de stage prévue à l’article 157, § 2 de la loi du 14 juillet 1994.

9/ Chapitre XVIII : modifications de la loi du 7 mai 2004 relative aux expérimentations sur la personne humaine.

Le Conseil national constate qu’il ait été tenu compte de son avis du 13 décembre 2003 (Bulletin du Conseil national n° 103, p. 10) en ce que le nombre de protocoles analysés nécessaires à l’habilitation ministérielle du comité d’éthique soit diminué.

(1) Ce projet de loi a été approuvé le 26/10/2006, en séance plénière du Sénat, quasi sans modification.
Informatique26/11/2005 Code de document: a111003
Projet BeHealth

En sa séance du 26 novembre 2005, le Conseil national s’est à nouveau penché sur le projet BeHealth. Il constate que le projet est actuellement en phase de réalisation. Il a à cet égard appris par les annales parlementaires que « la stratégie de développement des soins de santé par voie électronique s’appuie sur trois chantiers complémentaires et distincts », devant chacun faire l’objet d’une initiative réglementaire spécifique.

Le Conseil national vous fait connaître ses objections par rapport au dernier avant-projet de loi dont il a connaissance et tel qu’il lui a avez fait parvenir par e-mail en date du 10 octobre 2005 afin que vous puissiez prendre en compte ses remarques dans le cadre des trois « chantiers » visant la mise en place du projet BeHealth.

Ces remarques sont les suivantes :

1/ Les données de santé.

L’article 2, 1° de l’avant-projet de loi définit les données de santé comme suit :

« toute donnée à caractère personnel qui livre par son contenu ou par son utilisation une information sur l’état antérieur, actuel ou futur de la santé physique ou psychique d’une personne physique identifiée ou identifiable, à l’exception des données qui sont légitimement et exclusivement utilisées pour des finalités administratives ou comptables relatives à la prévention, aux soins ou à l’application des droits sociaux».

Cette définition n’est pas vide de conséquences en matière de secret professionnel. Elle est en outre manifestement inadéquate.

1.1/ Une définition inadéquate

Le Conseil national est d’avis que la définition de données de santé, telle que reprise dans l’avant-projet de loi, souffre au moins deux écueils :

1/ Si une donnée personnelle relative à la santé constitue en soi une donnée de santé, le contraire n’est pas toujours vrai : une donnée de santé n’est pas toujours personnelle. (Un simple numéro de nomenclature par exemple constitue une donnée de santé sans pour autant, dans tous les cas, constituer une donnée personnelle relative à la santé. Tel ne serait le cas que si le numéro de nomenclature attesterait d’un soin donné à une personne identifiée ou identifiable).

Une donnée de santé anonyme ne nécessite pas nécessairement de protection particulière en matière de vie privée ou en matière de secret professionnel. Une donnée personnelle relative à la santé par contre mérite une protection particulière du fait même qu’elle concerne une personne identifiée ou identifiable.

La législation en matière de vie privée, relayée en cela par la commission de la protection de la vie privée, a toujours considéré les données à caractère personnelles relatives à la santé comme des données sensibles dès lors qu’elles s’attachent à une personne identifiée ou identifiable, et pas dès lors qu’elles sont utilisées dans un contexte déterminé.

La définition, telle que reprise dans l’avant-projet de loi, ne reflète pas cette évidence.

2/ En outre, le Conseil national est d’avis que le fait de définir une donnée personnelle relative à la santé par l’utilisation qui en sera faite constitue une erreur de logique.

Tout comme une chaise reste une chaise même lorsque personne n’est assis dessus, une donnée personnelle relative à la santé en reste une même si elle est utilisée dans un contexte administratif ou comptable.

A cet égard, le Conseil national constate qu’il découle clairement de l’article 7 de la loi du 8 décembre 1992 relative à la protection de la vie privée à l’égard des traitements de données à caractère personnel (et particulièrement des articles 7, §2, b), c) et i)) que les données personnelles relatives à la santé le restent, même utilisées dans un contexte administratif ou comptable.

1.2/ Une définition lourde de conséquences.

La définition de « donnée de santé » reprise à l’article 2 de l’avant-projet de loi est lourde de conséquences négatives en matière de secret professionnel et de protection de la vie privée.

