Si le médecin estime qu'il est impossible de poursuivre une relation thérapeutique ou de réaliser une intervention ou un traitement, il en informe à temps le patient et organise la continuité des soins.
Code de déontologie médicale
Chapitre 4: Intégrité
1. Généralités
Le médecin a le droit de se démettre, s’il estime impossible de poursuivre une relation thérapeutique ou d’accepter de nouveaux patients.
1.1. Fin de la relation thérapeutique
Le respect est le fondement de la relation thérapeutique entre le patient et le médecin. Le nouvel article 4 de la loi relative aux droits du patient souligne l’importance de la collaboration et le respect mutuel entre le médecin et le patient. Une affiche dans la salle d’attente est un moyen de sensibiliser tous les patients à cet effet (voir avis CN 13 septembre 2024, a171013).
Confronté à un comportement inadéquat du patient, il est légitime que le médecin l’exprime au patient dans des termes nuancés et mesurés. Il indique les limites à ne pas dépasser et il met le patient en garde quant aux conséquences sur la poursuite de leur relation.
Un différend ou l’exercice par le patient de ses droits ne peut pas être sanctionné par la fin du traitement ou la rupture de la relation thérapeutique. Le médecin prend sa décision en conscience, de façon réfléchie et en temps utile, le patient devant trouver un autre confrère.
Le comportement du patient, notamment l’agressivité ou le manque de compliance et de motivation à préserver sa santé, peut également amener le médecin à interrompre une relation thérapeutique.
Des soins adéquats médicaux ne seront possibles que si le patient répond lui-même avec franchise aux questions du médecin et l’informe des éléments pertinents concernant sa santé et ses habitudes de vie. Le médecin explique au patient qu’une relation de soins est indissociable d’une relation de confiance réciproque difficile à établir si des informations pertinentes sont volontairement dissimulées.
Si les circonstances ou un comportement transgressif font craindre pour la sécurité et l’intégrité physique ou psychique du médecin, il se justifie qu’il soit mis sans délai un terme à une relation. Tel pourra notamment être le cas lorsque le médecin est agressé, menacé, violemment dénigré sur les réseaux sociaux ou encore mis sous pression pour poser des actes injustifiés, voire illégaux.
Quelle qu’en soit la forme, la violence envers les soignants est inacceptable. Il est essentiel de documenter la souffrance des médecins pour sensibiliser les autorités à cet enjeu sociétal, ce qui peut être fait sur le site de l’Ordre des médecins en remplissant le formulaire agression (https://ordomedic.be/fr/formul...).
Un comportement agressif persistant, des menaces ou du harcèlement du patient vis-à-vis du médecin peuvent être signalés à la police ou au parquet. Le médecin ne mentionne que le nom et les faits commis, mais ne divulgue pas les informations relatives à la santé du patient.
Le médecin peut refuser de poursuivre les soins à un patient après s’être assuré que le patient ait accès aux soins urgents dont il a besoin. Le médecin agit dans le respect des exigences contenues dans le Code de déontologie médicale. Cela signifie que se concerte avec le patient, et le cas échéant, avec les proches de celui-ci, qu’il veille à la continuité des soins et qu’l fournit toutes les informations utiles au médecin qui lui succède. Cela signifie aussi que le médecin doit prendre un certain nombre d’initiatives et organiser la prise en charge, les soins et le traitement ultérieurs.
Le médecin qui met fin à la relation thérapeutique pour des motifs liés au comportement du patient le fait savoir au conseil provincial de l’Ordre des médecins dont il dépend, en précisant ces motifs.
1.2. Accepter une relation thérapeutique ou refuser d’accueillir de nouveaux patients
Le médecin peut estimer que le problème médical qui lui est soumis dépasse sa compétence et ses moyens. Dans ce cas, il oriente le patient vers un confrère ou un service plus spécialisé (art. 6, CDM).
Le médecin généraliste peut être soumis à des exigences contradictoires : le nombre de demandes de patients et la protection de sa propre santé. Comme stipulé à l’article 10 CDM, le médecin a le devoir déontologique de s’efforcer de maintenir un équilibre entre ses activités professionnelles et sa vie privée. Un médecin surchargé et extrêmement sollicité s’expose à des problèmes de santé et à l’altération de la qualité de ses soins. Des raisons personnelles, des raisons relatives à la pratique (départ d’un membre du personnel, cessation d’activités de confrères, la défection des médecins surmenés ), ou encore des raisons locales ou régionales (manque de médecins généralistes) peuvent être à la base d’une surcharge de travail.
Chaque médecin doit organiser sa pratique pour pouvoir garantir la continuité et la permanence des soins, conformément aux dispositions de l’article 13 CMD et pour répondre aux demandes urgentes. Lorsqu’il est décidé d’appliquer une limitation de pratique ou de refuser d’accueillir de nouveaux patients, il faut prévoir une réorientation de ceux-ci selon un plan préalablement établi. Dans les pratiques de groupe ou les maisons médicales, il est conseillé d’organiser dans la mesure du possible ce renvoi en « interne ».
