Dans les limites de sa fonction dans le domaine des soins de santé, le médecin veille à son indépendance professionnelle et assume les responsabilités qui en découlent dans l’intérêt de ses patients et de la collectivité.
Code de déontologie médicale
Chapitre 2: Professionnalisme
1. Généralités
L'indépendance professionnelle du médecin lui permet d'apprécier une situation, de poser un diagnostic et de prescrire le traitement qu'il juge le plus adéquat pour le patient.
Le médecin engagé dans une fonction doit garder sa liberté de jugement.
Dans la relation de soins, l'indépendance professionnelle du médecin se manifeste par sa « liberté thérapeutique ».
La liberté diagnostique et thérapeutique est définie légalement par l'article 73, § 1er, de la loi relative à l'assurance obligatoire soins de santé et indemnités coordonnée le 14 juillet 1994 qui énonce que le médecin apprécie « en conscience et en toute liberté les soins dispensés aux patients ». En ce qui concerne l'établissement d'un diagnostic et l'exécution d'un traitement, le médecin « ne peut être l'objet de limitations réglementaires dans le choix des moyens à mettre en œuvre » (art. 31, de la loi coordonnée du 10 mai 2015 relative à l'exercice des professions des soins de santé) et « le règlement général ne peut contenir de dispositions qui mettraient en cause l'autonomie professionnelle du médecin hospitalier individuel [...] » (art. 144, § 1er, de la loi coordonnée du 10 juillet 2008 sur les hôpitaux et autres établissements de soins).
Note : l'article 4 de la loi du 22 avril 2019 relative à la qualité de la pratique des soins de santé énonce que « le professionnel des soins de santé choisit librement, dans les limites des compétences qui lui sont conférées par ou en vertu de la loi, les moyens qu'il met en oeuvre dans le cadre de la prestation de soins de santé. Aucune restriction réglementaire ne peut lui être imposée dans ce cadre ». Cet article est entré en vigueur le 1er janvier 2022.
La liberté diagnostique et thérapeutique est une liberté réglementée et conditionnée. Le médecin doit prendre ses décisions de façon responsable, avec pour référence le médecin normalement compétent et diligent placé dans les mêmes circonstances.
Note : l'article 4 de la loi du 22 avril 2019 relative à la qualité de la pratique des soins de santé énonce que « le professionnel des soins de santé se laisse guider, dans son choix visé à l'alinéa 1er, par des données scientifiques pertinentes et son expertise, tout en tenant compte des préférences du patient. » Cet article est entré en vigueur le 1er janvier 2022.
Les limites ou conditions de la liberté thérapeutique suivantes sont importantes :
1. les directives de soins
Les directives de soins et les preuves scientifiques doivent être systématiquement intégrées dans la pratique clinique en vue d'un travail rationnel et de qualité, respectueux des besoins du patient.
Ces directives se fondent sur une littérature scientifique internationalement reconnue et sont validées par des organes d'avis et de concertation.
L'objectif de ces directives est de donner des lignes de conduite pour une pratique quotidienne de qualité. Une directive est uniquement applicable si elle correspond aux besoins et attentes du patient. Si le médecin s'en écarte, il doit pouvoir s'en justifier.
2. lesmoyens mis à disposition par la société
Les ressources de la société en matière de santé étant limitées, le médecin doit avoir un comportement socialement responsable en utilisant au mieux les moyens mis à sa disposition en vue de soins efficaces (art. 41, CDM 2018).
3. l’intérêt du patient
Le médecin dispense les meilleurs soins possibles compte tenu du contexte dans lequel la relation médecin-patient s'inscrit.
L'autonomie professionnelle du médecin dans la relation avec le patient doit tenir compte de l'autonomie de celui-ci. Le médecin se concerte avec le patient (art. 17 CDM 2018).
Le médecin vise des soins orientés vers la personne qui tiennent non seulement compte de son état de santé, mais aussi de sa situation personnelle, de ses besoins et de ses préférences.
Le médecin doit éviter l’acharnement thérapeutique.