- Le secret professionnel

Pour rappel, l’article 458 du Code pénal est rédigé comme suit :

«Les médecins, chirurgiens, officiers de santé, pharmaciens, sages-femmes et toutes autres personnes dépositaires, par état ou par profession, des secrets qu'on leur confie, qui, hors le cas où ils sont appelés à rendre témoignage en justice (ou devant une commission d'enquête parlementaire) et celui où la loi les oblige à faire connaître ces secrets, les auront révélés, seront punis d'un emprisonnement de huit jours à six mois et d'une amende de cent francs à cinq cents francs ».

La Cour de cassation, dans un arrêt de principe du 16 décembre 1992, énonce que « le secret professionnel auquel l’article 458 du Code pénal soumet les praticiens de l’art de guérir, repose sur la nécessité d’assurer une entière sécurité à ceux qui doivent se confier à eux ».

La nouvelle définition de donnée de santé réduit considérablement la portée du secret professionnel, en considérant les données utilisées dans un contexte administratif ou comptable comme des données librement transmissibles.

Dès lors que les données à caractère personnel relatives à la santé ne perdent pas leur caractère personnel lorsqu’elles sont utilisées dans un contexte administratif ou comptable, le Conseil national est d’avis que la divulgation de ces données dans de tels contextes est susceptible de violer le secret professionnel.

Maintenir le principe du secret professionnel en en limitant progressivement et considérablement les possibilités d’application conduit à faire du secret une « coquille vide ». Les conséquences pratiques pour le patient pourraient être multiples.

Les patients sont très attachés au secret professionnel de leurs médecins : il en va de leur intérêt.

- La protection de la vie privée.

La définition de « donnée de santé » reprise à l’article 2 de l’avant-projet de loi est également lourde de conséquences négatives en matière de protection de la vie privée. S’il n’est pas exact qu’une donnée personnelle relative à la santé perdrait son caractère personnel dans un contexte administratif ou comptable, il apparaît légitime que même dans ces contextes, une protection de ces données soit garantie.

L’article 7 de la loi du 8 décembre 1992 ne s’y est d’ailleurs pas trompé.

L’expérience du Conseil national et des conseils provinciaux de l’Ordre des médecins montre à suffisance que les données à caractère personnel relatives à la santé méritent largement, si pas particulièrement, une protection en matière de secret professionnel et de vie privée dans le contexte administratif ou comptable, dans le domaine de la prévention ou encore dans celui des droits sociaux.

Le Conseil national est dès lors d‘avis qu’il serait davantage opportun de définir les données à caractère personnel relatives à la santé plutôt que, plus largement, les données de santé.

Cette définition serait la suivante : « toute donnée à caractère personnel qui livre une information sur l’état antérieur, actuel ou futur de la santé physique ou psychique d’une personne physique identifiée ou identifiable ».

2/ Le numéro d’identification santé personnel (NISP)

L’idée d’un identifiant de santé spécifique pour chaque individu, grâce auquel l’on pourrait accéder à la totalité de ses épisodes de santé depuis le berceau jusqu’à la tombe, à condition bien entendu que chaque épisode ait été rapporté par l’unité de soins ou par le médecin soignant et que toutes les institutions aient été interconnectées, n’est pas neuve.

Dans le cas présent, il s’agit d’attribuer un numéro unique sous lequel seront groupées toutes les données à caractère personnel relatives à la santé de l’individu, quelque soit l’endroit ou le moment où les soins lui ont été donnés.

Le Conseil national s’inquiète de l’utilisation qui pourrait être faite du numéro d’identification santé personnel pour d’autres finalités que les soins médicaux ou la recherche scientifique.

Certes, la commission de la protection de la vie privée a, à plusieurs reprises, recommandé l’usage d’un numéro de patient unique (avis n° 14/2002 du 8 avril 2002, avis n° 19/2002 du 10 juin 2002, avis n° 30/2002 du 12 août 2002, avis n° 33/2002 du 22 août 2002, avis n° 10/2004 du 23 septembre 2004, avis n° 01/2005 du 10 janvier 2005). Toutefois, cette recommandation s’accompagnait régulièrement d’une mise en garde : il convient de garantir une étanchéité des circuits d’informations entre les données à caractère personnel relatives à la santé et celles de sécurité sociale, ainsi qu’entre les données à caractère personnel relatives à la santé et celles du registre national.

Cette étanchéité n’est pas garantie dans l’état actuel du projet gouvernemental, et ce, pour au moins trois raisons :

1/ L’article 3, §1er in fine :

Le couplage logique entre le NISP (numéro d’identification santé personnel) et le NISS (numéro d’identification de la sécurité sociale), même s’il est réputé individuellement irréversible, permet la reconstitution d’un fichier national des NISP à partir du Registre national ou du registre des NISS.