Par contre, le refus de prise en charge ne peut être basé sur des exigences concernant les suppléments d’honoraires, comme cela a été rappelé à plusieurs reprises dans les avis du Conseil national.
Cette position déontologique exprimée en 2014 est devenue loi en 2016. La législation sur les hôpitaux prévoit explicitement que le patient a droit à la même offre de soins de santé de qualité sur le plan des prestations fournies, du délai dans lequel ces prestations sont offertes et des médecins qui sont actifs à l’hôpital, qu’il choisisse une admission en chambre individuelle, en chambre à deux lits ou en chambre commune. Le choix du type de chambre revient exclusivement au patient. Le médecin ne peut pas influencer ce choix pour faire accepter au patient des conditions financières d’hospitalisation qu’il ne souhaite pas. L’article 30 CDM enjoint au médecin de soigner tous ses malades avec la même conscience.
2. Avis du Conseil national
- Mention de l’identité du médecin-conseil sur une décision adressée au patient (Avis CN 15 novembre 2024, a171017)
- La rupture de la relation thérapeutique pour des motifs liés au comportement du patient (Avis CN 13 septembre 2024, a171013)
- Refus d'un rendez-vous pour une consultation uniquement pour des raisons de convenance personnelle du patient (Avis CN 23 mars 2024, a171010)
- Les conditions de la doctrine du secret professionnel partagé (Avis CN 23 mars 2024, a171007)
- Intervention du médecin coordinateur et conseiller d’une maison de repos et de soins dans le cadre de la procédure d'euthanasie d'un résident (Avis CN 9 décembre 2023, a170020)
- Enregistrements audio des consultations (Avis CN 16 septembre 2023, a170016)
- La pénurie de médecins et son impact sur les soins de santé (Avis CN 10 juin 2023, a170010)
- Agressions sur les médecins (Avis CN 25 février 2023, a170004)
- Aspects déontologiques de la relation de soins entre un médecin et un patient avec lequel il entretient par ailleurs une relation affective ou amicale (Avis CN 18 juin 2022, a169014)
- Visites à domicile chez des patients qui sont capables de se déplacer (Avis CN 23 avril 2022, a169010)
- Loi du 22 avril 2019 relative à la qualité de la pratique des soins de santé – Difficultés et préoccupations déontologiques (Avis CN 23 avril 2022, a169009)
- Inadmissibilité d'un refus général de dispenser des soins aux patients non vaccinés contre le Covid-19 (Avis CN 20 novembre 2021, a168025)
- Organisation de la pratique médicale du médecin-spécialiste (Avis CN 19 octobre 2019, a166017)
- Conditions dans lesquelles un médecin généraliste peut limiter sa pratique et refuser d'accueillir de nouveaux patients (Avis CN 20 octobre 2018, a163003)
- Arrêt des activités - Conservation et transmission des dossiers d'un médecin généraliste (Avis CN 15 septembre 2018, a162007)
- Acceptation par un médecin d'une donation d'un patient (Avis CN 24 février 2018, a160006)
- Refus de soins à un patient au seul motif que celui-ci ne choisit pas une chambre individuelle (Avis CN 24 février 2018, a160008)
- Arrêt des activités dans l'hôpital - Communication d'éléments du dossier hospitalier au médecin (Avis CN 19 novembre 2016, a155002)
- Pratique de certains médecins consistant à imposer au patient, comme condition de sa prise en charge durant une hospitalisation, d'opter pour une chambre individuelle (Avis CN 20 février 2016, a152004)
- Refus du médecin urgentiste de poursuivre les soins (Avis CN 12 mai 2007, a117005)
3. Dispositions légales
- Art. 4, de la loi du 22 août 2002 relative aux droits du patient, M.B. 26 septembre 2002(version révisée, loi modificative 6 février 2024)
- Art. 17 à 20 de la loi du 22 avril 2019 relative à la qualité de la pratique des soins de santé, M.B. 14 mai 2019. L’article 20 est entré en vigueur le 1er juillet 2022. Les articles 17 à 19 sont entrés en vigueur le 1er janvier 2022 .
- Art. 29/1 et 128, 13°, de la loi coordonnée du 10 juillet 2008 sur les hôpitaux et autres établissements de soins, M.B. 7 novembre 2008
4. Informations - Documentations - Liens
- FAQ 3.4. Comment réagir en cas de vol ou de falsification d'un document médical? – 09/05/2022
- Recommandations déontologiques sur le refus de soins, Conseil européen des Ordres des médecins (CEOM)
5. Mots-clés
arrêt de la relation médecin–patient – continuité des soins – refus d’intervention médicale par le médecin