Le médecin peut décider de mettre fin à une relation thérapeutique avec un patient ou refuser pour des raisons médicales une intervention médicale ou un traitement, sur la base de son indépendance professionnelle et en s’assurant de la continuité des soins (art. 32 CDM 2018). De telles décisions médicales sont à distinguer de celles qui seraient prises par le médecin sur la base de ses convictions personnelles (art. 31 CDM 2018).
4.
La liberté diagnostique et thérapeutique est aussi conditionnée par l’organisation des soins de santé indiquant si un prestataire de soins individuel ou une institution de soins peut exécuter une intervention ou une procédure définie qualitativement et ce en vue des meilleurs résultats possibles, entre autres la présence del'encadrement nécessaire (art. 14 de la loi du 22 avril 2019 relative à la qualité de la pratique des soins de santé), la structuration de l'activité médicale dans les hôpitaux (artt. 18 à 22 de la loi coordonnée du 10 juillet 2008 sur les hôpitaux et autres établissements de soins) et la compétence du médecin en chef de réseau pour donner des instructions aux médecins de l'hôpital dans le cadre des réseaux hospitaliers (art. 17 de la loi du 28 février 2019 modifiant la loi coordonnée du 10 juillet 2008 sur les hôpitaux et autres établissements de soins, en ce qui concerne le réseautage clinique entre hôpitaux).
Le médecin doit être vigilant à ce que ces limites ne portent pas atteinte à la quailité des soins.
2. Avis du Conseil national
- L'Utilisation off-label des dispositifs médicaux (Avis CN 14 octobre 2023, a170017)
- Enregistrements audio des consultations (Avis CN 16 septembre 2023, a170016)
- Refus du médecin biologiste de procéder à des analyses dont l’intérêt est discuté sur le plan scientifique et qui sont onéreuses pour le patient (Avis CN 16 septembre 2023, a170015)
- Modernisation de la loi du 22 août 2002 relative aux droits du patient (Avis CN 25 mars 2023, a170009)
Réseautage clinique entre hôpitaux – principes déontologiques (Avis CN 15 février 2020, a167001)
- Communiqué de presse : enregistrement sonore d'une conversation entre un patient et un médecin enregistrée à l'insu de ce dernier (Avis CN 6 mai 2017, a157011)
- Arrêt et refus de traitement (Avis CN 12 décembre 2015, a151005)
- Position d’un infirmier à domicile – Exécution du traitement prescrit par un médecin (Avis CN 21 novembre 2015, a151003)
- Contrat de travail destiné aux médecins actifs à l'Office des étrangers (Avis CN 16 novembre 2013, a143020)
- Administration de calmants par un médecin appelé par la police (Avis CN 26 octobre 2013, a143014)
- Réanimation des enfants extrêmement prématurés (Avis CN 20 février 2010, a129018)
- Relations entre médecins et entreprises en Belgique - Avis commun des académies royales de médecine (Avis CN 16 novembre 2002, a099007)
- Promotion de médicaments génériques (Avis CN 18 août 2001, a094001)
- Acharnement thérapeutique (Avis CN 15 novembre 1986, a035018)
3. Dispositions légales
- Art. 4, 72 et 74 de la loi du 22 avril 2019 relative à la qualité de la pratique des soins de santé (Loi qualité), M.B. 14 mai 2019. Ces articles sont entrés en vigueur le 1er janvier 2022.
- Art. 144, § 1er, de la loi coordonnée du 10 juillet 2008 sur les hôpitaux et autres établissements de soins, M.B. 7 novembre 2008
- Art. 73, § 1er, de la loi relative à l'assurance obligatoire soins de santé et indemnités coordonnée le 14 juillet 1994, M.B. 27 août 1994
4. Informations - Documentations - Liens
- GOFFIN, T., De professionele autonomie van de arts. De rechtspositie van de arts in de arts-patiëntrelatie, Brugge, die Keure, 2012
- NYS, H., Geneeskunde - Recht en medisch handelen, Mechelen, Wolters Kluwer Belgium, 2016
5. Mots-clés
acharnement thérapeutique – autonomie professionnelle – indépendance du médecin – liberté diagnostique et thérapeutique – responsabilité thérapeutique - soins palliatifs