Le Conseil national considère que le NISP doit impérativement être généré de manière aléatoire, et en aucune façon issu de la transformation logique de données à caractère personnel, fut-elle réputée irréversible.

2/ L’article 3, §3, 5°.

Le quinto du 3ème paragraphe de l’article 3 permet le couplage entre les données de sécurité sociale et les données à caractère personnel relatives à la santé.

3/ L’article 12, §3.

L’article 12, §3, du projet est rédigé comme suit :

« Pour les cas où le médecin traitant est le gestionnaire du dossier médical global du patient, les Organismes assureurs fournissent les données suivantes :

l’identification du médecin généraliste agréé
l’identification du patient via un numéro d’identification santé personnel ».

Si l’Organisme assureur peut fournir le numéro d’identification santé personnel du patient, il nous faut en conclure qu’il peut coupler le NISP et le NISS.

Le Conseil national s’inquiète en outre de ce que Be-Health organise lui-même le contrôle des transactions de données de santé qu’il opère.

3/ Le dossier de santé partagé.

L’avant-projet de loi met en place le principe d’un dossier de santé partagé. Différentes remarques peuvent être émises à ce sujet.

3.1/ La méthodologie.

Le Conseil national n’est pas convaincu de la réelle plus-value thérapeutique du dossier de santé partagé tel que décrit dans l’actuel projet.

La transmission de l’intégralité des données à caractère personnel relatives à la santé d’un individu n’est pas toujours nécessaire pour l’administration de soins de qualité et il n’est généralement pas requis de disposer de l’inventaire complet du passé médical du patient, mais uniquement de ses éléments pertinents.

Le dossier de santé partagé tel que décrit ne devrait pas être mis en place sans que son utilité scientifique ne soit démontrée.

3.2/ La vie privée et le secret professionnel

Il est évident que le dossier de santé partagé entraîne d’importants bouleversements dans la manière dont il est jusqu’ici requis de protéger la vie privée. Le Conseil national estime ne pas disposer jusqu’ici de suffisamment d’éléments pour pouvoir saisir la portée de ces bouleversements.

Le principe toutefois du dossier de santé partagé, tel qu’il est décrit dans l’avant-projet, suscite d’emblée la remarque suivante : il n’est pas acceptable que chaque professionnel de la santé (en ce compris les pharmaciens, kinésithérapeutes, dentistes et infirmiers) participant aux soins ait accès à l’ensemble des données concernant le patient.

La manière dont seront désignés les professionnels participant aux soins est en outre particulièrement nébuleuse (voir ci-dessous). La question de savoir si l’échange des informations est suffisamment sécurisé reste très largement en suspens. Cette question est pourtant essentielle afin de garantir la confidentialité des données à caractère personnel relatives à la santé du patient. Le Conseil national tient à faire remarquer à cet égard que l’accès au dossier de santé partagé DOIT faire l’objet d’une application différenciée selon la catégorie ou la spécialité du professionnel de santé.

Il nous faut également constater que la manière dont sont traitées les données personnelles peut varier d’une profession à l’autre, étant donné que la notion de « secret professionnel » peut être appliquée différemment entre deux droits disciplinaires différents. Le dossier de santé partagé interroge donc également le droit disciplinaire.

Le Conseil national estime que le principe de « dossier de santé partagé » mérite une large réflexion.

3.3/ La faisabilité

A la lecture des dispositions de l’avant-projet concernant le dossier de santé partagé, il nous est permis de nous interroger sur sa faisabilité pratique.

- L’informatisation

L’idée du dossier partagé repose entièrement sur le postulat suivant lequel les professionnels de la santé disposent d’un matériel informatique suffisant et qu’ils gèrent les dossiers de leurs patients via des logiciels spécifiques, compatibles entre eux.

L’informatisation globale et organisée de l’ensemble des professionnels de la santé nécessite du temps et de la volonté : il nous est permis de douter quant aux possibilités réelles d’application sur le terrain, à l’heure actuelle et à moyen terme, des mesures que préconise l’avant-projet de loi.

- Le financement

L’informatisation généralisée des dossiers de santé représente un coût important.

L’avant-projet de loi ne précise pas de quelle manière les mesures qu’il préconise seront financées et quel budget y sera consacré. Il est évident toutefois que l’application pratique des dispositions de l’avant-projet dépendra en grande partie du financement octroyé.

Le Conseil national s’interroge sur la faisabilité financière de l’avant-projet de loi.

- La surcharge administrative

La mise en place du dossier de santé partagé, tel que prévu dans l’avant-projet, implique une surcharge de travail administratif pour le médecin.

Il est demandé au médecin de diviser le dossier santé partagé en sections : le « dossier santé résumé », le « dossier santé historique » et d’éventuelles sections spécifiques (article 12). Ce tri entraîne assurément un surcroît de travail administratif.

- L’accès au DMP

En principe, seuls les médecins amenés à soigner le patient auraient accès au dossier de santé partagé. Dans l’exposé des motifs de l’avant-projet de loi, on peut lire ceci :

« Après avoir été identifié et authentifié, à la fois comme personne et comme professionnel de la santé, le praticien doit recevoir une autorisation d’accès à une application loco-régionale et à un dossier individuel géré au niveau de cette application. Cette autorisation ne lui est octroyée que s’il exerce une relation effective de soignant vis-à-vis du patient. Si un patient change de médecin, le médecin qui le traitait perd son accès au dossier. Le secret médical est organisé par le médecin traitant du patient (généraliste ou, le cas échéant, spécialiste) qui décidera, comme c’est le cas actuellement, quels sont les professionnels de l’équipe qui auront accès à quelles données, et cela en fonction de leur participation aux soins à ce patient ».

A la lecture de cet extrait, il nous est permis de nous interroger quant à savoir si l’on entend soumettre l’accès au dossier de santé partagé à l’autorisation préalable du médecin traitant.

Ce serait à la fois critiquable du point de vue de la déontologie et du libre choix du médecin mais ce serait également irréaliste.

La manière dont les médecins auront accès au dossier de santé partagé est en tous les cas décrite de manière particulièrement nébuleuse dans l’avant-projet de loi. Des éclaircissements sont indispensables.

En outre, le Conseil national constate que l’authentification du statut de médecin est réalisée par la consultation de la banque de données fédérales des professionnels de la santé, visée par la loi du 29 janvier 2003 (art. 13, 2°). Le Conseil souligne qu’une telle authentification relève, en vertu de l’arrêté royal n° 79 du 10 novembre 1967, de la compétence des Conseils provinciaux de l’Ordre des médecins, chargés de la constitution du Tableau.

4/ Les organes télématiques.

A côté de la Commission « normes en matière de télématique au service du secteur des soins de santé » et de la commission de la vie privée, de nouveaux « organes» sont créés qui recevraient un certain nombre de compétences en matière de télématique :

  • un « comité sectoriel pour les données de santé », créé au sein de la commission de la protection de la vie privée.
  • une « plate-forme télématique Be-health ».

Le rôle spécifique de chacun de ces organes ainsi que leurs interrelations ne sont pas très claires. Des doutes subsistent en outre quant à leur indépendance par rapport aux autorités politiques et par rapport aux organismes de sécurité sociale.

5/ La télémédecine.

En ce qui concerne le volet de l’avant-projet de loi touchant spécifiquement à la télémédecine, le Conseil national rappelle deux considérations fondamentales, dont le respect ne semble pas garanti dans le projet de loi actuel :

1/ Dans le cadre de la communication électronique les télé-experts ne peuvent s’engager à faire des diagnostics ou à installer des traitements, sans avoir ni interrogé ni examiné personnellement le patient. Leur rôle est donc celui d’aide au diagnostic et à la décision. Le lieu où l’acte médical est posé reste celui où se trouve le médecin traitant demandeur. Il s’agit ici aussi d’un problème de responsabilité médicale.

2/ La prescription électronique établie par un professionnel de la santé habilité, sous la forme d’un fichier électronique doit respecter le libre choix du patient.

Le Conseil national invite à se référer à ses avis exprimés précédemment en matière de télémédecine et d’exercice de la médecine à distance.

CONCLUSION

Le Conseil national

1/ refuse la définition de donnée de santé telle que reprise dans le projet : il l’estime attentatoire au secret professionnel et à la législation relative à la protection de la vie privée. Le recours aux termes « données à caractère personnel relatives à la santé » apparaît plus judicieux.

2/ refuse toute forme de couplage logique entre le NISP, d’une part, et le NISS ou le NRN (numéro de registre national), d’autre part. Le NISP ne peut être généré que de façon aléatoire et en aucune façon issu de la transformation logique de données à caractère personnel, fut-elle réputée irréversible.

L’utilisation du NISP doit rester circonscrite strictement à l’administration des soins.

3/ constate que les modalités de mises en place et d’accès au « dossier médical partagé » sont imprécises et ne permettent pas, en l’état, de garantir la confidentialité. Le Conseil national estime que la communication des données de santé par voie électronique entre professionnels de la santé, par un réseau public ou par un réseau privé non local, ne peut en aucune circonstance fonctionner sans recours préalables à des méthodes sécurisées de cryptage et de signature certifiée.

4/ souligne le manque d’indépendance de la « plate-forme télématique Be-Health », vis-à-vis tant des autorités publiques (notamment compétentes en matière de sécurité sociale) que des organismes assureurs.

5/ estime que la télémédecine doit être au service du requérant qui est médecin traitant.

6/ refuse la centralisation, par une seule instance, des systèmes de sécurité et d’identification, du notariat des transactions, de la labellisation des logiciels et, en particulier, du transfert des données.

7/ n’est pas convaincu de la réelle plus-value thérapeutique du concept de « dossier de santé partagé », tel que repris dans le projet.

Pour ces motifs, le Conseil national souhaite une révision du projet de loi dans un sens plus respectueux des impératifs, légaux et déontologiques, nécessaires aux relations médecins-patients.

Demande d’explications de M. Jan STEVELYNCK au ministre des Affaires sociales et de la Santé Publique sur « le plan d’action relatif aux e-soins de santé », n°3-1060, 27 octobre 2005, Annales du Sénat n ° 3-131, p. 59.

Informatique10/09/2005 Code de document: a110005
Projet de loi relatif au traitement et à l'informatisation des données de santé ainsi qu'aux applications de télémédecine

En sa séance du 10 septembre 2005, le Conseil national a discuté le projet de loi relatif au traitement et à l’informatisation des données ainsi qu’aux applications de la télémédecine. Ce document a déjà suscité beaucoup de réactions négatives et critiques dans la presse. Selon certaines mentions faites dans la presse, le ministre Demotte aurait, suite à ces remarques, déclaré qu’il ne s’agissait ici que d’un texte de travail et que l’avis de l’Ordre des médecins serait recueilli. Le Conseil national constate cependant que ce « texte de travail » est mentionné sur le site web du ministre en tant que projet de loi et que l’avis de l’Ordre des médecins n’a jusqu’aujourd’hui pas été demandé. Comme ce document soulève beaucoup de questions liées au respect de la vie privée des patients, au respect du secret professionnel ainsi qu’à l ‘exercice même de l’art de guérir, le Conseil national se sent obligé de réagir sans délai.

Le document susdit modifie profondément la définition de la donnée personnelle relative à la santé qui perdrait son caractère personnel dans un contexte administratif ou comptable, permettant dans certains cas son utilisation en dehors du cadre des soins. La nouvelle définition de donnée de santé réduit considérablement la portée du secret professionnel, en considérant les données utilisées dans un contexte administratif ou comptable comme des données librement transmissibles.

De plus est introduit un numéro d’identification de santé personnel unique pour chaque citoyen/patient grâce auquel l’on pourrait accéder à la totalité de ses épisodes de santé « depuis la naissance jusqu’au décès », à condition bien entendu que chaque épisode ait été rapporté par l’unité de soins ou par le médecin soignant et que toutes les institutions aient été interconnectées.

Ceci amène la création d’un « Dossier Médical Partagé » accessible à tous les prestataires de soins, sous condition qu’ils soient informatisés selon les impératifs fixés par la loi. Cette obligation d’informatisation du dossier médical comme condition de l’accès au dossier médical partagé devient de la sorte une condition à la poursuite de la pratique médicale.

L’accès du médecin au dossier médical partagé nécessite son identification par la carte d’identité électronique et le contrôle de sa qualification de médecin par le cadastre des professions de santé instauré par l’autorité ministérielle. La loi charge l’Ordre des médecins de reconnaître l’habilitation à la pratique de l’art de guérir.

La protection des données personnelles relatives à la santé ainsi colligées n’est pas garantie. Contrairement aux recommandations répétées du Conseil national, conformes aux prescriptions internationales, le cryptage des données n’est pas prévu d’office lors de leur transit sur le réseau.

Le Conseil national s’inquiète en particulier de l’utilisation qui pourrait être faite du numéro d’identification santé personnel pour d’autres finalités que les soins médicaux ou la recherche scientifique. Il convient de garantir une étanchéité du circuit d’information entre les données de santé et celles de la sécurité sociale.
Cette étanchéité ne paraît pas garantie dans l’état actuel du projet gouvernemental.

Ces remarques et constatations justifient en l’état l’opposition du Conseil national au contenu de ce projet.